" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


vendredi 31 mai 2019

Autour de l'Unigenitus : gallicanisme, richerisme et jansénisme réunis

L’histoire de l’Église dans notre pays est d’une très grande richesse. Elle ne se résume pas en des œuvres de pierres qui font l’admiration des touristes ou des nostalgiques d’un passé idéalisé. Elle est aussi faite de faits plus ou moins heureux, parfois sublimes mais aussi tragiques. Elle nous raconte comment nous sommes arrivés aujourd’hui à ce que nous sommes. Certains pensent qu’avant eux, rien n’existait. Or, comme nous tous, ils sont le fruit d’une histoire, d’une longue histoire. Nous ne pouvons pas comprendre notre présent et donc agir efficacement pour un meilleur avenir sans revenir  à ce passé. Il ne s’agit pas de se transformer en tribunal comme si nous étions capables de le faire, comme si nous en avions le droit. Notre époque est pleine de prétentions et d’orgueil. À force d’entendre de beaux discours qui flattent leur égo, nos contemporains ont fini par y croire. La société, qu’est-elle devenue si ce n’est qu’une multitude d’intérêts privés et de possibilité d’assouvir ses plaisirs pour son propre profit !

Le jansénisme est un de ces faits historiques. Après avoir étudié le gallicanisme, nous ne pouvons pas ne pas nous attarder sur ce long et douloureux passé. Aujourd’hui, nous en voyons encore les effets. Pouvons-nous en effet comprendre la laïcité telle qu’elle est entendue en France ou encore l’incrédulité de notre société sans nous préoccuper du jansénisme ?

Après avoir évoqué, dans le précédent article, le jansénisme sous l’aspect ecclésiastique et en rapport avec les relations entre les puissances temporelle et spirituelle, nous allons désormais nous attarder sur les faits. Car la doctrine se vit et s’élabore dans la pratique …

La condamnation du jansénisme

La doctrine janséniste telle qu’elle est formulée dans l’Augustinus fait l’objet d’un examen approfondi à Rome, examen qui donne lieu à une première condamnation du pape par la bulle In eminenti, datée du 6 mars 1642 et publiée le 19 juin 1643. L’ouvrage est censuré notamment pour avoir renouvelé les thèses de Baïus condamnées par les constitutions de Saint Pie V et de Grégoire XIII. La bulle le condamne aussi pour avoir enfreint une décision de Paul IV, qui, en 1611, a défendu de publier des écrits sur la grâce sans l’autorisation de l’Inquisition.

Pour mieux combattre les erreurs que contient l’ouvrage de Jansénius, Nicolas Cornet définit sept propositions qu’il considère comme les erreurs fondamentales de l’Augustinus. Avec l’assentiment de l’Assemblée du clergé, réunie en 1650, et de nombreux évêques, une supplique est envoyée au pape pour qu’il examine cinq des sept propositions et qu’il prononce sur chacune d’elle un jugement clair et distinct. Soulignons que le parlement de Paris refuse à la Sorbonne de procéder à l’examen de ces propositions et qu’onze évêques s’opposent aussi à l’examen pontifical. Le 31 mai 1653, après examen des propositions par une nouvelle commission, Innocent X censure et qualifie clairement chacune des propositions dans la bulle Cum occasione. La condamnation est nette et précise.

De subtiles distinctions

Les jansénistes vont-ils obéir ? Certes, ils concèdent que les propositions retenues sont légitimement condamnées, reconnaissant ainsi l’infaillibilité de l’Église romaine en matière de foi lorsqu’elle se prononce sur le sens hérétique de telle ou telle proposition. Mais, ils ne reconnaissent pas que ces propositions représentent la doctrine professée par Jansénius. Par conséquent, leur doctrine n’est point condamnée. Ainsi font-ils une subtile distinction, celle du droit et du fait.

En outre, selon Antoine Arnauld, si seule la première proposition se trouve textuellement dans l’Augustinus, elle n’a pas le sens de la proposition condamnée. Finalement, les jansénistes font une nouvelle distinction, celui du sens objectif et du sens subjectif d’une proposition. Dans le premier cas, la proposition est exprimée dans l’ouvrage considéré en lui-même et en dehors de l’intention personnelle de son auteur. Dans le deuxième cas, la proposition traduit la pensée personnelle et exacte de son auteur.

Ainsi, les jansénistes ne veulent reconnaître ni que les propositions sont de Jansénius ni qu’elles ont été condamnées dans le sens de Jansénius. Ils soulèvent finalement la question de l’infaillibilité de l’Église romaine lorsqu’elle détermine le sens objectif d’une proposition. Le sens subjectif est difficilement accessible surtout lorsque l’auteur est mort et ne peut se justifier.

Pour faire cesser tout débat inutile, en 1654, Innocent X déclare dans un bref qu’il a bien condamné, dans les cinq propositions, la doctrine de Jansénius contenue dans le libre intitulé Augustinus. L’année suivante, par ordonnance royale, l’assemblée du clergé déclare exécutoire le bref dans le royaume.

L’obstination des jansénistes

Pascal (1623-1662)
Antoine Arnauld persiste. Dans une Lettre à un duc et pair de France, il fait de nouveau la distinction entre le droit et le fait. Les cinq propositions ne peuvent être attribuées à Jansénius. Par conséquent, un catholique ne peut consentir de manière extérieure à la bulle de condamnation. Il prône donc le silence respectueux. En conclusion, il remet en cause l’autorité du pape en matière doctrinale.

En 1656, la Sorbonne le condamne de nouveau et lui demande de se soumettre au jugement pontifical. Une nouvelle constitution pontificale, intitulée Ad sanctam B. Petri sedem, du pape Alexandre VII déclare explicitement que les cinq propositions sont de Jansénius et ont été condamnées dans le sens de Jansénius, et il appelle perturbateur de l’ordre public tous ceux qui soutiennent le contraire. L’assemblée du clergé, réunie le 17 mars 1657, décide que tous les clercs devront désormais signer un formulaire clair, attestant leur soumission à la constitution d’Innocent X selon le sens donné par la constitution d’Alexandre VII. « Je reconnais que je suis obligé en conscience d’obéir à ces constitutions et je condamne de cœur et de bouche la doctrine des cinq propositions de Cornélius Jansénius, contenues dans son livre intitulé Augustinus, que ces deux papes et les évêques condamnés, laquelle doctrine n’est point celle de Saint Augustin que Jansénius a mal expliquée contre le vrai sens de ce saint docteur. »

Pour défendre la position janséniste, Pascal revient sur la distinction des questions de droit et de fait. Il déclare que l’Église romaine demeure infaillible lorsque ces questions concernent directement la Sainte Écriture mais elle ne l’est pas dans les questions de faits dogmatiques non révélés. Finalement, l’autorité du pape est profondément ébranlée…

L’appel aux « libertés gallicanes »

Alexandre VII
(pape de 1655 à 1667)
À partir de 1657, les gallicans interviennent plus directement dans la querelle. Quand Louis XIV demande au parlement de Paris d’enregistrer la bulle pontificale, ce dernier refuse sur demande d’Arnauld et de l’avocat en raison des libertés gallicanes. Le roi est alors obligé de recourir à un lit de justice[1].

Las des querelles, Louis XIV ordonne à tous les évêques, dans une déclaration du 29 avril 1665 l’obligation, de signer le formulaire sous peine de saisie de leurs bénéfices. Seuls quatre évêques s’insurgent contre cet ordre. L’un d’entre eux dénie même au roi le pouvoir de faire des canons et des lois dans l’Église, remettant ainsi en cause le « gallicanisme politique ».

