" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


mercredi 30 décembre 2015

Relativité et relativisme

La théorie de la relativité, qu’elle soit restreinte ou générale, illustre bien la nature de la science moderne et les dangers des interprétations de ses résultats, y compris pour notre foi et plus globalement pour l'accès à la vérité. On l'utilise souvent pour justifier des philosophies et des idéologies, parfois opposées. Mais au-delà d’une manipulation erronée caractéristique, elle révèle aussi la difficulté de son enseignement et de sa présentation.

La théorie de la relativité en faveur du relativisme ?

Selon une certaine opinion, la théorie de la relativité serait une preuve de la relativité des choses, c’est-à-dire un argument puissant en faveur du relativisme. Il n’existerait aucune vérité absolue, aucune connaissance absolue. Tout dépendrait d’un point de vue.

En reliant l’espace au temps, Einstein a tué Newton. L’idée d’un temps absolu sur laquelle repose la physique classique n’a pas résisté aux nouvelles théories. Pourtant, la physique de Newton ne s’est pas effondrée. Tout en étant fausse en soi, elle est encore enseignée et généralement appliquée. La science a en fait délimité le périmètre de validité de la théorie de Newton. La « vérité scientifique » connaît donc des limites selon le phénomène que le scientifique étudie. Elle est donc relative à l’objet de son étude.

En outre, dans les théories de la relativité restreinte et générale, tout est relatif au sens où tout se rapporte à un référentiel. Emportés par une certaine ivresse des mots, de beaux penseurs affirment alors que la vérité est relative à l’observateur, c’est-à-dire à l’homme. Les choses changent selon notre regard. Ainsi l’absolu n’existerait pas. Les vérités éternelles ne seraient que pures inventions comme l’idée d’un temps absolu. Les sceptiques et les matérialistes peuvent alors chanter victoire.

La théorie de la relativité en faveur de la primauté de la pensée pure dans la connaissance du vrai ?

Quelle que soit notre compréhension de la théorie de la relativité, les découvertes d’Einstein demeurent fabuleuses. Il est en effet surprenant qu’il a pu développer une telle théorie essentiellement au moyen d’expériences virtuelles. Les résultats expérimentaux viendront les valider a posteriori, parfois plusieurs années après leur présentation. La théorie de la relativité s’est en effet construite à partir de principes et d’un développement logique. Tout semble finalement provenir de sa pensée. Elle est souvent présentée comme une victoire de la pensée pure. En un mot, la science dite pure s’est montrée supérieure à la science expérimentale.

Plus tard, on verra en elles le produit d’une mathématique conceptuelle élevée, inaccessible aux communs des mortels. Comme l’a compris un biographe et ami d’Einstein, la théorie de relativité est formulée dans un certain langage particulier, un « langage logico-empirique »[1], c’est-à-dire dans un système de formules mathématiques avec des opérateurs qui peuvent être empiriquement mesurés. À un certain niveau, elle n’est compréhensible qu’au travers de concepts et d’un univers mathématiques très sophistiqués. Nous naviguons dans un monde de pensée loin de toute vision mécaniste en rapport avec notre expérience quotidienne. Les mathématiques sont ainsi seules capables d’atteindre une connaissance élevée du monde.

Cependant, lorsque nous réfléchissons à ces théories, nous arrivons vite à des résultats en apparence contradictoires, voire absurdes. Aux yeux de tout homme sensé, la dilatation du temps apparaît comme une aberration. « Si la Relativité pouvait avoir un sens pour les mathématiciens, elle contenait en revanche diverses absurdités pour ceux qui pensaient plus philosophiquement. »[2] Les notions simples comme le temps, l’espace, le mouvement perdent leur sens commun, ce qui peut nous désorienter et nous plonger dans la perplexité.

Pourtant, en dépit de ces absurdités, la théorie de la relativité est validée par l’expérience et utilisées de nos jours. Les succès qu’elle a emportés semblent donc confirmer la supériorité de la logique et des mathématiques purs contre le bon sens et la philosophie. Pourtant, la théorie n’a pas cessé d’interroger les philosophes.

La théorie de la relativité en faveur de l’idéalisme ?

Einstein n’utilise aucune analogie mécanique pour faire comprendre sa théorie. Il ne donne aucune description mécanique dans la contraction des longueurs ou la dilatation du temps. Ses théories ne peuvent que plaire à tous les courants de pensée qui s’opposent à la conception mécaniste du monde et au matérialisme.

La théorie de la relativité apparaît alors comme la victoire d’un certain idéalisme. Comme l’explique Einstein, notre connaissance du monde demeure fortement dépendante des concepts que nous développons. Et comme semble le montrer sa physique, les concepts peuvent ne pas s’appuyer sur le monde de l’observation. Pire encore. L’observation est elle-même source d’erreurs. En se détachant du sens commun, Einstein a fait avancer la connaissance de l’univers. Les idées seraient-elles donc sources de progrès ? Est-ce finalement une victoire de l’idéalisme ?

Réalisme ou subjectivisme ?

Selon une thèse récente, l’interprétation de la théorie de relativité se partage entre deux courants de pensée. Le premier courant est constitué par le positivisme logique que représente le Cercle de Vienne. Il voit dans la théorie le moyen d’approfondir davantage la connaissance des phénomènes, épurée d’anthropomorphisme et de métaphysique. La réalité serait ainsi saisie de manière plus objective, indépendante de notre conception du monde. Ce serait donc une théorie du réel extrêmement forte.

Le deuxième courant se réclame de la tradition kantiste de l’idéalisme critique. La relativité supprimerait toute objectivité. Il serait impossible de tirer de la connaissance des phénomènes à partir de leur expérience. L’empirisme serait voué à l’échec. Pourtant, nous pouvons constater l’incompatibilité radicale entre la relativité et le kantisme puisque l’un considère le temps relatif, différent selon le référentiel, alors que l’autre impose un temps absolu comme le suggérait Newton.

Impact dans le domaine religieux

Enfin, la théorie de la relativité n’a pas épargné le champ religieux. En remettant en question le sens commun, elle peut ébranler nos certitudes et modifier notre regard sur le monde et sur nous-mêmes. Par conséquent, elle peut remettre en cause nos convictions religieuses.

Est-elle alors facteur d’incrédulité ou porteur d’espoir ? Les avis divergent. Certains hommes religieux s’opposent aux théories d’Einstein car « elles étaient purement matérialistes »[3] quand d’autres ne les approuvent pas parce qu’elles sont fondées sur « l’idéalisme subjectif »[4]. Cependant, des philosophes louent la théorie de la relativité car elle ramène, selon eux, l’esprit dans la nature. « L’adoption du principe de relativité signifie que le facteur subjectif, - inséparable de la connaissance dans la véritable conception de celle-ci - doit entrer positivement à l’intérieur de la science physique. »[5] Il n’y aurait plus, selon le même auteur, de dispute pour savoir de l’esprit et de la science laquelle a la primauté sur l’autre. Certains théologiens feront même une analogie des différences entre la conception classique de l’espace et l’espace-temps avec les différences entre la vie mortelle et la vie éternelle. D’une même théorie peut-il résulter tant d’opinions contraires ?

