La révolution religieuse
du XVIe siècle a bouleversé le monde chrétien. Une grande partie de la
population occidentale a quitté l’Église catholique pour former des communautés chrétiennes.
La prétendue « Réforme » a ainsi
divisé la chrétienté. Elle s’est elle-même divisée. Face à cette situation
dramatique, l’Église catholique a réagi. La « Contre Réforme » désigne de manière classique et maladroite ce
temps de la réaction, même si cependant, depuis quelques années, le terme de
« Contre-Réforme » est
abandonné au profit de celui de « Réforme
catholique », soulignant davantage l’œuvre positive accomplie par
l’Église.
Le concile de Trente est
généralement présenté comme « la
réponse catholique pour se protéger de la réforme protestante »[1].
Il est souvent présenté comme celui qui a édifié une nouvelle Église en
réaction au protestantisme, l’« Église
de la Contre Réforme », terme plutôt négatif. On l’accuse alors
d’avoir consacré la division du christianisme. Néanmoins, aujourd’hui, son
succès est unanimement reconnu. Il est
décrit comme une des belles œuvres de l’Église. Mais cinq siècles après, est-il
encore utile de s’en référer comme de nombreuses voix le font pour
dénoncer les erreurs d’aujourd’hui ?
Dans les années 60, des
voix ont présenté l’Église catholique comme une Église de combat et de
résistance, une Église fermée au monde, en lutte contre le monde, ancrée dans
les dogmes, en un mot l’Église de la Contre-réforme, une Église devenue
inadaptée au monde moderne. Elles réclament alors un profond changement pour
s’ouvrir au temps moderne. Si le concile de Vatican Ier est surtout visé dans
ces attaques, de telles visions nous renvoient aussi au concile de Trente,
magnifié par les uns et calomnié par les autres. Mais dans l’opinion
catholique, il n’est guère connu. Comment peut-il l’être après de très longues
années de silence et de mépris ?
Néanmoins, revenons sur
cette idée selon laquelle le concile de Trente aurait bâti une nouvelle Église.
Si tel était le cas, un autre aurait le droit d’en bâtir une nouvelle afin
de l’adapter à son temps. La proposition est redoutable, et dangereusement
efficace. Nous pouvons aisément voir toutes ses conséquences pratiques. Elle a
souvent prévalu dans les esprits d’une manière plus ou moins insidieuse. Ainsi
le concile de Vatican II est présenté comme celui qui transforme l’Église
occidentale en une Église mondiale, une Église fermée au monde en une Église
plus ouverte, une Église consciente de la mondialisation[2].
Mais la prémisse est-elle vraie ? Une nouvelle Église était-elle née du concile
de Trente ?
Les prétendus « réformateurs », après l’avoir
longuement réclamé, voient ce concile comme celui de Rome, un concile inutile.
Ils rient de ces évêques réunis à Trente alors qu’ils savourent sans-doute leur
succès et leur expansion en Europe. Ils le condamnent sans appel et rejettent
ses décisions. Et le concile lance aux thèses protestantes des anathèmes en
grande quantité, condamnant leur conception religieuse. L’Église catholique
s’affirme devant les nouvelles communautés. En notre temps, où l’œcuménisme
moderne est tant prêché, le concile de Trente n’est guère apprécié.
Pourtant, de manière
unanime, les historiens, même protestants, soulignent le succès du concile de
Trente. Il est décrit comme un tournant de l’Église catholique, qui « a dominé de haut, du côté romain, trois
siècles de vie religieuse »[3].
Tout en précisant aujourd’hui que de nombreux mouvements de réformes
catholiques l’ont précédé, ils soulignent son œuvre dans l’effort considérable
que l’Église a entrepris pour se réformer et faire progresser la foi. Or
aujourd’hui, en notre temps d’amertume, l’Église connaît une nouvelle et
profonde crise que le concile de Vatican II n’a pas résolue, voire l’a accentuée
selon certaines critiques. Faut-il alors oublier ce concile dans ce temps de
déchristianisation et de doute que nous connaissons ?
Pour répondre à tant de questions, nous allons nous pencher sur ce concile...
Pour répondre à tant de questions, nous allons nous pencher sur ce concile...
