" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


lundi 28 octobre 2013

Les mozarabes, raisons d'une minorité en terre musulmane

Les historiens insistent sur la disparition des chrétiens à partir du XIIème siècle en al-Andalousie. Certains prétendent que cet affaissement provient de la conversion des chrétiens à l’Islam. Un livre ose même remettre en cause l’idée de la conquête musulmane. Selon son auteur, elle ne traduirait que la lente et progressive avancée pacifique de l’Islam par la conversion de la population. De nombreux historiens ont rejeté cette thèse. Mais s’il y affaissement du christianisme en al-Andalousie, provient-il essentiellement des conversions des mozarabes ? 

Un transfert de population

Revenons à la conquête arabe en Orient lorsque les musulmans se sont emparés d’immenses territoires, souvent bien peuplés. Les conquérants sont alors dans l’obligation de gérer leurs conquêtes en dépit de leur infériorité démographique. Pour pallier à ce rapport défavorable, ils pratiquent une forte politique de déplacement de populations. Des tribus arabes quittent la péninsule arabique pour s’installer sur les nouvelles terres alors que les populations indigènes sont transférées vers d’autres territoires. Des tribus berbères et arabes s’implantent dans la péninsule quand des familles chrétiennes sont envoyées au Maghreb. Cette politique est aussi menée en al-Andalousie. Les Almohades ont surtout pratiqué ces transferts de population de manière intensive. Les berbères qui abordent la terre hispanique sont aussi accompagnés de leurs tribus. Par ces déplacements de population, l’affaiblissement des chrétiens est alors inévitable. Il est l’objectif des musulmans afin d‘asseoir leur autorité.

Une population meurtrie

Mais cette diminution s’explique aussi par d’autres raisons encore plus matérielles. Il faut le rappeler : la conquête ne se déroule pas dans la douceur. Elle est accompagnée de massacres qui déciment les populations chrétiennes lorsqu’elles refusent de se rendre. Pendant les premiers siècles d’occupation, des révoltes sont réprimées dans le sang. Devant une telle terreur, des chrétiens fuit leurs anciennes terres comme aujourd’hui encore, pour fuir la guerre et la désolation, des populations quittent leurs maisons en quête d'un refuge. 

Nous retrouvons cette « ambiance » dans la chronique mozarabe de 752. Elle relate brièvement les événements survenus entre les années 649 et 792 de l’ère hispanique dans les mondes byzantin, arabe, et hispanique. L’auteur serait « un clerc hispanique possédant de vastes connaissances quant à la doctrine et à l’histoire de l’Église dont il est bien informé des affaires »[1]. Elle aurait été écrite dans le sud-ouest de la Péninsule. 

Prisonniers crucifiés
par les Sarrasins
L’auteur se lamente de la violence et de la cruauté des troupes berbères et arabes. La situation est décrite de manière catastrophique. Nous sommes loin d’une vision « aseptisée » de la conquête ou d’une occupation relativement pacifique du territoire. Il décrit les conséquences désastreuses de la conquête « avec un luxe de détails macabres fait de carnages, de pillages et de dévastations »[2].

Et pourtant, le texte ne recèle aucune haine à l’égard de l’Islam. « En dépit du « patriotisme » intense de ce dernier [l’auteur], chrétien à la foi ardente […], regrettant l’époque où sa patrie jouissait de la liberté, et de son hostilité aux nouveaux gouverneurs du pays, on n’observe pas de haine dans son texte »[3]. Il faut donc prendre au sérieux sa description catastrophique. « Pas une seule foi, l’auteur n’exprime la moindre animosité envers la religion des Arabes : en vérité, il n’en dit absolument rien »[4].
Il n’y a pas seulement absence d’antagonisme religieux, il y a même absence d’allusion à l’Islam. « A aucun moment, il ne fait référence à l’Islam. Il ne considère pas non plus les musulmans arabes comme des chrétiens hérétiques, et encore moins comme des païens »[5]. C’est bien la terreur et la violence de la conquête qui marquent son esprit et non la religion musulmane. Les chrétiens fuient avant tout les ravages destructeurs des conquérants…

« Muza s'étendit en effet ensuite de tous côtez sans aucun obstacle, et conquit avec une égale facilité l'Espagne Ulterieure et la Citerieure jusqu'à Saragosse qu'il prit, qu'il livra au pillage et au glaive de ses soldats, et dont il emmena les habitans en captivité. Il traita avec une plus grande sévérité plusieurs autres villes des plus considérables d'Espagne, car il les réduisit en cendres, après avoir fait souffrir les plus cruels tourmens à leurs habitans. Il vouloit par cette conduite barbare intimider celles qui étoient en état de lui résister ; et de fait la terreur de ses armes jeta une si grande consternation dans tout le pays, que ces villes offrirent d'elles-mêmes de capituler et se rendirent par composition pour prévenir de plus grands mau. La plupart de leurs habitans ne se fiant pas cependant à la parole des Sarasins, et craignant d'être exposez à leurs mauvais traîtemens, prirent la fuite et se réfugièrent dans les montagnes, où malgré la disette des choses les plus nécessaires pour leur subsistance, ils défendirent le reste de leur liberté au péril de leur vie »[6]

Des chrétiens fuient donc la domination musulmane pour se réfugier dans des territoires moins hostiles et pour rejoindre leurs coreligionnaires, notamment au Nord de la péninsule. Cette fuite a du croître au fur et à mesure du développement et de l’extension des royaumes chrétiens. Ce n’est pas alors étonnant que le terme de « mozarabe » a d’abord été employé dans les terres de Léon. Elle atteste leur refus de vivre en al-Andalousie. Ils fuient une existence qu’ils ne peuvent supporter. 

Cordouans exilés

Une vie de clandestinité

La disparition progressive des chrétiens en al-Andalousie peut donc s’expliquer en partie par le déplacement forcé ou volontaire de la population. Une autre solution est possible : la clandestinité. Comme nous l’avons pu constater dans le récit des martyres [21], des chrétiens font semblant de vivre comme des musulmans. Il ne leur est pas possible de vivre ouvertement leur foi

La pression sociale sur les chrétiens est très forte. Ils doivent payer un impôt spécifique, de plus en plus écrasant. Tout fonctionnaire non musulman finit par perdre son emploi. Tout chrétien perd systématiquement sa position sociale. Une grande famille qui voudrait garder son statut social dans la société musulmane n’a pas d’autre choix que la conversion, sincère ou apparente. Une oligarchie locale ne peut donc espérer se maintenir sans se convertir à l’Islam. « Les impôts touchaient particulièrement les classes sociales de chrétiens riches, ceux qui désiraient le plus leur intégration à la société musulmane et qui voyaient diminuer leurs possibilités de promotion, surtout avant le XIe siècle, devant la décadence de la culture chrétienne et le peu de prestige que montraient les sociétés chrétiennes du nord » [1].

Une minorité d'abord juridique 

Nous pourrions penser que les chrétiens ont un statut particulier parce qu’ils sont minoritaires comme parfois nous pouvons le lire. « Les minorités médiévales dans la péninsule sont donc déterminées par leur appartenance à une religion minoritaire. Ainsi, ont-elles un statut juridique propre qui précise et limite leurs droits »[7]. Terrible erreur. Car l’Islam impose un statut juridique particulier non pas parce que les chrétiens appartient à une religion minoritaire mais parce qu’ils sont non-musulmans [8]. Ils appartiennent à une religion minoritaire de droit et non de fait.


Les traités conclus lors des capitulations instaurent ce statut de minorité. Des exemples bien réels montrent qu’effectivement cette règle est strictement appliquée. Toute la vie du chrétien se règle ensuite sur ses clauses. Ils instaurent la discrimination sociale, un statut concret, quotidien, bien visible. Le chrétien doit savoir qu’il est inférieur au musulman et vivre réellement cette infériorité. Nous insistons : ce statut d’infériorité doit être visible aux yeux de tous… 

La notion de « minorité » n’est donc pas liée à une situation démographique. « Quand l'Islam s'installe en Hispanie au début du VIII siècle, les chrétiens, qui formaient démographiquement la majorité de la population du pays, devinrent selon la loi islamique, une minorité religieuse »[9]. Par la conquête des terres, l’Islam considère les chrétiens comme étant des gens de seconde zone en situation d’infériorité et donc appartenant à une minorité par rapport aux musulmans. « La condition humiliante de dhimmî, n'est guère enviable. Elle entraîne de nombreuses mesures discriminatoires pour ces citoyens de seconde zone […] Une situation aussi pénible finit obligatoirement par entraîner de nombreuses conversions, certaines d'entre elles étant d'ailleurs on ne peut plus sincères »[10].


Un statut plus ou moins appliqué

Le statut de la dhimmitude est différemment appliqué aux chrétiens selon les régions. Selon la chronique mozarabe de 754, un des premiers gouverneurs musulmans d’al-Andalus « a poursuivi les Sarrasins et les Maures d’Espagne pour avoir usurpé ce qui avait été antérieurement payé pour obtenir la paix et a rendu de nombreuses choses aux chrétiens »[1]. Dans la période des taïfas, période de troubles et d’instabilité, les communautés chrétiennes ont souffert de l’absence de pouvoir central suffisamment fort pour faire appliquer les lois. Bien que le droit musulman respecte le statut de chrétien, la société musulmane fait pression de diverses manières sur les populations chrétiennes et leur impose des humiliations sociales. L’État a pour rôle d’encadrer cette pression sociale afin qu’elle ne dégénère pas et ne va pas à l’encontre de ses intérêts

D'autres chrétiens ne disposent pas de ce statut de « protégés » : ils sont voués à la captivité ou à l’esclavage. Seule la conversion à l’Islam peut le libérer de ses chaînes[11]. « Pour échapper à leur long emprisonnement, des chrétiens se convertirent parfois à l'Islam de plein gré. C'est ainsi que la garde personnelle des sultans de Grenade fut composée dès le XIII siècle de renégats d'origine chrétienne »[12].

