" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


lundi 11 mai 2015

Christianisme : fidélité à la Parole de Dieu

Notre Seigneur envoie ses douze Apôtres en leur commandant : « N’allez point vers les gentils, et n’entrez point dans les villes des Samaritains ; mais allez plutôt aux brebis perdues de la maison d’Israël. » (Matth., X, 6). Son enseignement est clair. La Parole doit d’abord être annoncée aux Juifs. A plusieurs reprises en effet, il précise sa mission. « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. » (Matth., XV, 24). Les Apôtres sont donc envoyés pour convertir les juifs. Fidèles aux ordres de Notre Seigneur Jésus-Christ, ils enseignent auprès des Juifs dans le Temple et dans les synagogues.

La prédication de Saint Pierre


Saint Pierre et Saint Jean
guérissant un boiteux

(gravure Doré bible )



Dans sa première prédication, que relate les Actes des Apôtres, Saint Pierre interpelle les Juifs de Jérusalem. « Prêtez l’oreille à mes paroles. » (Act. Ap., II, 14). Pour expliquer les miracles qu'il vient de faire, il en appelle au témoignage prophétique de Joël et de David. Il affirme ainsi la continuité divine entre l’histoire sainte et les événements dont ils sont témoins. Ce qui a été promis, préparé, ébauché dans le passé se réalise enfin devant leurs yeux. Il donne donc du sens aux prodiges qui se manifestent. Tout cela a en effet un sens. Ils sont la réalisation des desseins divins.

Dans sa deuxième prédication, Saint Pierre rappelle à ses auditeurs les souvenirs de leurs ancêtres et unit de nouveau les événements au passé du peuple de Dieu. C’est donc une même histoire qui se poursuit. Il n’y a ni rupture ni scission. La Sainte Écriture en est témoin comme le montre les prophéties. Notre Seigneur est bien celui qui a été prédit par « tous les prophètes depuis Samuel et de l’alliance que Dieu a établie avec nos pères […] » (Act. Ap., III, 25). En outre, Notre Seigneur a été glorifié par « le Dieu de nos pères », c’est-à-dire par « le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob » (Act. Ap., III, 13). Celui que Saint Pierre prêche a été justifié par Celui que les Juifs prétendent servir…

Avec un ton mesuré, sans aucune animosité, Saint Pierre reproche alors aux Juifs la mort de Notre Seigneur Jésus-Christ, « que vous avez livré à Pilate et renié devant lui […] Vous avez renié le Saint et le Juste, et vous avez sollicité la grâce d’un meurtrier. » (Act. Ap., III, 13-14) Mais il diminue leur responsabilité. « C’est par ignorance que vous avez agi, aussi bien que vos chefs. »(Act. Ap., III, 17). La passion et les souffrances ont aussi été prédites. Les Juifs ont finalement réalisé ce que les prophètes avaient annoncé.

Rien n’est pourtant perdu. « Repentez-vous donc et convertissez-vous pour que vos péchés soient effacés » (Act. Ap., III, 19). Il y a certes continuité entre l’histoire sainte dont ils sont les héritiers et Notre Seigneur Jésus-Christ mais le temps tant attendu est venu, « jours dont Dieu a parlé anciennement par la bouche de ses saints prophètes » (Act. Ap., III, 21), jours de rafraîchissement et de repos. Notre Seigneur Jésus-Christ est la fin de cette histoire comme il est le but de la première partie du plan de Dieu, que relate l'Ancien Testament. Il est « le terme régulier et l’aboutissement final de toute l’ancienne économie religieuse »[1].

Saint Pierre et Saint Jean
devant Sanhédrin

(P. Gall, XVIe)
Pour appuyer ses déclarations, Saint Pierre évoque l’autorité de Moïse que les Juifs ne peuvent récuser. « Moïse a dit : le Seigneur votre Dieu vous suscitera d’entre vos frères un prophète comme moi : vous l’écouterez en tout ce qu’il vous dira. Et quiconque n’écoutera pas ce prophète sera exterminé du milieu du peuple. » (Act. Ap., III, 22-23). Il faut donc écouter Notre Seigneur Jésus-Christ pour gagner cette éternité. 