La théorie de la relativité, objet de débats philosophiques

Finalement, les théories de la relativité ont conduit à de nombreux débats et interprétations philosophiques, politiques et religieux. Cela ne nous surprend guère. Toute nouvelle théorie, comme celle de la physique quantique, interroge les esprits, surtout lorsqu’elle remet en cause la conception classique du monde. Les uns s’en emparent pour appuyer leur philosophie quand d’autres la rejettent lorsqu’elle s’oppose à la leur.

Dans le cas des théories d’Einstein, les avis les plus contradictoires divergent. Ainsi on y voit comme une preuve de l’idéalisme contre le matérialisme, une confirmation de la dialectique matérialiste, un facteur d’incrédulité contre la religion traditionnelle ou un espoir de spiritualité. « Comme il n’est pas inhabituel lorsqu’apparaît une nouvelle théorie scientifique, le travail d’Einstein a souffert, de la part de chaque philosophe, de la tendance à l’interpréter en conformité avec son propre système métaphysique et à suggérer qu’il en résulte une grande reconnaissance de solidité pour les vues que ce philosophe soutenait auparavant. Ce ne peut être vrai dans tous les cas, et on peut espérer que ce n’est vrai dans aucun cas. Ce serait désespérant si un changement aussi fondamental que celui introduit par Einstein n’impliquait aucune nouveauté philosophique. »[6]

Les limites de notre compréhension ?

Selon Philippe Franck, la raison de ces interprétations divergentes proviendrait non du contenu de la théorie mais du langage dans laquelle la théorie est formulée, ses images et ses analogies. Elle ne réside donc pas dans la théorie elle-même mais dans sa présentation. On porterait essentiellement notre regard vers les mots et les images que les scientifiques utilisent pour faire comprendre une théorie bien difficile à saisir autrement. Le fait d’employer souvent l’expression « relatif à des objets » ferait par exemple croire que tout est relatif aux phénomènes. Les expériences virtuelles sont nécessaires pour saisir les difficultés de la physique classique, ce qui pourrait justifier l’idéalisme. Finalement, ce ne sont pas les théories d’Einstein qui seraient la source des divergences philosophiques que nous avons constatées mais la façon dont elles sont enseignées et interprétées.


Ainsi, selon Philippe Frank, les conclusions philosophiques sont erronées, absurdes, insensées car elles sont étrangères aux théories de la relativité. Il accuse en fait la philosophie elle-même d’en être responsable par son impuissance à les comprendre. C’est donc en s’éloignant de la philosophie que nous pourrions la comprendre et finalement accéder à la connaissance de l’Univers. La science serait donc le seul mode de connaissance véritable !

Laissons parler Einstein !

Mais que pense Einstein de ses découvertes ? Dans un de ses ouvrages, intitulé L’évolution des idées en physique, écrit en collaboration avec un autre scientifiquen, Infeld, il décrit l’histoire de la physique depuis Newton jusqu’aux théories modernes. Dans ce livre, « nous nous sommes efforcés de mettre en évidence les forces actives qui obligent la science à inventer des idées qui correspondent à la réalité de notre monde. »[7] Les auteurs tentent donc de montrer les moteurs de la connaissance scientifique. La principale source de développement serait la volonté de coller au mieux à la réalité, c’est-à-dire de « trouver la connexion entre le monde des idées et le monde des phénomènes ». Le monde réel demeure bien le fondement de la science. Une théorie perd sa justification lorsqu’elle s’éloigne du monde des phénomènes. C’est pourquoi Einstein a toujours manifesté une certaine désapprobation à l’égard de la physique quantique qui lui semblait contraire à ses convictions.

Une science capable d’objectivité et de réalisme

Nous connaissons tous l’expression d’Einstein : « Dieu ne joue pas aux dés ». Elle aurait été exprimée lors d’une conférence scientifique au cours de laquelle Einstein s’oppose à une théorie de la physique quantique, selon laquelle il serait impossible à la science de décrire la position d’une particule et donc de prédire de manière certaine les futurs événements. Einstein croit en effet fortement que les lois physiques décrivent la réalité dans l’espace et le temps et qu'elles sont indépendantes de nous. Il est donc fortement objectif. La réalité ne dépend pas de nous, ne cessera-t-il de répéter. « [...] la théorie de la relativité, si souvent mal comprise, non seulement n'a pas supprimé l'absolu, mais encore elle a fait ressortir mieux que jamais combien la physique est liée à un monde extérieur absolu »[8].

Cependant, la théorie de la relativité semble montrer que le monde dépend du référentiel employé, c’est-à-dire du point de vue selon lequel nous l’observons. C’est en fait mal connaître la théorie de la relativité. La question ne porte pas sur la réalité mais sur sa connaissance. « Le problème fondamental de la pensée philosophique d'Einstein, autour duquel s'organisent ses propres analyses, est celui de la réalité du monde et de son intelligibilité, c'est-à-dire de la capacité de la pensée à le pénétrer, à s'en donner une représentation " vraie " (quoique provisoire), qui ne soit pas illusoire ou précaire. »[9] La théorie de la relativité oppose ainsi les tenants de l'essentialisme, où le monde est un et sa saisie une également, et le relativisme, où l’unicité du monde est plus que douteuse et sa connaissance nécessairement singulière.

La description d’une réalité indépendante de l’observateur

Revenons à la théorie de la relativité restreinte. Elle se fonde sur deux principes absolus. Selon le premier principe, les lois de la nature, que doivent décrivent les formules scientifiques, ne dépendent pas du référentiel dans lequel elles sont exprimées. Cela signifie qu’elles ne dépendent pas de l’observateur. Selon le second principe, la vitesse de la lumière est invariante. Elle est aussi indépendante du référentiel et donc de l’observateur. Le scientifique doit donc traduire la réalité indépendamment du point de vue de l’observateur.

La théorie d’Einstein est en fait très mal nommée comme le remarquent de nombreux commentateurs. Le problème de l’interprétation de sa théorie est donc lié au langage qui porte à confusion. « L’on peut même trouver qu’à ce point de vue le nom sous lequel la théorie est connue n’est pas très heureusement choisi. En effet, comme nous l’avons dit au début de ce chapitre, ce nom est susceptible de faire naître la croyance que, dans la nouvelle conception, l’existence du réel serait elle-même conçue comme étant relative à autre chose et notamment, bien entendu, à la conscience. »[10]

Description de la perception de la réalité et non la description de la réalité

Pourtant, n’avons-nous pas parlé de dilatation du temps et de contraction des longueurs ? Conclusions révoltantes pour un esprit sensé ! En fait, ces termes ne désignent pas des phénomènes ou dit autrement, ils ne sont pas réels. Ils correspondent à notre perception de la réalité, perception qui elle dépend évidement de l’observateur. Deux hommes, l’un sur le quai d’une gare ou l’autre assis dans un train à vive allure, n’ont pas la même perception de la réalité. La science doit donc être capable de décrire ces deux perceptions, c’est-à-dire la réalité telle qu’elle est perçue par les deux observateurs. Les théories de la relativité décrivent finalement les liens entre des descriptions multiples d’une seule et même réalité. Nous revenons en fait à l’objectif de la science, qui n’est pas d’atteindre ou de formuler la vérité mais de décrire ce que nous percevons, directement ou au moyen d’instruments, de la réalité. Newton est un pythagoricien qui croyait que par les mathématiques nous pouvions connaître et faire connaître la vérité. Einstein a montré que ses concepts ne peuvent décrire toute la réalité.