Des chrétiens en manque d’églises, rejetés vers les périphériques

Les conditions sociales permettent-elles aux chrétiens de vivre leur foi ? Elle a notamment besoin d’églises, d’un encadrement épiscopal, de prêtres... 

Mosquée de Cordoue, gravure de 1891
Pendant la conquête, de nombreuses églises ont été détruites. Une étude sur la répartition des églises dans la ville de Cordoue nous paraît intéressante [13]. Son auteur démontre que « s’il y a bien des églises, et des chrétiens pour les fréquenter, dans la Cordoue du VIII-IXème siècle, elles étaient situées dans la périphérique urbaine ». Un texte juridique musulman (fatwa) du Xème siècle déclare en effet qu’on ne peut construire ou restaurer des églises qu’hors de la vue des musulmans, et à l’écart de leur sanctuaire. Les églises de Cordoue à l’intérieur de la ville ont été détruites ou récupérées pour être transformées en mosquées. La cathédrale de Cordoue [14] a d’abord été à moitié transformée en mosquée avant que la seconde moitié ne soit rachetée par les autorités musulmanes pour agrandir leur lieu de prière. Les autorités permettent aux chrétiens de construire leur église mais hors de la ville et de la vue des musulmans. Or « l’absence d’églises implique raisonnablement l’absence d’une population qui en aurait l’usage » [15]. En clair, ils rejettent les chrétiens hors de la cité. Leurs églises, signes de leur existence, ne doivent pas être visibles des musulmans…

Toujours selon cette étude, les chrétiens seraient répartis dans des faubourgs spécifiques, dans des agglomérations rurales ou dans les montagnes. 

Cathédrale mosquée de Cordoue
Cette réalité est parfaitement conforme aux lois musulmanes. « On ne construit pas d’église dans la dar al-Islam, ni dans son sanctuaire, et que ne se trouve pas parmi eux [les chrétiens] de musulmans. Car on ne leur interdit pas de les construire entre eux, ni d’introduire u vin chez eux, ni de se procurer des porcs. Mais s’ils se trouvent au milieu des musulmans, tout cela leur est interdit. Quant à la réparation de leurs églises anciennes, qui leur ont été laissées, à moins que cela a été stipulé dans le traité de capitulation, il le leur est observé et on leur interdit d’y faire des croisement, que l’accroissement soit visible ou caché. S’il leur a été stipulé qu’il ne leur serait pas interdit d’innover les églises, et que l’immam leur a concédé ce point par ignorance, le Prophète a interdit […] »[16]. L’auteur de ce texte s’appuie sur un hadith : « N’élevez parmi vous rien des Juifs ni des Chrétiens ».

Des chrétiens en manque d’évêques et de prêtres

Mais les chrétiens peuvent vivre leur foi sans église. Il est donc risqué de mesurer l’importance de la population chrétienne, voire de la localiser, en fonction de la présence d’églises. Leur principale préoccupation est surtout de disposer de prêtres et d’évêques suffisants, capables de donner les sacrements, surtout celui du baptême.

« Déjà peu nombreux et limités surtout à un milieu urbain déclinant, les chrétiens auraient eu besoin pour se maintenir d'un encadrement épiscopal qui, si l'on en juge par l'absence presque totale de références à des sièges épiscopaux effectivement pourvus dans la région à l'époque musulmane, leur fit défaut »[17]. Il est noté dans certaines régions une interruption dans la succession épiscopale, soit par disparition de l’évêché, soit par regroupement afin de mieux répondre aux besoins des fidèles. D’autres témoignages soulignent l’absence ou l’insuffisance d’un encadrement suffisant. L’arrivée des Almohades puis celle des Almoravides n’ont fait qu’accentuer la pression sur les structures de l’Église. « Les propriétés chrétiennes, laïques et ecclésiastiques ne seront confisquées qu’à partir de la deuxième moitié du XIIe s., avec l’arrivée des Almohades »[18] (90). 

Ce besoin d’évêques ou de prêtres est aussi une nécessité en terre musulmane : l’Islam ne traite avec les chrétiens comme avec d’autres non-musulmans qu’au travers d’une communauté structurée et hiérarchique. « II doit exister une organisation administrative chrétienne, ou une communauté de référence, qui soit responsable devant l'autorité musulmane » [19]. L’individu dispose de droits s’il appartient à une communauté reconnue. Ainsi des chrétiens étrangers peuvent constituer une communauté reconnue si elle dispose d’un prêtre. Les commerçants chrétiens forment ainsi un groupe influent car il est « présidé » par un prêtre.

Le statut social d’un individu identifie même son appartenance à une communauté reconnue. « Si l'évêque de Malaga, Hosteogis, dénonçait devant le fisc les populations chrétiennes rurales, c'est parce que, n'étant pas inscrites comme tributaires, elles n'avaient pas le statut de chrétien et, de ce fait, devenaient tout à fait légalement musulmanes »[20]. 

Conclusion

Depuis la conquête de la péninsule ibérique, les populations chrétiennes vivent dans une situation peu enviable, faite de souffrances, d’humiliations et de vexations. Il n’est pas bon pour un chrétien de vivre sous la domination musulmane. La fuite est une solution pour échapper à un tel sort. La conversion à l’Islam est aussi une autre. Il est par ailleurs difficile de mesurer la sincérité d’une conversion, surtout dans le passé et dans un contexte de pression sociale forte. Sans le soutien de prêtres et d’évêques en nombre suffisant, persécutés et relégués dans un état social d’infériorité, les chrétiens sont fortement tentés d’embrasser la religion musulmane. Considéré par principe et par droit comme étant une population « minoritaire », elle finit par l’être concrètement. Cessons donc de parler de cohabitation pacifique ou de « tolérance » en al-Andalousie. La tolérance musulmane n’a qu’un but : l’élimination progressive des chrétiens. Enfin, beaucoup d'explications peuvent expliquer l'affaissement visible du christianisme : déplacement forcé ou volontaire des chrétiens, vie chrétienne clandestine, conversion intéressée ou réelle à l'Islam...

En conclusion, l’époque de la conquête musulmane nécessitait de l’héroïsme de la part des chrétiens. Et pourtant, le christianisme s’est maintenu en dépit de son silence. 





Références
[1] López Pereira cité dans La kûra de Beja et le territoire de Merola de Santiago Macias, thèse de l'université de Lyon, soutenue en 2007
[2] John Tolan, Les Sarrasins, 2003.
[3] Sanchez Albornos.
[4] John Tolan, Les Sarrasins
[5] Roger Collins, La conquista arabe
[6]Histoire Générale de Languedoc de Dom Claude Devic et Dom Joseph Vaissete, 1730- 1745, Religieux Bénédictins de la Congrégation de St Maur, augmenté et continué jusqu'en 1830 par Alexandre du Mège2.
[7] Manuela Marin et Joseph Pérez, L'Espagne des trois religions du mythe aux réalités. Introduction. In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée, N°63-64, 1992. 
[8] Manuela Marin et Joseph Pérez, L'Espagne des trois religions du mythe aux réalités
[9] Mikel de Epalza, Les mozarabes. État de la question In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée, N°63-64. 
[10] Raymond Le Coz, Les Mozaraves et les débuts de la médecine dans la-Abdalous
[11] Ils peuvent être aussi libérés par rachat ou échange, grâce notamment à des ordres religieux (Les Trinitaires, Les Mercédaires). Les « alfaqueque » (rédempteurs) étaient aussi chargés de médiateurs pour obtenir la libération des chrétiens. 
[12]  Rachel Arié,  Les minorités religieuses dans le royaume de Grenade (1232-1492) In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée, N°63-64. 
[13] Jean-Pierre Molénat, La place des chrétiens dans la Cordoue des Omeyyades d’après leurs églises (VIII-IXème siècle)
[14] Ou la moitié du territoire attribuée à la cathédrale. 
[15] Jean-Pierre Molénat, La place des chrétiens dans la Cordoue des Omeyyades d’après leurs églises (VIII-IXème siècle)
[16] Ibn al-Magisun cité dans Jean-Pierre Molénat, La place des chrétiens dans la Cordoue des Omeyyades d’après leurs églises (VIII-IXème siècle)
[17] Pierre Guichard, Les Mozarabes de Valence et d'Al-Andalus entre l'histoire et le mythe.
[18] Jean-Pierre Molénat, Mudéjars et mozarabes à Tolède du XIIe au XVe siècle
[19] Mikel de Epalza, Les mozarabes. État de la question
[20] Mikel de Epalza, Les mozarabes. État de la question
[21] Voir Émeraude, août 2013, article Les martyrs en Al-Andalousie : le prix de la tolérance.

vendredi 25 octobre 2013

Le néomalthusianisme et la propagande

Contrairement aux mouvements d’extrême-gauche et anarchistes de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle, le néo-malthusianisme a longtemps subsisté. Certes aujourd’hui il ne semble plus exister de ligues ou d‘associations qui s’en réclament ouvertement mais son idéologie domine la pensée contemporaine et guide le comportement d’un grand nombre de contemporains. Osez aujourd’hui contester le droit de la femme à « disposer librement de son corps ». Osez remettre en cause l’idée d’« enfants désirés ». Osez même vous éloigner du modèle standard : une famille à deux enfants. On vous submergera de tous les sobriquets possibles et inimaginables. On vous dénoncera comme un retardataire anachronique d’un passé révolu, un pourfendeur de libertés, un « macho » qui ne comprend guère au bonheur des femmes, etc. La paupérisation de la population n’est certes plus évoquée pour demander la légalisation des produits anticonceptionnels. On évoque davantage la liberté de chacun ou l’épanouissement personnel. Mais le leitmotiv est toujours le même, celui du progrès individuel et collectif par le contrôle des naissances... 