Une Europe chrétienne
divisée
Revenons d'abord au temps qui
précède celui du concile de Trente, c’est-à-dire au début du XVIe siècle. Depuis
1517, c’est-à-dire depuis l’affichage des thèses de Luther, une contestation
divise les Chrétiens occidentaux. Luther, Zwingli, Bucer, puis plus tard Calvin,
remettent en cause l’autorité de l’Église catholique et sa foi. Les fondements
du christianisme sont discutés et rejetés, parfois avec violence. De nouvelles
confessions de foi sont élaborées, de nouvelles religions chrétiennes voient le
jour. Tous ces mouvements de révolte sont englobés sous un terme, celui du « protestantisme ». Un grand nombre
d’États et de peuples ont suivi la nouvelle foi, se séparant de l’Église
catholique. Les Pays-Bas, la Pologne, les pays nordique y adhèrent. Rien ne
semble arrêter son succès prodigieux. L’Angleterre avec Henri VIII a aussi fait
sécession, certes pour d’autres raisons, mais bientôt l’île verra croître une
nouvelle forme de protestantisme, l’anglicanisme. En trente ans, l’Église
catholique recule partout. Elle est menacée de toute part. Seules l’Espagne et
l’Italie semblent être épargnées. La France se tâte, même si la nouvelle foi
gagne la grande noblesse et de nombreuses régions.
Depuis le début du XVIe
siècle, de profondes querelles divisent donc les Chrétiens. Les discours
exacerbent les passions. Les protagonistes se battent à coups de pamphlets
injurieux. Les résistances radicalisent les positions. Les nouvelles doctrines soulèvent
de l’enthousiasme et conduisent rapidement à des révoltes populaires. Elles
apportent ainsi division, violence et destruction. L’intolérance est à son
comble. La société vacille. La querelle devient vite politique tant les princes
ont pris fait et cause pour des doctrines plus favorables à leurs intérêts.
Elle aboutit alors à des conflits plus graves qui ensanglantent le Saint Empire
germanique. De nouvelles puissances politiques et bourgeoises s’y mêlent,
aggravant la situation. Tout est bon pour remettre en question l’hégémonie impériale
et une société sans-doute devenue désuète. L’Empereur, les rois et les princes
se méfient et se battent. Le Pape participe également à ce jeu dangereux. Les
alliances se forment et se dissolvent pour une suprématie qui ne dure guère. En
trente ans, l’Europe est profondément déchirée non seulement au niveau religieux
mais également politique. La chrétienté est-elle encore une réalité ? Un
monde disparaît…
Le rôle des conciles
De nombreuses voix tant
catholiques que protestantes réclament un concile pour résoudre le temps de
crise qui afflige l’Église. L’indignité et l’ignorance des évêques et des
prêtres, les abus et les scandales sont suffisamment importants et criants. Des
chefs d’États, des clercs et des religieux, de nombreux chrétiens demandent au
Saint-Siège de réagir et d’entreprendre de vives réformes. Cet appel ne peut
guère nous surprendre. Depuis son origine, lorsqu’elle doit résoudre de graves
difficultés, d’ordre doctrinal ou disciplinaire, l’Église fait traditionnellement
appel au concile.
Les conciles ont souvent été
un recours déterminant pour l'Église dans les graves moments de son histoire.
Ils ont condamné les hérésies, affirmé solennellement les vérités de foi et mis
en œuvre des règles disciplinaires salutaires. Approuvées par le Pape, leurs
décisions font force de loi dans l’Église. Notre Credo est leur œuvre. Ils ont
aussi organisé la liturgie, harmonisé les différentes pratiques, résolu des
querelles de personnalités. Certains conciles ont uni les efforts de la
Chrétienté contre des menaces, comme celle des armées musulmanes attaquant les
pèlerins en terre sainte ou envahissant l’Europe.