Il rappelle que les Juifs détiennent un privilège puisqu’ils sont « les fils des prophètes et de l’alliance » (Act. Ap., III, 25). Ils ont été longuement préparés et c’est au milieu d’eux que Dieu a suscité le Sauveur. « C’est pour vous premièrement que Dieu, suscitant son Fils, l’a envoyé pour vous bénir, afin que chacun revienne de son iniquité. » (Act. Ap., III, 26).

Le discours de Saint Pierre est interrompu. Saint Luc nous apprend que les Sadducéens n’apprécient guère l’enseignement qu’il donne au peuple, notamment la résurrection des morts en la personne de Jésus. Ils sont aussi probablement mécontents qu’il puisse enseigner si librement au Temple. Comment les prêtres et les scribes peuvent-ils ignorer leurs prédications ?

L’embarras du Sanhédrin

Les Apôtres sont alors conduits au Sanhédrin. Les membres du grand conseil juif sont inquiets comme ils l’ont été avec Notre Seigneur Jésus-Christ. Rappelons que la seconde prédication de Saint Pierre fait suite à l’émotion de la population juive lorsqu’elle l’a vu guérir un boiteux. « Par quelle puissance ou au nom de qui avez-vous fait cela ? » (Act. Ap., IV, 7). Le Sanhédrin ne comprend pas comment Saint Pierre a pu accomplir un tel miracle. Ils savent aussi qu’il l’a réalisé au nom de Celui qu’ils ont condamné à mort.

Guérison de l'aveugle-né
(Duccio di Buoninsegna)
Les Sadducéens et les Pharisiens ne comprennent pas, pas plus qu’ils n’ont compris Notre Seigneur Jésus-Christ. Ils sont de nouveau confrontés à une situation paradoxale. Ils sont en effet témoins d’un miracle indiscutable, reconnu par un grand nombre. Or un miracle ne peut provenir que de Dieu ou de ses fidèles serviteurs. L’aveugle-né que Jésus a guéri a été parfaitement lucide devant ceux qui l’interrogeaient : « nous savons que Dieu n’écoute pas les pécheurs ; mais si quelqu'un honore Dieu et fait sa volonté, c’est celui-là qu’il exauce. Jamais on n’a ouï dire que quelqu'un ait ouvert les yeux d’un aveugle-né. Si celui-ci n’était pas Dieu, il ne pourrait rien faire. » (Jean, IX, 31-32). Or pour les Sadducéens et les Pharisiens, l’auteur du miracle est un homme infidèle aux prescriptions de la Loi tel qu’ils les entendent. « Cet homme n’est point de Dieu, puisqu'il ne garde point le sabbat. » (Jean, IX, 16). L’aveugle-né a bien compris qui était Notre Seigneur Jésus-Christ. Il ne résiste pas à l’évidence des faits.

La remise en question

Les membres du Sanhédrin interrogent donc l’Apôtre qui de nouveau proclame fermement la mission de Notre Seigneur Jésus-Christ et rappelle sans ambiguïté leur responsabilité et leur erreur dans sa mort. « Ce Jésus est la pierre qui a été rejetée par vous qui bâtissiez, et qui est devenu un sommet d’angle » (Act. Ap., IV, 11). Il fait en fait allusion à une prophétie. Il les dirige donc vers la Sainte Écriture. C’est encore la Sainte Bible finalement qui leur répond. Elle a aussi prédit les événements en cours : les disciples de Jésus sont rejetés par les autorités juives.

Le Sanhédrin interdit finalement les Apôtres « absolument de parler et d’enseigner au nom de Jésus » (Act. Ap., IV, 1). Mais en dépit de ses injonctions et de ses menaces, Saint Pierre ne peut pas se taire. « Nous ne pouvons pas ne point parler de ce que nous avons vu et entendu. » (Act. Ap., IV, 20). Or le Sanhédrin est le tribunal suprême. Saint Pierre révoque pourtant son autorité. « Jugez s’il est juste devant Dieu de vous obéir plutôt qu’à Dieu. » (Act. Ap., IV, 19) Il affirme finalement le droit divin et sa liberté d’apostolat. Le Sanhédrin n’a pas d’autres choix que de le menacer. Il ne peut pas en effet le punir tant le miracle est connu et éclatant. Qui ne peut pas y voir la main de Dieu ?