Si les discours semblent avoir changé, les idées du néomalthusianisme historique dominent notre société. Elle a réussi ce qu’il voulait : changer les mentalités et la société. Il est parvenu à déconstruire la Morale pour la remplacer par une autre. C’est une formidable réussite, il faut hélas l’avouer. D’où vient ce succès ? Probablement d’une propagande qui a été très tôt efficace… 

« Le néo-malthusianisme […] est devenu une doctrine officiellement professée et publiquement soutenue : pour la propager dans les intelligences et la traduire en réalités concrète de la vie commune une vaste propagande est organisée et cette propagande dont la puissance égale la souplesse et l’ingéniosité utilise les ressources variées que notre civilisation moderne met au service des meilleures causes »[1].

Une propagande active 

Les néo-malthusiens comprennent rapidement qu’ils parviendraient à leurs fins s’ils diffusent rapidement et constamment leur doctrine. Ils utilisent ainsi tous les moyens de diffusion les plus modernes et populaires pour la répandre : conférences, journaux, chansonnettes, livres, brochures, … Quelle meilleure façon en effet de répandre des doctrines lorsqu’elles sont portées par des chansons populaires [2] ? En fredonnant des aires aussi célèbres que le Temps des cerises, elles finissent par s’infiltrer dans les consciences. 

Le succès de leur propagande s’explique par la qualité de ses membres. Les néo-malthusiens sont de brillants orateurs. Ce sont des convaincus et des passionnés. La prison ne les arrête pas. Au contraire, cela ne fait que décupler leurs énergies. Ce sont aussi des militants révolutionnaires qui se battent pour une cause qu’ils croient justes. Ce sont enfin des révolutionnaires de terrain d’extrême gauche. Ils rencontrent les ouvriers à la sortie des usines, dans la rue ou dans les cafés et cabarets. Ils savent parler leur langage. Ils se font parfaitement entendre. Hommes d’action, ils savent maîtrisés les méthodes de propagande. 

Leurs revendications se retrouvent mêlées à d’autres, ce qui permet de mieux diffuser encore leurs doctrines. Nous les retrouvons dans les mouvements éducatifs, féministes, eugénistes, hygiénistes, etc. L’appel à « la guerre des ventres », prônée par les néo-malthusiens, a été lancée de Marie Huot (1846-1930), également féministe. Certains de ses membres ou partisans occupent des places politiques très importantes. Aux Pays-Bas, le président d’honneur de la conférence néomalthusienne de juillet 1990, organisée par la Fédération universelle de la Régénération humaine, est un ancien premier ministre du pays, Van Houten[3]. Lorsqu’ils organisent une conférence dans une ville, de nombreux syndicalistes et anarchistes viennent apporter leur aide. 

Très pédagogues, les néo-malthusiens vulgarisent leurs doctrines et l’adaptent à leurs cibles. « Nous nous efforcerons toujours de parler le langage clair et simple que tout le monde comprenne : nous éviterons autant que possible les termes trop techniques qui pourraient être obscurs »[4]. Au-delà des mots, elles sont associées à des conseils pratiques. « Chaque numéro contiendra, sur la physiologie sexuelle, un article, où l’on trouvera de précieux conseils pratiques ; puis des contes, ou nouvelles sur ce sujet, persuadés que ce genre de littérature est excellent pour faire penser »[5]. Ce ne sont donc pas que des discours. Sous couvert de consultation, ils délivrent des produits anticonceptionnels, informent les femmes sur les techniques, les instruisent. Ils vendent aux ouvriers des moyens de contraception[6]. En Espagne, s’ouvrent même des cliniques[7]. Astucieux, ils les enveloppent dans un prospectus qui vante « la science de limiter les naissances », « la science de ne pas avoir d’enfants sans vous priver d’amour » [8]. Dans une conférence internationale, les néo-malthusiens se demandent comment ils peuvent toucher les femmes qui viennent d’accoucher. Ils préconisent aussi de taxer les enfants à partir du quatrième[9].

La vente des moyens de contraception et des préservatifs leur assure en outre le financement de leur propagande. Car chose rarissime dans les mouvances d’extrêmes gauches : ils demeurent car ils n’ont pas de difficultés de financement grâce aux ventes de produits anticonceptionnels

N’oublions pas que nombre de néomalthusiens sont des médecins. Ils peuvent sans difficulté répandre la bonne parole, auréolée du prestige et du respect qu’apportent leur savoir et leurs compétences. Au début du XXème siècle, il est l’autorité du village et du quartier au même titre que le curé, l’instituteur, le maire. 


Une agitation

Les sujets que traitent les néomalthusiens sont perçus comme des tabous au début du XXème siècle. Peu de personnes osent parler de la sexualité, des moyens de contraceptions, de l’avortement. « Ils ne se bornèrent pas à exprimer ce que des millions de couples taisaient à l'époque, mais qu'ils le justifièrent politiquement [10]».

Les néo-malthusiens font l’objet de nombreuses procès et emprisonnements, parfois retentissant, qui les sortent de l'anonymas. Ils acquièrent par là une certaine popularité.

Tournés vers le monde ouvrier

Le néomalthusianisme français veut convertir le monde ouvrier, peut-être la cible la plus sensible à leurs doctrines. Sujets aux familles nombreuses et à la paupérisation, ils peuvent mieux entendre leur doctrine. Dans ses discours, il se présente d’abord comme une arme à la lutte des classes, comme un moyen d’édifier une société meilleure, plus juste. Son action « humanitaire », « émancipatrice » par une nouvelle morale sexuelle est secondaire dans leurs discours. Leurs doctrines se diffusent au moment où le monde « prolétaire » est travaillé par les communistes qui prônent le même discours.

« Il nous restera à dévoiler aux classes prolétariennes les procédés utilisés depuis longtemps par les hautes classes sociales procédés par lesquels les familles prévoyantes ont pu, sans se priver d’amour, arriver à la richesse, à la puissance, et former l’élite opulente et dirigeante de la nation »[11]. La nouvelle morale sexuelle est décrite comme un privilège soigneusement gardé et source de profits. Elle est aussi implicitement présentée comme une référence sociale. L’ouvrier est tenté de s’embourgeoiser…

Une adversité à court terme…

Le néo-malthusianisme connaît une forte opposition, surtout de la part des « natalistes » qui prônent une forte natalité pour préparer la reconquête de son territoire et laver l’affront de l’humiliante défaite de 1870. La propagande antinataliste est alors considérée comme une trahison. Le discours est aussi très fort au lendemain des boucheries de la 1ère guerre mondiale. En pleine essor industriel, les usines demandent des bras à bon marché. Les natalistes attaquent donc les néo-malthusiens avec force et efficacité. Des lois sont élaborées pour les mettre hors d’état de nuire.

Dans ce combat, l’Église nous semble bien silencieuse. Et pourtant, elle fait l’objet de violentes attaques. Une étude plus poussée serait intéressante à mener pour effectivement voir si elle a joué un rôle dans cette lutte. Son silence sera assourdissant dans les années 60. 

Dans nos recherches, nous constatons que les adversaires du néo-malthusianisme se défendent essentiellement par la loi et la répression. Les discours sont surtout orientés vers des besoins occasionnels. Peu de réponses profondes à la hauteur des enjeux et de la Morale. Que deviendront ces discours au lendemain de la deuxième guerre mondiale ?

Mais les néo-malthusiens n’hésitent pas à attaquer leurs adversaires, notamment les natalistes. Ils savent les ridiculiser et frapper fort. Par exemple, pour porter atteinte à leurs accusateurs, ils diffusent une liste de personnalités reconnues natalistes en indiquant leur nombre d’enfants. Sur leur liste, rares sont les pères de famille nombreuse. Ils fustigent ainsi la société bourgeoisie et dénonce l’« hypocrisie sociale ». Ils présentent les « bourgeois » comme des hypocrites qui, depuis longtemps, gardent les secrets de la contraception pour limiter leur progéniture et accroître leur richesse au détriment des classes populaires. Aidés par de brillants caricaturistes[12], ils ridiculisent leurs adversaires…

Les néomalthusiens se présentent comme des victimes et des martyrs en proie à l’injustice et à l’oppression. On parle encore aujourd’hui de lois d’oppression ! Leurs buts est de supprimer ces lois, en menant de l’agitation et en se couvrant d’appuis « honorables » auprès d’hommes « illustres » : hommes et femmes de lettre, artistes, chansonniers, docteurs en médecine, avocats, députés, etc. 