Au début du XVIe siècle,
Rome a réuni les prélats pour répondre à ces douloureuses inquiétudes. C’est le
Vème Concile de Latran (1512 à 1517). Son but premier est d’unir la Chrétienté
face au danger turc. Après avoir conquis Constantinople en 1453 et assiégé
Belgrade en 1455, les forces musulmanes demeurent une menace constante pour
l’Occident. Mais les Européens ne se
sentent pas suffisamment en danger pour s’unir contre le danger commun. Il
devait aussi être un concile de réforme. Là aussi, l’œuvre apparaît décevante. Des
décrets sont publiés mais faute de volonté, surtout au niveau du Pape, ils s’avèrent
bien inutiles. De beaux principes sont certes établis mais restent sans réalité
pratique et donc sans efficacité. Cependant, il a raffermi l’autorité du Pape
au moment même où Luther apparaissait…
Objectifs du Concile de Trente
Objectifs du Concile de Trente
Répondant aux vœux de
tous, un nouveau concile est réuni. Dans la bulle de convocation publiée
le 22 mai 1542, Paul III précise ses objectifs. Il doit traiter « plus commodément et avec plus de succès tout
ce qui peut regarder la pureté et la vérité de la religion chrétienne, le
rétablissement des bonnes mœurs et la correction des mauvaises ; la paix,
l’union et la concorde, tant des princes chrétiens que des peuples ; et
les moyens de s’opposer aux entreprises des barbares et infidèles, qui semblent
vouloir accabler toute la chrétienté ».
La bulle d’indiction lui assigne donc quatre objectifs :
La bulle d’indiction lui assigne donc quatre objectifs :
- l’enseignement dogmatique ;
- les réformes disciplinaires ;
- la paix entre les princes chrétiens ;
- le combat contre les Turcs qui assaillent l’Europe.
- les réformes disciplinaires ;
- la paix entre les princes chrétiens ;
- le combat contre les Turcs qui assaillent l’Europe.
Remarquons que l’unité des
Chrétiens n’est pas mentionnée. Dans la seconde bulle de convocation, celle
dite Laetare
Jerusalem, datée du 19 novembre 1544, le concile reçoit aussi pour
objectif de rétablir l’unité religieuse. Telle est surtout la volonté des
empereurs Charles-Quint et Ferdinand. Ils sont certainement plus soucieux de
faire cesser les divisions religieuses qui minent l’Empire. Ils sont donc fortement favorables à toute réforme disciplinaire susceptible de répondre aux
revendications protestantes et ainsi de désarmer la rébellion religieuse.
Cependant, moins dupe, Paul
III est bien conscient que les protestants ne veulent pas de l’union et donc
d’un concile sauf si ce dernier accuse Rome et décrète l’abandon du
catholicisme. Pourtant, ils y sont invités pour qu’ils puissent se faire entendre.
Les Pères conciliaires les attendront longuement, n’hésitant pas à ralentir
leur débat, voire à les suspendre, pour qu’ils puissent y participer. Mais tout
cela s’est avéré vain. Il est en effet bien trop tard, semble-t-il. Les
protestants sont suffisamment forts et convaincus de leur succès pour rejeter
le concile, devenu inutile à leurs yeux. Leur attitude montre suffisamment leur
état d’esprit. Ils dénigrent les légats pontificaux en tant que représentants de
l’autorité du Pape. Après de multiples négociations, il faut attendre 1561 pour
que leur réponse, particulièrement désobligeante, ne laisse plus aucun doute
sur leur volonté de ne pas participer au concile. Aucune entente n’est alors possible.
Notons qu’aucun décret du concile n’a mis en cause des personnes, respectant la
consigne du cardinal Farnèse du 31 décembre 1545 : « les opinions des hérétiques doivent être
condamnées, plutôt que les hérétiques personnellement et par leurs noms. »[4]
Paul III (1468-1549) Pape en 1534 |
Un concile maintes fois menacé
Comme l’évoque la bulle de
convocation, l’ouverture du concile a donné lieu à de nombreuses difficultés
dont la plupart provient d’événements extérieurs. Les guerres qui déchirent
les États, entrecoupées de temps de paix bien précaires, et les exigences des
princes comme leur attitude évasive expliquent en partie les obstacles que les
Papes ont rencontrés pour réunir les évêques. Il faut en effet comprendre qu’un
concile n’est pas seulement une affaire religieuse. Les évêques et les experts,
théologiens ou canonistes, dépendent fortement de leur prince. Leur présence au
concile est subordonnée à leur bon vouloir. Et aucun décret ne peut être
efficace si les monarques ne veulent pas les appliquer. Il est donc nécessaire
d’avoir leur consentement. En outre, certains princes, comme l’Empereur ou le
roi de France, se présentent parfois comme des adversaires du concile. Ils n’hésitent
pas à menacer le Pape d’organiser un concile national afin de mener leur propre
réforme, le menaçant en fait d’un véritable schisme. Le manque de fermeté de
certains Papes rend encore la situation bien difficile.