Mais Einstein semble souligner le rôle essentiel de l’observateur dans la connaissance de la vérité. La théorie semble alors appuyer le subjectivisme. Or comme le remarque Russel, l’observateur dans les expériences de pensée d’Einstein n’est pas nécessairement un homme. Il peut être constitué d’instruments de mesure. Einstein cherche par ailleurs à définir des points de mesure au-delà des concepts. « L’hypothèse qui fonde la relativité est réaliste, c’est-à-dire que les points sur lesquels tous les observateurs sont d’accord quand ils enregistrent un phénomène donné, peuvent être regardés comme objectifs, et non comme une contribution des observateurs. »[11]

La science selon Einstein

« La science n’est pas une collection de lois, un catalogue de faits non reliés entre eux. Elle est une création de l’esprit humain au moyen d’idées et de concepts librement inventés. Les théories physiques essaient de former une image de la réalité et de la rattacher au vaste monde des impressions sensibles. Ainsi, nos constructions mentales se justifient seulement si, et de quelle façon, nos théories forment un tel lien. »[12] Les théories scientifiques doivent donc relier une vision de la réalité, exprimée sous forme de pensées, avec sa perception. Qu’importe donc les concepts s’ils sont compatibles avec nos impressions. Nous en déduisons donc qu’une théorie est valide si elle est efficace. Sa force ne réside pas dans sa véracité.

Einstein prône donc la libre création dans les sciences. Le moteur de la science réside dans cette capacité créatrice. C’est en créant et développant des concepts et des idées que la science progresse. La création du concept « temps », « masse », « champ » a conduit à avancer dans la voie de la connaissance du monde. Cependant, cette créativité n’est pas tirée du néant. Einstein a établi ces deux principes à partir des résultats d’expériences. Les contradictions auxquelles aboutissait la théorie de Newton confrontée aux nouvelles découvertes scientifiques ont conduit Einstein à développer ses idées. Einstein attendait aussi que des expériences valident ces théories. Ainsi, si elle résulte de la créativité du scientifique, une loi est fortement liée à l’observation et à l’expérience. Nous sommes loin de l’idée que la pensée pure est capable par elle-même d’élaborer une théorie efficace.

A la base de la théorie, une conception du monde

Une théorie est surtout fondée sur une foi en une conception du monde. Le scientifique élabore des concepts qui résultent d’une certaine vision. Elle est alors valide tant que cette foi subsiste. « Pour le physicien du commencement du XIXe siècle, la réalité de notre monde extérieur était constituée par des particules et des forces simples agissant entre elles et dépendant seulement de la distance. Il s’efforçait de garder aussi longtemps que possible la foi qu’il réussira à expliquer tous les événements de la nature par ces concepts fondamentaux de la réalité. » [13] Lorsqu’ils rencontrent des difficultés ou que les lois buttent sur des obstacles, les scientifiques ont tendance à la complexifier de façon à sauver les concepts sur lesquels elles s’appuient, c’est-à-dire à sauver sa foi, jusqu’au jour où une « imagination scientifique hardie » finit par découvrir d’autres idées plus performantes et par ébranler les convictions. Nous voyons ainsi l’interdépendance entre les théories et les expériences. Nous sommes loin d’un monde scientifique perdu dans un univers de pensées déconnectées du monde réel.

Encore un problème de présentation, d’explication ?

Cependant, certaines expressions d’Einstein[14] nous semblent bien maladroites. Ainsi de manière réaliste, il définit que le but de la science est de décrire la réalité en la reliant avec la réalité sensible. De manière positiviste, il voit la science comme capable de décrire avec certitude les phénomènes. Puis de manière idéaliste, il nous présente « la réalité créée par la physique moderne » comme éloignée de « la réalité du début de la science ». Il ne parle pas en fait de la réalité en soi mais de l’image de la réalité. La science décrit la réalité. Elle ne la crée pas. Voyons un autre exemple. L’expression « relativité des objets », expression courante dans la théorie, est en fait la relativité de notre perception des objets ou de leurs descriptions. Néanmoins, Einstein aurait nettement affirmé la réalité de la dilatation du temps et de la contraction des longueurs, ce qui a soulevé une vive réticence de la part de certains scientifiques, considérant cette position comme incompatible aux concepts de la relativité.

Observer et créer pour comprendre un monde harmonieux indépendant de nous

Dans la conclusion de son ouvrage, Einstein donne sa vision de la science. « A l’aide des théories physiques nous cherchons à trouver notre chemin à travers le labyrinthe des faits observés, d’ordonner et de comprendre le monde de nos impressions sensibles. Nous désirons que les faits observés suivent logiquement de notre concept de la réalité. Sans la croyance qu’il est possible de saisir la réalité avec nos constructions théoriques, sans la croyance en l’harmonie interne de notre monde, il ne pourrait y avoir de science. Cette croyance est et restera toujours le motif fondamental de toute création scientifique. A travers tous nos efforts, dans chaque lutte dramatique entre les conceptions anciennes et les conceptions nouvelles, nous reconnaissons l’éternelle aspiration à comprendre, la croyance toujours ferme en l’harmonie de notre monde, continuellement raffermie par les obstacles qui s’opposent à notre compréhension.»[15]

Einstein est bien loin de tout idéalisme. Il reconnaît en l’homme la capacité créative de créer des lois à partir de l’observation pour mieux comprendre des faits bien réels, indépendants de nous. Cette capacité s’appuie sur la croyance en « l’harmonie interne de notre monde », c’est-à-dire sur l’ordre qui règne dans la nature. La science a alors pour objectif de décrire cet ordre à partir de concepts qui peuvent évoluer. Il était ainsi convaincu que l’homme pouvait définir une seule loi générale capable de contenir toutes les autres lois scientifiques. Einstein est bien un positiviste.

Enfin, comme le suggère Einstein, une loi dépend d’une vision de la nature. Elle est définie de manière à suivre logiquement « notre concept de la réalité ». Nous l’avons vu dans le cadre de la mécanique classique de Newton, même si nous oublions son fondement philosophique. C’est en remettant en cause ce fondement qu’Einstein a fondé une nouvelle physique. Contrairement à ce qu’affirme Philipe Franck, accusant la philosophie d’être responsable des erreurs d’interprétation de la théorie de la relativité, la philosophie est le fondement même d’une théorie. Sans « croyance », il n’y pas de science. Or qu’est-ce que cette croyance ?

Incompatibilité de conception de la réalité

D’où viennent alors les erreurs d’interprétation ? Philippe Franck le dit lui-même : de la forme dans lesquelles est décrite et enseignée la théorie. Compte tenu de sa complexité, nous préférons parfois nous contenter de la théorie telle qu’elle est vulgarisée ou connue. Nous cherchons alors à la comprendre en nous raccrochant à des mots simples, à des images et à des modèles accessibles. Or ces mots, ces images, ces modèles nous renvoient à une vision du monde. Le propre du vulgarisateur est même de rendre une théorie compréhensible selon la vision commune, c’est-à-dire de l’adapter afin qu’elle s’y insère. Une interprétation scientifique peut donc s’égarer quand cette vision ne correspond pas à celle de la théorie. Le manque de précision des termes employés par l’auteur lui-même ou par les intermédiaires (traducteur, enseignant, journaliste, vulgarisateur) peut favoriser ces erreurs et les encourager.