Le néomalthusianisme, porteur de progrès et de modernité

Dans un style clair, les néo-malthusiens traitent aussi bien de problèmes de société que des difficultés d’ordre familial. Ils mêlent des préoccupations bien réelles et concrètes des familles nombreuses à des idées politiques élevées. La résolution des problèmes de foyers apparaissent ainsi comme une étape nécessaire à la révolution sociale et politique. En clair, l’emploi de produits anticonceptionnel soulagera les familles et leur apportera aisance, prospérité et tranquillité tout en étant un moyen d’arriver au progrès individuel et social. Face à une société décrite comme « vieille, injuste, cruelle », se dessine la promesse d’un avenir radieux, « débarrassé de toutes les tyrannies et de toutes les misères ». Face à la famille nombreuse, où règnent les cris, le désordre, la pauvreté, l’abêtissement, se dresse dans ses privilèges la famille bourgeoise, qui use d’une procréation réfléchie, prudente, avisée. « Propagé parmi les prolétaires, le néo-malthusianisme aidera puissamment à l’amélioration de la santé publique, à l’abolition de la prostitution, à la disparition de l’avortement, à la suppression des guerres internationales, à la solution de la question sociale »[13]

Nous pouvons sourire de ces promesses mais n’oublions qu’ils s’adressent à des hommes et des femmes qui vivent dans la misère, la promiscuité, dans une société terriblement dure. Il n’y a ni congés payés, ni 35 heures, ni SMIC, ni indemnités de chômage,... Nous sommes loin de notre société de confort. Les néo-malthusiens comme les communistes apportent l’espérance, le rêve : « […] nous prétendons refaire et fonder la société future, la société du bonheur, du bien-être complet »[14]. Les mots sont simples, terriblement simples. « Assez de chair à plaisir ! de chair au travail ! de chair à canon ! »… 

Les néomalthusiens se présentent comme des médecins de la société, porteurs de science. Ils n’ont pas d’autres buts que de vouloir diffuser la bonne parole de la science. Et la science ne peut qu’être libératrice. « La science vous a émancipées de l’épouvantable fatalité d’être mères contre votre volonté » [15]. Ils se disculpent de toute irrationalité dans les méthodes qu’ils demandent d’appliquer. Il n'y donc point d'inquiétude à les écouter et à les suivre. La science ne peut les tromper. L’irrationalité est plutôt du côté de leurs adversaires, de ceux qui prônent la chasteté ou la procréation incontrôlée. Les néo-malthusiens se présentent donc comme libérateurs qui contribuent au progrès de l’humanité contrairement à leurs oppresseurs qui maintiennent les hommes dans l’irrationalité et l’esclavage. 

De véritables organisateurs

Enfin, il n’y a pas de propagande efficace sans véritable organisation, surtout dans une société « persécutrice ». Issus de mouvements d’extrême gauche et d’anarchistes, les néo-malthusiens savent s’organiser, y compris dans la clandestinité. A peine leurs journaux sont-ils interdits qu’ils renaissent sous un autre titre, y compris durant la première guerre mondiale Et rapidement, ils comprennent qu’il est de leur intérêt de dépasser le cadre limité d’un pays. Ils ont ainsi mis en place des associations internationales. 

Mais en définitive, le néo-malthusianisme bien vulnérable

Jusqu’à la deuxième guerre mondiale, les néo-malthusianismes sont très vulnérables. Face à des adversités unis, aux enjeux clairs, ils sont fragiles.

Leurs objectifs sont peu appréciés et font peur. Ils ne cachent pas en effet l’objet de leur lutte : la régénération de l’homme, notamment en empêchant la propagation des « tarés », des « débiles ». Leurs discours ne cachent pas leur volonté eugénique. Or, évidemment, il n’est guère aimable à personne d’être traité ainsi. Conscients de cette grossière erreur, surtout après la douloureuse expérience eugénique du nazisme, les eugénistes ont changé de méthodes à partir des années 60. « Dans des circonstances normales, les gens ont un nombre d’enfants en proportion de leur capacité à en prendre soin. S’ils se sentent financièrement en sécurité, s’ils apprécient les responsabilités, s’ils sont affectueux, s’ils sont physiquement forts et compétents, il est probable qu’ils auront une grande famille, pourvu qu’ils aient reçu un conditionnement raisonnable dans ce sens. En revanche, ceux qui sont incapables de nourrir leurs enfants, s’ils craignent les responsabilités, s’ils sont peu affectueux, ces gens ne veulent pas beaucoup d’enfants. S’ils disposent de moyens efficaces de planification familiale, ils n’en auront pas beaucoup. Nos études ont démontré que c’était vrai partout dans le monde. Sur une telle base, il est sûrement possible de construire un système de sélection volontaire inconsciente »[16]. Ainsi « cessons de dire à tout le monde qu’ils ont une qualité génétique globalement inférieure, parce qu’ils ne seront jamais d’accord. Appuyons nos propositions sur le désir d’avoir des enfants (nés) dans des foyers où ils bénéficieront de soins affectionnés et responsables, peut-être alors nos propositions seront-elles acceptées. Il me semble que si l’eugénisme veut progresser comme il le devrait, il doit suivre de nouvelles politiques et se réaffirmer, et de cette renaissance nous pourrions, de notre vivant, le voir atteindre les buts élevés que Galton lui avait fixés». Le conditionnement inconscient…

En outre, empreints de l’image anarchiste, les néo-malthusiens sont rejetés des socialistes et des communistes. Ils sont finalement marginalisés et ne participent pas à leurs succès. Aujourd’hui encore, les héritiers du néomalthusianisme oublient leur passé. « Les mouvements de la seconde partie du XX° siècle se sont bien gardés d'entretenir l'histoire et le souvenir des victimes des luttes passées pour la liberté de la contraception et de l'avortement. […]. L'héritage du néo-malthusianisme n'est plus revendiqué que par quelques petits groupes fidèles à la pensée libertaire ou au syndicalisme révolutionnaire [17].

En dépit de leurs talents, les néo-malthusiens ne parviennent pas à former des organisations internationales puissantes tant leurs susceptibilités nationales demeurent fortes. Les querelles intestines sont nombreuses. Leurs conférences et leurs fédérations s’avèrent inefficaces…

S’ils savent très bien s’organiser, les néo-malthusiens méprisent les lieux du pouvoir contrairement à d’autres associations qui cherchent à établir des liens afin que leurs revendications soient entendues. S’ils sont présents dans de nombreuses associations, ils sont généralement minoritaires et rejettent leurs politiques considérées comme des idées bourgeoises. Cet isolement semble s’estomper entre les deux guerres. Empreints de misogynie, ils ne parviendront pas à associer à leur lutte les mouvements féministes[18]. Plus pragmatiques entre les deux guerres, ils cherchent à investir les lieux publics.

Enfin, le contexte social et politique n'est pas favorable au néomalthusianisme. La société est marquée par une crainte, celle de la dépopulation, dans une époque où les usines comme les armées avaient besoin de bras. Les « natalistes » ont mis en place des moyens législatifs pour les faire taire et empêcher la diffusion de leurs idées. Vigilante, la société résiste donc à leur propagande. En outre, les mouvements socialistes, syndicalistes, féministes sont plus centrés sur la recherche de droits, de congés payés, … Les néo-malthusiens ne sont guère entendus. « Ils se mirent à dos presque toute la société pensante et bien pensante de leur temps » [19]

En conclusion

Portés par des hommes d’actions, habitués au militantisme, le néo-malthusianisme français a mené une propagande particulièrement active, mêlant habilement doctrines et conseils pratiques. Mais s’il parvient à diffuser des méthodes anticonceptionnelles, sa doctrine révolutionnaire n’est guère entendue. « Même si individuellement beaucoup de personnalités éprouvent de la sympathie pour les idées néo-malthusiennes, elles se méfient et s'engagent à peine : prudence des syndicats, du parti socialiste, des francs-maçons, hostilité de tous les autres » [20]. Leurs discours font finalement peurs.

L’absence d’unité du mouvement le rend surtout fragile face à une opposition plus solide. De sa propagande, on ne retient finalement que les conseils pratiques qui vont se répandre. Par elles-mêmes, ces méthodes vont naturellement faire évoluer l’état d’esprit de ceux qui les appliquent. On finit toujours par penser comme on vit.

La situation change progressivement quand le néo-malthusianisme abandonnera les questions démographiques et l’agitation sociale pour se centrer davantage sur les notions d'éducation sexuelle. Après la seconde guerre mondiale, il se diluera dans les puissantes organisations anglo-saxonnes du birth-control, au moment même où la « natalité » ne sera plus une priorité, où les mouvements socialistes n’auront plus de droits sociaux à conquérir. En outre, débarrassée de son écorce anarchiste, l’idéologie néo-malthusienne ne fera plus peur dans les années 60. Le cadre ne sera plus celui de la révolution sociale mais des chantres de la liberté individuelle… 





Références
[1] Paul Bureau, La Propagande néo_malthusienne et la répression
[2] Parmi les soutiens du néomalthusianisme, on peut citer notamment Eugène Pottier, l’auteur de l’Internationale ou de Jean-Baptiste Clément, l’auteur du Temps des Cerises
[3] Programme de la conférence néomalthusienne (4 mai 1910), qui s’est tenu le 28 et 29 juillet 1910 à La Haye.
[4] Génération consciente 15 avril 1908 n°1.
[5] Génération consciente 15 avril 1908 n°1.
[6] Paul Robin ouvre à Paris en 1889 un centre de consultation et de vente de produits anticonceptionnels.
[7] José Ardillo, Malthus et les libertaires, revue Réfractions 25, automne 2010, traduit de l’espagnol par Sonia Balidian. 
[8] Bulletin de L’Alliance nationale contre la dépopulation (1909), cité dans Alain Drouard, Aux origines de l’eugénisme en France : le néo-malthusianisme (1896-1914). 
[9] Sujets qui seraient évoqués à la conférence néomalthusienne (4 mai 1910), qui s’est tenu le 28 et 29 juillet 1910 à La Haye selon son programme cité ci-dessus. 
[10]H.L. B., analyse du livre de Ronsin Francis intitulé, La grève des ventres; propagande malthusienne et baisse de la natalité en France, XIXe-XXe siècles In: Population, 36e année, n°1, 1981 pp. 196-197, http://www.persee.fr
[11] Le néo-malthusien, Déclaration. 
[12] l'Assiette au beurre.
[13] Lettre ouverte à M. Le sénateur Bérenger, 1911, par Génération consciente
[14] Docteur Gottschalk, Le Sexualisme, paru dans Le Malthusien, juillet 1910. 
[15] Paul Robin, texte de 1896, cité dans http://biopsher.ouvaton.org
[16] Déclaration de Frederick Osborn, qui avait présidé Eugenics Society américaine de 1946 à 1952, en avril 1956, Eugenics Review, avril 1956, v.48 n°1. 
[17] http://biosphere.ouvaton.org. 
[18] Anne Cova, Féminisme et néomalthusianisme sous la IIIème République : « la liberté de la maternité », L’Harmattan 2011. 
[19] H.L. B., analyse du livre de Ronsin Francis intitulé, La grève des ventres; propagande malthusienne et baisse de la natalité en France, XIXe-XXe siècles
[20] H.L. B., analyse du livre de Ronsin Francis intitulé, La grève des ventres ; propagande malthusienne et baisse de la natalité en France, XIXe-XXe siècles.

