" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


mardi 29 mai 2012

Mahomet, un prophète de la Sainte Ecriture ?

Il est politiquement correct de présenter Mahomet comme un des plus grands hommes de l'humanité comme le prétendait déjà Lamartine. « Si la grandeur du dessein, la petitesse des moyens, l'immensité du résultat sont les trois mesures du génie de l'homme, qui osera comparer humainement un grand homme de l'histoire moderne à Mahomet ? » (1). Combien de revues prétendues sérieuses le rangent encore aux côtés d'Abraham, de Moïse, ou de Notre Seigneur Jésus-Christ ? Il est temps de quitter ce aveuglement ou cet angélisme pour affronter en face la vérité. 

A force de voir les religions équivalentes, nous finissons pas être insensés. Comme l'affirme un docteur en civilisation islamique, les catholiques refusent tout débat sur ce sujet. « C'est délirant. Les catholiques font de l'angélisme. Alors qu'ils ont été très loin pendant le Moyen-Age en propageant la légende noire de Mahomet, aujourd'hui il n'y a plus de dogme, ni de Christ à défendre, on répugne à faire des distinctions entre les religions » (2). Cet islamologue exagère certainement mais ses paroles nous éclairent sur la perception du christianisme au début du XXIème siècle. 

Cet article a pour but, non pas de présenter Mahomet selon les versions officielles, présentation déjà réalisée dans un de nos premiers articles (3), mais de remettre en cause, de manière raisonnable, sa légende dorée, bien ancrée dans notre société. Mahomet, peut-il être considéré comme l'égal des grands serviteurs de Dieu que nous rencontrons dans la Sainte Bible ? Nous oserons même nous demander s'il peut être comparé à Notre Seigneur Jésus-Christ ?... Que Dieu nous pardonne de faire de telle comparaison ! 

Un homme peu soucieux des moyens... 

Avons-nous déjà vu les serviteurs de Dieu prôner l'assassinat et la violence ? Ont-ils prononcé des paroles de haine et de morts ? Certes, dans l'Ancien Testament, la guerre, les meurtres, les exterminations ne sont pas absents, mais nous pouvons faire deux constats : ils sont parfois liées à la légitime défense, à un contexte particulier de violence ou répondent à une volonté précise de Dieu. Cette violence est quasiment absente au temps d'Abraham ou de Notre Seigneur Jésus-Christ. La haine est un sentiment qui leur est inconnu ! La seule manifestation de violence que nous pourrions constater dans la vie de Notre Seigneur est la scène des vendeurs du Temple. 

Or, Mahomet prône l'assassinat de ceux qui l'insulte ou le met en dérision. Avons-nous déjà entendu Notre Seigneur demander à ses disciples de tuer un Juif et ses persécuteurs ! David a, certes, conduit Urie à la mort pour pouvoir épouser sa femme, mais n'a-t-il pas été condamné par Dieu ? Nathan, envoyé par Dieu, le reprend en effet pour son péché et lui révèle la justice divine : « Pour cette raison, le glaive ne s'éloignera jamais de ta maison, parce que tu m'as méprisé et que tu as enlevé la femme d'Urie, l'Héthéen, afin qu'elle fût ta femme ? » (II.Rois, XII, 10). Et quand Judith tue Holoferne, elle n'est guidée que par le désir de remplir une mission divine, celle de délivrer le peuple de Dieu. « C'est par moi, ta servante, qu'il a accompli sa miséricorde qu'il a promise à la maison d'Israël ; et il a tué par ma main l'ennemi de son peuple cette nuit » (Judith,XIII, 18). Mais, ce ne sont pas des prophètes comme ils ne prétendaient pas fonder des religions... 


Un homme peu exemplaire... 

Regardons de plus près la vie de Mahomet. Contrairement aux prescriptions du Coran, son harem contiendra jusqu'à neuf femmes, alors que le livre le limite à quatre. Certes, David, Salomon et bien d'autres n'ont pas obéi à tous les préceptes de Dieu, mais n'ont-ils pas été punis par Dieu pour leurs infidélités ? Et surtout, ils ne sont pas considérés comme des prophètes ! L'exemple de la vie n'est-il pas la meilleure façon de prouver sa mission divine ? Il n'est, non plus, ni un ascète, ni un pauvre. Il ressemble plutôt à un chef de guerre ou à un souverain qu'à un prophète. 

Un témoignage de sang ? 

Ce témoignage visible peut conduire à la souffrance et à la mort. La plupart des prophètes de la Sainte Bible ont été pratiquement tués par leur peuple, y compris Saint Jean Baptiste et évidemment Notre Seigneur Jésus-Christ, qui est plus qu'un prophète. Mahomet est probablement un des rares à ne pas avoir signé ses paroles de son propre sang. Il a plutôt terminé sa vie d'une belle manière... 

Certes, Mahomet a fait l'objet de moqueries et d'un bannissement, signes d'une incompréhension des arabes à l'égard de sa mission. ll a également été rejeté par les Juifs et les Chrétiens. La misère et les souffrances de Mahomet sont cependant bien relatives. Car après des échauffourées, quelques astuces diplomatiques et un mariage de circonstance, il gagne La Mecque et prend le pouvoir. Puis, il mène la guerre dans la péninsule arabe pour unifier les tribus. Est-ce cela le sort réservé aux prophètes de l'Ancien Testament ? Ont-ils en outre vaincu leurs adversaires par des armes si humaines ? ... 

Si peu de signes divins ... 

Revenons aux prophètes de la Sainte Bible. Les prophètes annonce la volonté de Dieu, prédit l'avenir afin de préparer la voie de celui qui doit venir, décrivent les signes précurseurs, les permettant de l'identifier. Ils sont en quelque sorte les instruments de Dieu. Certains adversaires mêmes de Dieu prophétiseront à leur dépend. Prophétiser n'est donc pas signe d'élection. D'autres serviteurs de Dieu, comme Moïse, seront les intermédiaires entre le Tout-Puissant et son peuple. Moïse donne les commandements de Dieu que tous les prophètes rappelleront, y compris Notre Seigneur. 