Enfin, il ne faut pas non plus négliger la personnalité d’Einstein. Ses idées ne sont pas très claires. Parfois, elles se contredisent. Il prône ainsi la liberté créatrice du scientifique tout en dénonçant celle des novateurs de la physique quantique quand ces derniers viennent contredire sa conception de la science ou du monde. Ses positions sur la physique quantique peuvent en effet surprendre. Il décrit les lois comme étant purement inventions humaines mais les refusent quant elles ne sont pas vérifiées par l’observation ou quand elles s’opposent à ses idées. Parfois, il limite cette créativité. Cela ne consisterait finalement qu’à chercher avec ardeur ce qui est caché dans la nature. En parlant du XVIII et XIXe siècle, « les savants de ce temps pour la plupart convaincus que les lois ou les concepts fondamentaux de la physique n’étaient pas, au point de vue logique, de libres inventions de l’esprit humain, mais qu’ils étaient plutôt déduits de l’expérience par abstraction – c’est-à-dire par un processus logique. Ce fut la théorie de la Relativité généralisée qui montre d’une manière convaincante l’inexactitude de cette vue. »[16] Cette vision des choses est bien éloignée de la vérité historique. Newton n’a-t-il pas innové de la même manière qu’Einstein ? « La vision relativiste venait donc se substituer à la vision newtonienne du monde. »[17]

Au début de toute théorie, une philosophie ?

La théorie de la relativité a commencé par des questions d’ordre philosophique « parce que les problèmes physiques qu’il se posait demandaient une analyse logique de certains concepts »[18]. Einstein a remis en question les concepts que Newton a lui-même créés. Selon Michel Paty, «la démarche d’Einstein (comme attitude et comme pensée) est de nature profondément philosophique » [19]. Plus précisément, « le travail scientifique ne commence pas par l’énoncé d’un problème philosophique, mais qu’au contraire les questions scientifiques, par leur contenu, peuvent révéler leur portée philosophique. » [20]. Il est donc inévitable que sa théorie aboutit à des interprétations philosophiques. Elle a donné lieu à des interprétations empiristes, rationalistes, réalistes ou constructivistes. On y a associé Mach, Reichenbach, Kant, Spinoza et bien d’autres penseurs.

La position d’Einstein en matière philosophique est cependant floue. D’abord positiviste, Einstein s’en est progressivement éloigné au point de provoquer une controverse. Cette évolution a été si frappante qu’on a émis l’idée de deux Einstein. Ses positions parfois contradictoires sont mieux compréhensibles quand nous connaissons sa personnalité. N’oublions pas qu’il est un scientifique isolé, peu respectueux des normes, qui a une très grande idée de ses capacités intellectuelles, cherchant plutôt à se valoriser au détriment des autres. N’oublions pas non plus sa forte médiatisation et sa célébrité. Une meilleure connaissance de son auteur permet de comprendre sa philosophie.

Conclusion

La théorie de la relativité est une théorie complexe, ingénieuse et difficile. Comme toute théorie, elle est censée décrire une réalité selon une vision du monde, c’est-à-dire selon des concepts et des idées philosophiques. Elle n’a pas pour vocation de dire ce qu’est la vérité mais de valider une conception du monde en s’appuyant sur des faits mesurables. Elle n’a pas pour vocation d’être la vérité. Sa force réside dans son efficacité à confirmer des concepts et à rendre compte de l’observation de la réalité. 

L’erreur ou la faute la plus fréquente est de présenter comme étant une vérité une théorie scientifique indépendamment de la pensée philosophique ou de l’idéologie qui l’ont fait naître, de l’enseigner sans définir les concepts qu’elle utilise ou en les acceptant comme étant vrais, ou encore de présenter la conception de la réalité sur laquelle s’appuie la théorie comme étant la réalité elle-même. Ainsi quand une théorie scientifique semble s’opposer à notre foi, la raison n'en vient pas de la science en elle-même mais de ses origines (concept, vision du monde, personnalité de l’auteur), de son enseignement, de son interprétation. La meilleure défense de la foi consiste donc souvent à les connaître, à en déceler les erreurs et à les présenter…



Notes et références
[1] Philippe Franck, Einstein, sa vie, son temps, XI, Flammarion, 1991.
[2] Philippe Franck, Einstein, sa vie, son temps, VII.
[3] Carinal O’Connell, cardinal de Boston, cité dans Einstein, sa vie, son temps, XI, Philippe Franck.
[4] O’Rahilly, philosophe irlandais, cité dans Einstein, sa vie, son temps, Philippe Franck, XI.

[5] Philosophe anglais Wildon Carr, cité dans Einstein, sa vie, son temps, Philippe Franck, XI.
[6] Bertrand A. W. Russel, Conséquences philosophiques de la relativité, article paru dans Britannica, 13ème édition, 1926, trad. par Philippe Matherat (Mars 2007, révisé en déc. 2014) d’après l’article original accessible à : http://www.britannica.com/ Ce texte français est accessible à http://matherat.net/publications/Russell/cons-phil.pdf.
[7] A. Einstein, L. Infeld, L’Évolution des idées en physique des premiers concepts aux théories de la relativité et des quanta, traduit par M.Solovine, Préface, Flammarion, 1983.
[8] M. Planck, Initiations à la physique, Paris, Flammarion, collection Champs cité dans Origines et fondements philosophiques de la relativité : les conceptions de Mach, Galilée et Einstein, Jacques Montminy, Philosophiques, vol. 22, n° 1, 1995, www.erudit.org.
[9] Michel Paty, Einstein, éditions Les Belles Lettres, 1997.
[10] Meyerson, La déduction relativiste, 1925.
[11] Bertrand A. W. Russel, Conséquences philosophiques de la relativité.
[12] A. Einstein, L. Infeld, L’Évolution des idées en physique des premiers concepts aux théories de la relativité et des quanta, 4.
[13] A. Einstein, L. Infeld, L’Évolution des idées en physique des premiers concepts aux théories de la relativité et des quanta, 4.
[14] Cette imprécision peut aussi provenir de la traduction ou de l’enseignement.
[15]A. Einstein, L. Infeld, L’Évolution des idées en physique des premiers concepts aux théories de la relativité et des quanta, 4.
[16] Einstein dans une conférence organisée par Herbert Spencer dans l’été de 1933, cité dans Einstein, sa vie, son temps, Philippe Franck, IX.
[17] Hervé Barreau, Les théories philosophiques de la connaissance face à la relativité d'Einstein dans Communications, L'espace perdu et le temps retrouvé, 41, 1985, www.erudit.com.
[18] Michel Paty, Einstein philosophe cité dans Michel Paty, Einstein et la philosophie des sciences, Angèle Kremer-Marietti.
[19] Michel Paty, Einstein philosophe cité dans Michel Paty, Einstein et la philosophie des sciences, Angèle Kremer-Marietti.
[20] Angèle Kremer-Marietti. Michel Paty, Einstein et la philosophie des sciences.

lundi 28 décembre 2015

Contre Bultmann et la démythologisation

Le théologien Bultmann a probablement eu une grande influence sur la pensée chrétienne du XXe siècle, y compris chez certains théologiens catholiques. Sans être si radicaux dans son rejet du « Jésus historique », ses disciples ont développé sa pensée et l’ont diffusée. Aujourd’hui, des discours en sont fortement imprégnés. S’il est important de la déceler et de la rejeter, faut-il surtout la réfuter et la dénoncer. Pour nous aider dans cette tâche, nous disposons de quelques textes et ouvrages, bien rares il est vrai.