Sur demande de Louis XIV, le pape Alexandre VII demande à son tour dans la bulle Regimini apostolici la signature du formulaire à tous les évêques. Soulignons qu’en faisant intervenir le pape dans les affaires du royaume, le roi fait une véritable entorse aux libertés gallicanes. Les récalcitrants seront poursuivis pour désobéissance au pape. Le 29 avril 1665, la bulle est enregistrée au Parlement. Le formulaire doit être signé « purement et simplement, sans user d’aucune distinction, interprétation ou restriction. »

Refusant de signer sans mandement, les quatre évêques jansénistes sont susceptibles d’être condamnés par une commission pontificale. Ils en appellent alors à la défense des libertés gallicanes. Arnauld s’y oppose aussi et accuse Rome d’avilir la dignité épiscopale en s’arrogeant le droit de juger les évêques de France.

Néanmoins, après d’âpres négociations, le pape obtient leur signature accompagnée d’une attestation d’obéissance envers le Saint Père sous des formes bien équivoques. Mais tout le monde aspire à la paix. Rome se contente d’une soumission extérieure. Par arrêt du conseil d’État du 23 octobre 1668, Louis XIV défend à tous ses sujets « de s’attaquer et de se provoquer à l’avenir les uns les autres sous couleur de ce qui s’était passé, ni d’user des termes injurieux d’hérétiques, de jansénistes, de semi-pélagiens, ou de quelqu’autre nom de parti, ni même d’écrire ou de publier des libelles sur les matières contestées ou de blesser par des termes injurieux la réputation de qui que ce soit. »[2]

La reprise de la crise

La paix n’est en fait qu’une pause. On publie divers ouvrages en faveur du jansénisme ou contre lui. Les injures se poursuivent. Les passions risquent à tout moment de se réveiller. Un opuscule intitulé « cas de conscience » déclenche finalement la tempête. Il demande à l’archevêque de Paris s’il est possible d’absoudre un ecclésiastique qui ne se soumettrait qu’extérieurement à la bulle pontificale. Quarante docteurs de la Sorbonne affirment qu’un silence respectueux suffit, provoquant alors de violentes protestations. Le pape Clément XI doit même intervenir. Dans un bref du 12 février 1703, il demande à Louis XIV de « dompter les rebelles que la douceur de l’Église n’est pas capable de gagner. » Dans un deuxième bref, il le somme de ne pas épargner « ces turbulents » dont l’hérésie est propre à troubler aussi bien « la discipline civile » que « la discipline ecclésiastique ». Las de ces querelles, le roi ordonne des exils, des confiscations, des embastillements contre les jansénistes notoires.

La manifestation des différents « gallicanismes »

Louis XIV intervient de nouveau auprès du pape pour qu’il condamne encore le jansénisme ainsi que l’idée selon laquelle le seul respect silencieux suffirait pour se soumettre aux bulles pontificales. Mais afin d’être conforme à la doctrine gallicane, il lui demande de rédiger la nouvelle constitution « sur la demande du roi de France », ce que ne peut accepter le pape. En effet, en dépit des instances royales, Clément XI ne répond guère à sa demande très imprégnée de « gallicanisme politique ». Sa résistance provoque la colère du roi et même des menaces.

Après deux ans de négociations et l’avis du roi, le pape publie la bulle Vineam Domini, datée du 15 juillet 1705. Il condamne le silence respectueux comme « un voile trompeur dont on se sert pour se jouer de l’Église au lieu de lui obéir » et déclare qu’il faut rejeter comme hérétique, non seulement de bouche mais de cœur, le sens de Jansénius condamné dans les cinq propositions. Louis XIV prie alors l’assemblée du clergé de « recevoir avec respect la Constitution pontificale et de délibérer sur la voie la plus convenable pour la faire recevoir d’une manière uniforme dans tous les diocèses du royaume. »

Les prélats rassemblés obtempèrent à la demande du roi mais son acceptation s’accompagne de deux restrictions. L’archevêque de Paris, Mgr de Noailles, dévoué au parti janséniste, remet en cause la pertinence de cette bulle. Selon ses propos, les jansénistes ont depuis longtemps adhéré à l’idée que le sens du livre de Jansénius est hérétique sans pourtant croire que Jansénius y ait voulu y attacher ce sens. Il demande alors pour les prélats uniquement de déclarer qu’ils « ne renferment uniquement dans la décision contenue dans la bulle, sans rien ajouter ni diminuer à cette décision si exacte ».

Mgr de Noailles (1651-1729)
La deuxième restriction concerne la forme et la procédure. Il demande que la lettre précise que les décrets apostoliques « après l’acceptation solennelle que le corps des pasteurs en avait faite » doivent être alors regardés comme le jugement et la loi de l’Église. La constitution Vineam Domini obtiendrait ainsi sa pleine autorité qu’après avoir été approuvée par l’Église gallicane. Ainsi se manifeste clairement le « gallicanisme ecclésiastique ». Clément VI ne peut que protester contre l’injure qui lui est faite.

Enfin, quand le pape condamne le livre de Quesnel dans un bref du 13 juillet 1708, ses Réflexions morales, des membres du Conseil royal s’opposent à la réception du décret sous prétexte qu’il est demandé de remettre les exemplaires de l’ouvrage de Quesnel, désormais interdit, aux évêques mais aussi à des inquisiteurs pour qu’ils les brûlent eux-mêmes. Ils en appellent aux « libertés gallicanes ». La sentence romaine reste alors lettre morte. Le « gallicanisme parlementaire » a remporté une victoire.

Sur demande d’adversaires des jansénistes, Louis XIV en appelle encore au pape pour qu’il condamne de nouveau dans une bulle le livre de Quesnel, lui assurant qu’elle sera désormais reçue, et donc exécutée, dans le royaume avec ou sans le consentement des évêques. Ainsi pour venir à bout du jansénisme, Louis XIV n’hésite pas à s’opposer au « gallicanisme épiscopal ». C’est ainsi qu’après plus d’une année d’examen du livre par une commission, Clément XI publie la bulle Unigenitus le 8 septembre 1713, contenant 101 propositions extraites de ses Réflexions morales et condamnées. Mais l’une des 101 propositions est assez particulière. Elle touche une autre doctrine, chère aux gallicans, le richerisme[3]. La 90e proposition remet en effet en cause le « gallicanisme ». C’est ainsi que le « gallicanisme » rejoint le jansénisme dans leur opposition à Rome...

Or selon les « libertés gallicanes », la bulle ne peut avoir force de loi qu’après avoir été acceptée par le clergé et enregistrée par le parlement. Après avoir allégué que la bulle porte atteinte aux « libertés gallicanes », le parlement finit par l’enregistrer le 15 février 1714. Une résistance plus vigoureuse vient plutôt du clergé.

La division de l’Église de France

La querelle interminable du jansénisme divise profondément l’Église de France. La majorité des prélats, c’est-à-dire cent dix-sept, l’accepte « purement et simplement » alors qu’une minorité, quinze exactement, apporte une acceptation conditionnelle, restrictive et relative aux explications que les prélats veulent donner dans une instruction pastorale. Les évêques réfractaires demandent des explications à Rome avant de donner leur adhésion à la bulle. L’archevêque de Paris, Mgr de Noailles, toujours favorable aux jansénistes, interdit son clergé de recevoir la bulle sans autorisation sous prétexte de l’irrégularité de la procédure. Le pape aurait dû demander l’acceptation préalable des évêques français avant de publier la constitution. L’opposition se fonde donc sur le « gallicanisme épiscopal ». Le pape réprouve l’instruction pastorale comme ayant un relent de schisme.