Les serviteurs de Dieu vivent surtout selon la volonté divine, montrant une exemplarité irréprochable dans leur fidélité et leur obéissance. Des signes accompagnent en outre leurs missions. Ils justifient en quelque sorte le commanditaire et les légitiment devant le peuple incrédule. Ce sont avant tout des envoyés de Dieu vivant de Dieu, non en paroles mais en actes. Et leur enseignement est parfois donné par des actes, et peu en paroles. 

Or, dans la vie de Mahomet, avons-nous des signes de sa mission divine ? Des miracles ? Une prophétie réalisée ? Non que des versets et des conquêtes... 

Un détail qui ne peut que frapper le lecteur du Coran : il n'existe aucun rappel des commandements de Dieu... 

Un chef plus soucieux de politique... 

Aucun prophète n'a cherché à légiférer en matière de société civile. Notre Seigneur laisse à César ce qui est à César. Seul Moïse dicte des lois mais elles sont religieuses et concerne un peuple. Or, Mahomet donne un cadre législatif à une communauté, allant jusqu'à des précisions détaillées qui ne semblent concerner que son entourage, voire lui-même. Il apparaît avant tout comme un chef politique. L'islam est la seule religion qui mêle vie religieuse et vie politique si intimement que l'une ne peut être vécue sans l'autre. Et c'est bien une nouveauté... 

Enfin, si Mahomet a construit une société civile, il est étrange de le voir si peu enclin à construire une religion ! Pas de sacrifices aussi précis que ceux des Juifs, pas de lévites, ni de prêtres, encore moins de chefs religieux pour sauvegarder la doctrine ! Seuls comptent le Coran et les hadiths, et la force politique... 



Finalement, un homme profondément humain... 

Ainsi, nous ne pouvons qu'être frappés par les différences qui séparent Mahomet de tous les prophètes de la Sainte Écriture, et encore plus de Notre Seigneur Jésus-Christ. Comparons la force du premier, qui est celle d'un chef de guerre, et les faiblesses apparentes des seconds. L'un utilise les armes et la diplomatie, les autres, la force de Dieu. Notre Seigneur Lui-même n'apparaît-il pas faible et dérisoire sur la Croix entre deux malfaiteurs ? Et Abraham, quittant tout pour un destin inconnu, ne croyant qu'en la parole de Dieu, n'est-il pas insensé de partir ainsi à l'aventure ? Combien de prophètes n'ont-ils pas été comparés à des fous ? La force des prophètes ne repose pas sur celle des armes ou sur les capacités humaines ! Souvenons-nous des paroles de Saint Paul : « nous avons ce trésor en des vases d'argiles, afin que la grandeur appartienne au Verbe de Dieu, et ne vienne pas de nous » (I, Cor., IV, 7). 

Mahomet apparaît en effet bien trop humain et sensé pour porter la parole de Dieu... Nous sommes bien loin de la pédagogie utilisée par Dieu dans la Sainte Ecriture. Qui le justifie par ailleurs ? Le Coran ? Il en est cruellement absent... une contradiction fond 

Références
1 Alphonse de Lamartine, Histoire de la Turquie, édition Librairie du Constitutionnel, 1854,livre 1er). 
2 Anne-Marie Delcambre, entretien dans le Figaro Magasine, du samedi 13 décembre 2003, suite à la parution de son livre L'Islam des interdits, entretien cité sur un site musulman ! www. coranix.org 
Connaissance de l'Islam : Mahomet, décembre 2011.

lundi 21 mai 2012

La science moderne, est-elle si objective ?

Croire que la science seule apportera la connaissance et le progrès revient à renier à la science sa plus belle vertu, la sagesse, ou encore la connaissance de ses propres limites. Prétendre donc à la suprématie de la science, ce n'est plus de la science, c'est de l'idéologie ou de la folie. Insensé en effet celui qui oublie l'ignorance et les faiblesses inhérentes à l'homme, mais heureuse notre époque qui semble plus sage que celle qui l'a précédée. Les scientifiques savent aujourd'hui que la vérité n'est pas à leur portée ou que leur réponse ne peut qu'être provisoire. 


« Notre science n'est pas une connaissance : elle ne peut jamais prétendre avoir atteint la vérité, ni même l'un de ses substituts, telle la probabilité. […] Nous ne savons pas, nous ne pouvons que conjecturer » (Karl Popper, 1). 
« La science ne poursuit jamais l'objectif illusoire de rendre nos réponses définitives ou même probables. Elle s'achemine plutôt vers le but infini encore qu'accessible de toujours découvrir des problèmes nouveaux, plus profonds et plus généraux, et de soumettre ses réponses, toujours provisoires, à des tests toujours renouvelés et toujours affinés » (Karl Popper, 1). 

La science cherche à comprendre et à fournir des réponses à des questions en sachant bien que les solutions qu'elle trouve ne sont jamais définitives. Mais si elle ne donne pas la vérité, peut-elle s'y approcher par une méthode objective ? Son but est tout autre. Elle explique certains aspects de la réalité en négligeant d'autres aspects. Elle est donc arbitraire. Mais, pouvons-nous néanmoins croire qu'il y a dans la science un certain désintéressement, ce qui lui assurerait l'objectivité de ses travaux et de son savoir, même si elle est arbitraire dans ses choix? 

Notre article a pour but de décrire certaines limites de la science, certaines interférences qui lui empêchent d'atteindre son objectivité. Nous tenons à rappeler que nous estimons la science à sa juste valeur et que nous ne souhaitons pas la dévaloriser ou la dénigrer. Elle est une mode de connaissance estimable si nous savons la considérer telle qu'elle est et non telle qu'elle est imaginée... 

A la découverte d'hypothèses... 