Les miracles des Apôtres et le succès de leur apostolat auprès du peuple juif énervent les Sadducéens. Les Apôtres finissent par être emprisonnés, sans-doute pour être exécutés. Quelle fut alors leur surprise lorsqu'ils apprennent que libérés de manière incompréhensible, ils enseignent de nouveau librement au Temple en toute tranquillité ?!

De nouveau emprisonné, Saint Pierre comparait devant le Sanhédrin. Le grand-prêtre se plaint qu’il fasse peser sur lui le sang de Notre Seigneur Jésus-Christ. Quel revirement ! « Vous voulez faire retomber sur nous la sang de cet homme ! » Il ne prononce pas le nom du condamné. « Nous vous avons expressément défendu d’enseigner ce nom-là » (Act. Ap., V, 28). 

Mais après avoir de nouveau affirmé le droit divin, Saint Pierre, inflexible, lui répète inlassablement le même témoignage de Notre Seigneur Jésus-Christ : Dieu a ressuscité Jésus qu’ils ont crucifié et l’a élevé « par sa droite comme prince et sauveur, pour donner à Israël pénitence et rémission des péchés » (Act. Ap., V, 31). Il réaffirme la continuité entre l’histoire sainte et Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est bien « le Dieu de nos pères » qui « a ressuscité Jésus » (Act. Ap., V, 30). « Le christianisme n’est pas chose nouvelle, il est impliqué dans la doctrine même dont les membres du tribunal sont les représentants. »[2]

Gamaliel enseignant
(British Library)
En colère, le prince des prêtres veut faire mourir les Apôtres quand l’un des Pharisiens propose au Sanhédrin une voie plus sage. Gamaliel prend la parole. Il est le maître de Saül, celui qui deviendra plus tard Saint Paul. Il est un des premiers grands rabbins. Sa réputation est déjà grande. Il se lève dans l’assemblée et demande l’éloignement des Apôtres afin d’exprimer plus librement sa pensée.

Gamaliel rappelle la révolte de deux chefs rebelles qui ont péri et dont leurs disciples se sont vite dispersés. Flavius Joseph les mentionne aussi dans ses Antiquités juives. Avec le temps, leur révolte s’est en effet vite estompée. De même, le temps permettra de juger de la valeur du christianisme. « Ne vous occupez plus de ces hommes, et laissez-les ; car si cette entreprise ou cette œuvre est de l'homme, elle se dissipera ; que si elle est de Dieu, vous ne pourrez la détruire, et peut-être que vous vous trouveriez combattre contre Dieu lui-même. » (Act. Ap., V, 38-39). Prudent et mesuré, Gamaliel a été entendu. Le Sanhédrin suit l’avis du Pharisien.

Cet avis est surprenant pour deux raisons. D'une part, il révèle un certain doute de la part d’un grand docteur de la foi. Et si effectivement l’œuvre est de Dieu ? Les miracles ne peuvent qu’interroger les âmes attentives et non aveugles. La persistance du christianisme est un argument apologétique indéniable. Gamaliel demande donc au Sanhédrin de laisser agir le temps. D'autre part, il ne se prononce pas sur l’enseignement des Apôtres. Il ne leur reproche rien. Alors que les Pharisiens sont minoritaires dans l’assemblé, le Sanhédrin accepte de suivre l’avis de Gamaliel. Il n’est pas le seul à douter…

En dépit des supplices qu’ils ont subis, sans-doute pour les punir de rébellion à l’égard du Sanhédrin ou par haine, les Apôtres poursuivent leur apostolat et répandent la bonne parole en public, au Temple et dans les maisons particulières. « Tous les jours, ils ne cessaient, dans le Temple, et de maison en maison, d’enseigner et d’annoncer le Christ Jésus. » (Act. Ap., V, 42). Les Apôtres gagnent ainsi de nombreuses âmes à Jérusalem, y compris parmi les prêtres et les scribes. « Une multitude de prêtres obéissaient à la foi » (Act. Ap., VI, 7).