Ainsi, l’Église de France est divisée entre les « acceptants », qui se soumettent au pape, et les « opposants », une minorité certes faible en effectif mais remuante et tenace, et fortement soutenue par des sympathisants auprès de l’opinion publique, des docteurs de la Sorbonne et du clergé de second degré. Les « opposants » trouvent enfin leur appui auprès des parlementaires. Ces derniers s’opposent non seulement aux « acceptants » mais également au roi. Ainsi, au lieu d’en finir avec le jansénisme, comme le souhaitait le roi, la constitution Unigenitus lui donne des forces nouvelles et ravive aussi le « gallicanisme ». En outre, la mort de Louis XIV amène une forte réaction en faveur des jansénistes.

Le 1er mars 1717, quatre évêques en appellent de la bulle à un futur concile. La Sorbonne y adhère. Le cardinal de Noailles les rejoint. Ils seront seize évêques. L’Église de France est encore plus divisée, entre les « acceptants » et les « appelants », qui comprennent 3 000 ecclésiastiques sur 100 000. Une bulle pontificale Pastoralis Officii du 8 février 1718 les excommunie. Mais le parlement la rejette. Le schisme est proche…

Des longues négociations pour arriver à des accommodements et surtout la mort des protagonistes comme celle du cardinal de Noailles conduisent au déclin du jansénisme. En 1729, seul trois évêques « appelants » ne se rétractent pas. Mais, le conflit persiste en raison de l’hostilité des parlementaires à l’égard de Rome et du roi. Sous prétexte des « libertés gallicanes », ils font obstacle à l’enregistrement des bulles pontificales.

Les prétentions des parlementaires

La querelle est inlassable. En 1732, plusieurs évêques prescrivent à leurs curés de refuser les sacrements in extremis à tout « appelant » qui déclare encore rejeter la bulle ou qui ne peut attester d’un billet de confession en bonne et due forme. Considérant ce refus de sacrement comme une diffamation justiciable des tribunaux, les jansénistes en appellent au parlement. Ce dernier intervient dans cette affaire et procède contre les évêques et les prêtres qui refusent effectivement les derniers sacrements selon les conditions posées. L’archevêque de Paris, Mgr de Beaumont, ordonne de nouveau à ses prêtres de refuser tout dernier sacrement aux appelants récalcitrants. En 1649, sur un de ces refus, une famille porte plainte au parlement. Il ordonne des poursuites contre le curé mis en cause. Le conseil royal les arrête. En 1752, un nouvel incident se produit. Le parlement ordonne le saisi du temporel d’un curé qui a refusé les sacrements à un janséniste notoire. Louis XV intervient et casse le jugement. Furieux, le parlement publie le 18 avril 1752 un arrêt défendant tout ecclésiastique de « faire acte tendant au schisme ; et notamment de faire aucun refus public des sacrements sous prétexte de défaut de présentation d’un billet de confession ou de déclaration du nom du confesseur ou d’acceptation de la bulle Unigenitus » au risque « d’être poursuivis comme perturbateurs du repos public et punis selon la rigueur des ordonnances. » Le parlement dénonce alors au roi l’archevêque de Paris comme « fauteur de schisme ». Pourtant, faut-il rappeler que l’administration des sacrements ne relève que de la compétence des autorités spirituelles ? L’abus de pouvoir est flagrant…

Le désordre dans le royaume de France

L’hostilité du parlement ne cesse de croître. Le 28 janvier 1753, dans de « grandes remontrances », il accuse « les ecclésiastiques d’opposer au gouvernement un esprit d’indépendance et de préparer un schisme dans l’Église de France. » Un conflit dur s’ouvre alors entre le roi, les parlementaires et les évêques. Les parlementaires condamnent des évêques et des curées. Le roi ordonne aux parlementaires de cesser leurs poursuites. En dépit des menaces, le parlement persiste car il ne peut le faire sans « manquer à son devoir et à son serment ». L’exile le réduit un moment avant d’être rappelé par le roi. Le roi impose alors aux deux partis la « loi du silence ». Mais le refus des sacrements continue en province et à Paris. L’archevêque de Paris est à son tour exilé. Bref, le désordre est à son comble.

Une assemblée du clergé réuni en mai 1755 cherche une solution pour apaiser les esprits. Certains sont intransigeants. Ils ne veulent point changer d’avis. D’autres plus modérés proposent de refuser le sacrement qu’aux « appelants » notoires et publics. Mais, tous, unanimement, protestent contre l’intervention du parlement dans un domaine qui ne relève pas de ses compétences. De quels droits interviennent-ils dans les conditions requises pour l’administration des sacrements ? C’est pourquoi dans ses remontrances envoyées au roi, l’assemblée du clergé déclare que l’Unigenitus est « un jugement purement doctrinal » et que « c’est aux pasteurs et non aux fidèles qu’il appartient de décide qui doit être admis aux sacrements. » Il lui demande tout naturellement de casser toutes les sentences que le parlement a portées contre les prêtres et les évêques. Tout en admettant le caractère purement doctrinal de l’Unigenitus, le roi refuse néanmoins de casser les arrêts du parlement et exige que la « loi du silence » soit respectée. C’est donc une fin de non-recevoir. L’assemblée du clergé s’adresse au pape et lui demande conseil…

Dans un bref daté du 16 octobre 1756, intitulé Ex omnibus, le pape Benoît XIV adopte le parti modéré. Seuls ceux qui sont publiquement et notoirement réfractaires ne peuvent recevoir les sacrements. Il précise ce qu’il entend par « publiquement et notoirement réfractaire ». Mais, en dépit de son indulgence, le parlement refuse de nouveau d’enregistrer le bref. Le roi doit alors tenir un lit de justice et ordonne de respecter la bulle comme une décision de l’Église.

En 1757, un nouvel incident éclate entre l’archevêque de Paris et le parlement. Refusant de lever une censure contre un couvent janséniste, Mgr de Beaumont est exilé pendant un an et demi.

La diffusion du jansénisme

En dépit de ses condamnations, le jansénisme, surtout celui de la seconde génération, s’est diffusé dans la société de l’ancien régime. Il a gagné le parlement de Paris ainsi que les autres parlements comme nous avons pu le voir. Il a aussi touché le clergé de second ordre, dit encore le bas clergé. L’opinion public est assez favorable non pas au jansénisme lui-même dans sa doctrine et sa morale mais plus dans sa résistance contre l’autorité pontificale et celle du roi.

Les partisans du jansénisme ont fait l’objet d’une véritable persécution. « Quiconque était soupçonné de professer le quenellisme, au mépris de la bulle Unigenitus qui venait de le condamner, était poursuivi, traqué, à la fois par l'autorité ecclésiastique, qui fulminait bulles, rescrits, mandements ou sentences d'excommunication, et par l'autorité civile, intéressée à donner force de loi à un texte qu'elle avait, en somme, sollicité de Rome. »[4] Cette persécution, parfois violente et aveugle, notamment à l’égard des célèbres bénédictines de l’abbaye Port-Royal, a soulevé l’indignation. En devenant ainsi victimes, les jansénistes ont gagné, par leur résistance, l’estime et la faveur de l’opinion. Enfin, les faits extraordinaires[5] qui se produisent en faveur des jansénistes ne peuvent qu’attirer l’approbation de la population, toujours éprise du merveilleux.