Comme nous l’avons évoqué dans l’article précédent[1], Bultmann a cherché à introduire l’essentialisme d’Heidegger dans la théologie et l’exégèse,ou plus globalement dans le christianisme. Un de nos axes d’attaque pourrait alors consister à réfuter cette philosophie. Pour cela, faut-il mieux la connaître. Dans cet article, nous allons plutôt nous en désintéresser partiellement pour nous attacher davantage aux idées de Bultmann.

Indifférentisme historique

La pensée de Bultmann s’appuie sur une idée forte : on doit s’abstraire de la réalité historique de Notre Seigneur Jésus-Christ, c'est-à-dire ne pas prendre en considération sa dimension historique, sa personnalité, ses prodiges. Pour se justifier, il s’appuie sur les échecs des méthodes critico-historiques. Bultmann prétend en effet qu’en dépit de leurs efforts, nous ne savons presque rien sur le « Jésus de l’histoire ».  Nous ne connaissons qu’avec certitude que l’existence de Notre Seigneur Jésus-Christ, sa mort et sa résurrection. Or la situation a changé depuis ses affirmations au point que ses disciples ont rejeté l’indifférentisme historique de Bultmann.

Bultmann hérite en fait d’une certaine pensée historique du XIXe siècle. A cette époque, des commentateurs du Nouveau Testament croient qu’avec l’essor de nouvelles méthodes historico-critiques appliquées aux textes sacrés, ils seraient capables d’accéder à la réalité historique qui se cacherait derrière le récit évangélique, sous-entendu qu’il était déformé au cours du temps par différentes influences. Nous sommes en effet à une époque du positivisme et du rationalisme, où on croit au pouvoir absolu de la raison, y compris en histoire. Il serait possible d’appliquer à l’histoire des règles aussi rigoureuses que celles en vigueur en chimie ou en physique. Ainsi veut-on fonder une science de l'histoire. Par le mot « science », on veut évidemment faire donner aux connaissances historiques un poids égal à celles des véritables sciences. Forts de cette prétention, on commente les Évangiles en employant les règles historico-critiques. Notre Seigneur Jésus-Christ se réduit alors à une figure historique.

Mais cette entreprise se révèle être un échec. Devant l’impossibilité de parvenir à une connaissance objective des événements historiques, on en vient à s’en désintéresser pour ne s’occuper que de ce qui est accessible. « Il n’y a pas à poser la question de son origine historique (du Christ), mais sa véritable signification commence seulement à apparaître si précisément l’on ne se préoccupe plus de pareilles questions. »[2] Constatant les limites d’une histoire scientifique, Bultmann déclare finalement qu’on ne peut presque rien savoir sur le « Jésus historique ». Nous ne pouvons saisir que ce que croyaient les premiers chrétiens.

A la recherche de la foi pure

Son indifférentisme historique s’explique aussi par une conception particulière de la foi. Pour Bultmann, elle ne devrait pas dépendre de nos connaissances historiques, ou dit autrement, de notre ignorance ou de nos incertitudes. Il veut construire une théologie indépendante des méthodes historico-critiques, de notre savoir ou non-savoir historique, ce qui garantirait la validité du christianisme. Il est à la recherche de la « foi pure ».

Certes, pour Bultmann, il serait possible d’atteindre des faits historiques certains sur Notre Seigneur Jésus-Christ mais cette certitude historique serait dangereuse car elle justifierait notre foi. Or la foi ne se reposerait que sur Dieu seule. Il recherche en effet une foi pure, authentique, épurée de toute justification. On ne devrait pas rechercher des raisons de croire. Il considère en outre que ces faits historiques sont inutiles. Le kérygme apostolique suffirait.

Mais une conception de la foi erronée

Or Notre Seigneur Jésus-Christ nous interpelle par son enseignement que nous transmet l’Église. Les apôtres nous interpellent aussi. Leurs discours s’appuient sur Lui et nous renvoient à son enseignement, à sa personnalité, à ses prodiges, à des faits concrets, à des faits historiques. S’ils ont évoqué si fortement des événements historiques et la personnalité de Notre Seigneur Jésus-Christ, c’est parce qu’ils sont inévitables dans la justification de notre foi.

Le Christ crucifié et ressuscité est enfin incompréhensible sans Notre Seigneur Jésus-Christ saisi dans sa dimension historique. Or pour Bultmann, le « Jésus de la foi » porterait en lui ce qui serait nécessaire pour le rendre intelligible. La question porte donc sur l’intelligibilité de l’objet de notre foi. Il ne s’agit pas alors de nous interroger sur les raisons de croire mais sur le sens de la foi. Bultmann tend à confondre ces deux questions. Il ne s’agit pas simplement de croire pour comprendre mais aussi de comprendre pour croire comme Saint Augustin nous le rappelle. Sans être confondues, ces deux actions sont inséparables. La foi vient de Dieu seul mais nous sommes des êtres de raison qui ont besoin de comprendre. C’est même une exigence de notre foi. Nous devons justifier notre foi. Or la foi se justifie par des faits concrets, des paroles, un témoignage d’événements réels, historiques. En les supprimant, que devient la foi si ce n’est une pensée abstraite, emplie de nos propres espérances et non de la connaissance de la volonté de Dieu ? La volonté divine s’exprime en particulier dans notre présent mais aussi dans une histoire que nous ne pouvons pas ignorer.

Un « was » et une « dass » inséparables

« Assurément la Bible est un document historique et nous devons l’interpréter avec les méthodes propres à la recherche historique. (…) Mais quel est notre effectif et véritable intérêt? (…) Pour ma part, je pense que notre intérêt doit véritablement être celui d’écouter ce que la Bible a à nous dire pour notre temps présent, d’entendre ce qui, pour notre vie et pour notre âme est vérité. » Ce qui compte pour Bultmann, c’est le sens profond du fait divin qui permet à la Parole de Dieu de nous toucher dans notre vie présente. Ainsi distingue-t-il l’enseignement du fait d’enseigner, le « was » du « dass ».

Mais si nous ignorons celui qui enseigne et ce qu’il enseigne, que devient le « dass » ? Si le contenu d’un discours est sans importance, relégué aux oubliettes de l’histoire, que devient l’événement même du discours ? Pour Bultmann, il reste la pure gratuité de l’événement de la Parole de Dieu. La personne concrète de Notre Seigneur Jésus-Christ s’évanouit derrière la transcendance de la Parole divine.