Après de multiples ajournements
et reports, le concile de Trente s’ouvre finalement le 13 décembre 1545 dans la
ville de Trente. Mais en avril 1547, en raison d’une épidémie de la peste et
d’une pression impériale devenue insupportable, il est transféré à Bologne en
avril 1547 avant d’être suspendu en septembre 1549 en raison du mécontentement
de Charles-Quint. Les travaux conciliaires à Trente reprennent le 1er mai 1551. Mais l’année suivante, il est de nouveau interrompu à cause de la
guerre et la défaite de Charles-Quint. L’interruption dure dix longues années.
Enfin, il s’achève en 1563. Le concile de Trente a ainsi officiellement duré
dix-huit ans sous le pontificat de trois Papes, Paul III, Jules III et Pie IV.
Les phases du concile
Le concile est souvent décrit selon trois phases, chacune s’étant déroulée sous un
pontificat différent. Cependant, le transfert de Trente à Bologne est aussi à
prendre en compte. Ainsi, nous préférons répartir son histoire en quatre épisodes.
1er épisode : le
Concile à Trente sous Paul III (décembre 1545 - mars 1547)
D’abord convoqué à Mantoue
puis à Vicence, le concile de Trente est finalement convoqué dans la ville
italienne de Trente en terre d’Empire. La ville est soigneusement choisie afin
de satisfaire toutes les parties politiques, mais surtout l’Empereur. Il
s’ouvre le 13 décembre 1545, sous la présidence des trois cardinaux légats Del
Monte, le futur Jules III, Cervini, le futur Marcel II, et Réginald Pole.
Le premier épisode du
concile comprend huit sessions. Les trois premières sessions traitent des
questions préliminaires et définissent les procédures. Plusieurs décisions sont
d’une grande importance. Il est d’abord décidé que le vote aura lieu par tête
et non par nation pour écarter les intrigues et les rivalités. Le concile
s’affirme nettement contre la volonté des princes de constituer des églises
nationales. En outre, seuls les cardinaux, les évêques, les généraux d’ordre et
les abbés auront droit de vote. Seuls les légats pontificaux, qui président le
concile au nom du Pape, peuvent désigner les sujets à traiter. Ces sujets
seront d’abord étudiés par des théologiens ou des canonistes, qui présenteront
leurs travaux aux Pères conciliaires, puis ils seront soumis à des
congrégations générales d’évêques avant de promulguer les décrets en session
générale.
Depuis février 1547, une
sorte de peste sévit dans la région de Trente. Apprenant la mort d’un évêque
qui succombe à la maladie, certains Pères conciliaires quittent la ville. Le 11
mars, contre la volonté de l’Empereur, le concile vote son transfert dans la
ville italienne de Bologne. Mais sur la pression de Charles Quint, les évêques d’obédience impériale ne le suivent
pas. S’il n’est pas mécontent, le Pape laisse toute décision à ses légats.
2e épisode :
le période bolonaise du concile de Trente sous Paul III (avril 1547 - septembre
1549)
Le concile se tient donc à
Bologne sans les évêques espagnols. Fortement réduit, il poursuit néanmoins ses
travaux. Les 9eme et 10eme sessions sont de pures formes.
Charles-Quint publie une protestation officielle et menaçante en janvier 1548
contre le transfert et poursuit sa politique de concession à l’égard des
protestants. Usurpant les droits du Pape, il leur autorise le mariage des
prêtres et la communion sous les deux espèces dans l’Interim d’Augsbourg. Le
Pape cherche alors à démontrer toute la validité du transfert, ouvrant un
procès qui ne sera jamais conclu. Les relations entre le Pape et l’Empereur
sont ainsi très tendues. En dépit de ce contexte difficile, l’activité
conciliaire est néanmoins maintenue dans la mesure du possible. Mais, sous la
pression impériale, aucun décret n’est finalement promulgué au cours de cette
période. À partir de février 1548, les travaux cessent en raison du procès sur
la validité du transfert. En septembre 1549, les prélats reçoivent la
permission de regagner leur diocèse sans qu’il y ait une suspension officielle
du concile si ce n’est une bulle pontificale. C’est la fin du concile à
Bologne. Le Pape Paul III se réserve d’examiner, dans une assemblée romaine,
les problèmes relatifs à la réforme. Mais le 10 novembre 1549, il meurt.