Tous les adversaires de l’Église ne sont pas mécontents de ces débats houleux et sans fin qui ne cessent de la discréditer. Blaise Pascal dans ses Provinciales et tous les libelles en faveur du jansénisme ont fait rire et ridiculisé l’autorité religieuse. Les jansénistes ont créé un journal, « une merveille de la presse clandestine »[6], intitulé Les Nouvelles Ecclésiastiques. Il permet de capter l’opinion publique et de la tenir en haleine par le récit des différentes affaires.

En fait, au début du XVIIIe siècle, qui songe encore à la doctrine de la grâce et à l’œuvre de Jansénius ? « Le miracle accapare tous les regards, toutes les préoccupations, toutes les forces vives. La théologie janséniste, vidée de sa substance, est devenue le refuge des plus absurdes hypothèses sur le pouvoir de Dieu, la puissance du démon ou l'intervention du surnaturel. » [7]

Tous les controverses que le jansénisme a suscitées ont aussi apporté de la confusion et donc ont favorisé le doute, la lassitude, et peut-être l’incroyance dans la population. « Plusieurs évêques furent les vrais athlètes de la résistance janséniste. Certains en devinrent les victimes sincères. Mais où la critique se perd, c'est quand elle essaie de démêler l'argumentation touffue de cette phalange de théologiens habiles à justifier leur hostilité aux directives de Rome. Chaque docteur voulut avoir sa part d'originalité dans cette joute théologique. De là naît une horrible confusion d'idées qui rend si difficile l'intelligence de la querelle janséniste au XVIIIe siècle...»[8]


Le jansénisme n’est plus que le reflet d’un christianisme appauvri, qui provoque regret, lassitude, indignation, et colère. Il n’est pas étonnant que l’incrédulité ait autant grandi. « En France, la querelle janséniste avait abouti à des conséquences désastreuses pour l'Église et la société. On a pu dire, qu'en un sens, « elle leur fit plus de mal que le protestantisme, parce que l'erreur janséniste était mieux adaptée au tempérament français du XVIIIe siècle, plus dissimulée et plus habile » [9]. En critiquant avec âpreté les traditions et les personnes de l'Église, les jansénistes avaient ouvert la voie aux railleries et aux négations des encyclopédistes. D'autre part, en soulevant d'interminables disputes, ils avaient détourné de travaux plus sérieux et plus féconds les défenseurs de l'Église »[10].

Conclusions




Sans s’intéresser à la doctrine et à la morale des jansénistes, nous pouvons qu’être surpris de la durée de la querelle et de leurs intrigues. Leur subtilité pour ne pas se soumettre au pape tout en feignant d’y rester fidèles est impressionnante. Tout cela révèle une hypocrisie, pire que la révolte. Mais quel désastre pour l’Église ? Par leurs attitudes et leurs mensonges, ils ont sapé l’autorité ecclésiastique. En s’associant au gallicanisme par opportunisme, ils ont ravivé les prétentions des parlementaires de vouloir régir l’Église gallicane. Quelle aubaine pour les incrédules et les libertins ! Que d’efforts pour de vaines querelles quand l’Église est menacée par des adversaires plus redoutables ! Mais le dommage le plus grave est d’avoir fait intervenir les laïcs dans une affaire doctrinale complexe qu’est celle de la grâce et d’avoir donné à l’opinion publique un rôle dans la quête de vérité et de justice.

Nous pouvons aussi mieux comprendre le développement du richerisme dans le jansénisme. Dans la première génération, les jansénistes accentuent surtout le rôle de l’évêque qui paraît la seule autorité capable de faire face au pape qui les condamne. Dans la seconde génération, au moment où les évêques s’opposent aux jansénistes, l’effort est plutôt porté sur les curés. Même si ces thèses se retrouvent dans les œuvres d’Edmond Richer, elles répondent probablement aux difficultés qu’ils rencontrent. Elles approfondissent clairement l’opposition entre les hauts et bas clergés. Les résistances sont des moteurs d’évolution.

La parlement sous la régence
Heureux de l’opportunité que lui offrent le jansénisme, les parlementaires n’hésitent plus à intervenir dans les affaires de l’Église, considérant qu’elle fait partie de l’État, y compris en matière spirituelle. Il manifeste ainsi la tendance de l’autorité temporelle de vouloir tout régir, y compris la religion. Face à cette puissance qui s’affirme, l’autorité spirituelle finit par lui être soumise si elle ne dispose pas de liberté et d’une puissance au moins égale, mettant alors en danger l’Église elle-même. L’autorité spirituelle a certes besoin d’un soutien en matière temporelle pour résister aux oppositions mais cela ne suffit pas. Elle a besoin d’une autorité spirituelle de dimension universelle. Elle a besoin d’une autorité suprême, incontestable. Les faits historiques nous le démontrent encore. Car face aux difficultés et aux résistances qu’ils rencontrent, que font les évêques et même le roi ? Ils n’hésitent pas à faire intervenir le pape dans leurs affaires. Les faits historiques sont en effet parfois plus convaincants que la doctrine. Ce sont des leçons que Dieu nous donne. Mais faut-il encore les entendre !




Notes et références
[1] Tenir un lit de justice : devant le refus du parlement d’enregistrer ses ordonnances, le roi les fait transcrire, en sa présence, sur les registres du parlement lors d’une séance solennelle.
[2] Arrêt de Louis XIV, dans Histoire abrégée de la paix de l'Église, Denis de Saint-Marthe, Gabriel de Gerberon, 1698.
[3] Voir Émeraude, avril 2019, article « La primauté pontificale selon les "libertés gallicanes" : un retour au temps de l'Église enchaînée ».
[4] J. Dedieu, L’agonie du jansénisme, dans Revue d’Histoire de l’Église de France, avril-juin 1928, tome XIV, n°63.
[5] Miracles sur la tombe d’un janséniste notoire, François de Paris. Convulsionnaire au cimetière de Médard.
[6] J. Dedieu, L’agonie du jansénisme, dans Revue d’Histoire de l’Église de France.
[7] J. Dedieu, L’agonie du jansénisme, dans Revue d’Histoire de l’Église de France.
[8] J. Dedieu, L’agonie du jansénisme, dans Revue d’Histoire de l’Église de France, avril-juin 1928, tome XIV, n°63.
[9] J. Bourlon, Les Assemblées du Clergé et le Jansénisme, in-8°, Paris, 1909.
[10] F. Mourret, Histoire général de l’Église, VII, 1929.

samedi 25 mai 2019

Le jansénisme, un nouvel adversaire du pape et de la monarchie pontificale


Lorsqu’une crise durable touche l’Église et remet en doute bien des certitudes, des réformateurs prônent un retour en arrière et rejettent toutes les évolutions dont elle a fait l’objet. À leurs yeux, tout changement est critiquable. La réforme qu’ils veulent appliquer se résume alors en un assainissement de l’Église par un retour à une situation antérieure considérée meilleure et parfois sans tâche. Le mal qu’ils veulent combattre est en fait l’évolution en elle-même qui ne serait plus que déviation, corruption, dépravation. Le « gallicanisme » sous toutes ses formes en est un parfait exemple.