Selon ce principe, il ne faudrait pas s’attacher aux circonstances de la Révélation, à l’objet même de la Révélation mais à la seule Révélation en soi, sur le fait seul que Dieu s’est révélé. Certes, la Révélation est en soi extraordinaire mais l’objet même de la Révélation demeure essentiel. Il ne s’agit pas de croire seulement que Dieu est intervenu dans l’histoire des hommes mais surtout de connaître sa volonté qui s’exprime dans la Révélation. Or cette connaissance passe par celle de Notre Seigneur Jésus-Christ car c’est par Lui que nous pouvons saisir Dieu le Père. Cette certitude est la base de notre foi. Nous ne croyons pas parce que Dieu s’est révélé mais parce que Dieu nous a dit de croire ce qu’Il a enseigné, notamment par son Fils, Notre Seigneur Jésus-Christ, le Verbe fait chair. Sans le « was », le « dass » n’a plus aucun sens…

Une pensée qui refuse tout présupposé autre que le sien

Pour Bultmann, Dieu est en fait inconnaissable, incommunicable. Il ne peut communiquer avec l’homme. Selon son vocabulaire, Dieu est non-mondain – Il n’est pas du monde - quand la parole est mondaine – elle est du monde. Dieu est dans le ciel, et nous, nous sommes sur la terre. C’est alors le rôle du mythe de rendre mondain ce qui est non-mondain. « On peut dire que les mythes donnent à la réalité transcendante une objectivité immanente à ce monde. Ils attribuent une objectivité mondaine à ce qui est non-mondain. »[3] Ainsi Bultmann nous demande de dépasser le mythe pour parvenir à la Parole de Dieu. Finalement, nous arrivons à un des principes sur lequel Bultmann fonde véritablement son interprétation de la Sainte Écriture.

Or, n’a-t-il pas prétendu que la véritable interprétation nécessite de se dégager de tout « dogme » ou « pré-supposé » ? Il refuse par exemple les « pré-supposés » de l’Église, c’est-à-dire les dogmes et son enseignement, mais il accepte ses propres certitudes, ses propres dogmes. Pourquoi devrions-nous rejeter les uns et accepter les autres ? Sur quels critères ? Sa parole est-elle plus importante que celle de l’Église ?

Il est en fait irréaliste et faux de croire qu’il est possible d’interpréter la Saint Écriture sans « pré-supposé » ! Quoique nous fassions, ils existent. Notre lecture n’est pas celle d’un nouveau-né. L’essentiel n’est donc pas de vouloir rejeter les soit-disant présupposés, comme si cela était possible, mais de se reposer sur les « pré-supposés » même sur lesquels se fonde la Sainte Écriture. Il faut se remettre dans l’esprit de la Sainte Écriture pour la lire correctement. Or les Ancien et Nouveau Testaments s’appuient sur l’idée que Dieu est capable de se manifester réellement et concrètement aux hommes et de communiquer avec eux. S'Il n’est évidemment pas de ce monde au sens où Il est distinct du monde, Dieu n’est pas étranger au monde.

Une interprétation insensée

Selon Bultmann, le mythe appartient au langage de la religion. Mais, dit-il, ce langage nous est devenu incompréhensible. Les représentations qui portent le message biblique ne sont plus compatibles avec nos propres représentations, notamment à cause des progrès scientifiques. Des disciples de Bultmann insisteront sur cette incompatibilité. Nous la retrouvons aussi dans certains discours catholiques. Par conséquent, Bultmann nous demande de supprimer cette représentation pour atteindre la Parole de Dieu afin que cette Parole agisse encore dans notre actualité.

Or le problème que Bultmann et bien d’autres évoquent ne concerne pas le message en lui-même mais la relation qui existe entre le message et son support, entre le signifié et le mode du signifié. Devant ce constat, Bultmann demande de supprimer le mode. Il voit en effet dans la suppression de la représentation le moyen d’accéder au signifié, à un signifié « vivant ». Mais que devient alors l’interprétation puisque sa raison d’être réside dans l’existence du message et du support et dans leurs relations ?

Prenons un exemple. Bultmann considère que dans la Sainte Bible, l’au-delà est vu comme un ici-bas, c’est-à-dire que la transcendance de Dieu est pensée comme un éloignement spatial. On parle de descente en enfer comme d’élévation au ciel. Or cette conception ne serait plus acceptable selon nos connaissances scientifiques. Mais comment les auteurs sacrés comprennent-ils ces expressions ? Croient-ils vraiment à un « éloignement spatial » ? Ils les comprennent évidemment au sens métaphorique. Quand l’auteur sacré parle du bras de Dieu, ils savent bien que Dieu n’a pas de bras. Dieu leur a bien défendu de Le représenter sous forme humaine. Ils ne sont pas dupes du langage qu’ils utilisent. L’Église a aussi toujours eu conscience de cette représentation métaphorique. Les Pères de l’Église ont toujours interprété la Sainte Écriture en prenant en compte  l’anthropomorphisme du langage biblique dans un sens métaphorique. La Sainte Écriture s’oppose aux païens qui adorent les statues et dénonce leurs croyances anthropomorphiques. Il est donc faux de croire que nos progrès scientifiques ont rendu incompréhensible la représentation biblique de Dieu ; ils rendent plutôt caduques une lecture naïve de la Sainte Écriture qu’ont toujours dénoncée les défenseurs de la foi. Mais pourquoi ce langage métaphorique est-il utilisé ?

L’importance du mode du signifié pour atteindre le signifié

Il est en effet impossible à l’homme de comprendre la Parole de Dieu sans représentation imagée. L’image est parfois le seul support qui nous permet d’accéder à de hautes vérités et à une réalité supérieure. Le ciel ou les lieux souterrains évoquent autre chose qu’une étendue spatiale. Ils évoquent la liberté ou les ténèbres, la clarté ou l’obscurité, l’espérance ou la peur. Les images évoquent en nous ce qui est finalement inaccessible directement par les mots. Les sens extérieurs sont impuissants à nous donner le sens profond des paroles divines. Ce qui est recherché n’est pas de l’ordre rationnel ou sensible mais plutôt psychologique, intérieur. Ce mode de "connaissance" n’est pas rare. Il est en particulier le fondement même de la poésie qui use de tous les moyens du langage pour faire naître des sentiments et des sensations afin que nous accèdions à une réalité inaccessible autrement

Par l’intermédiaire d’images et de représentations, l’homme peut alors atteindre des concepts élevés. Rappelons-nous Einstein qui voyait dans les sciences le moyen de relier notre conception du monde avec ce que nous observons. Les mathématiques n’échappent pas à cette règle. Nous comprenons les concepts mathématiques les plus abstraits en les raccrochant par exemple à des représentations géométriques. Finalement, l’homme ne vit pas dans l’abstraction pure. Il emploie toutes les richesses de son langage pour exprimer au mieux sa pensée et pour atteindre l’esprit de son interlocuteur. Le signifié est donc inséparable de son mode.

Dans le paganisme, les mythes sont un mode d’expression suffisamment riche et fort pour traduire la pensée de l’homme. Ils emploient des images archétypées qui évoquent en chacun de nous des concepts. « Le mythe est la manifestation des archétypes et l’expression de l’inconscient collectif, symbole des processus intérieurs. »[4] Mais la Sainte Écriture n’imite-elle pas aussi ce mode d’expression pour traduire une expérience de la foi ? N’évoque-t-elle pas une pensée religieuse d’une communauté et non une réalité historique ? ..