3e épisode :
le Concile de Trente sous Jules III (Mai 1551 – avril 1552)
Jules III (1487-1555) Pape en 1550 |
Le 28 avril 1552, en
raison de la guerre et de la trahison de Maurice de Saxe[5],
le concile vote sa suspension pour deux ans. En route pour le concile, des
théologiens de Wurtemberg et de la ville de Strasbourg sont rappelés par leur
prince. Melanchthon, retenu, n’a même pas quitté la Saxe. La guerre durera en
fait neuf ans. La désunion des princes chrétiens et l’hésitation des États
catholiques à accepter les décrets de réforme déjà promulgués retardent la
reprise du concile. Certains veulent un nouveau concile, refusant toute
continuité, quand d’autres ne veulent que la poursuite de l’œuvre déjà
commencée. Comme son prédécesseur, Jules III cherche en vain à regrouper à Rome
une partie des évêques pour mener la réforme. Il meurt le 23 mars 1555.
4e épisode : le concile
de Trente sous Pie IV (janvier 1561 – décembre 1563)
Pie IV (1499-1565) Pape en 1559 |
Les débats rencontrent de
réelles difficultés. Le nombre rend plus difficile l’unanimité des décisions. Au
cours des séances, les légats pontificaux doivent se heurter aux princes qui
veulent imposer les matières à traiter, à l’épiscopalisme des Espagnols et au
gallicanisme des Français. La question du « droit divin » des évêques préoccupe longtemps le concile mais
aussi le Pape et les princes. Elle a failli suspendre le concile. Ce dernier
épisode est surtout marqué par l’importance des décrets disciplinaires.
Les décrets tridentins
En vingt-cinq sessions, de nombreux décrets dogmatiques et disciplinaires sont promulgués.
Sur le plan dogmatique :
- la Sainte Écriture et la Tradition (1ère session) ;
- le péché originel (5ème session) ;
- la justification (6ième session) ;
- les sacrements en général, puis le baptême et la confirmation (7ème session), l’eucharistie (13 et 21ème session), la pénitence et l’extrême-onction (14ème session), l’ordre (23ème session), le mariage (24ème session) ; le saint sacrifice de la messe (22ème session) ; le purgatoire, la vénération des saints, les saintes images et les indulgences (25ème session).
Sur le plan
disciplinaire :
- -
les abus dans l’usage de la Sainte
Écriture ;
- - la prédication ;
- - la résidence des évêques ;
- - les bénéfices ecclésiastiques ;
- - l’ordination des clercs et les
séminaires ;
- - la vie des prêtres ;
- - les abus dans les sacrements ;
- - les pouvoirs des évêques ;
- - la réforme des réguliers et des moniales.
Les travaux sont
généralement de très grande qualité dans le fond et par l’ampleur du sujet
abordé. Certains sujets sont traités avec profondeur pour la première fois. Les
décrets comprennent généralement des chapitres définissant et précisant la
doctrine ou la discipline puis des anathèmes qui censurent les erreurs ou les
abus les concernant.
Le résultat ?
« On juge l’arbre à ses fruits : pour
mesurer l’importance du concile de Trente, il suffit de considérer ses
résultats. Ils sont immenses, et tels qu’aucun concile, dans toute l’histoire
de l’Église, n’eut jamais une importance égale. »[6]
Le concile de Trente a
d’abord laissé à l’Église un imposant monument dogmatique qui affermit la foi alors
que les chrétiens vivaient dans un temps troublé et qu’elle faisait l’objet de
virulentes attaques de la part des
protestants. « Bien qu’il ait été
célébré dans des temps adverses, le concile a produit de grands fruits pour le
monde chrétien. Les dogmes très saints de la religion ont été définis avec plus
de précision et exposés plus amplement. Les erreurs ont été condamnées et
arrêtées. »[7]
La foi y est formulée avec netteté et force, avec une ampleur dont peut-être
jamais encore elle n’avait bénéficié. Le décret sur la justification en est un
exemple. Il est sans-doute « le chef
d’œuvre du concile de Trente »[8].