lundi 21 octobre 2013

Galilée : récit historique contre vérité historique

L'affaire Galilée peut nous paraître étrange. Elle demeure encore un mythe. De nombreuses enquêtes sérieuses ont pourtant été menées pour dénoncer les fausses accusations qu'elle porte contre l'Eglise et le christianisme. Des livres ont été publiés pour dénoncer les mensonges et donner un récit plus juste de la vérité. Mais le mythe domine encore dans l’opinion. Pour les catholiques, l’affaire Galilée constitue souvent une source d’embarras et de frustration. Voyons
comment le mythe a pu se développer et se maintenir… 

A la conceptualisation de l’Histoire… 

D’abord, les protagonistes de l’affaire sont clairement « catalogués ». Il y a d’une part les bons, c’est-à-dire les savants, porteurs de sciences et de progrès, et d’autre part les mauvais, les ecclésiastiques, représentants de l’Église et de la superstition. Ainsi sont opposées la Science et la Religion. 

Or première question : comment distinguer à cette époque le savant de l’ecclésiastique ? Nombreux sont les religieux savants comme les savants religieux. Copernic est un chanoine. Newton n’a pas seulement fondé la physique moderne, il a aussi tenté d’élaborer une philosophie religieuse. Cette distinction date du XXème siècle. Elle n’a aucun sens au XVIIème siècle. Et pourtant, cette erreur est facilement acceptée, y compris aujourd’hui. Nous en voyons trois raisons :

  • on donne à l’Histoire un sens moral claire et nette en cherchant systématiquement une opposition entre le bien et le mal ; 
  • on s'attache essentiellement aux événements et au récit historique sans connaître véritablement l’esprit qui régnait à l'époque ; 
  • on applique à ces événements l’esprit de son époque à la recherche d'une Histoire cohérente et compréhensible et non d'une Histoire vraie. 
Par ces simplifications, nous classons les individus, nous « cataloguons » les protagonistes : d’un côté, Galilée qui représente la Science, de l’autre des ecclésiastiques qui représentent l’Église. Nous passons donc d'une réalité à une abstraction, d’un fait particulier à une généralité. Nous conceptualisons. Nous nous plaçons dans un monde virtuel, sans individualité, sans nuance, dans une idéalisation d’une époque, d’une société. 

Galilée devant le tribunal de l'Inquisition
Joseph Clerian, Aix-en-Provence, MUsée Granet
Processus de victimisation et de dramatisation 

Galilée est ensuite présentée comme une victime. Le récit historique est présenté comme un drame, comme une véritable tragédie. Il pourrait être un roman d’Alexandre de Dumas, où la fiction historique remplace subtilement l’Histoire. Nous vivons encore dans l’illusion du XIXème siècle. L’important n’est pas la Vérité mais le drame historique. 

Le processus de victimisation a un double effet : éveiller les "bons" sentiments et radicaliser les positions . On prend aisément fait et cause pour celui qui fait l’objet d’une injustice criante. L’innocent est auréolé, le bourreau maudit. Toujours la même opposition... 

Des images plus vraies que nature 

Eugène Délacroix
Image anticléricale
Par ces procédés, on éveille en nous des images stéréotypées qui ont été élaborées et développées dans l’imagination collective pour établir un réflexe dans le jugement de chacun. Pour que ces images gardent toute leur force et leur pertinence, elles sont régulièrement rappelées de génération en génération. Cette erreur se transmet facilement quand elle est véhiculée par ceux qui enseignent, informent ou détiennent le savoir. Comme l’atteste différents travaux de recherche, les enseignants ne sont pas exempts de ces mystifications de l’histoire. Le développement et la permanence du mythe s’expliquent aussi par le pouvoir moral dont se sont acquis les adversaires de l’Église. Cette dernière a aussi perdu de la crédibilité… 


Nous perdons de la crédibilité quand, imitant les accusateurs de Galilée, nous croyons défendre l’Église quand finalement nous défendons nos manières de pensée et refusons de remettre en cause nos préjugés. 

En outre, chaque fois qu’une affaire semble soulever une opposition entre la Foi et la Science, on éveille les vieilles images, on rappelle l’affaire Galilée. Cette permanence finit par donner de la véracité aux mensonges, même les plus grotesques, au point qu’on finit par ne plus juger. Cette permanence finit aussi par décourager ceux qui savent et qui savent juger. 

Juger l’Histoire et soi-même… 

L’Histoire, ainsi conceptualisée et dramatisée, nous est alors présentée de façon à nous inciter à juger. Nous ne sommes plus dans la situation d’un élève apprenant l’Histoire d’un maître, mais d’un juge statuant sur un crime. Pire encore, nous sommes incités à nous juger nous-mêmes. En assumant ce rôle de « justicier », on nous laisse devant un choix : à quel clan appartenons-nous ? Sommes-nous du côté de la Science ou de l’Église ? Impossible de suspendre le jugement. Qui dit mot consent. Le silence est un aveu. Et la conclusion est toujours la même : vous êtes soit porteur d’avenir, soit rétrograde ! Vous êtes bon ou mauvais.  Évidemment, vous voulez appartenir au monde libre et non à l’obscurantisme. 

De plus, si vous vous opposez à Galilée, vous remettez en cause votre époque, votre société, vous-mêmes. Il est en effet présenté comme l'origine de la modernité. Or qui peut sincèrement et réellement refuser son époque sans se renier profondément ? C’est en quelque sorte porter tort à ses propres intérêts. Certes nous pouvons critiquer notre époque mais pouvons-nous vraiment la rejeter sans nous nuire ? La refuser revient en effet à ne plus accepter ce qu’elle nous procure : la tranquillité. Notre société s’effondrera le jour où elle n’apportera plus ce précieux avantage. Elle nous tient encore par ses bienfaits. Nous ne pouvons donc que condamner l’obscurantisme et ses représentants. Les stéréotypes qui traversent les époques et biaisent nos jugements consolident notre société et renforcent ce clientélisme inavouable. 

L’affaire de Galilée telle qu’elle est véhiculée est une de ses armes qu’on brandit pour condamner une société et ce qu’elle représente, pour renforcer une autre et ce qu’elle symbolise. Tout est mêlé pour inciter le jugement vers un choix inéluctable. Tout est mis en scène comme dans un excellent film qui éveille des sentiments et les manipule à son grès pour parvenir à ses fins. Et si nous nous opposons à cette fiction, même en apportant de solides arguments, on nous répond comme devant un film : tout est affaire de goût. Dans notre société, les récits ont pris tant d’importance qu’on ne recherche pas la vérité mais la cohérence et les bons sentiments … Nous recherchons finalement un monde de sens et non un monde vrai … 




Sommes-nous alors condamnés à subir ces mensonges et à voir nos sentiments guider notre raison ? La vérité doit ne pas cesser d’être dite pour éveiller les consciences des hommes de bonne volonté et écorner les belles images d’Épinal. Nous avons un devoir de montrer le monde virtuel qu’on nous impose et le monde vrai dans lequel nous vivons réellement. N’est-ce pas la véritable liberté ? Ce rappel de la vérité freine en outre l’audace des manipulateurs et les discrédite peu à peu. Ne leur laissons pas en effet le champ libre ! Encore faut-il expurger de nos beaux souvenirs d’histoire ces images qui font tant de mal à nos têtes blondes sur les bancs d’école. Mieux vaut les remplacer par d’autres images, d’autres récits aussi cohérents et plaisants mais portant un sens plus juste… 

Au-delà de la Vérité historique, l’Histoire porte un sens moral qui guide finalement notre manière de penser et de vivre. Elle construit l’homme et la société. Les adversaires de l’Église l’ont bien compris. A force d’images caricaturales, plus assimilables que les dures leçons de la réalité, ils ont fini par faire condamner une époque et à faire opposer Science et Religion au point de bâtir une société contre une autre… 

Les mythes perdurent par notre ignorance et notre silence, par notre crédulité. Cela est devenu si flagrant que les athées eux-mêmes s’en étonnent. « Écoutez-moi, vieil incrédule, qui s‘y connaît : le chef d’œuvre de la propagande antichrétienne, est d’avoir réussi à créer chez les chercheurs, les catholiques en particulier, une mauvais conscience. A force d’insister, de la Réforme à nos jours, ils ont réussi à vous convaincre que vous étiez responsable de la quasi-totalité des maux du monde. Ils vous ont paralysé dans l’autocritique masochiste. Et vous, si souvent ignorants de votre passé, vous avez fini par y croire. Moi, en revanche agnostique mais historien qui essaye d’être objectif, je vous dis que vous devez réagir, au nom de la Vérité : souvent, en effet, ce n’est pas vrai. Et s’il y avait quelques choses vraies, il est également vrai que dans un bilan de 20 siècles de christianisme, les lumières dépassent de beaucoup les ombres »[1].