La découverte d'une loi peut apparaître parfois comme le fruit de l'imagination ou du hasard. Selon la légende, Archimède aurait découvert la poussée qui porte son nom en prenant son bain. Néanmoins, comme le souligne Pasteur, « dans le champ de l'observation, le hasard ne favorise que les esprits préparés » (2). Après de longues recherches et études, le scientifique est en effet prêt à observer et à interpréter le fait. Il y a donc une préparation intellectuelle du scientifique qui l'a formé à recevoir l'hypothèse... Une découverte est néanmoins redevable au génie de son auteur qui a su dépasser la simple constatation d'une observation pour en déduire une explication logique. 

Parfois, des chercheurs arrivent à des hypothèses qui ne sont pas prêtes à voir le jour car les esprits ou les avancées scientifiques, technologiques, ne sont pas mûrs pour les prendre en compte. Ainsi, sont-elles délaissées, et un jour peut-être, elles seront reprises et connaîtront le succès. Le chercheur peut aussi les abandonner de lui-même, ne songeant pas à l'enjeu de sa propre découverte jusqu'au jour où un de ses disciples comprend la portée de sa pensée. Le contexte non seulement scientifique mais social, économique, culturel dans lequel évolue le scientifique, sans compter sa propre expérience et son éducation, peuvent donc influencer une théorie... 

Dans la plupart du temps, les découvertes se font par tâtonnements et demandent beaucoup de patience et d'imagination. Ainsi que l'a écrit le physicien français Pierre-Gilles de Gennes, prix Nobel de Physique 1994, « une découverte, c'est trois mois de théories et quatre ans de pratique » (3). 

Ainsi, les théories sont fortement dépendantes du contexte temporel et socio-culturel comme elles sont guidées par l'état de la science de leur temps, et donc des savoirs hérités du passé. 

Véracité d'une théorie... 

Il ne suffit pas qu'une loi soit découverte pour qu'elle soit acceptée et proclamée. La science est parfois fortement dépendante du conformisme. Elle doit prendre en compte le poids de la tradition et toute forme de discrimination. L'intolérance, le clivage entre science expérimentale et théorique, la logique des pseudo-sciences, la méthodologie et la terminologie sont autant de facteurs de biais qu'il convient de connaître pour bien délimiter l'action de la science. 

La vanité scientifique... 

Une idée nouvelle n'est pas en effet automatiquement admise par la communauté scientifique. Ainsi que l'a écrit le physicien allemand Max Planck, « une vérité nouvelle en science n'arrive jamais à triompher en convainquant ses adversaires et en les amenant à voir la lumière, mais plutôt parce que finalement ses adversaires meurent et qu'une nouvelle génération grandit, à qui cette vérité est familière » (4). 

Mendel
Ce sont souvent des personnes extérieures à la discipline ou de jeunes recrues occupant un rang plus modeste dans la hiérarchie qui découvrent de nouvelles idées. Les travaux de Mendel (5) par exemple furent ignorés pendant 35 ans car les biologistes considéraient que les expériences d'un ecclésiastique ne pouvaient rien apporter à la science. La théorie de la dérive des continents de Wegener (6) sera rejetée pendant 40 ans car il eut été inconcevable qu'un météorologiste donne son avis en matière de géologie. Par ces exemples et par d'autres encore, nous voyons que des chercheurs font l'objet de la prétention d'autres scientifiques, plus sûrs de leurs connaissances et de leurs compétences que de les voir remettre en cause. L'orgueil humain fait aussi ses ravages dans la science... 

La recherche des scientifiques est donc influencée par des facteurs autres que la raison et l'imagination. Elle est fonction d'a priori culturels et sociologiques. Il est bon ton de parler de l'affaire Galilée, mais nous oublions souvent de mentionner les difficultés des scientifiques à faire accepter leurs théories pour des raisons sociales ou idéologiques au sein même du monde de la science. 

Le conformisme scientifique …. 

Le manque d'échanges entre les chercheurs, la méconnaissance des découvertes réalisées par un groupe ou la compétition entre institutions scientifiques suffissent quelquefois à enrayer un processus de pensée cohérente ou à commettre des erreurs d'appréciation. Le désintéressement n'est pas toujours au cœur des préoccupations... 

On reproche au christianisme d'avoir conduit à l'obscurantisme en refusant des théories, mais, ces détracteurs oublient souvent que ce sont en général les détenteurs du savoir qui refusent toute remise en cause de leur domination intellectuelle. Ainsi, aujourd'hui, toute théorie venant apporter des preuves contre le « big bang » est rejetée. Des chercheurs peu conformistes sont même écartés de tout moyen permettant d'approfondir leurs théories. Aucun éditeur ne publiera les recherches d'un scientifique qui est fortement attaqué par la communauté scientifique. Le conformisme est une forte pression interne à ne pas négliger … 

Entre théorie et pratique ... 

Dans une démarche traditionnelle, le scientifique constate un fait, cherche une réponse au problème posé puis émet une hypothèse qui tente de la vérifier en la confrontant à la réalité par l'expérimentation. L'expérience est elle-même guidée par la théorie. « Les résultats d'observations sont des interprétations faites à la lumière des théories. […] C'est le théoricien qui formule la question et qui montre de la façon la plus précise quelle voie doit suivre l'expérimentateur» (7). Mais, le scientifique peut suivre une autre démarche. 

Einstein témoigne du rapport qui existe entre l'expérience et la théorie : « Newton écrit-il, croyait que les concepts fondamentaux et les lois de son système pouvaient être dérivés de l'expérience. [Mais] toute tentative pour réduire logiquement les concepts et postulats fondamentaux à partir d'expériences élémentaires est vouée à l'échec. […] La base axiomatique de la physique théorique […] doit être librement inventée »(8). Par exemple, la géométrie non euclidienne a été développée selon une très grande liberté, sans se soumettre à l'évidence. La théorie de la relativité est un autre exemple de science détachée de l'expérience. Or, ces théories, qui se sont difficilement imposées, ont permis à la science de se développer et de répondre à des questions bien concrètes. 