Le rejet de la spécificité de la Sainte Écriture

Il y a une différence fondamentale -et c'est le point essentiel - entre les mythes et les récits de la Sainte Écriture, notamment les récits évangéliques : la Sainte Écriture est un témoignage des actions et des manifestations de Dieu dans l'histoire des hommes. Elle est alors une œuvre d’enseignement sur la connaissance de la volonté de Dieu.

Or Bultmann rejette la dimension historique de la Sainte Écriture. Ces récits n’ont d’intérêt que dans notre actualité, c’est-à-dire dans les relations qu’ils entretiennent avec le présent, ou plutôt, soyons plus précis, dans une lecture biblique rapportée à la vie présente. En y évacuant toute historicité, il est alors évident que les récits évangéliques deviennent un mythe. Pour Bultmann, « le mythe ne renverrait donc pas à une réalité historique, à un événement mais dévoilerait la structure existentielle actuelle de l’homme expliquée comme conséquence de ce qui est dit virtuellement et fictivement dans le mythe. »[5] Ils ne renvoient pas à un évènement ou à une réalité historique mais à l’existence humaine. Il y a finalement rupture entre ce qui relève de l’histoire et de l’ontologie.

Ainsi enlever dans le récit évangélique toute dimension historique revient à nier la spécificité du christianisme par rapport au paganisme.

Un regard purement centré sur l’homme

Prenons l’exemple de la chute d’Adam. Ne parlons pas du mode de représentation utilisée mais de ce qu’elle peut signifier. Certes sa représentation ne peut qu’être approximative puisque l’auteur l’écrit dans un monde abîmé par le péché alors que le récit se déroule dans un monde sans péché. Le cadre dans laquelle il écrit influence nécessairement son écrit, même s’il écrit sous l’influence du Saint Esprit. Rappelons qu’il reste libre de sa plume tout en exprimant uniquement ce que Dieu veut révéler par son intermédiaire.

Cette histoire, renvoie-t-elle à un événement historique ou n’est-elle que la compréhension de l’homme de sa situation existentielle d’aujourd’hui ? Devons-nous l’interpréter selon l’enseignement de l’Église ou selon l’interprétation existentielle de Bultmann ? Mais au-delà de ces questions, posons-nous en fait la véritable question. La chute d’Adam s’est-elle produite ou non ? Est-elle réelle ou symbolique ? Est-elle véridique ou inventée ? Car au-delà du mode ou du genre littéraire employé – poésie, histoire, ... – la véritable et seule question qui nous intéresse porte sur la réalité à laquelle ce mode nous rend accessible. Pour Bultmann, rejetant toute dimension historique, le récit de la chute d’Adam ne représente qu’une parole pour calmer l’angoisse de l’homme par laquelle il prend conscience de son néant d’où il provient. C’est donc une parole poétique censée exprimer une situation actuelle d’homme pécheur et aussi censée l’apaiser.

Son interprétation soulève une question. D’où vient cette situation d’homme pécheur ? Rien ne provient sans cause. Or la Sainte Écriture nous décrit la cause historique. Elle nous éclaire alors sur l’œuvre de la Rédemption. Si nous renions cette dimension historique, comment pouvons-nous la comprendre ? Selon l’enseignement de l’Église, nos péchés nous renvoient à la désobéissance d’Adam. C’est une lecture du récit d’Adam qui n’exclut pas sa dimension historique. Mais Bultmann ne songe pas à cette lecture. Il justifie l’origine du récit par un besoin purement existentiel de l’homme. La Sainte Écriture ne serait qu’un refoulement de la conscience humaine ou qu’une méthode thérapeutique pour calmer ses angoisses ! Avec un tel regard centré finalement sur soi-même, que devient la Sainte Écriture ?

Nous commençons en fait à comprendre la pensée de Bultmann : la Sainte Écriture aurait pour but de donner des réponses aux questions existentielles de l’homme afin qu’il puisse supporter son existence, sous-entendu qu’elle est insupportable, issue du néant, vide de sens. Son origine est finalement purement humaine, censée répondre à des besoins purement humains. La Sainte Écriture n’est finalement qu’un remède à une profonde angoisse !  Dieu en est cruellement absent.

En outre, le remède est pire que le mal puisque l'interprétation de Bultmann n’explique rien. Le récit ne traduirait ou n’exprimerait qu’une situation sans apporter de réponse. Or c’est l’absence de réponse qui explique en partie le mal et l’angoisse. Nous arrivons donc à une contradiction. S’il est lu selon l’interprétation de Bultmann, le récit de la chute d’Adam accroit notre angoisse alors qu’il est censé l’apaiser.

Une telle interprétation de la Sainte Écriture est donc dangereuse et absurde car elle ne permet pas de répondre aux questions essentielles que nous nous posons dans notre monde d’aujourd’hui. L’interprétation existentiale trouve en fait les réponses en nous-mêmes. C’est croire finalement que tout se résume en nous, c’est-à-dire en rien. Si Dieu est incommunicable, nous sommes finalement réduits à ne regarder que notre nombril. Une telle interprétation nous tourne finalement vers l’absurdisme et le nihilisme, vers le néant…

Trouver Dieu là ou Il est absent ?!

Poursuivons encore plus profondément notre étude de la pensée de Bultmann, qui nous rapproche lentement vers la philosophie d’Heidegger.

Comme nous l’avons évoqué au début de notre article, Bultmann refuse la dimension historique des récits évangéliques car en la reconnaissant, nous appuierons notre foi sur des faits concrets et non sur Dieu Lui-même. En clair, ce que nous rechercherions dans les faits historiques, ce serait une sécurité terrestre. « Dans le monde, Dieu et son action, en effet, ne sont et ne peuvent absolument pas être manifestes aux yeux des hommes qui recherchent une sécurité terrestre. Nous pourrions dire que la Parole de Dieu interpelle l’homme dans son insécurité et l’appelle à la liberté, car, dans son aspiration à la sécurité, l’homme perd sa liberté. »[6] Bultmann refuse cette « sécurité terrestre ». Il rejette donc toute représentation objectivante de Dieu. Notre foi ne doit s’appuyer que sur notre existence, là où se rencontre la Parole de Dieu. Or Bultmann est convaincu que Dieu lui est inaccessible.

Nous arrivons ainsi à un nouveau paradoxe, sans-doute le plus important. Dieu est tellement transcendant qu’Il ne peut être accessible que dans l’angoisse de son absence ! Selon Bultmann, c’est en se recherchant qu’on recherche Dieu. Mais plus on le recherche, plus on constate son absence ! Car rappelons-nous, Dieu ne peut être accessible dans aucune représentation objectivante. C’est pourquoi, dit-il, toute théorie de l’existence humaine, comme celle de Heidegger, ne prend pas en compte la relation entre Dieu et l’homme. Dieu est ailleurs, hors de nous-mêmes. « Je sais que je ne puis trouver Dieu tant que je porte mon regard sur ou en moi. » [7] Pourtant, il faut saisir son existence personnelle pour connaître ses relations avec Dieu, et pour cela, il demande qu’on se détourne de soi car « ma relation personnelle avec Dieu ne peut être établie que par Dieu […] qui me rencontre dans sa Parole » Pour rechercher Dieu, on doit se rechercher faisant alors croître l’angoisse de son absence afin de s’expulser de soi vers Dieu !