[1] Léo Moulin (1906-1996), médiéviste français, L’inquisition dans l’Inquisition, cité dans L’affaire Galilée : le journal allemand Die Wert donne raison à l’Église, Mauro Faverzanni.. 


jeudi 17 octobre 2013

Galilée : un mythe dangereux

« Galilée est devenu au cours du temps le héros de la libre-pensée, martyre de la science face à l’obscurantisme religieux ». Il fait partie des « génies incompris de leur époque », « une des plus glorieuses victimes » de la liberté et de la vérité, « sacrifié à la barbarie de son siècle ». « La cruauté se joignit à l’ignorance pour étouffer la physique à son berceau »[1]. Les reproches ne manquent pas pour condamner une époque et au-delà l’Église. On l'accuse de s’être s’opposée à la connaissance et au progrès scientifique pour faire perdurer son empire sur les consciences. 

L’affaire Galilée symbolise l’ignorance qui emploie toutes les méthodes, y compris la cruauté, pour s’opposer à la connaissance et au progrès scientifique. Elle fonde une « formidable leçon d’histoire sur le pouvoir absolu que l’Église a fait peser pendant des siècles sur l’État et la Science »[2]. On en vient même à accuser l’Église de l’avoir torturé pour obtenir son abjuration. Ainsi Galilée est devenu le martyr de l’Inquisition. « Il est moralement monstrueux de menacer de prison à vie un homme qui cherche à promouvoir la connaissance, si par malheur elle contrevient à l'idéologie religieuse » comme « moralement, il n'est pas inadmissible de remplacer la démonstration par la contrainte, le libre raisonnement par le dogme imposé »[3]. 

Galilée est l’étendard qu’on brandit quand on veut condamner l’Église et l’accuser d’obscurantisme. Il est le « symbole du prétendu refus par l’Église du progrès scientifique ou bien de l’obscurantisme dogmatique opposé à la libre recherche de la vérité » [4]. Ainsi présenté comme le reflet de l’opposition entre science et foi, ce mythe a contribué à éloigner de la foi de nombreux scientifiques de bonne foi

Il est en effet moralement condamnable de mener de tels obstacles à la connaissance mais ses accusations se trompent d’accusateurs ! Il n’y a ni connaissance ni démonstration dans l’affaire Galilée. Il n’y a ni idéologie religieuse, ni dogme imposé non plus. Cette histoire condamne plutôt la prétention d’un homme qui veut imposer une vérité en mêlant science et théologie sans apporter la moindre preuve, comme elle condamne ceux qui restent enfermés dans un modèle, renonçant à le remettre en cause et confondant interprétation et vérité. Entre ces deux partis, nous voyons plutôt des hommes prudents et réfléchis. Il n’y a pas de démarche scientifique quand on veut imposer des convictions sans apporter de preuves scientifiques ou quand l’intransigeance dépasse la raison et la foi. C’est par de tel comportement que la connaissance de la Vérité est en danger. 

Pour s’opposer à ce mythe, il est indispensable de rappeler les faits... [10]

Véritables motifs de condamnation 

Galilée n’a pas été condamné pour avoir défendu l’héliocentrisme et la rotation de la Terre, idées déjà connues et acceptées par des ecclésiastiques et des religieux, mais pour avoir imposé une thèse scientifique comme une vérité sans apporter de preuves irréfutables. « C’était pourtant là une exigence de la méthode expérimentale dont il fut le géniale initiateur » [5]. Il est aussi accusé d’avoir renié ses engagements et trompé la confiance du Pape

Un modèle de héros inapproprié 

Il n’est pas le modèle du scientifique moderne puisque contrairement aux conseils de ses amis, il a mêlé à sa démonstration des arguments théologiques, mêlant ainsi deux champs de connaissances distincts. L’affaire de Galilée marque l’absence de « distinction entre ce qui est l’approche scientifique des phénomènes naturels et la réflexion sur la nature d’ordre philosophique »[6]. 

Il n’est guère le scientifique prudent puisqu’il est très probablement un polémiste né, particulier intransigeant et imbu de ses qualités. 

Il ne s'est pas opposé à la Sainte Ecriture. Au contraire, il a cherché à la rendre compatible avec l’héliocentrisme en proposant une nouvelle interprétation des versets incriminés. « Ce n’était pas l’Église qui s’était mêlée de science, mais Galilée qui avait voulu faire le théologien »[7]. 

Pour en finir avec l’anachronisme : le retour au contexte 

L'affaire Galilée ne peut être évoquée sans l'inscrire dans un contexte particulier. Elle se situe à une époque particulière, celle de la Renaissance. Les Etats s'affirment devant la Papauté. Ils étendent leurs pouvoirs dans les sciences et les arts, concurrençant ceux de l’Église. La Cité commence à s’émanciper de l'Eglise ou à s'en écarter. Galilée apparaît comme le modèle des scientifiques soutenus et appuyés par un État. Il annonce la mainmise de la science par les politiques

C’est aussi une époque où après de vifs débats, l’aristotélisme est devenu un des plus efficaces outils de la scolastique. En outre, autrefois vivement attaqués et affaiblis par les protestants, les ecclésiastiques et les religieux sont désormais dans une phase offensive. Certains d’entre eux voient alors dans l’héliocentrisme une nouvelle attaque contre l’enseignement de l’Église

Enfin, les représentations du Monde sont entrain d’être profondément modifiées. Non seulement le protestantisme a profondément rompu l’unité de la foi et de l’esprit, mais la vision héritée des Grecs, considérée comme la science par excellence, est remise en cause par de nouvelles découvertes. Un monde nouveau se révèle. Newton n’est pas très loin… 

L’affaire de Galilée s’inscrit donc dans un contexte complexe où se jouent des conflits d’intérêts propres à une époque. Elle ne peut être comprise sans une compréhension globale de ce cadre particulier. Or, depuis le XVIIIème siècle, elle « a été chargée d’une telle tension nerveuse au point de devenir quasiment mythique »[8], c’est-à-dire dénué du cadre historique. L’affaire Galilée est devenue intemporelle, détachée de la réalité et donc parfaitement malléable. Elle est « une représentation de la science et de l’histoire de la science plus proche du mythe que de la réalité »[9]. Pour s’opposer aux mensonges et aux accusations injustifiées, il est impératif de reconnecter l’affaire à son époque, de la démystifier. 

N.B. Le prochain article "Galilée : récit historique contre vérité historique" donnera quelques éléments de réflexion pour expliquer pourquoi ce mythe est encore si efficace...


Références
[1] http://www.utc.fr/~tthomass/Themes/Unites/index.html.
[2] Nouvel Observatoire, télé-ciné-radio, 7-13 janvier 2006. 
[3] http://www.philosciences.com/Societe/Galileo.html.
[4] Discours du Pape Jean-Paul II aux participants de la session plénière de l’Académie pontificale des Sciences, III, n°10, 31 octobre 1992, www.vatican.va.
[5] Discours du Pape Jean-Paul II aux participants de la session plénière de l’Académie pontificale des Sciences, II, n°5. 
[6] Discours du Pape Jean-Paul II aux participants de la session plénière de l’Académie pontificale des Sciences, II, n°5. 
[7] Paul Feyerabend, philosophe agnostique, Contre la Méthode requise, 1976.
[8] Cardinal Ratzinger, entretien avec Peter Seewald, Le Sel de la Terre, beatriceweb.eu/Blog6
[9] Jacqueline Lubet, Bernard Pourprix, Culture épistémologique et scientifique des enseignants, Spirale, revue de recherche Education, 2000, n°26. 
[10] Voir Émeraude, article L'Affaire Galilée, 14 octobre 2013.

lundi 14 octobre 2013

L'affaire Galilée

Quand des catholiques tentent de présenter leur conception du Monde, un nom suffit parfois à les faire taire : Galilée. Que de symboles et de mythes en effet derrière ce nom : Héros de la Science contre l’obscurantisme religieux, défenseur de la Vérité et de la Liberté contre l’injustice de l'Inquisition, victime sacrifiée à des bourreaux ignares et touts puissants ! Aujourd’hui encore, l’affaire Galilée porte en elle les oppositions les plus classiques : Foi et Science, Christianisme et Progrès, ... Revenons sur cette histoire, source de tant de malentendus et de manipulations… 

Que cherche-t-on en évoquant ce personnage ? On n’attend pas vraiment une réponse. De nombreux livres sérieux et admirablement bien documentés relatent les faits et ont rétabli la vérité. On souhaite plutôt entendre quelques repentances de la part des chrétiens ou plus simplement on tente de les disqualifier dans leur prétention de décrire le monde. On veut finalement les faire tairerendre inaudible tout discours catholique à consonance scientifique. 

Nous avons déjà évoqué cette affaire qui semble en effet peser lourdement dans la conscience de beaucoup de catholiques[1]. Il est donc tout naturel d’y revenir et de mieux comprendre cette affaire. Ainsi pourrons-nous éclairer et soulager ceux qui portent une croix illusoire, celle d’un passé déformé… 


Géocentrisme et héliocentrisme, deux modèles en compétition

Galilée a vécu aux XVIème et XVIIème siècle. Au temps de la Renaissance, le modèle de Ptolémée prédomine dans l’opinion des scientifiques et des gens d’Église. Ptolémée décrit un Univers centré sur la Terre. Ce modèle est appelé géocentrisme. Il est encore bien utile, notamment en astrologie. Il correspond aussi aux interprétations de la Sainte Écriture.