C’est le fruit d’une immense activité bien réglée sur la base des sources de la
foi, de la Sainte Écriture et de la Tradition. Si certaines questions ne sont
pas toutes traitées avec la même rigueur et si des sujets auraient peut-être
mérité davantage de temps, nous restons impressionnés par l’immense activité du
concile de Trente et de ses résultats, compte tenu des événements qui l’ont souvent
perturbé. Contre toute attente et en dépit des diverses suspensions, il s’est
maintenu jusqu’au bout.
Les grandes thèses
protestantes sont très souvent au centre des débats dogmatiques. Les Pères
conciliaires les étudient avec soin, distinguant les points qu’ils remettent en
question et sur lesquels ils doivent renforcer la défense. Sur les points
essentiels que les protestants ont attaqués, en particulier la Révélation et
les bases de la doctrine, la justification, les sacrements et sur l’Eucharistie,
le concile fixe résolument la foi. L’objectif qu’a fixé Paul III est
parfaitement rempli. Si certaines questions n’ont pas été abordées par une
heureuse prudence et si certains sujets ont été traités avec hâte, comme celui
des indulgences, l’essentiel est dit. Il est à noter que les Pères conciliaires
distinguent dans les thèses protestantes différents niveaux d’importance. Tout
n’est pas rejeté. Tout n’est pas condamné.
Dans le domaine de la
discipline, le concile de Trente a précisé et raffermi l’autorité des évêques
et supprimé de nombreux abus et dispenses qui se sont développés au cours du
temps au détriment de leur autorité. Par l’obligation de la résidence et la
suppression de tout ce qui l’entravait, le pouvoir épiscopal est rendu plus
efficient. Leur compétence est aussi accrue sans supprimer leur dépendance à
l’égard du Pape. Par ce renforcement du pouvoir épiscopal et de son efficacité,
le concile de Trente fait reposer la réforme sur eux. « C’est bien le pouvoir épiscopal qui
constitue la pièce essentielle de la réforme »[9].
Le pouvoir pontifical est aussi renforcé mais de manière implicite. Les efforts qu’ont menés les Papes pour réunir le concile et le maintenir avec succès en dépit des difficultés, des lenteurs et des complications de toutes sortes, ont certainement resserré les liens avec les évêques et raffermi l’autorité pontificale. L’action des Papes a sans aucun douté été décisive, notamment dans le choix des légats. « Jamais, en aucun concile, ne régna entre l'Église enseignante et son chef, union plus étroite, plus constante, si entière. »[10] Le concile de Trente consolide finalement les liens entre les pouvoirs pontifical et épiscopal afin qu’ensemble, ils œuvrent pour le redressement. L’évêque est considéré comme le « délégué du Siège apostolique ».
Le pouvoir pontifical est aussi renforcé mais de manière implicite. Les efforts qu’ont menés les Papes pour réunir le concile et le maintenir avec succès en dépit des difficultés, des lenteurs et des complications de toutes sortes, ont certainement resserré les liens avec les évêques et raffermi l’autorité pontificale. L’action des Papes a sans aucun douté été décisive, notamment dans le choix des légats. « Jamais, en aucun concile, ne régna entre l'Église enseignante et son chef, union plus étroite, plus constante, si entière. »[10] Le concile de Trente consolide finalement les liens entre les pouvoirs pontifical et épiscopal afin qu’ensemble, ils œuvrent pour le redressement. L’évêque est considéré comme le « délégué du Siège apostolique ».