Qu’il soit ecclésiastique, parlementaire ou politique, le « gallicanisme » s’efforce de vouloir appliquer les « libertés gallicanes », c’est-à-dire d’effacer toutes les mesures mises en place depuis le XIe siècle dans l’Église. En un mot, les gallicans veulent revenir à une situation où le pouvoir spirituel était assujetti au pouvoir temporel, temps où l’Église était sous la tutelle des seigneurs. L’idéalisation du passé cache un dessein politique et de villes ambitions contre lesquels finalement l’Église a combattu…

Le « gallicanisme » n’est pas le seul mouvement qui abuse de l’histoire. À partir du XVIIe et pendant au moins deux longs siècles, un autre mouvement se développe dans le royaume de France, bouleversant la vie politique et religieuse du pays, semant la confusion et divisant les cœurs. Ce mouvement est le jansénisme.
Religieux, philosophique ou politique, le jansénisme provoque en effet dans le royaume de France de vifs débats et d’interminables controverses. Il soulève l’opposition de Rome ainsi que l’hostilité du pouvoir royal. Dans sa rébellion contre le pape et le roi, il est proche du « gallicanisme ».  Il en est peut-être la suite logique. Selon des commentateurs, ces deux mouvements finissent par se rencontrer et s’unir. Pourtant, le jansénisme apparaît d’abord comme un problème purement religieux. C’est en attaquant la doctrine relative à la grâce qu’il a été condamné. Faut-il alors voir dans cette union une opportunité de combat comme nous le voyons souvent ou une véritable affinité de pensée ?

Il serait bien long et prétentieux de décrire cette longue histoire qu’est celle du jansénisme tant elle est riche en événements, en doctrines, en pensées mais aussi en intrigues et en inextricables rebondissements. Il existe tant d’ouvrages et d’études sur ce sujet que ce serait bien vain d’y revenir. Nous risquons aussi de nous éloigner de nos préoccupations. Nous allons donc le circoncire, si cela demeure possible, à notre étude, c’est-à-dire aux questions relevant de la primauté pontificale et des rapports qui existent entre les pouvoirs spirituel et temporel.

Le jansénisme, une volonté de réformer l’Église

Nous avons déjà évoqué indirectement le jansénisme dans le précédent article[1] en mentionnant le livre intitulé Mars Gallus dont l’auteur est l’évêque d’Ypres, Cornélius Jansen, plus connu sous le nom de Jansénius. Le terme de « jansénisme » est en effet tiré du nom de cet homme.

Rappelons que dans Mars Gallus, Jansénius récuse l’idée même de la raison d’État, c’est-à-dire toute excuse justifiant une action politique contraire à la foi et à l’Église. Elle va à l’encontre de la finalité de l’État qui est de sauver les âmes et donc de servir l’Église. Il critique ainsi le roi de France, le roi Très Chrétien, qui n’hésite pas à faire alliance avec des hérétiques contre le roi Très Catholique. Nous pouvons alors comprendre que cet ouvrage n’est guère apprécié par les gallicans. Sa traduction en français par Charles Hersent est en effet condamnée en France car « propre à troubler la paix publique et à révolter les sujets contre leur souverain. »[2] Cet ouvrage nous permet déjà de saisir une des motivations de Jansénius. Il est en effet très épris de l’idée de réformer et de restaurer le christianisme selon la doctrine de Saint Augustin telles qu’il les comprend. Il n’est pas seul dans cette entreprise. Son nom est en effet associé à un autre, encore plus illustre, celui de Jean du Vergier de Hauranne, plus connu sous le nom de Saint-Cyran.

Jansénius et Saint-Cyran sont habités par une ferme volonté de restaurer le christianisme et même de rétablir l’Église puisqu’ils considèrent qu’« il n’y a plus d’Église depuis six cents ans »[3], selon les propos de Saint-Cyran. Ils reconnaissent donc l’échec du concile de Trente dans sa tentative de réforme. Ils sont insatisfaits de ses résultats. Pire encore. Il n’a fait qu’aggraver la situation. Le déclin est dû à des erreurs doctrinales et au laxisme qui défigurent l’Église. Tel est leur constat.

Se sentant alors investis d’une noble mission, Jansénius et Saint-Cyran veulent réformer l’Église sur les plans doctrinal et moral en revenant aux origines du christianisme. Au niveau dogmatique, c’est un retour à l’augustinisme ; au niveau moral, aux mœurs des temps primitifs. Le seul remède réside dans le retour de l’Église originelle, c’est-à-dire dans l’enseignement pur de la doctrine augustinienne et dans le rigorisme des temps primitifs. Le concile de Trente a échoué car il a apporté des nouveautés alors que la solution est de revenir à l’Église originelle.

Tout démarre d’un ouvrage de Jansénius publié à titre posthume en 1640. Il est connu sous le nom d’Augustinus. C’est un ouvrage purement théologique qui traite du rôle de la grâce et du libre-arbitre selon les œuvres de Saint Augustin. Nous sommes donc sur le plan dogmatique. Le second ouvrage de référence du jansénisme, intitulé De la Fréquente Communion, décrit une piété et une morale qui découlent de la doctrine de la grâce telle qu’elle est décrite dans l’Augustinus. Le jansénisme élève le christianisme à une « religion de la rigueur et de l’absolu ». Nous sommes sur le plan moral.

Une nouvelle ecclésiologie

Les deux livres de référence du jansénisme ne semblent guère nous concerner. Les sujets qu’ils évoquent sont bien éloignés de la primauté pontificale ou des relations entre les pouvoirs temporel et spirituel. Mais allons au-delà de ces ouvrages.

Jean du Vergier de Hauranne,
dit Saint-Cyran
En 1626, Saint Cyran publie un livre qui recevra les louanges des gallicans. Il est connu sous le titre de Petri Aurelius. Cet ouvrage intervient dans le cadre d’une controverse qui se déroule en Angleterre. En 1630, le pape envoie Richard Smith en Angleterre avec le titre d’évêque de Chalcédoine. Craignant la restauration de la hiérarchie ecclésiastique dans l’île en leur défaveur, des Jésuites refusent de le reconnaître au point qu’il doit finalement regagner le continent. Dans leurs publications, les jésuites s’opposent aux pouvoirs des évêques et affirment que pour le gouvernement des diocèses, ils peuvent être remplacés par un conseil de religieux. C’est donc une remise en question de l’autorité ecclésiastique. Pour défendre Richard Smith, le recteur du collège des Anglais à Douai écrit à son tour un Traité de la hiérarchie ecclésiastique auquel des Jésuites répondent par deux publications. Saint-Cyran est alors invité à les récuser. Sous le pseudonyme de Petrus Aurelius, il écrit une série de pamphlets qu’il regroupe sous la forme du Petri Aurelius.

Dans ses écrits, Saint Cyran expose les événements d’Angleterre ainsi que les ouvrages qui ont été publiés durant la controverse. Il défend ensuite l’autorité des évêques contre les empiétements des réguliers et réaffirme avec vigueur l’origine divine des évêques. Il s’efforce alors de montrer que l’Église est une société aristocratique et non monarchique, les évêques étant égaux au pape. Nous retrouvons ainsi de manière diffuse certaines idées d’Edmond Richer[4]. Le richerisme s’affirme dans un des disciples de Saint Cyran, Antoine Arnauld, qui deviendra le véritable chef du jansénisme. Il est surnommé le Grand Arnauld.

Antoine Arnauld (1612-1694)  : affirmation de l’autorité épiscopale

Antoine Arnauld est l’auteur du livre De la Fréquente Communion. À partir de la parution de ce livre, il devient un des plus ardents chefs du jansénisme. Promis à une carrière d’avocat, il devient prêtre, docteur en théologie.