Un autre modèle est aussi connu mais ne parvient pas à supplanter le géocentrisme.  C'est l'héliocentrisme : un Univers centré sur le Soleil, la Terre tournant autour du Soleil. Le chanoine Copernic (1473-1543) a proposé l'héliocentrisme comme modèle hypothétique de l'Univers. Il l'a déjà présenté au Pape Clément VII et aux prélats de la Curie romaine, dont certains le soutiennent et l’encouragent. Mais il est peu concret et ne répond pas réellement aux besoins. Il existe aussi un modèle héliocentrique plus juste, celui de Kepler. Deux systèmes finissent par se confronter… 

Des protestants et des ecclésiastiques catholiques attaquent vivement l’héliocentrisme. Des scientifiques, comme Tycho Brahé, juge même absurde la thèse de Copernic. « Cette doctrine répugne à la philosophie naturelle »[3]. Nous pouvons noter que face à l’opposition des pasteurs protestants, Kepler est accueilli par les Jésuites pour poursuivre ses travaux. Tycho Brahé aurait fait intervenir la Sainte Écriture dans le débat [4].

Le modèle héliocentrique pose de sérieuses difficultés pour certaines autorités de l’Église. Il semble en effet contredire des versets de la Sainte Écriture, qui évoquent plutôt le mouvement du ciel et l’immobilité de la Terre. « Vous avez fondé la terre sur sa base : elle ne sera pas ébranlée dans les siècles des siècles » (Ps. CIII, 5). Le miracle de Josué pose aussi problème. « Josué parla au Seigneur […] : « Soleil, ne te meus point contre Gabaon, ni toi Lune, contre la vallée d’Aaron », et le soleil et la lune s’arrêtèrent jusqu’à une nation se fut vengée de ses ennemis. […] C’est pourquoi le Soleil s’arrêta au milieu du ciel, et ne se hâta point de se coucher durant l’espace d’un jour » (Josué, X, 12-13). « Une génération passe, et une génération vient ; mais la terre pour toujours reste debout. Le Soleil se lève et se couche, et il revient à son lieu : et là renaissant » (Ecclésiaste, I, 4-5). Que faut-il croire ? 

Enfin l’héliocentrisme est un modèle si peu pratique pour les savants. Ces derniers préfèrent l’autre modèle plus simple pour leurs calculs. « L’intérêt pratique de l’astronomie résidait en effet essentiellement dans l’établissement de tables calendaires précises, fondées sur le mouvement des astres : or, les tables fondées sur la théorie copernicienne ne présentaient pas à cet égard plus de précisions que celles qui étaient obtenues à partir de l’Almageste. Le De Revolutionibus était en outre difficile à comprendre, à exploiter dans la pratique et la réalité du mouvement de la terre sur elle-même et autour du soleil demeurait presque unanimement rejetée comme absurde du point de vue physique »[5]. Le traité de Copernicien est un livre difficile à lire. Galilée ne le terminera jamais. Le géocentrisme apparaît comme un modèle plus juste qui sauve davantage les apparences. 

Les astrologues sont aussi préoccupés par les découvertes de Galilée qui remettent en cause leurs prédictions [6]. Ils feront partis de ses adversaires.

La Science et la Sainte Écriture ne se contredisent pas, seules nos interprétations peuvent s’affronter

La question n’est pas de savoir si la Science ou la Bible ont tort ou raison, puisque l’une établit des modèles en accord avec la raison et les observations, l’autre des Vérités selon un sens objectif, c’est-à-dire indépendamment de l’intelligence du lecteur

Dans les deux cas, nous avons affaire à une double interprétation, celle de la Nature et de la Saint Écriture. Le véritable problème est la confrontation entre ces deux interprétations et non entre les Vérités qu’elles sont censées explicitées. Il n’y a donc pas opposition entre la Nature et la Sainte Écriture. Il ne peut y avoir puisque les deux ont pour auteur Dieu. « Puisque le vrai ne peut en aucune façon contredire le vrai, on peut être certain qu’une erreur s’est glissée soit dans l’interprétation des paroles sacrées, soit dans une partie de la discussion »[7]. Or au temps de Galilée, « la majorité des théologiens ne percevaient pas la distinction formelle entre l’Écriture Sainte et son interprétation, ce qui les conduisit à transposer indûment dans le domaine de la doctrine de la foi une question de fait relevant de l’investigation scientifique » [8].

Si les observations astronomiques remettent en cause le géocentrisme, il faut changer l’interprétation de la Sainte Écriture. « Bien que ces hypothèses [celles de Ptolémée] paraissent sauver les apparences, il ne faut pas affirmer qu’elles sont vraies car on pourrait peut-être expliquer les mouvements apparents des astres par quelques autres procédés que les humains n’ont pas encore conçus »[9]. C’est aussi l’avis de Saint Augustin. « S’il arrive que l’autorité des Saintes Écritures soit mise en opposition avec une raison manifeste et certaine, cela veut dire que celui qui [interprète l’Écriture] ne la comprend pas correctement. Ce n’est pas le sens de l’Écriture qui s’oppose à la vérité, mais le sens qu’il a voulu lui donner. Ce qui s’oppose à l’Écriture ce n’est pas ce qui est en elle, mais ce qu’il y a mis lui-même, croyant que cela constitue son sens »[10]. Saint Bellarmin, cardinal et théologien, le confirme également : « devant une vraie démonstration scientifique des hypothèses nouvelles, il vaudrait mieux dire que nous ne comprenons pas les Écritures, plutôt que de dire que serait faux ce qui est démontré »[11]. 

Mais pour qu’il y ait changement d’interprétation, il faut avant tout « une vraie démonstration scientifique ». Sans un argument raisonné et solide, il n’est pas possible d’affirmer son hypothèse comme une vérité. 

A travers le modèle, une métaphysique est remise en cause

Quand on évoque le modèle ptoléméen, on pense immédiatement à Aristote. Le remettre en cause revient à mettre en doute le philosophe et sa pensée. Or l’aristotélisme est parfaitement intégré à la pensée chrétienne, notamment grâce à Saint Thomas d’Aquin. Ainsi s’attaquer à Ptolémée, c’est aux yeux de certains ecclésiastiques s’attaquer à la foi. Certaines autorités sentent alors un danger pour l’Église. Rappelons que le modèle ptoléméen améliore celui d’Aristote. Le géocentrisme de Ptolémée n’est pas en effet celui d’Aristote. Ce sont en fait les principes métaphysiques aristotéliciens qui sont remis en cause, ceux que Tsycho Brahé puis Kepler ont déjà bien entamés : l’idée de la perfection céleste, reflet de celle de Dieu. Certains voient donc dans l’héliocentrisme une remise en cause de cette métaphysique.
Galilée, un ardent défenseur de l’héliocentrisme

Après des années d’enseignement à l’université de Padoue, Galilée s’adonne pleinement à l’astronomie. Ses recherches sont soutenues par certains cardinaux dont le futur Pape Urbain VIII. A partir de 1611, Galilée adhère au système copernicien. Grâce à la lunette astronomique récemment inventée, qu’il perfectionne [12], il fait de nombreuses découvertes : tâches solaires, satellites de Jupiter, rotation du Soleil autour de son axe, etc. Or elles ne concordent pas avec le géocentrisme mais plutôt avec l’héliocentrisme. Il tente alors de le diffuser, notamment par des publications. 

L’héliocentrisme, une hypothèse soutenue par l’Église…

L’idée d’un mouvement de la Terre ne semble pas faire l’objet d’un quelconque refus de la part de l’Église catholique. Les futurs cardinaux Nicolas Oresme et Nicolas de Cues en font l’hypothèse sans en être inquiétés [13]. Le chanoine Copernic a publié son ouvrage avec le soutien et sous la protection du Pape Paul III, et de nombreux cardinaux et évêques. L’héliocentrisme reste néanmoins dans le domaine de l’hypothèse. Enfin Galilée lui-même sera soutenu dans ses recherches astronomiques. Il est bien reçu dans la bonne société et dans les académies scientifiques, y compris celles de Rome. Il est reçu avec enthousiasme à l’académie de Lynx et en devient membre. Le futur Pape Urbain VIII est un de ses plus fidèles protecteurs. 

L’arrogance de l’un et les erreurs des autres

Certaines savants et ecclésiastiques s’inquiètent des succès grandissants de Galilée. Des sermons s’attaquent à l’idée de la rotation de la Terre. En 1613, un grand débat a lieu à Florence. Les thèses héliocentriques sont-elles compatibles avec l’enseignement de l’Église ? Des savants les déclarent absurdes, des hommes d’Église les trouvent contraires à la Sainte Écriture. 

La controverse devenant violente, « le 12 avril 1615, le cardinal Bellarmin fait connaître la position officielle de l’Église : le recours à l’héliocentrisme permet de sauver les apparences mieux qu’en posant les excentriques et les épicycles et ne présente pas de danger dès lors que l’on se borne à parler d’hypothèse de travail ». Il précise néanmoins que « l’interprétation des passages des Textes bibliques où il est question de la Terre et du Soleil est contraire au concile de Trente « qui interdit d’interpréter les Écritures contre l’avis unanime des saints pères » [14]. 

Se sentant attaqué, Galilée s’empresse de se défendre dans une lettre qu’il adresse à Christine de Lorraine, la mère du Grand duc de Florence, son protecteur. C’est un véritable manifeste qui s’oppose ouvertement aux déclarations du cardinal Saint Bellarmin. Dans sa défense, il commet de grandes maladresses. Publié en italien et non en latin, il porte le débat hors de la communauté des savants : il s’explique en recourant à l’exégèse et à la théologie. Face aux critiques de ses adversaires qui en appellent à la Bible, Galilée veut prouver la compatibilité du système héliocentrique avec les Écritures, se laissant ainsi entraîner dans un domaine dont il n’est pas compétent. Il attaque aussi brutalement ses contradicteurs, sans aucun ménagement. Non seulement il intervient dans un domaine de compétence qui n’est pas le sien, mais en plus, il veut donner des leçons à ceux qui en sont les maîtres, tout cela sans prudence et modestie. 

