" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


vendredi 13 juillet 2012

La Création selon les Saintes Ecritures

« Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre » (Gen., I, 1). Ainsi commence la Sainte Bible. Le premier chapitre renferment dans une précision et une clarté extraordinaire tout le socle sur lequel est bâtie notre religion. La Rédemption, l'autre mystère de notre foi, ne serait rien sans la Création, sans ce commencement. Toute notre vision de la vie repose sur les quelques lignes qui ouvrent la Sainte Écriture et nous ouvrent les portes de la Révélation. S'attaquer à ce mystère revient inévitablement à s'opposer à notre religion et à l'ensemble des vérités de la foi. Croire que notre foi peut demeurer intacte en refusant d'adhérer à ce mystère ou en le modifiant à son gré est probablement une des plus graves erreurs de notre siècle. 

La Sainte Écriture pose d'emblée une réalité, celle de Dieu. L'existence de Dieu est supposée connue. Des « érudits » peuvent s'étonner que sa version hébreu ne parle pas de Dieu, mais d' « Elohim ». Ils en conclut alors toute la fausseté de nos dogmes. Cet article n'a pas pour but de traiter des noms de Dieu. Allons donc à l'essentiel. Le terme d' « Elohim » signifie l'être devant lequel on tremble, l'être souverainement redoutable. Dans la Sainte Bible, ce nom désigne effectivement Dieu. « Yahvé » est l'autre nom qui se rapporte à Dieu, mais en relation avec l'homme. Précisons aussi qu' « Elohim » est le pluriel d'Eloah alors que le verbe utilisé est au singulier. Certains Pères de l'Église ont vu dans ce pluriel une allusion à la Sainte Trinité. Mais, il peut aussi désigner un pluriel de majesté... 

La Sainte Écriture nous présente Dieu agissant, en-dehors et au-dessus du monde. Dieu n'apparaît pas comme un concept intellectuel. L'action divine a pour conséquence première d'introduire un « commencement », donc le temps. Avant l'acte, il n'y a point de temps. Hors du temps, Dieu crée donc le ciel et la terre, c'est-à-dire l'univers. Il crée en conséquence l'espace. Par cet acte, s'établit enfin une distinction forte entre un Créateur, qui est Dieu, et la créature. Cette dernière se distingue par un commencement... 

Comment Dieu agit-il ? Dans le premier verset, la Sainte Bible en hébreu utilise le terme « bara », verbe rarement employé. Il a la particularité de n'avoir pour sujet que Dieu. Il indique donc une action exclusivement divine. Le sens est plus fort que « creare » ou « poiew » (« faire »), employé dans les Septantes

Pour désigner qu'une action s'exerce sur une matière pré-existante, l'hébreu emploie plutôt le verbe « béré », avec un complément qui désigne la matière sur lequel s'exerce le travail, alors que le verbe « bara », utilisé dans la Sainte Écriture, est suivi du résultat de l'action accomplie. Peut-être, pouvons-nous penser à une création « ex-nihilo » ? Il faut en fait attendre le dernier livre de l'Ancien Testament pour que cette vérité soit explicite. Le Livre des Macchabées raconte les persécutions des rois Séleucides contre les Juifs, au IIème av. J.C., et notamment le martyre des frères Macchabées. Leur mère professe une foi claire en la création « ex-nihilo » : « je te conjure, mon enfant, de regarder le ciel et la terre et toutes les choses qui y sont ; et de comprendre que de rien Dieu a fait toutes choses » (II. Macch.,VII,28). C'est la première foi qu'est utilisé clairement le terme de création « ex-nihilo ». Dieu a créé toute chose à partir de rien. Et rien n'existe à côté de Dieu avant la création. Il n'y a pas d'autre Créateur que Dieu. Il « a donné l'origine à toute chose » (II. Macch., VII, 23)... 

« Dieu dit : que la lumière soit. Et la lumière fut » (Gen., I, 3). Par la parole, qui exprime une volonté, le monde a été créé. Dieu a créé le monde sans effort, par sa toute-puissance, par sa seule volonté. La Création n'est donc pas le fruit du hasard mais bien d'une intention. « Lui-même a dit, et les choses ont été faites ; lui-même a commandé et elles ont été créées » (Ps. CXLVIII, 5). La création est le produit d'un acte de la volonté de Dieu. « Toutes les choses qu'Il a voulues, Il les a faites » (Ps., CXV, 3). 

L’œuvre de la Création suit un ordre bien précis : matière, lumière, firmament, eau, terre, mers, végétaux, animaux et homme. Nous pouvons longtemps gloser sur ces termes et sur leurs significations. Nous ne sommes pas assez compétents pour cela. Laissons cette étude aux exégètes. Mais, poursuivons notre récit pour en dégager l'essentiel. Quand nous abordons les êtres vivants, une expression revient souvent : « selon leur espèce ». Dieu crée en effet les êtres vivants selon leur espèce, donc selon une classification, qui est un acte intellectuel. Toute l'œuvre de la Création reflète finalement un ordre, et donc une intelligence. Aujourd'hui encore, nous pouvons contempler l'harmonie de l'univers. « Vous avez disposé toutes choses avec mesure et nombre et poids » (Sag., XI, 21). 