Quel raisonnement sophistiqué ! Il ne parvient pas cependant à masquer les contradictions d’une pensée incohérente. « Avouons le, une telle dialectique donne le tournis, l’intelligence perd ses marques. Ivre de ses propres contradictions, elle est prête à affirmer tout et son contraire dans une pure démarche sophistique. Elle est prête à se mettre en guerre pour justifier n’importe quelle position de la démythologisation.  L’effort de Bultmann pour fonder rationnellement une interprétation existentiale est-elle un réel effort de l’intelligence ou une lourde machinerie intellectuelle qui se donne pour seul but d’impressionner afin de faire passer en force deux a priori sans fondement : le Nouveau Testament s’exprime à l’aide d’une mythologie d’inspiration gnostique et l’homme moderne, façonné par la science, ne peut plus recevoir cette mythologie. »[8]

Confusion entre foi et confiance

Bultmann s’extrait alors de ses contradictions en s’appuyant sur la philosophie d’Heidegger, sur ses notions d’Être et de Néant. L’angoisse y occupe une place centrale. Elle correspond probablement à la foi bultmannienne. « La foi est le renoncement à la sécurité ». « Il ne reste rien comme appui à l’angoisse. » Or la foi nous libèrerait de l’angoisse qui tarauderait le cœur de l’homme.

Essayons encore de résumer la pensée de Bultmann. Pour saisir nos relations avec Dieu, nous devons nous tourner vers notre existence. Mais quand nous menons l’expérience, nos relations avec Dieu s’évanouissent, nous laissant dans l’angoisse et l’insécurité. Alors nous devons nous expulser de nous-mêmes vers Dieu. Telle serait la foi pure qui procurerait sécurité et liberté.

Mais Bultmann ne commet-il pas une regrettable confusion à cause d’une mauvaise conception de la foi ? La « foi pure, authentique » est pour lui une foi qui ne s’appuie sur aucune connaissance historique, une foi sans motif, sans preuve, qui peut être détachée de toute vérité historique. Sa « foi pure » est en réalité ce que nous appelons la confiance en Dieu, une confiance censée apaiser les angoisses de l’homme. Certes la foi apporte confiance en Dieu mais elle n’est pas confiance.

La foi est une adhésion de l’intelligence à des vérités révélées qui nous ont été transmises. Elle nous renvoie donc à des témoignages présents et anciens. Certes ils ne sont pas la source de notre foi mais notre foi s’appuie sur des témoignages sans lesquels finalement la foi serait vide ou plutôt emplie de nous-mêmes. « La nature a horreur du vide », selon l’adage. Et ces témoignages nous renvoient inévitablement à un contexte historique que nous ne pouvons pas ignorer. En un mot, sans sa dimension historique, Notre Seigneur Jésus-Christ ne serait qu’un être idéalisé, sans chair ni personnalité, une idée malléable, sans consistance ni réalité, une figure mythique parmi tant d’autres. Ainsi en voulant démythologiser les récits évangéliques, Bultmann Le réduit à un être mythique !

Conclusion

La pensée de Bultmann s’est répandue dans l’opinion, y compris dans les communautés chrétiennes. Extrêmement dangereuse, elle est certainement une des causes qui éloignent bien des âmes de Dieu et de la vérité. « La méfiance envers ces images de Jésus s'est amplifiée, et par suite, la figure-même de Jésus s'est encore davantage éloignée de nous. Toutes ces tentatives ont cependant laissé derrière elles, comme dénominateur commun, l'impression que nous avons bien peu de connaissances certaines sur Jésus, et que c'est seulement tardivement que la foi en sa divinité a façonné son image. En même temps, cette impression a pénétré profondément dans la conscience commune de la chrétienté. Une telle situation est dramatique pour la foi, car elle rend incertain son authentique point de référence: l'amitié intime avec Jésus, dont tout dépend, menace de se diluer dans le vide. »[9]

Bultmann recherche une interprétation de la Sainte Écriture selon des présupposés infondés[10] et selon des principes erronés. Elle conduit à construire un « Jésus » selon des besoins existentiels. Il tente en fait d’introduire dans le christianisme la philosophie existentialiste mais aboutit vite à des contradictions qu’il tente de résoudre par des raisonnements sophistiqués. En détachant la foi des connaissances historiques, il construit un « Jésus » mythique. C’est justement en dissociant le « Jésus de l’histoire » du « Jésus de la foi » que l’homme finit par construire un mythe. C’est le résultat de la démythologisation de Bultmann et de ses disciples plus ou moins radicaux. Quelle plus belle preuve de leurs erreurs !...

Enfin, rappelons que la Sainte Écriture est un témoignage historique qui élève notre regard vers une réalité qui ne dépend pas de nous et de notre imagination. Par leur mode de représentation, les évangélistes nous renvoient à une réalité historique, certes parfois mystérieuse mais accessible par l’enseignement de l’Église. Et ce témoignage historique nous permet d’affirmer que Notre Seigneur Jésus-Christ n’est pas un mythe. Voilà l’abîme qui sépare le christianisme du mythe…

« Je retiens que réellement ce Jésus - celui des Évangiles - est une figure historiquement solide et convaincante. Ce n'est que s'il s'est vraiment passé quelque chose d'extraordinaire, si la figure et les paroles de Jésus dépassaient toutes les espérances et les attentes de l'époque, que l'on peut expliquer sa Crucifixion, et ses effets. »[11]





Notes et références
[1] Voir Émeraude, décembre 2015, « Bultmann et la démythologisation ».
[2] Bultmann, Kerygma und Mythos, dans René Marlé, Bultmann et l’interprétation du Nouveau Testament, coll. Théologie Aubier, n°33, 1956, cité dans La Méthode de Rudolphe Bultmanne (2), ThéotimedeSavoie, https://francoisdesales.wordpress.com, 2 juin 2013.
[3] R. Bultmann, Jésus, Mythologie et démythologisation, Paris, Seuil, 1968 dans La Méthode de Rudolphe Bultmanne (2), ThéotimedeSavoie.
[4] Jung dans Jean-Paul II, Doc. Catho., 7 oct. 1979, N° 1771, p810, note 4.
[5] ThéotimedeSavoie, La Méthode de Rudolphe Bultmanne (2).
[6] R. Bultmann, Jésus, Mythologie et démythologisation, dans ThéotimedeSavoie, La Méthode de Rudolphe Bultmanne (2).
[7] R. Bultmann, Jésus, Mythologie et démythologisation, dans ThéotimedeSavoie, La Méthode de Rudolphe Bultmanne (2).
[8] ThéotimedeSavoie, La Méthode de Rudolphe Bultmanne (2).
[9] Benoit XVI, Jésus de Nazareth.
[10] Parmi ces présupposés, l’idée que Jésus n’a jamais eu conscience d’être le Messie ou encore l’idée que « Jésus » a développé par la prédication. Il considère en effet que Notre Seigneur Jésus-Christ n’est pas le prédicateur de la Parole de Dieu mais le contenu de la prédication de l’Église. En un mot, il a été construit par les communautés chrétiennes. Bultmann défend ces idées sans fondement sérieux selon le théologien protestant Pierre Bonnard, La Théologie du nouveau Testament selon R. Bultmann dans Revue de théologie et de philosophie, 1951.
[11] Benoit XVI, Jésus de Nazareth.