Arnauld conçoit l’Église comme une association d’Églises particulières, réglées par la législation conciliaires et les anciennes lois et coutumes et placées sous la direction des évêques. Sa conception est ainsi très centrée sur les évêques, seuls maîtres dans leur diocèse et détenteurs d’une juridiction sans entrave. Leur origine est aussi divine que celle du pape. « Saint Pierre et tous les autres apôtres ont reçu leur mission immédiatement de Jésus-Christ […] Or il n’est pas moins constant, par toute la Tradition, que les évêques sont les successeurs des Apôtres. »[5] Les évêques reçoivent la juridiction de Notre Seigneur Jésus-Christ à partir de la transmission apostolique comme le pape la reçoit de Saint Pierre. Ils ne la reçoivent pas par simple délégation de pouvoirs qu’accorderait le pape.


Pour se justifier, Arnauld rappelle l’origine du christianisme. Comme Jansénius et Saint-Cyran, il est animé d’une forte volonté de retour aux sources et il ne peut éviter une idéalisation du passé. Il se réfère à la simplicité égalitaire des origines et s’oppose au développement de l’Église et à l’affirmation de la primauté pontificale. Ainsi refuse-t-il d’utiliser la formule classique « évêque par la grâce du siège apostolique » mais plutôt « évêque, par la miséricorde de Dieu ». Leur élection ne dépend ni du roi ni du pape mais relève de leur Église.

Certes, les évêques restent soumis au pape mais soumission ne veut pas dire aveuglement. Ils peuvent s’opposer à ses décisions ou au moins les interpréter. « Quand un pape décide un dogme, les évêques peuvent et doivent consulter les lumières de la Parole de Dieu et de la Tradition, pour recevoir sa décision, si elle s’y trouve conforme. » Sans-doute parle-t-il du concile. « Il est quelque fois arrivé que ce qu’a dit un pape n’a point eu d’autorité parce que le plus grand nombre du collège épiscopal a refusé d’y consentir. »[6] L’autorité pontificale est en fait subordonnée au consentement des évêques. Le terme de « consentement » est en fait au cœur du jansénisme. Nous le retrouverons à plusieurs reprises…

Arnauld ne restreint pas le rôle des évêques au pouvoir de législation au sein d’un concile. Chaque évêque dans son diocèse a un rôle de docteur de la foi. « Leur pouvoir n’a point de bornes à cet égard : il en a pour le jugement des personnes mais non pour la foi et la doctrine ; chaque évêque pouvant appuyer la vérité en quelque lieu qu’on l’ait combattue et condamner l’erreur en quelque lieu qu’on l’ait enseignée. »[7] L’une de leurs grandes obligations est alors « de veiller à ce que la doctrine sainte de l’Évangile ne reçoive point d’altération, c’est la même chose de leur défendre de s’écrire les uns aux autres sur ces matières, quand ils ne peuvent pas s’assembler dans les conciles, d’en consulter le Saint-Siège, et de s’unir plusieurs ensembles pour le faire avec plus de poids. »[8] L’exercice de leur autorité ne se limite donc pas aux conciles puisqu’ils « ont reçu également toutes ces sortes de pouvoirs du Saint-Esprit, qui les a établis pour gouverner l’Église de Dieu. »[9]

Antoine Arnauld : rejet de la monarchie pontificale absolue

Le gouvernement de l’Église universelle appartient alors aux évêques réunis en concile qui représente ainsi l’autorité supérieure. Les conciles provinciaux et nationaux disposent aussi de leur propre autorité, qui ne relève ni du pape ni du roi. Naturellement, Arnaud défend aussi les droits des curés. Nous reconnaissons finalement dans ses idées la conception d’Edmond Richer.

Antoine Arnauld se différencie de Richer dans la définition de l’autorité du pape. Dans sa doctrine, il demeure l’évêque universel qui jouit d’une primauté de juridiction de droit divin. Il a la suprême autorité sur les Églises particulières mais non sur l’Église universelle. Inférieur à l’Église, il est comme tout chrétien soumis au concile œcuménique et donc à ses décrets. L’autorité du pape n’est donc pas absolue. Cependant, à force d’exalter la fonction doctrinale de l’évêque et l’origine divine de son état, Arnauld a tendance à considérer le pape comme un égal des évêques.

Soulignons qu’Arnauld distingue le pape et la « cour de Rome ». Il s’oppose à la curie qui ne songe qu’à ses intérêts et non à ceux de l’Église. C’est elle qui défend l’idée d’une monarchie pontificale absolue dans un esprit de dominateur, particulièrement sur l’épiscopat. Arnauld demande alors de résister contre ce projet bien différent de l’esprit qui doit guider le pape. Il le conçoit plutôt comme au-dessus des partis, juge suprême des controverses et défenseur des intérêts de l’Église.  Il s’oppose donc à toute idée d’une monarchie pontificale sans limite ou d’une infaillibilité pontificale, source de nombreuses erreurs.

Antoine Arnauld, un gallican ?


Concernant l’autorité du roi, Antoine Arnauld la considère d’origine divine et donc sans partage. Il approuve aussi l’autorité du parlement en matière de police et de discipline ecclésiastique. Il se pose enfin comme un fervent défenseur des « libertés gallicanes ».

Sa position n’est pas aussi nette. Il loue aussi Saint Ambroise qui a résisté au prince. Le mauvais évêque est pour lui celui dont l’obéissance au prince est poussée jusqu’à la servitude. N’oublions pas que les seuls évêques qui se sont opposés à l’extension du droit de régale[10] sont des évêques jansénistes. Le Mars Gallus exprime aussi les pensées jansénistes. Comme Jansénius, Antoine Arnauld défend l’indépendance absolue du spirituel de l’évêque à l’égard de toute autorité temporelle.

En fait, la position d’Arnaud semble évoluer selon l’attitude du roi et des parlements à l’égard de sa doctrine. Il se plaint de leur ingérence dans les affaires ecclésiastiques et déclarent nulles les décisions parlementaires quand elles s’en prennent au pape mais elles s’opposent aussi à l’enseignement pontifical. En outre, lorsqu’il défend les « libertés gallicanes », il ne les conçoit pas comme Pierre Pithou ou encore les tenants de « gallicanisme » plus anciens. Il met plutôt l’accent sur la notion de « liberté » telle que nous l’entendons aujourd’hui, sur l’idée d’obéissance raisonnable ou encore « éclairée », et sur le droit à exprimer une « parole de liberté ». Nous sommes ainsi bien éloignés du « gallicanisme » tel que nous l’avons rencontré…

Arnauld développe en fait sa doctrine en marchant, selon les situations dans lesquelles il se trouve. Ses démêlées avec le roi et le pape façonnent sa pensée. Néanmoins, comme Jansénius et surtout Saint-Cyran, sa pensée est fortement imprégnée d’une idéalisation de l’Église primitive. Il ne conçoit pas en fait de réformes sérieuses sans un retour aux origines et par conséquent sans remettre en cause le développement de l’Église et donc la primauté pontificale. Sa pensée est-elle alors vraiment un attachement aux idées d’Edmond Richer ? Son rapprochement avec le gallicanisme n’est qu’opportunisme de combat ? Sur ce sujet, son successeur en tant que chef du jansénisme aura une doctrine plus arrêtée et donc plus cohérente…

Pasquier Quesnel (1634-1719), le chef du jansénisme de seconde génération

Docteur en théologie, Pasquier Quesnel entre dans la congrégation française de l’Oratoire en 1657. Très estimé par sa science et sa piété, il est nommé directeur de l’institution oratorienne de Paris. C’est probablement pour l’usage de ses élèves qu’il rédige son Abrégé de la Morale[11], publié en 1671. C’est un immense succès. Une nouvelle édition plus étendue et volumineuse est publiée en 1687, puis surtout en 1693. Elle a aussi changé de titre. Elle est désormais connue sous le nom de Réflexions morales[12]. C’est par cet ouvrage qu’il marque de son empreinte le jansénisme. Quesnel y reproduit les erreurs du jansénisme sur la grâce, que Rome a déjà condamnées. Ses Réflexions morales finissent par être dénoncées au Saint-Office. Pour plus de sécurité, il rejoint alors Antoine Arnauld à Bruxelles. En 1708, le pape Clément XI condamne l’ouvrage.

Les Réflexions morales ne sont pas les seuls ouvrages de Quesnel. En 1675 puis en 1709, il publie également une nouvelle édition des œuvres de Saint Léon le Grand avec des dissertations et des notes. Dans ces annotations, il s’attaque en fait aux prérogatives pontificales. Elles sont à leur tour condamnées.

Après la publication de ses Réflexions morales, Pasquier Quesnel est considéré comme le nouveau chef du jansénisme après la mort d’Antoine Arnauld en 1694, un jansénisme qui a bien évolué. Il reprend et continue les doctrines gallicanes d’Edmond Richer.

Quesnel, un véritable richériste

La bulle Unigenitus condamne les Réflexions morales, notamment la proposition suivante : « l’Église a l’autorité d’excommunier, pour l’exercer par les premiers pasteurs du consentement au moins présumé de tout le corps. »[13] Selon Quesnel, le pouvoir de lier et de délier a été accordé à toute l’Église et non aux seuls apôtres. Ces derniers ne peuvent lier un membre sans le consentement au moins présumé du corps de l’Église. Cela revient à dire que l’autorité pour gouverner l’Église réside immédiatement dans ce même corps. Or, l’usage des clefs ne peut être donné de manière concrète au corps tout entier. Il ne peut en effet exercer par lui-même cette autorité. Ainsi il est nécessaire que l’Église « commette des ministres pour les exercer. »[14] Le pape et les évêques ne sont donc que des ministres qui reçoivent de l’Église les pouvoirs qu’ils doivent exercer. Agissant en son nom, ils ne sont que ses instruments, ses mandataires.

En outre, le pape est « comme chef ministériel de tout le collège épiscopal »[15]. Veut-il signifier par là qu’il est aussi mandaté par l’ensemble des évêques ? Néanmoins, le pape a « autorité et juridiction sur chacun de tous les évêques du monde chrétien, pour veiller à la conservation de la discipline générale. » [16] Il est ainsi « chef général de toutes les chefs particuliers des Églises. » [17] Son rôle est donc limité à cette mission.

Toutes les décisions que les papes prennent en matière de foi et de discipline ne sont alors valides que si elles sont consenties par le corps entier de l’Église, ou du moins qu’autant qu’il y consent librement ou est présumé y consentir de cette manière.

Mais qu’est-ce ce corps ? Ou encore qui appartient au corps de l’Église selon les jansénistes ? Tous ceux qui ne sont ni pécheurs ni opposés à l’enseignement de l’Église. Il est évident que les jansénistes appartiennent à l’Église contrairement à tous ceux qui les combattent. Cela revient en fait à remettre en question les censures pontificales à l’égard des jansénistes. Si le pape est pécheur, il n’appartient plus au corps, par conséquent, ses décisions sont nulles et sans valeur. De ce principe découle notamment le droit des fidèles de juger de la foi et de la légitimité des autorités.

Le développement du richerisme dans le jansénisme

D’autres jansénistes défendent les idées chères à Edmond Richer mais au profit du clergé du second ordre, c’est-à-dire essentiellement les curés.

En 1676, l’abbé Jacques Boileau exalte les droits du clergé paroissial. Dans son livre intitulé De antiquo jure Presbyterium in regimine ecclesiastico, il établit que du temps de l’Église primitive, les prêtres avaient part au gouvernement aussi bien que les évêques. Il prône donc un partage dans le gouvernement de l’Église.



Dans le livre intitulé Du témoignage de la vérité dans l’Église[18], Vivien de la Borde (1680-1748) ne considère les évêques que comme des délégués et des interprètes de l’Église particulière qu’il préside et dont il est l’envoyé. Il enseigne que les définitions portées en matière de foi dans les conciles généraux ne sont valides qu’autant elles sont approuvées par le peuple. « Personne ne doute qu’un jugement dogmatique, où l’autorité du Saint Siège se trouve accompagnée de l’acquiescement des Églises, ne soit un jugement irrévocable et final »[19], précisant que cet acquiescement doit être libre, c’est-à-dire réel. Cela est aussi vrai pour les décisions épiscopales. « Les jugements des évêques sont essentiellement dépendants de l’aveu du corps des fidèles.»[20] Il conteste que le témoignage extérieur rendu par le plus grand nombre des pasteurs soit un critère de vérité. Il n’est pas essentiellement et sans distinction la voix de vérité. Pourtant, par elle-même, cette voix fait autorité. Elle peut donc être détenue par un petit nombre si elle demeure reconnue fidèle à Notre Seigneur Jésus-Christ. Et ce petit nombre constitue le corps de l’Église. L’autorité ne réside donc pas dans son détenteur mais dans le contenu de son enseignement. C’est donc en jugeant son enseignement qu’il est possible de vérifier s’il est valide ou non…

Mais Vivien de la Borde va encore plus loin que ses prédécesseurs. Il compare en effet l’Église à la Nation, la foi à « une espèce de droit public dont toute la nation est dépositaire »[21]. Ce n’est pas le grand nombre qui fait force de loi dans un État mais la notoriété publique. Nous en arrivons donc vite à l’idée de démocratie et à un rejet de la monarchie.

Dans le livre Du renversement des libertés de l’Église gallicane, paru en 1716, le chanoine Nicolas le Gros, autre janséniste célèbre, défend aussi les droits du clergé du second ordre. Fidèle à l’enseignement de Quesnel, il considère que l’Église détient en elle-même l’autorité suprême, et non le pape, l’Église d’hier comme celle d’aujourd’hui. Par conséquent, l’obéissance se fonde sur la fidélité à son enseignement. Un pape ou un évêque sont obéis si eux-mêmes lui obéissent. C’est encore l’idée selon laquelle le contenu de l’enseignement détermine la légitimité de l’autorité et non la personne en elle-même. Les décisions d’un concile n’ont pas plus d’autorité que celles d’un pape ou d’un évêque. Il n’existe pas d’absolutisme dans l’Église. Pour limiter l’arbitraire, aucun évêque ne peut gouverner sans les prêtres. Ceux-ci ne font pas qu’exécuter les ordres des évêques même si ces derniers remplissent un ministère supérieur. Le prêtre a une autorité qui lui est propre. Il exerce à leur niveau une juridiction. Ainsi, selon Nicolas le Gros, l’Église est une sorte d’aristocratie modérée, dont l’unique chef est Notre Seigneur Jésus-Christ.