« Que la terre produise de l'herbe verdoyante, et faisant de la semence, et des arbres fruitiers, faisant du fruit selon leur espèce, dont la semence soit en eux-mêmes sur la terre » (Gen., I, 11). Dieu met en place les causes secondes permettant aux plantes de se reproduire. Il crée le règne végétal. Pour le règne animal (poissons, oiseaux), et pour la première fois, il bénit ce qu'Il vient de créer, disant : « croissez et multipliez-vous, et remplissez les eaux de la mer ; et que les oiseaux se multiplient sur la terre » (Gen., I, 22). Alors que la plante peut posséder en elle-même la faculté de se reproduire, ce n'est pas le cas pour les animaux. Selon les Pères de l'Église, la bénédiction renferme cette action vivifiante que nécessite la reproduction. Puis dans une même phase, le sixième jour, apparaissent les animaux terrestres et enfin l'homme... 

Quand arrive la création de l'homme, le style change subitement. Pour les autres créatures, Dieu parle à l'être qui doit paraître ou à l'élément d'où il doit sortir. Avant de créer l'homme, Dieu se parle à Lui-même. C'est une décision prise intérieurement, qui précède l'exécution : « faisons un homme à notre image et à notre ressemblance » (Gen., I, 26). Les Pères de l'Église ont vu dans ce pluriel un nouvel indice de la Sainte Trinité... 

C'est un moment solennelle comme l'indique le style. « Et Dieu créa l'homme à son image ; c'est à l'image de Dieu qu'il le créa : il les créa mal et femelle » (Gen., I, 28). La répétition du terme « créa » n'est pas simplement un effet de style. Elle reflète une intention particulière de l'écrivain sacré. Ce verset souligne en outre la création de deux personnalités distinctes, pourtant unies. Nous en déduisons l'unité du genre humain... 

L'homme reçoit une bénédiction, qui, contrairement aux premiers animaux, ne concerne pas uniquement la fécondité. Il bénit en effet une chose qui lui est propre : la souveraineté sur toute la terre et sur tous ses habitants. Dieu donne en effet à l'homme le pouvoir de dominer sur toutes les créatures : « croissez et multipliez-vous ; remplissez la terre, et assujettissez-la, et dominez sur les poissons de la mer, sur les volatiles du ciel et sur tous les animaux qui se meuvent sur la terre » (Gen., I, 28). Dans l'œuvre de la Création, l'homme a une situation et un rôle privilégiés

Après chaque étape de la Création, la Sainte Écriture précise que Dieu est satisfait de son œuvre. Ce qui a été créé lui apparaît bon. Quand Il finit son œuvre, « Dieu vit toutes les choses qu'Il avait faites, et elles étaient très bonnes » (Gen., I, 31). Dieu marque ainsi un temps d'arrêt et exprime sa satisfaction, non seulement pour chaque étape de la Création mais aussi pour l'ensemble. Son œuvre est conforme à sa pensée. Le terme hébreu, « tov mehod », est plus explicite. Il signifie bon et beau. Ce que Dieu créé est parfait au sens d'achever. Il ne manque rien au monde ainsi créé. Il n'y a donc pas besoin d'améliorer ce que Dieu vient de créer. L'idée de progrès nous paraît donc inconcevable. 

L'œuvre de la création est racontée selon un plan structuré, ordonné, dans le cadre de six jours. Le terme « yôm », ou « jour », « peut être entendu soit au sens propre du jour naturel, soit dans un sens impropre pour une certaine espace de temps » (1). Ce terme est le plus concret, le plus facilement intelligible pour désigner des périodes différentes et successives. Au septième jour, Dieu se repose. « Et Dieu eut accompli son œuvre le septième jour ; et il se reposa le septième jour de tous les ouvrages qu'il avait faits » (Gen., II, 2). L'œuvre de la Création est terminée. Il n'y a plus de nouvelle création à proprement parler. Désormais, les causes secondes vont agir dans le temps selon les lois que Dieu a posées. 

Cela ne signifie pas que Dieu n'agit plus comme s'Il ne se préoccupait plus de son œuvre. Les choses, « Il les a établies à jamais, et pour les siècles des siècles, Il leur a donné une loi et elle ne passera pas » (Ps., CXLVIII, 6). La Création perdure sous la protection de son Créateur. Elle n'est livrée ni à l'anarchie, ni au chaos. Dieu pense même aux passereaux : « pas un d'eux ne peut tomber sur la terre sans la permission de votre Père » (Matth., X, 26). Ajoutons que contrairement aux autres jours, le septième ne contient pas de soir. Il ne finit pas... 





Décision de la commission biblique, 30 juin 1909

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