Selon la méthode employée, le problème à éluder est différemment abordé. L'historien des sciences Lewis Pyenson considère que cette distinction entre théorie et pratique représente une réelle différence dans la façon dont chaque groupe de scientifiques conçoit même les problèmes. Le théoricien considère son problème phénoménologique comme établi. Il analyse donc le phénomène par le biais de tout l'arsenal de règles mathématiques. Le praticien par contre transforme son problème de façon à l'adapter à l'outil mathématique. Il est donc fortement dépendant des outils dont il dispose. Selon les époques, l'une des démarches domine sur l'autre. Tout dépend parfois du contexte socio-économique dans lesquelles elles se déroulent. 

Double dépendance de la science 

Dans son livre La structure des révolutions scientifiques (9), T. Kuhn développe l'idée que chaque science travaille dans un cadre intellectuel propre, un modèle qui organise sa manière d'appréhender le réel. L'activité du scientifique serait "contrôlée" par deux situations : l'époque à laquelle prend naissance la théorie et l'appartenance du chercheur à tel ou tel groupe. 

On ne peut donc réellement soutenir que le scientifique est indépendant de toute influence, de toute subjectivité, ou plus exactement son avis est circonstancié, tributaire d'un jugement de valeurs ou de définitions. Puisque la science est affaire d'hommes et de femmes appartenant à une société, pensant, éprouvant des sentiments, croyant en certains dogmes, ce sont les règles de cette communauté qui déterminent finalement la science normale et orientent son avenir. 

Les connaissances que nous pouvons acquérir sont en outre limitées par la vigueur de notre esprit, fortement influencée par notre éducation et par le contexte. La structure de la pensée est gouvernée par des idées prélogiques qui nécessairement influencent sur l'orientation des recherches et des hypothèses, sur l'observation et l'interprétation. 

Limites de l'expérience... 

L'attitude scientifique se traduit par le besoin de s'informer, par l'esprit d'analyse. Cet esprit est critique. Il doute du savoir et procède par approximations. Dès lors, les lois que pose le chercheur doivent être vérifiées et les résultats reproductibles. Le progrès ne sera possible qu'une fois ses travaux soumis à l'évaluation par ses paires. Si les scientifiques estiment que la théorie mérite d'être soutenue, elle pourra éventuellement donner naissance à un nouveau concept. 

Prenons un exemple. Si en appliquant une théorie, on peut prédire un évènement, deux cas peuvent se produire : soit l’évènement se produit, soit il ne se produit pas. Si l'événement ne se produit pas, on peut dire que la théorie est fausse bien que le théoricien puisse éventuellement bricoler une explication pour sauver temporairement sa théorie. Mais si l’évènement se produit comme prévu, la théorie est confirmée mais rien ne permet de conclure que la théorie est vraie. Aucune théorie ne peut donc être vérifiée. Il est alors impossible de démontrer leur véracité. On ne peut qu'améliorer leur vraisemblance. Finalement, ce n'est que l'illusion du savoir. 

« La science ne repose pas sur une base rocheuse. La structure audacieuse de ses théories s'édifie en quelque sorte sur un marécage. Elle est comme une construction bâtie sur pilotis. Les pieux sont enfoncés dans le marécage, mais pas jusqu'à la rencontre de quelque base naturelle ou "données" et, lorsque nous cessons d'essayer de les enfoncer davantage, ce n'est pas parce que nous avons atteint un terrain ferme. Nous nous arrêtons, tout simplement, parce que nous sommes convaincus qu'ils sont assez solides pour supporter l'édifice, du moins provisoirement » (Einstein, 1922). 

Une réalité scientifique... 

Comme nous l'avons précisé dans un précédent article, la science possède quelques propriétés dont la reproductibilité des faits. D'où vient cette propriété fondamentale ? Car « elle résulte de la nature du fait scientifique, qui le distingue du fait ordinaire » (10). Un fait est en effet scientifique quand le scientifique isole le phénomène à étudier. Il n'est pas naturel, il est expérimental. Contrairement au fait ordinaire, il n'a pas d'aspects historiques. De même, quand un scientifique parle d'une réalité, il traite d'une réalité non naturelle, mais scientifique. Car il ne peut prendre en compte l'individualité d'une chose naturelle, beaucoup trop complexe à étudier tant ces composantes varient selon les circonstances. 

De plus, le fait ou la réalité scientifique sont précis et doivent être mesurables avec la plus grande rigueur. Cette réalité est donc perçue en fonction des instruments de mesures disponibles et de leur précision. Une théorie peut ainsi s'effondrer par la précision apportée par de nouveaux outils de mesures. 

La question de la mesure est fondamentale. Jusqu'à une certaine échelle, l'observation et la mesure sont indépendantes du fait observé. Nous pouvons ainsi mesurer avec rigueur la distance parcourue par une pomme quand elle tombe d'un arbre et le temps de sa chute. En outre, nos outils ne modifient pas la trajectoire du fruit. Mais, le fait observé est-il toujours indépendant de l'observation ? Ce n'est pas en effet le cas en microphysique. Car ce qui permet l'observation, c'est-à-dire la lumière (le photon), modifie l'énergie et la position des particules (électron) que nous voulons observer. Plus nous voulons préciser sa position, plus nous la modifions. Ainsi, sommes-nous incapables de la déterminer. Nous parlons alors d'incertitude, et donc de probabilités. Par l'observation, le scientifique peut donc agir sur l'objet observé. Cette influence est perceptible à partir d'une certaine dimension

Les éléments scientifiques sont donc abstraits des réalités naturelles puisqu'il est impossible d'expérimenter des faits réels dans des conditions précises, c'est-à-dire mesurables, ou plus exactement, ils ne peuvent pas être mesurés sous toutes ses composantes et sous toutes les forces agissantes. « Le vol capricieux d'un papillon peut agir sur l'état météorologique dans un an » (11). Cette réalité scientifique est donc simplifiée, en quelques sortes purifiée. 

Ainsi, le scientifique élabore un fait scientifique pour que la question soit nette et précise, et qu'il puisse avoir une réponse claire et permanente, reproductible dans les mêmes conditions expérimentales. La réponse n'est pas la réalité mais une « réalité » scientifique. Il est donc important de savoir dans une théorie la distance qui sépare le « réel » scientifique et le réel naturel... 

La loi scientifique est donc une sorte d'abstraction de la réalité. Elle n'atteint pas la nature profonde de la réalité. Alors, pourquoi cherchons-nous à établir des théories ? Car nous voulons rassembler et unifier notre savoir pour tenter peut-être de chercher le « pourquoi » des choses. Nous pouvons alors penser que le scientifique cherche à établir des théories car il est convaincu que le monde est établi par des règles, qu'il tente donc de rechercher et de formuler. « Il faut croire à la science, c'est-à-dire au déterminisme » (12). Ce présupposé est fort. Il n'est évidemment pas scientifique. Nous sommes véritablement dans un domaine de croyance. Le déterminisme est le principe premier sur lequel repose la science... Certains scientifiques propose alors « se dégager de cette foi aveugle dans les théories qui n'est au fond qu'une superstition scientifique » (13). N'allons pas jusque là. Sachons simplement reconnaître que la science se repose fondamentalement sur une « foi ». 


« Sans la croyance qu'il est possible de saisir la réalité avec nos constructions théoriques, il ne pourrait y avoir de science. Cette croyance est et restera toujours le motif fondamental de toute création scientifique. A travers tous nos efforts, dans chaque lutte dramatique entre les conceptions anciennes et les conceptions nouvelles, nous reconnaissons l'éternelle aspiration à comprendre, la croyance toujours ferme en l'harmonie de notre monde, continuellement raffermie par les obstacles qui s'opposent à notre compréhension » (14). 


La science est donc limitée par nos faiblesses et par notre nature. Elle tente de construire une réalité, bien différente de la réalité naturelle. Cette construction est influencée par des forces si peu scientifiques (contexte socio-culturel, économique et technologique, idéologie, conformisme scientifique). 

Aujourd'hui, plus consciente de ses limites et de sa raison d'être, la science a appris qu'elle ne pouvait prétendre à la vérité mais qu'elle pouvait proposer des réponses raisonnables, toujours améliorables. Elle ne se considère donc plus comme le dépositaire de la vérité... 

Fondée en outre sur une croyance fondamentale, non scientifique, qu'est le déterminisme, peut-elle encore s'opposer à la foi par principe et refuser de la considérer comme un mode de connaissance légitime ? 

Peut-elle alors au moins l'entendre ?... 




Références

1 Karl Popper, La logique de la découverte scientifique, Payot, 1973, 30, p107. Karl Popper est un des plus influents philosophes des sciences du XXème siècle. 

2 Louis Pasteur (1822-1895), microbiologiste français, discours prononcé à Douai, le 7 décembre 1854, à l'occasion de l'installation de la Faculté des Lettres de Douai et de la Faculté des sciences de Lille. 

3 Pierre-Gilles de Gennes (1932-2007), physicien français, Les objets fragiles, Plon, 1994, cité dans l'article La philosophie des sciences, www.astrosurf.com. Ce site est une source d'informations intéressantes sur les sciences. 

4 Max Planck (1858-1947), un des fondateurs de la mécanique quantique, dans Autobiographie scientifique, Flammarion Champs, 1994, cité dans l'article La philosophie des sciences, www.astrosurf.com

5 Johann Gregor Mendel (1822-1884), moine dans le monastère de brno en Moravie, botaniste. Il a posé les bases théorique de la génétique et de l'hérédité moderne. 

6 Alfred Lothar Wegener (1880-1930), astronome et climatologue allemand, connu pour sa théorie des dérives des continents. 

7 A. Einstein (1879-1955), fondateur de la relativité, prix Nobel de physique en 1921, Ideas and opinions, Souvenir Press, 1973, cité dans l'article Mathématiques, www.astrosurf.com

8 Einstein, cité dans l'article Les dérives de la science, www.astrosurf.com

9 T.Kuhn, La structure des révolutions scientifiques, Flammarion, 1962/1983, La tension essentielle : tradition et changement dans les sciences, Gallimard-nrf, 1990. 

10 Louis Millet, La Science aujourd'hui, Action familiale et scolaire 

11 Propos du météorologiste Lorenz, rapportés par Ivar Ikeland, Le calcul, l'imprévu, figures du temps, de Képler à Thom, cité dans La Science Aujourd'hui

12 Claude Bernard, Introduction à l'étude de la médecine expérimentale

13 Claude Bernard, ibid 

14 Einstein et Infeld, L'Evolution des idées en physiques des premiers concepts aux théories de la relativité et des quanta, cité dans La Science Aujourd'hui.

vendredi 18 mai 2012

Foi et art, sont-ils indissociables ?

Certaines paroles des Papes (1) peuvent nous surprendre. Elles devraient même nous étonner. Si nous entendons bien leurs enseignements, nous pourrions en effet croire que la foi et l'art sont indissociables (2). Par conséquent, nous pourrions en conclure que le catholique devrait rejeter la musique de Jean-Sébastien Bach ou les pièces de Shakespeare. Si un artiste n'est pas chrétien ou est hérétique, son œuvre serait contraire à la foi et donc potentiellement dangereuse. Nous pourrions alors en conclure que l'artiste ne peut qu'être chrétien. Or, la réalité est toute autre. Non seulement il existe un art musulman, indien ou polynésien authentique, mais l'art n'a pas attendu le christianisme pour se développer et atteindre la perfection. Que devons-nous donc en penser ? 

L'art est une expression de l'homme que seul peut apprécier l'homme. Mais qu'exprime-t-il ? Et que retient-il ? Nous avons donc deux points de vue à prendre en considération : celui de l'artiste et celui du public (3). L'un émet, l'autre reçoit, par un mode de connaissance spécifique … 

Dans les textes présentés, les Papes ne semblent traiter l'art que du point de vue de l'artiste. Ils lui demandent de refléter la beauté ineffable qu'il perçoit pour élever le public jusqu'à la source de toute beauté. Son inspiration provient du Créateur, qui lui donne le privilège de participer à son œuvre. Comme nous l'avons constaté avec Fra Angelico, un véritable artiste peut élever le public vers le bien, le beau et le vrai, et par ce mode de connaissance, vers Dieu lui-même. L'art atteint donc l'âme pour l'élever à la connaissance sublime... 

Dans ce mode de connaissance, il y a transmission entre l'artiste et le public. Que transmet l'artiste au public ? Des mots, des concepts, des idées ? Non, car la raison n'est pas mise en œuvre dans ce mode. Antonin Artaud n'a probablement pas tort quand il affirme qu'il est absurde que l'art parle d'abord à l'entendement, mais il se trompe quand il affirme que l'intention de l'artiste ne consiste qu'à parler qu'aux sens. Il a aussi raison quand il précise que la foule ne peut être saisie que par les sens, mais il se trompe encore quand il prend le public pour une foule. Dans l'art, il y a rencontre entre un artiste et une personne, les deux dotés d'une personnalité, d'une expérience et d'une âme, l'un atteignant l'émotivité et l'intelligence de l'autre au moyen des sens. Ces sens sont captivés par la matière, des formes et par d'autres éléments esthétiques, qui, agencés selon une certaine harmonie, forment un tout ... 

Un artiste doit maîtriser des techniques pour atteindre son public au moyen de ses sens à partir d'un support matériel composé. Contrairement à certaines idées répandues, l'art n'est pas inné. Il répond à des exigences et nécessite des techniques, un savoir-faire, qu'il faut acquérir par l'étude et le travail. Cela demande donc des efforts comme nous l'enseignent les Papes. Mais, cela ne suffit pas sinon peut-être serions-nous aussi devenu artistes après de longues heures de travail... Il faut en outre un certain génie, autrement dit des dons particuliers, un talent artistique. Et ces dons deviennent actes au moyen de techniques acquises ... 

Qu'exprime donc l'homme par l'art ? La Vénus de Milo était considérée comme une déesse au temps de l'antiquité. Sous le Moyen-Age, la foi était omniprésente dans l'art. Depuis la Renaissance, l'homme est au centre de l'art, sans aucune dimension religieuse. Le sacré a disparu. Au XIXème siècle, certains tentent même de faire une religion de l'art, pensant que la beauté sauvera le monde, comme dira Dostoïevski. Au XXème siècle, cette beauté est considérée comme trop contraignante. La forme est délaissée au profit de la force (4). 

Une œuvre exprime probablement une certaine perception du monde de la part de l'artiste au moment où il la compose. Le public la perçoit aussi à travers sa propre perception du monde dans un contexte parfois différent. Chacun donne du sens à une œuvre, sens qui peut évoluer durant les siècles. Les sculptures antiques éveillaient du mépris pour Saint Paul quand aujourd'hui, un chrétien peut en être émerveillé. Le contexte dans lequel évolue une œuvre a un rôle important dans sa compréhension et sa contemplation. Mais, peut-être, certaines œuvres garde intact ce que voulait transmettre son auteur quel que soit le contexte dans lequel elles évoluent ? 

Comment donnons-nous du sens à une œuvre ? Revenons à la Cité de Dieu. Nous donnons du sens selon l'inclination ou le mouvement de notre âme. Ainsi, une œuvre reflète nécessairement cette inclination, non seulement celle de l'artiste mais aussi celle du public. L'art et l'inclination de l'âme sont bien indissociables, chez l'artiste et chez le public. 

Les relations pouvant exister entre l'artiste et le public, à travers une œuvre, sont, à notre avis, fondamentales, surtout en notre époque où l'âme rencontre de multiples occasions de s'égarer et de chuter. Existe-t-il une réelle indépendance entre l'artiste et le public ? Saint Augustin nous précise dans son ouvrage que l'un de ses buts est d'extirper au fond de l'âme de ses contemporains les restes de paganisme. Nos contemporains ont encore aujourd'hui des restes du christianisme que des artistes tentent à leur tour de faire disparaître. Antoine Artaud a compris que par l'art, il pouvait déraciner ces restes, déconstruire leurs pensées. L'artiste a en effet le pouvoir d'influencer sur l'inclination de l'âme ... Car le public ne donne pas seulement un sens à une œuvre quand il la perçoit, il est aussi imprégné de cette œuvre selon sa force émotive et selon la résistance de son âme... 

Finalement, que déduire de ces quelques pensées ? Notre article n'a pas la prétention de démontrer quoi que ce soit, mais de donner quelques éléments de réflexions. L'art et la foi, au sens de l'inclination ou mouvement de l'âme, sont, à notre avis, indissociables non seulement pour l'artiste mais aussi pour le public, l'artiste pouvant néanmoins influencer sur le public... 

Mais une œuvre ne peut pas être rejetée sous le seul motif de la foi de l'artiste. Il faut surtout évaluer l'influence de son œuvre sur l'âme, considérée dans son environnement. Si la musique de Bach me permet de louer davantage Dieu, alors alleluia. Écoutons-là. De même, la tragédie a été délaissée et abandonnée par les premiers chrétiens pour les dangers qu'elle représentait, avant d'être reprise lorsqu'elle est devenue bienfaisante pour le public devenu chrétien. Mais si une pièce de théâtre parvient à rabaisser l'âme, à l'éloigner de la beauté et de la vérité, alors elle devrait être délaissée, quels que soient les raisons qui ont poussé l'artiste à la concevoir et à la mettre en scène. 

Le point essentiel est bien de considérer l'impact d'une œuvre sur une âme dans un contexte précis... 


Références
1 Voir articles La vocation de l'art selon les Papes (Mars 2012) et La responsabilité de l'artiste selon les Papes (Avril 2012). 
2 La foi prise dans un sens général, peut-être dans le sens de « croyance ». 
3 Nous utilisons le terme de « public » pour prendre en compte l'individu en tant que spectateur, auditeur, lecteur, etc. 
4 Christian Godin, philosophe, L'homme et son ouverture à la transcendance et au spirituel dans l'art, Institut théologique d'Auvergne, 19 janvier 2011 dans le cadre de « art et foi: quelle rencontre pour l'homme d'aujourd'hui ». 

dimanche 13 mai 2012

Qu'est-ce que l'hellénisme ?...

Il n'est guère facile de définir l'hellénisme tant les hommes l'ont manipulé à plusieurs reprises au cours de l'histoire, réapparaissant toujours avec un visage reluisant. Il est en effet porteur de sens et de valeurs

Les dictionnaires font plusieurs distinctions. Est hellénique ce qui relève du monde grec. Il vient du terme grec « ellhuikoz » désignant les mœurs grecs. Nous pouvons aussi trouver le terme « exhellénizô » qui signifie « rendre grec », « donner à quelque chose une forme grecque ». Le verbe «ellhuizw» (« hellénizô ») est plus précis car il signifie « parler grec, parler en grec ». La langue grecque est alors l'élément caractéristique de l'hellénisme. 

Pour définir l'accroissement spectaculaire des régions où le grec devint une langue de communauté et de vecteur d'influence culturelle, l'historien Johann Gustav Droysen (1) a inventé le terme d'« hellênizein » ou encore de « ellhuizeiu », ce qui signifie « vivre comme les Grecs ». Le terme désigne alors la période historique et les territoires de l'empire créé par Alexandre le Grand, de la conquête macédonienne jusqu'à Cléopâtre et à la conquête romaine, avec différents pôles de diffusion de l'hellénisme (Alexandrie, Antioche, ...). L'hellénisme serait alors la fusion entre les cultures grecques et orientales. Il aurait conduit à la mort de la « grécité ». 

L'hellénisme désigne aussi l'étude de la civilisation grecque antique. Selon les hellénistes, cette civilisation aurait contribué au progrès de la connaissance d'une haute culture et aurait institué les fondements de notre société, c'est-à-dire de la démocratie, de la politique, des sciences, de l'histoire et de la philosophie. 

Au sens religieux, l'hellénisme est la résurgence, ancienne ou contemporaine, de la religion grecque antique (2). Pour désigner le paganisme gréco-romain en réaction contre le christianisme, Julien l'Apostat (3) utilise, au IVème siècle, le terme d'« hellénismos ». Il n'englobe pas seulement des valeurs religieuses mais aussi culturelles comme la langue, la philosophie, la littérature. L'hellénisme est ainsi entendu comme le patrimoine culturel païen de langue grecque. Il a été constitué pour opposer au christianisme l'antique civilisation et toutes les valeurs qu'elle représente. 



Nous pouvons ainsi distinguer trois sens principaux du terme « hellénisme », qui se rapportent tous aux notions de culture et de civilisation. D'abord, il peut définir une aire culturelle marquées par la langue et les mœurs grecques. Il s'opposerait aux cultures barbares et romaines. Il dépasse la Grèce et englobe l'Orient. Elle pourrait probablement englober l'empire byzantin. L'hellénisme peut alors être partagé par des chrétiens de langue grecque comme le sont notamment les Pères de l'Eglise d'Alexandrie ou d'Antioche, qui ont enrichi à leur tour le patrimoine culturel. 

L'hellénisme peut également représenter des valeurs religieuses et culturelles d'une époque antérieure au christianisme. Il finit par se confondre avec le paganisme. Il a été conçu en réaction contre les «Galiléens», tenus comme responsables de sa disparition. Le christianisme est alors exclu du patrimoine culturel dont seuls les païens serait détenteurs légitimes. 

Enfin, dans un sens plus restreint et encore plus postérieur à l'antiquité, elle peut désigner la vision que les hellénistes auraient de la civilisation grecque antique, aujourd'hui disparue, d'où serait issue la civilisation occidentale, ou plutôt ce qu'elle a de meilleure. On lui donne donc une supériorité politique et intellectuelle supérieure à toute autre civilisation. Il est la référence. Cela conduit inévitablement à négliger les apports des autres civilisations. 

Après cette très brève étude, nous pouvons mieux comprendre les ambiguïtés d'un terme aussi riche que celui de l'« hellénisme ». Utilisé à mauvais escient, il peut être une arme redoutable aux mains des antichrétiens qui souhaiteraient considérer le christianisme comme opposé à la civilisation et aux progrès, et donc contraire au bonheur des peuples et des âmes. Mais les partisans de l'hellénisme unifient des valeurs et des mœurs disparates pour tenter de donner du sens à un monde, peut-être imaginaire, mais surtout marqué par la pluralité et la division, quand le christianisme donne du sens à la réalité, notamment une unité et une direction. L'hellénisme apparaît alors comme une pâle tentative bien humaine d'une explication du monde et de la vie... 

Mais, comme l'ont bien compris les Pères de l'Eglise, il n'est pas juste et honnête d'exclure le christianisme du patrimoine culturel de l'humanité comme le voulaient et le souhaitent encore les antichrétiens. Il a joué et continue de jouer un rôle bénéfique dans l'art, les lettres et dans les sciences. La foi n'est donc pas l'apanage des ignorants, des misérables et des pauvres d'esprits, comme le colportaient les premières calomnies portées contre les chrétiens. Elle est aussi vécue par l'élite et par tous ceux qui participent à l'élévation culturelle de l'humanité. Le christianisme élève davantage l'homme aux plus hauts degrés de civilisation car il le tourne vers la Cité de Dieu... 

1 Droysen (1808-1884), historien allemand.
2 Le paganisme avait été interdit par l'empereur Théodose en 392 ou 393.
3 Julien l'Apostat (331 ou 332, 363), empereur de 361 à 363, a voulu rétablir le paganisme. Autrefois chrétien, il a renié sa foi.

mardi 8 mai 2012

Sept mois de voyage, bilan...

Connaître et faire connaître, éveiller notre devoir apostolique, tel sont les objectifs que nous nous sommes fixés en publiant le premier article, non pour satisfaire à un quelconque confort intellectuel ou pour occuper des journées déjà bien remplies, mais pour répondre à une nécessité et à une obligation, celles de participer au combat chrétien. Après sept mois de labeur, que pouvons-nous déjà retenir de cette entreprise, bien ambitieuse ? 

Des antichrétiens nous ont conduit dans des temps antiques qui, autrefois si lointains, nous apparaissent aujourd'hui bien proches et bien utiles pour répondre à leurs attaques. Nous avons rencontré et entendu des chrétiens soucieux de défendre la foi et de la témoigner au mépris de leur vie, n'hésitant pas à attaquer les calomniateurs et les persécuteurs. Attentifs à leurs paroles, nous avons approfondi notre foi et mieux compris les faiblesses de nos ennemis comme la force du christianisme... 

Toujours dans le même désir de comprendre la « christianophobie », nous nous sommes aussi aventurés dans le monde de l'art, sans hésiter à côtoyer ceux qui veulent déraciner l'homme pour détruire les dernières traces de christianisme enracinées en lui. Ces « déconstructeurs » nous ont menés vers d'autres idéologues aussi dangereux qui, par la sémantique, tentent aussi d'imposer une autre forme de société. Nous avons ainsi découvert une méthode subtile et puissante en vue d'une ambition diabolique... 

Mais, subitement, dans notre périple, nous avons découvert la beauté sublime, celle qui élève vers Dieu, l'art parfait, l'art ineffable. Fra Angelico nous a subjugués et élevés jusqu'aux beautés célestes. Parfait exemple du type d'artistes que nous ont décrits les Papes.. Ces Papes qui, conscients des exigences de l'art et de son pouvoir, osent rappeler aux artistes leurs devoirs et leurs responsabilités... 

Notre voyage nous a aussi conduits vers d'autres cieux, notamment vers le monde de la science, ce monde autrefois si fier et si arrogant de ses réussites, monde qui nous apparaît désormais plus sage et plus conscient de ses limites. Nous avons hésité à l'étudier. Pourtant, il est si présent dans notre environnement personnel et professionnel. En effet, tant de rencontres ont dégénéré en conflits, en compromissions ou en démissions. Aujourd'hui, ce temps nous semble révolu ... 

Enfin, nous avons eu l'audace de nous aventurer dans l'islam, ce grand méconnu et pourtant si omniprésent dans nos villes. Nous avons écouté des musulmans, lu certains de leurs articles, et nous avançons encore péniblement dans le Coran. Ainsi, l'islam se dévoile progressivement, révélant peu à peu ses faiblesses, ses erreurs, ses mensonges... 

Depuis sept mois, à travers ses multiples périples, nous découvrons probablement un autre monde. Le voyage forme la jeunesse, nous dit un vieux dicton. En effet... Certes, parfois, nous nous égarons probablement dans nos réflexions tant nos faiblesses et nos lacunes sont grandes. Mais, quel monde découvrons-nous ? Un monde hostile et dangereux, mais pas aussi fort et dominant que nous pouvions le penser. Derrière la réalité médiatique, derrière nos préjugés que réconfortent notre ignorance et notre solitude, se trouve une autre réalité, celle des remises en cause, des questionnements, des incertitudes. Le monde n'est plus aussi arrogant qu'il l'était. Il sent sa fragilité et sa misère. Et ses vulnérabilités ne sont pas difficiles à percevoir et à exploiter... 

Et face à ce monde, nous ne sommes pas aussi faibles et isolés que nous avions tendance à croire. Le christianisme recèle en son sein un trésor inépuisable qu'ont constitué tant de chrétiens épris d'amour et de foi. Ce seul trésor suffit parfois pour répondre aux attaques des antichrétiens. Preuve que Notre Seigneur n'abandonne pas l'Eglise dans son exil ici-bas. Combien de David ont-ils déjà triomphé de Goliath ! Mais, faut-il encore nous approprier de ce trésor ! … 

Notre foi peut encore ébranler le monde et répondre aux attentes de nos contemporains. Utopie, me direz-vous ? Alors, pourquoi croyons-nous ? … 

Mais pourquoi tant d'âmes égarées et éperdues !… Car le mensonge et la haine répandent leur venin non pas par leurs forces, mais par nos propres faiblesses, notre paresse, notre indifférence et par notre silence ! … Et dans notre monde numérique, notre silence n'est plus alors faiblesse, mais faute... 

Nous pouvons manifester et nous indigner. Nous pouvons encore crier notre colère devant les diverses manifestations du mal et de la haine. Et elles ne manqueront pas encore. Cela est parfois nécessaire, inéluctable, mais insuffisant. Car si le combat ne consiste qu'en cela, il est bien vain et dangereux. Ne sommes-nous que des protestataires ? N'avons-nous rien d'autres à proposer ? Nous avons choisi une autre voie... Nous savons que la foi a gagné des cœurs non en se plaignant, en se lamentant ou en laissant faire, mais en témoignant dans le monde, par la parole et par l'exemple. 



En poursuivant ce voyage, nous menons un autre, en parallèle, plus intérieur, plus silencieux, plus enrichissant encore. Car au contact de serviteurs de Dieu, ne sommes-nous pas conduits à nous tourner davantage vers la Cité de Dieu ? Et donc vers la prière ? Prière encore plus indispensable car la crainte de nous égarer est aussi grande que notre joie ! 

Que Notre Seigneur nous éclaire et nous protège ! Notre Dame du Bon Secours, veillez sur nous... 

Et vous, lecteurs, que nous tenons à remercier pour votre assiduité et votre gratitude, priez pour nous... 

Deo gratias...