Enfin et surtout, contrairement à Copernic, Galilée présente l’héliocentrisme comme une vérité indiscutable sans apporter la moindre preuve…

La controverse ne se réduit pas à Galilée. En 1616, le carme Paolo Foscarini (1565-1616) publie une lettre affirmant la réalité physique du système copernicien sans encore réfuter de manière concluante le géocentrisme. Le Cardinal Bellarmin lui rappelle qu’il ne peut l’ériger en vérité tout en reconnaissant l’intérêt pratique. Il définit ainsi la valeur et la portée d’un modèle scientifique.

Quand une hypothèse est finalement indémontrable !

Comment pourrait-il prouver la mobilité de la Terre ? Il faudra attendre le XIXème siècle pour en avoir des preuves. Il n’a ni les moyens techniques, ni les principes et notions scientifiques nécessaires pour le démontrer. Et nous savons aujourd’hui que l’héliocentrisme est une erreur, donc indémontrable. 

Les observations font pencher Galilée sur un modèle héliocentrique quand d’autres orientent plutôt des scientifiques toujours vers un modèle géocentrique de plus en plus complexes et inextricables toujours pour « faire sauver les apparences ». Mais Galilée ne peut fournir de preuves. L’héliocentrisme ne peut donc qu’être une hypothèse concevable au XVIIème siècle au regard des observations. « Ce qui reproché à Galilée, ce n’est pas tant de postuler l’héliocentrisme que d’affirmer la véracité de ce système en se dispensant d’en apporter la preuve »[15].

L’héliocentrisme, première victime

Des pamphlets s’attaquent à Galilée. On le dénonce devant l’Inquisition en 1615, dénonciations qui échoueront. Les juges ne trouvent aucune matière d’hérésie. Et son protecteur, Frédéric II de Médicis, est si puissant ! Ces dénonciateurs s’en prennent alors à l’héliocentrisme de Copernic et à ses écrits. Le Saint-Office déclare finalement hérétique la proposition selon laquelle le Soleil est le centre immobile du Monde, et erronée l’affirmation selon laquelle la Terre tourne sur elle-même au prétexte que ces deux postulats contredisent la Sainte Écriture

Indirectement, Galilée est touché. Car c’est bien Galilée qu’on vise, ou plutôt son orgueilleuse assurance. Il s’est fait trop d’ennemis...

Le Cardinal Saint Bellarmin lui demande alors de renoncer à ses idées ou de les présenter non comme des certitudes mais comme une hypothèse. En 1616, Galilée accepte toutes les conditions. Les livres traitant de l’héliocentrisme sont mis à l’Index. 

Une faute de trop…

En 1624, Galilée présente un projet au Pape Urbain VIII, nouvellement élu, l’un des plus fidèles défenseurs. Galilée [16] souhaite écrire un ouvrage où seraient comparés les divers systèmes du monde (Ptolémée, Copernic, Kepler). Le Pape accepte son projet sous plusieurs conditions dont trois principales : ne privilégier aucune de ces théories, les présenter toutes comme des hypothèses, de ne pas mêler la Saint Écriture et la théologie à la question. Ces conditions montrent bien toute la perspicacité et la sagesse du Pape. Plus tard, il lui demandera de finir son traité par un paragraphe sur la toute-puissance divine et de l’imprimer à Rome. Après plusieurs lectures et modifications, son ouvrage est accepté. Galilée obtient l’imprimatur.



En 1632, Galilée publie son ouvrage et l’imprime à Florence, et non à Rome. Selon certains historiens, Galilée aurait modifié le texte original. Le texte imprimé, Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, serait en effet différent de celui qui a obtenu l’imprimatur. Selon d’autres, l’imprimentur aurait été fourni de manière peu sérieuse, sans véritable examen et avec l’aide du puissant duc de Florence.

L’ouvrage est un entretien entre trois individus, chacun défendant son système. Or, Simplicio, celui qui propose le géocentrisme, est, comme l’indique son nom, un simplet. L’héliocentrisme est défendu par un personnage particulièrement brillant. Le dernier, personnage éclairé, penche sans difficulté vers l’héliocentrisme. Où est la description impartiale ? De plus, le Pape est implicitement raillé sans y être nommé. La conclusion du livre mentionne certes la toute-puissance de Dieu mais de manière sarcastique. En clair, Galilée se montre particulièrement indigne et offensant. Il a surtout trahi ses engagements, le Pape et bafoué son autorité. Le traité relance la polémique…

Pourtant, Urbain VII demeure indulgent. Son admiration pour l’homme de science explique-t-il une telle patience ? Mais le Pape est dans une situation difficile. Le contexte politique et religieux ne porte pas en effet à une indulgence publique. Ses ennemies l’accusent de soutenir les Français qui viennent de s’allier avec des princes protestants pour attaquer victorieusement l’Allemagne pourtant catholique. Va-t-il défendre un homme jugé hérétique ? Il condamne donc Galilée mais de manière plutôt douce, compte tenu de ses fautes et de l’époque.

La condamnation … Et des peines plutôt légères…

En 1632, une commission de théologiens accuse Galilée de défendre les thèses de Copernic non comme une hypothèse mais comme l’expression d’une certitude et donc d’avoir violé son engagement de 1616. L’Inquisition est alors saisie de l’affaire. Le Pape obtient l’assurance d’une certaine indulgence. « Le tribunal conservera sa réputation ; le coupable pourra être traité avec mansuétude et quel que soit le résultat final, saura qu’il a reçu un traitement de faveur et saura l’apprécier »[17]. 

En 1633, la sentence tombe. Galilée est coupable d’avoir commis deux fautes contre l’obéissance : avoir professé l’héliocentrisme sans pouvoir l’avoir prouvé et avoir fait imprimer le Dialogue à Florence au lieu de Rome. Il lui est interdit d’enseigner la théorie copernicienne et de se livrer à l’interprétation des Saintes Écritures. Il est condamné à une peine de prison, qui sera remplacée par une assignation à résidence d’abord chez l’ambassadeur de Florence puis dans sa demeure d’Arcetri dans la campagne florentine. On lui soumet une formule d’abjuration. Enfin, il est tenu de dire des prières de pénitence, prières qui seront finalement dites par sa fille aînée religieuse.

« Une tragique incompréhension réciproque »

Jean-Paul II a résumé l’affaire de Galilée comme « une tragique incompréhension réciproque ». Les torts sont en effet partagés. 

Les juges ecclésiastiques n’ont pas pris en compte de nouvelles données scientifiques à cause d’un littéralisme biblique condamnable. « La science nouvelle […] obligeait les théologiens à s’interroger sur leurs propres critères d’interprétation de l’Écriture. La plupart n’ont pas su le faire » [18]. Ils ont aussi probablement été influencés par les adversaires de Galilée. 

Galilée a aussi eu le tort de présenter une hypothèse comme une vérité sans apporter la moindre preuve. Il n’a pas su non plus rester uniquement sur le plan scientifique. Il a en outre accumulé de nombreuses fautes : il a renié ses engagements, s’est emporté contre tous, a bafoué celui même qui l’a protégé et continuera à le faire… 

Une arrogance insupportable

Pour terminer, reprenons un fait qui caractérise bien le caractère de Galilée. Pendant ses sept ans de silence (1616-1623), une dispute divise le savant et un des ses amis, le Père Grassi, astronome du Collège romain. Galilée affirme que les comètes sont des illusions d’optique quand Grassi y voit plutôt des corps célestes se déplaçant sur des orbites elliptiques [19]. En 1623, Galilée publie un traité dans lequel il ridiculise son adversaire : « Vous n’y pouvez rien, il a été donné à moi seul de découvrir tous les phénomènes du ciel et rien aux autres. Telle est la vérité, que ni la malice ni l’envie peuvent étouffer ». Or, nous savons qui aujourd’hui était plus près de la vérité… 




Références

[1] Voir Émeraude, article "le syndrome de Galilée", 3 septembre 2012.
[2] Jean Sévillia, Historiquement Incorrect, Le Livre de Poche, Fayard, 2011. 
[3] Jean-Baptiste Noé, Le Dossier Galilée, 2011, www.jbnoe.fr
[4]Voir Jean-Baptiste Noé, Le Dossier Galilée
[5] www.cite-sciences.fr
[6] www.cite-sciences.fr
[7] Léon XIII, encyclique Providentissimus Deus, 1894. 
[8] Discours du Pape Jean-Paul II aux participants de la session plénière de l’Académie pontificale des Sciences, III, n°9, 31 octobre 1992, www.vatican.va
[9] Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique. Il envisage une rotation de la terre et non la rotation de la Terre autour du Soleil. 
[10] Saint Augustin, Epistula, 143, N°7. 
[11] Lettre au Père Foscarini, en 1615, cité par Paul Poupard, Galiléo Galilei, 350 ans d’histoire, Desclée international, 1983, citation reprise dans Historiquement Incorrect et cité par Discours du Pape Jean-Paul II. 
[12] La lunette astronomique est une invention hollandaise. Galilée en a construite de nombreuses, de qualité souvent médiocre. Il n’en est pas l’inventeur. 
[13] Voir Traité du Ciel et de Monde (1377) de Nicolas Oresme et De docta ignorantia de Nicolas de Cues. 
[14] www.cite-sciences.fr
[15] Jean Sévillia, Historiquement Incorrect
[16] Les avis divergent sur celui qui le premier a proposé un tel projet. Certains pensent que le Pape aurait été l'initiateur du projet.
[17] Cité par Aimé Richardt, La Vérité sur l’Affaire Galilée, François-Xavier de Guibert, 2007 in Historiquement Incorrect
[18] Discours du Pape Jean-Paul II aux participants de la session plénière de l’Académie pontificale des Sciences, III, n°5. 
[19] Père Grassi, De tribus cometis anni 1618 disputatio astronomica. Mario Guidicci , élève de Galilée, Discorso delle comete.