Le canoniste et abbé Nicolas Travers, « le plus audacieux des disciples de Richer »[22], réclame plus de pouvoirs pour le clergé du second ordre, notamment une voix consultative et délibérative dans les décrets disciplinaires et doctrinaux. Il récuse aussi toute efficacité aux évêques en matière de foi sans le suffrage des curés et des prêtres. Il prétend démontrer « l’institution divine et le rôle considérable du second ordre dans l’Église de Dieu. » puisque « le pouvoir des chefs est radicalement du côté de Dieu, aussi grand dans le simple prêtre que dans l’évêque. »[23] Dans sa paroisse, le prêtre a même juridiction que l’évêque dans son diocèse. Des abus ont transformé la prééminence de l’évêque en un empire sans contrôle…

Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, les idées se radicalisent encore et se diffusent. En 1776, un docteur en théologie, Bernard Dubroca, refuse la nomination d’un professeur de la part d’un évêque justifiant que « l’approbation des maîtres d’écoles dans les paroisses appartient principalement aux curés qui ont dans les paroisses le même pouvoir que les évêques dans les diocèses, ayant le même pouvoir et la même charge sur le troupeau qui leur est soumis, et Messieurs les évêques n’ont tout au plus que le droit de réformation et d’examen en cours de visite sur ce point. »[24] Bientôt, viendra l’heure où la pensée deviendra action…

Conclusions

Le jansénisme est avant tout un mouvement de réforme qui tente par l’enseignement de l’augustinisme et par un rigorisme moral à combattre les maux qui affligent l’Église. Il justifie sa position en faisant référence au passé, seul gage de véracité à leurs yeux. Mais erronée et dangereuse, sa doctrine est censurée.

Pour se défendre contre les censures et les condamnations pontificales, les jansénistes accentuent le rôle et l’autonomie des évêques à l’égard du pape, remettant ainsi en question la monarchie pontificale. Ils acquièrent ainsi le soutien des gallicans, qui voient alors dans leurs écrits un puissant recours contre Rome.
Cependant, les évêques s’opposent à eux et combattent leurs doctrines et leurs influences. Emportés par la logique de leurs idées ou par ce combat, les  jansénistes s’approprient encore davantage de la pensée d’Edmond Richer et accentuent désormais le rôle du clergé du second ordre, c’est-à-dire les curés. Ainsi, progressivement, le jansénisme remet en question la forme de gouvernement de l’Église, réclamant d’abord une « aristocratie modérée » puis une démocratisation dans l’Église.

Néanmoins, ne voyons pas dans cette évolution uniquement une réaction de défense contre les condamnations. Dès le début, les jansénistes se considèrent investis d’une mission. Rien ne peut donc les détourner de leur voie. Ils ne doutent pas d’être dans la vérité. Ne prétendent-ils pas enseigner que les pécheurs et les hommes infidèles à l’enseignement de l’Église n’appartiennent pas à son corps ? Mais comment peuvent-ils se justifier sans remettre en cause l’autorité de ceux qui la détiennent et qui les condamnent ? Ainsi leur défense repose sur l’idée de l’acquiescement du corps de l’Église comme seul critère de véracité. Ce n’est plus son origine ni la personne elle-même qui définissent l’autorité mais le contenu de son enseignement et de ses décisions. Cela signifie que l’acquiescement ou le jugement fondent l’autorité. Mais à partir de quels critères ? Sur l’histoire ou plutôt sur une perception de l’histoire ? Mais si cette perception est erronée ? Qui peut la légitimer ? Sur l’acquiescement général ou dirons-nous aujourd’hui sur l’opinion publique... Ce n’est donc pas un hasard si l’enseignement, c’est-à-dire les écoles, demeure au centre des combats du XVIIIe siècle. Car qui façonne les esprits et les mentalités ? Qui forme l’acquiescement général ?…

Le jansénisme ne remet pas simplement en question le gouvernement de l’Église. Elle remet en cause la notion d’autorité donc aussi celle de l’État et plus précisément la monarchie absolue. Les parlementaires, plus ou moins jansénistes et gallicans, en sont bien conscients. L’Église fortement insérée dans l’État depuis au moins le XVIe siècle ne sortira pas indemne de leur prochaine révolte. Qui peut encore prétendre qu’une doctrine religieuse, tel le jansénisme, n’ait aucun impact sur le gouvernement des hommes et sur le destin d’une nation ?...



Notes et références
[1] Voir Émeraude, mai 2019, article « Le gallicanisme : raison d'État vs raisons de Dieu ».
[2] Dans Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes ou Mémoires pour servir à l’histoire des égarements de l’esprit humain par rapport à la religion chrétienne, François Pluquet, article Hersan, Ateliers Catholiques, 1847.
[3] Voir Les Jansénistes du XVIIe siècle : Leur histoire et leur dernier historien, M. Sainte-Beuve, Frédéric Fuzet, collection XIX, 2016.
[4] Voir Émeraude, avril 2019, article « Le richerisme, une forme du gallicanisme : une nouvelle conception de l’Église ».
[5] Antoine Arnauld, Jugement équitable sur la censure faite par une partie de la faculté étroite de théologie de Louvain, 1685, dans Œuvres de messire Antoine Arnauld, tome XI dans L’évêque selon Port Royal, René Taveneaux, www.amisdeportroyal.org.
[6] Antoine Arnauld, Projet d’une lettre pastorale de Monseigneur Nicolas Pavillon dans Œuvres de messire Antoine Arnauld, tome XXXVII dans L’évêque selon Port Royal, René Taveneaux, www.amisdeportroyal.org.
[7] Antoine Arnauld, Défense de la lettre circulaire des quatre Évêques dans Œuvres de messire Antoine Arnauld, tome XXIV.
[8] Antoine Arnauld, Lettre au roi, 1677, dans Œuvres de messire Antoine Arnauld, tome II.
[9] Antoine Arnauld, Lettre au roi, 1677, dans Œuvres de messire Antoine Arnauld, tome II.
[10] Voir Émeraude, mai 2019, article « XVIIe-XVIIIe siècle : l'Église face à la volonté hégémonique de la puissance temporelle ».
[11] Le titre complet est de l’Évangile ou Pensées chrétiennes sur le texte des quatre Évangiles pour en rendre la méditation plus facile à ceux qui commencent à s’y appliquer.
[12] Le titre complet est Le Nouveau Testament en français ou Réflexions morales sur chaque verset.
[13] Clément XI, 90e proposition condamnée, Constitution Unigenitus Dei Filius, 8 septembre 1713, dans Denzinger 2490.
[14] Bossuet, Justification des Réflexions morales, c. 24 et 25, édition de Liège, 1768, Encyclopédie théologique ou Série de dictionnaires sur toutes les parties de la science religieuse, J.-P. Migne, article Quesnel.
[15] Bossuet, Justification des Réflexions morales, c. 24 et 25.
[16] Bossuet, Justification des Réflexions morales, c. 24 et 25.
[17] Bossuet, Justification des Réflexions morales, c. 24 et 25.
[18] Le titre complet est Du témoignage de la vérité dans l’Église. Dissertation théologique, où l’on examine, quel est ce témoignage, tant en général qu’en particulier, au regard de la dernière Constitution. Pour servir de précaution aux fidèles et d’apologie à l’Église catholique contre les reproches des protestants.
[19] Vivien de la Borde, Du témoignage de la vérité, 1714, Avertissement.
[20] Vivien de la Borde, Du témoignage de la vérité, 1714, intitulé du chap. XXIX.
[21] Vivien de la Borde, Du témoignage de la vérité, chap. XXVI.
[22] Préclin, dans Le Mouvement janséniste au diocèse de Rennes (suite et fin), Abbé Raison, Annales de Bretagne, tome 52, n°1, 1945.
[23] Travers, Consultation sur la juridiction et approbation nécessaire pour confesser, défendue par l’Auteur contre le Mandement de M. l’Archevêque de Sens, 1er mai 1735.
[24] Bernard Dubroca, dans archives nationales, G8 639, chemise 36 dans Le désarroi janséniste pendant la période du quesnelliste, Joseph Dedieu, Revue d’histoire de l’Église de France, année 1934, 88, www.persee.fr.