Le discours de Saint Étienne

Un autre épisode des Actes des Apôtres nous permet de mieux comprendre encore les relations entre les premiers chrétiens et les Juifs. Saint Luc nous relate l’institution des diacres et l’apostolat de Saint Étienne. D'origine grecque, Saint Étienne se démarque rapidement des autres diacres. Il accomplit lui-aussi des miracles au nom du Seigneur Jésus-Christ. « Homme de plein de foi » (Act. Ap., VI, 5), « plein de grâces et de force » (Act. Ap., VI, 8), il apparaît plus agressif et résolu que les autres disciples.

La prédication de Saint Etienne soulève la résistance des Juifs de la Diaspora, et plus particulièrement des Synagogues des Affranchis, des Cyrénéens, des Alexandrins. Contre lui se coalisent en effet les Juifs occidentaux et helléniques. Mais ils sont incapables de répondre à Saint Étienne. Pour le faire taire, ils sont dans l’obligation d’user de moyens odieux. Ils subornent des témoins qui l’accusent de blasphémer. « Nous l’avons entendu proférer des paroles blasphématoires contre Moïse et contre Dieu. » (Act. Ap., VI, 11). « Cet homme ne cesse de proférer des paroles contre le lieu saint et contre la Loi. » (Act. Ap., VI, 13). L’accusation est terrible. Elle soulève naturellement la population et attire la colère du Sanhédrin.

Prédication de Saint Étienne 
( Charles-Joseph Natoire, XVIIIe)
Saint Étienne est conduit devant le Sanhédrin. Il parle librement. Il professe clairement sa foi juive. Son discours montre combien il est familier avec l’histoire du peuple d’Israël et avec le plan de Dieu. A plusieurs reprises, il insiste sur la libre volonté et action de Dieu. « C’est lui » qui agit à sa convenance. Et Moïse n’est que son serviteur. Il rappelle aussi les nombreuses oppositions, contestations et révoltes qui sont intervenues au cours de la vie de Moïse. Il évoque aussi les circonstances qui ont conduit à la construction du Temple sans oublier la protestation de Saint Jérémie. Le prophète a en effet protesté contre l’orgueilleuse sécurité des Juifs pour qui le Temple était une garantie divine. Salomon lui-même sait combien le Temple lui est indigne. « N’est-ce pas ma main qui a fait toutes ces choses ? »(Act. Ap., VII, 50). Tout le passé montre finalement l’amitié de Dieu à l’égard de son peuple en dépit de ses ingratitudes et révoltes, une amitié qui ne dépend pas des Juifs, qui dépasse la Loi et le Temple, une amitié parfaitement libre. Il est donc faux de donner au Temple et à la Loi une valeur absolue. Ainsi Saint Étienne s’oppose à la conception juive de la religion. 

Et continuant son discours avec plus d’énergie, il accuse les Juifs de s’entêter à s’opposer à Dieu. « Durs de tête et incirconcis de cœur, vous résistez toujours à l’Esprit-Saint ; il en est de vous comme de vos pères. Lequel des prophètes vos pères n’ont-ils point persécutés ? » (Act. Ap., VII, 51). Il dénonce leur aveuglement, leur étroitesse de cœur et d’esprit, leur orgueil qui rabaisse Dieu à des pensées bien humaines. Il les accuse d’avoir tué ces hommes qu’ils considèrent désormais comme des Justes par excellence, ces prophètes qui ont annoncé la venue du Juste, celui-là même qu’ils ont condamné à mort. Ils n’ont cessé de mépriser Dieu. Son réquisitoire est sans appel.





La foule est furieuse en entendant de tels propos. « En entendant ces paroles, la rage déchirait leur cœur, et ils grinçaient des dents contre lui. »(Act. Ap., VII, 4). Mais ce n’est pas la foule qui fait interrompre le discours. C’est une vision surnaturelle. Dans le ciel, il voit la gloire de Dieu et de Jésus, debout à la droite du Père. « Voici que je vois les cieux ouverts, et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu » (Act. Ap., VII, 56). C’en est trop pour les Juifs. Saint Etienne est finalement lapidé, devenant le premier martyr d’une longue série. Cependant, imitant Notre Seigneur Jésus-Christ, avant de mourir, il pardonne ses bourreaux…

Remarquons que ce sont bien des Juifs qui tuent Saint Étienne, enfreignant ainsi la loi romaine. Saint Étienne est bien l’objet d’une véritable exécution menée selon les règles juives et non d’un excès de fureur d’une foule excitée. Les Romains semblent être en fait absents de la scène. Ils sont moins préoccupés de leur domination. Effectivement, nous sommes à une époque où Jérusalem est bien vue par Rome. Elle a été la première cité à saluer le nouvel empereur Caligula.


Les discours de Saint Pierre et de Saint Étienne sont riches d’enseignement. Remarquons d’abord qu’ils prêchent en s'appuyant sur la Sainte Écriture. Ils témoignent de ce qu’ils ont vu et entendu tout en rapportant leurs témoignages aux prophéties bibliques. En outre, ils défendent leur foi et leur piété. Et nombre de Juifs, y compris des chefs de synagogues, des prêtres et des Pharisiens, adhèrent à leurs paroles. Les docteurs de la Loi ne parviennent pas non plus à contester leur enseignement. En un mot, leurs discours ne sont pas contraires à la foi juive et à la Sainte Écriture. Contrairement aux accusations des Juifs, les chrétiens ne forment pas une « secte séditieuse » ou une « hérésie ». Ils s’opposent plutôt à l’étroitesse d’esprit, à l’orgueil et à l’aveuglement des Juifs. « Le cœur de ce peuple s’est appesanti, et ses oreilles se sont endurcies » (Matth., XIII, 15).

Conscient de sa culpabilité et désespérant de tout salut, Judas a préféré se tuer. De peur de se remettre en cause, les Juifs n’ont qu’une solution : réprimer les chrétiens. Ils ne veulent point entendre leurs méfaits. Ils ne veulent plus assumer la mort de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Une ère nouvelle

Saint Pierre défend particulièrement la continuité de l’histoire sainte et de Notre Seigneur Jésus-Christ. Il n’y a aucune rupture. Cependant, s’il y a continuité et unité, il y a aussi nouveauté. Le temps du salut promis est enfin arrivé. Notre Seigneur Jésus-Christ a ouvert les cieux. Un temps est donc achevé, un autre commence. Saint Pierre révèle nettement la déchéance du Sanhédrin. Saint Étienne révèle l’amitié de Dieu qui dépasse la Loi et le Temple. Nous sommes désormais loin de la conception religieuse de leur temps, conception qu’ils dénoncent avec vigueur.

Si cela est nouveau, rien n'est surprenant. Tout se déroule en effet selon un plan divin que Dieu Lui-même a annoncé par ses Prophètes. Les signes sont en effet nombreux dans la Sainte Écriture pour indiquer l’ère promise. En refusant ces signes et en persévérant dans leur conception erronée, le judaïsme a fait sécession.

Dans une conclusion magnifique, Saint Paul reprend toutes les prophéties qui annonçaient leur aveuglement : « Vous entendrez de vos oreilles, et vous ne comprendrez point ; regardant, vous regarderez, et vous ne verrez point. Car le cœur de ce peuple s’est appesanti, leurs oreilles sont devenues sourdes, et ils ont fermé leurs yeux ; de peur qu’ils ne voient de leurs yeux, qu’ils entendent de leurs oreilles, qu’ils ne comprennent de leur cœur, qu’ils ne se convertissent et que je ne le guérisse. » (Act. Ap., XXVIII, 25).

Saint Étienne prononce sans doute le discours le plus clairvoyant. Il montre l’origine de la sécession des Juifs. Leur conception de Dieu est radicalement opposée au Dieu véritable. Dans une telle conception, que devient en effet sa volonté divine et sa liberté ? La justice et l’amitié de Dieu sont bien éloignées des vues étroites et orgueilleuses des Juifs. Les fidèles de Dieu ne peuvent pas suivre une telle conception qui les éloigne de la véritable connaissance et de l’adoration. Les chrétiens n'ont pas d'autre nécessité que celle de se séparer des Juifs pour demeurer fidèles à Dieu et poursuivre le long chemin que Dieu a tracé afin de conduire les hommes dans la bienheureuse éternité.



Références
[1] Dom Paul Delatte, Les Épîtres de Saint Paul, replacées dans le milieu historique des Actes des Apôtres, Actes des Apôtres, chapitre III, Tome I, 1928.
[2] Dom Paul Delatte, Les Épîtres de Saint Paul, replacées dans le milieu historique des Actes des Apôtres, Actes des Apôtres, chapitre III.

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