La réforme passe aussi par
d’autres mesures comme la clarification des statuts canoniques des membres de
l’Église, y compris des réguliers, la limitation des interventions du pouvoir
séculier dans l’organisation de l’Église et surtout par un plus grand exercice
et contrôle du soin des âmes. Une vigilance est aussi apportée au choix des prêtres
et à leur formation. « De ces
décisions, […], sortira la régénération du clergé séculier et régulier, ferment
de la réforme morale. »[11]
Conclusion
St Charles Borromée |
Le concile de Trente a
donné incontestablement un nouveau souffle à l’Église catholique. Elle a connu un
redressement et un dynamisme extraordinaires à partir de la fin du XVIe siècle
et cela pendant au moins trois siècles. Elle affermit la foi en la clarifiant
et en la confirmant par des textes clairs et profonds. La justification est
brillamment définie. Le mystère de l’Eucharistie en sort magnifiquement
éclairé. En restituant l’autorité des évêques afin qu’ils puissent reprendre en
main le clergé tout en le rendant dépendant du Pape, le concile de Trente donne
en outre à l’Église les moyens de la réforme catholique. La création de
séminaire et le contrôle des prêtres sont les directives qui demeurent les plus
importantes. Le redressement ne peut en effet avoir lieu que si le clergé
séculier gagne en vertu et en science. La réforme des religieux et des
religieuses n’est pas oublié. L’œuvre est donc d’une grande ampleur à la
hauteur des enjeux.
Encadrés par un clergé
plutôt ignorant, les fidèles avaient soif de connaître. Las d’une Rome
incapable de se corriger et de combattre les abus, ils voulaient un clergé plus
digne. Le concile de Trente a parfaitement compris l’origine de la crise de
l’Église et les causes du succès des prétendus « réformateurs ». Les procès verbaux des débats montrent
suffisamment combien les Pères de l’Église en étaient conscients. Mobilisés et
unis au Pape, ils ont ainsi pu répondre aux besoins des fidèles.
Mais que vaut une
directive si elle n’est pas appliquée ? L’œuvre du concile de Trente a surtout
été efficace car les Papes et les évêques ont fait sien l’esprit de réforme et
de renouveau catholique qui s’est nettement affirmé à Trente. Il a aussi été
efficace car l’Église a été servie par des saints qui ont entrepris l’œuvre qui
lui ont donné tout son éclat. Saint Charles Borromée en est un parfait exemple.
Saint François de Sales en est aussi un heureux produit. Le concile de Trente
est finalement un très bon exemple de ce que voulait dire Saint Paul aux
Corinthiens : « il faut qu’il y
ait parmi vous-mêmes des sectes, afin que les frères d’une vertu éprouvée
soient manifestés parmi vous. »(I Corinthiens, XI, 19)
[2]
Voir Bruno Chenu, De Trente à Vatican II, l’enjeu des conciles, article La
Croix, le 11 octobre 1999.
[3]
Jean Delumeau, Monique Cottet, Le catholicisme entre Luther et Voltaire,
2ème partie, chap. I, D, 3, presse universitaire de France, 1996.
[4]
Cardinal Farnèse, dans Concilium Tridentinum, Diarorium, Actorum,
Epistolarum, Tractarum nova collectio, Feriburg/Br., 1901 sv dans Histoire
des conciles œcuméniques, Le Concile de Trente, 1561-1563,
Tome XI, Conclusion, Fayard, 1981.
[5]
Voir Émeraude,
février 2017, article «Luther, une Église soumis aux prêtres ».
[6]
Daniel-Rops, L’Église de la Renaissance et de la réforme, Une
ère de renouveau, la Réforme catholique, II, Fayard, 1955.
[7]
Conciliorum
oecumenicorum decreta, 780, 1962 dans Histoire des conciles œcuméniques,
Le
Concile de Trente, 1561-1563, Tome XI, Conclusion.
[8]
Dom Ch. Poulet, Histoire de l’Église, Tome II, Temps modernes, éditeurs
Gabriel Beauchesne et ses fils, 1935.
[9]
Histoire
des conciles œcuméniques, Le Concile de Trente, 1561-1563,
Tome XI, Conclusion.
[10]
P. Richard, Histoire des conciles d’après les documents originaux,
Charles-Joseph Hefele, Concile de Trente, Introduction,
volume IX, 1ère partie, 1930.
[11]
Dom Ch. Poulet, Histoire de l’Église, Tome II, Temps modernes.
[12]
Constitution
dogmatique sur la foi catholique, 1er Concile de Vatican.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire