" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


vendredi 29 juin 2012

Mahomet, une légende ?

Muhammad Sven Kalish est professeur de théologie en Allemagne et titulaire d'une chaire sur l'islam à l'université de Munster. Converti à l'islam à l'âge de 15 ans, il est plutôt considéré comme musulman radical. Mais, à la surprise générale, en 2008, il met en doute l'existence historique de Mahomet ! Dans un article de Wall Street Journal, il explique son cheminement intellectuel qui l'a conduit à ce doute. Après avoir dévoré des livres questionnant l'existence d'Abraham, de Moïse et de Notre Seigneur Jésus-Christ, il a pris le risque de s'interroger sur l'existence même de Mahomet. Au fur et à mesure de ses recherches et de ses contacts avec des chercheurs, il finit par douter : « plus je lisais, plus la personne historique à la base de tout me paraissait improbable » (1). Son hypothèse n'est pas une nouveauté. Le Père Gabriel Théry (1881-1959) est probablement le premier à mettre en doute l'existence de Mahomet. D'autres l'ont suivi, en particulier Patricia Crone, à partir de sources documentaires abondantes et externes à l'islam. Certes, il est bon ton de remettre en question les « fondateurs » de religions, et donc les religions elles-mêmes, mais cette hypothèse est-elle raisonnable ? 


Interrogeons le Coran...


Mahomet (ou Muhammad) est cité rarement dans le Coran (version d'Hamidallah). Il apparaît en intitulé de la 47ème sourate, mais les intitulés ne font pas partie du Coran et auraient été ajoutés au Xème siècle. Selon les islamologues, dans le texte arabe primitif, donc la seule version véridique, nous ne rencontrons pas le nom « Muhammad » mais la forme « mhmd » à quatre reprises (III, 144, XXXIII, 40, XLVII, 2 et XLVIII, 29) et la forme « hmd » une fois (LXV, 6). Rappelons-nous en effet que la langue arabe primitive ne connaît pas les voyelles. Le nom du prophète est donc mentionné par la racine « mhmd » ou « hmd ». Mais, ces racines sont employées comme des qualificatifs et non comme des patronymes. Elles signifient « digne d'éloge », « loué ». Or, à chaque fois, elles sont traduites abusivement par « Muhammad ». Ces racines se rencontrent souvent dans toutes les langues sémitiques qui ont précédé l'arabe. En hébreux, elles ont le sens de précieux, d'excellent ou d'homme de prédilections comme nous le trouvons dans le Livre de Daniel. Ce qualificatif peut donner lieu à un surnom. 

Dans la prophétie de Daniel (IX, 23), le mot qui désigne « l'homme des prédilections » a pour racine en araméen hmd (2). Dans une vision, Saint Gabriel annonce à Daniel qu'il est « cet homme de prédilection ». N'a-t-il pas une certaine ressemblance avec la vision de Mahomet ? Ou une confusion avec Notre Seigneur, l'homme de prédilection annoncé ? Selon des chercheurs, la première communauté musulmane, influencée par une secte chrétienne, attendait la venue d'un Messie. Les « dogmes » musulmans l'annoncent en effet à la fin des temps. Dans un manuscrit du VIIème siècle (3), un Juif demande à un sage si ce prophète n'est pas le messie. Selon Saint Théophane, au VIIIème siècle, les Juifs voyaient Mahomet comme le Messie promis. 

Comme le Coran en langue arabe primitive est seul véridique selon la doctrine du Coran incréé et qu'il ne mentionne pas le nom du Prophète, nous ne pouvons pas nous appuyer sur la « parole de Dieu » pour croire à un certain Mahomet. Serait-il alors le seul envoyé de Dieu dont le nom ne figure pas dans un « texte saint » ?! Dieu Lui-même n'aurait pas donné à son prophète une légitimité indiscutable. Cela est en effet bien étrange... 

Interrogeons d'autres sources musulmanes 

La vie de Mahomet est essentiellement connue d'une source écrite arabe, écrite au début du IXème siècle, deux cents ans après l'époque des évènements, intitulée Kitab sirat rasul Allan le livre de la vie de l'envoyé de Dieu »), communément désigné par "sirat" ou "sira". Il est censé reproduire un récit antérieur d'un chroniqueur arabe, Ibn Is'haq, mort en 767 ou 768. Ce récit n'a jamais été découvert mais des critiques émanant de différents écrivains dont Malik ibn Anas (713-795) ont été retrouvées. Ces critiques mettraient en doute l'exactitude des faits qui y sont rapportés. Les hadiths mentionnent aussi des faits de la vie de Mahomet mais, certains sont peu crédibles et sont relativement tardifs ( VIIIème, surtout IXème siècle). Des chercheurs (4) admettent finalement le manque de fiabilité des sources littéraires arabes pour prouver l'existence de Mahomet. Les « clerc » musulman « en ont sélectionné et compilé les éléments selon l'idée qu'ils voulaient donner des origines de leur communauté et de la vie de leur prophète » (5)

Interrogeons les traces du passé 

L'archéologie et l'épigraphie donnent peu de preuves et les recherches seraient interdites dans les villes saintes de l'islam. 

Mohammed Sven Kalish n'a trouvé les premières traces du nom du prophète que sur des pièces de monnaie vers la fin du VIIème siècle. On a en effet trouvé une pièce de monnaie datée de 685 portant le nom de Mahomet et son titre de prophète (6). Mais, nous savons que les premières pièces fabriquées par des musulmans datent précisément du règne d'Abd-el-Malik (685-705). Auparavant, ils utilisaient les pièces byzantines. Ce n'est que vers 696 que les « musulmans fonde un véritable système monétaire » (7)

On a aussi trouvé des graffitis et des gravures sur pierre en arabe mentionnant la chahada. Elle se présentait comme ceci : « je témoigne qu'il n'y a de Dieu que Dieu, pas d'associé à lui ». En 690, apparaît la forme : « je témoigne qu'il n'y a de Dieu que Dieu, et Mahomet est son prophète ». La forme actuelle ne s'imposera qu'à partir de 735. Pourtant en 740, on connaît encore cette forme étrange : « je témoigne qu'il n'y a de Dieu que Dieu, et le Christ est son prophète » (8). La forme actuelle de la chahada devient exclusive vers 735-740 (9).

Interrogeons les témoins des évènements 

Les textes non-musulmans et contemporains des évènements témoignent du point de vue des vaincus, mais ils apportent quelques témoignages ou silences intéressants à prendre en compte. 

Sophrone (vers 550, 638 ou 639), évêque de Jérusalem, ouvre les portes de Jérusalem au calife Omar. Il ne mentionne aucun Mahomet dans ses récits de la prise de Jérusalem. 

Le patriarche jacobite Jean Ier rencontre l'émir Saïd ibn Amir en 644 en Syrie pour débattre. Dans sa lettre (10), il n'y a aucune trace de Mahomet, ni d'un prophète auteur d'une doctrine religieuse, encore moins du Coran. Les musulmans n'évoquent que la Torah dans la controverse pour défier les chrétiens de prouver que le Christ est Dieu. Cette lettre nous paraît intéressante et pertinente mais aucune information n'a été trouvée sur son authenticité. 

Thomas, dit le Presbyte, syriaque de Mésopotamie, rapporte des évènements de 634 et 636 dans une chronique datée vers 640. Ce texte mentionne les Arabes de d-Mhm ("Tayayê d-Mhmt"): « Dans l'année 947 » [c'est-à-dire 634-635], « il y eut une bataille entre les Romains et des « Tayayê d-Mhmt » en Palestine, à douze mille à l'Est de Gaza ». Mais qu'exprime d-Mhm ? Le « d » correspondrait à Daniel. 

Saint Théophane le Confesseur, né vers 758 et mort en 817, a écrit une importante chronographie qui serait une source unique sur l'histoire de Byzance pour le VII et VIIIème siècle. Il évoque un commerçant du nom de « Mouamed, leader et faux prophète des Sarrasins ». 

Dans une chronique syriaque anonyme, écrite vers 660 dans le Khûzistân, en Iran occidental, un chroniqueur relate l'assaut des fils d'Ismaël qui sont dirigé par un certain « Muhammed » sous le règne de Yazdagird III (632-651) (11). S'agit-il du prophète ou le nom d'un guerrier ? Est-il le chef des guerriers entrain de lancer l'assaut ou le chef des ismaéliens restés en Arabie ? 

La Doctrina Jacobi nuper baptizati (12) est un manuscrit rédigé en grec, d'auteur inconnu et datant du VIIème siècle. Il nous est parvenu sous une forme fortement altérée. Elle mentionne un nouveau prophète chez les Arabes, qui ont vaincu et tué un général de l'Empire romain dans un bataille près de Gaza au début de l'année 634. Or, Mahomet est mort deux ans avant, il n'aurait jamais été en Palestine et selon la tradition musulmane, la conquête de la Palestine revient au premier calife Abou Bakr. Selon Laurent Lagartempe, ce Mahomet serait un glorieux chef arabe de l'époque. Nous pouvons aussi envisager d'autres solutions qui peuvent ne pas remettre en cause l'existence de Mahomet (erreurs dans la bibliographie officielle). Selon la datation du manuscrit reconnue généralement, il est le texte le plus ancien mentionnant la conquête islamique. Mais, certains historiens doutent de sa véracité. 

Sébéos, religieux arménien, serait l'auteur d'un ouvrage historique intitulé Histoire d'Héraclius. Il raconte les premières incursions arabes en Arménie en 640. Son histoire se termine en 662. Il ne parle que de l'esprit de conquête des arabes. « La première édition de cet ouvrage, à Constantinople, en 1851, se base sur un manuscrit découvert à Etchmiadzin en 1842 ; le manuscrit ne portait lui-même ni titre ni divisions, et le titre d’Histoire d'Héraclius ainsi que l'attribution à Sébéos lui sont donnés lors de sa découverte, en supposition d'une identification de ce manuscrit avec l'Histoire de Sébéos évoquée par diverses sources médiévales. Ce manuscrit étant par ailleurs aujourd'hui perdu, la paternité de l'œuvre est donc fort incertaine dans sa totalité. » (13). Pour certains chercheurs, le manuscrit serait en partie considéré authentique (14). Dans une traduction découverte sur internet, nous y avons trouvé trois mentions de Mahomet, le présentant comme prédicateur (15)... 

Que conclure de toutes ces recherches ? 

A notre avis, rien ne peut prouver ou non l'existence de Mahomet. Il est en particulier bien difficile de faire parler des textes anciens. Il est tentant de les interpréter dans le sens d'une négation de l'existence de Mahomet ou dans le sens contraire. Soyons donc prudents. N'imitons pas ceux qui remettent en cause la Sainte Écriture et notre foi par des interprétations de textes parfois abusives et surtout présentées comme les seules véridiques. 

De ces recherches, nous pouvons retenir trois points. D'abord, le Coran lui-même ne peut justifier l'existence de Mahomet. Ce simple constat nous suffit pour douter fortement. Essayons d'imaginer la Bible sans la mention de Moïse ! Qui justifie Mahomet et sa mission ?! Éternelle question sans réponse... Faut-il alors trouver des preuves humaines pour justifier sa mission divine ? Quel comble !... Le deuxième point est la faiblesse de la langue arabe. Et pourtant, elle serait la langue inimitable choisie par Dieu pour donner un message claire ! Enfin, au-delà du doute sur l'existence de Mahomet, retenons la leçon du sage érudit des Livres Saints de la Doctrina Jacobi

« On disait que le prophète était apparu, venant avec les Saracènes [Arabes], et qu’il proclamait la venue du Messie qui allait venir. Étant arrivé à Sykamine, je m’arrêtai chez un vieil homme bien versé dans les Écritures et lui dis : Que me dis-tu du prophète apparu avec les Saracènes ? Il me répondit dans un profond soupir : Il est faux car les prophètes ne viennent pas armés avec épée et char de guerre... Et moi, Abraamès, ayant poussé l’enquête, j’appris de ceux qui l’avaient rencontré qu’on ne trouve rien d’authentique dans ce prétendu prophète : il n’est question que d’effusion du sang des hommes. Il dit aussi qu’il détient les clés du Paradis, ce qui est incroyable » (16)


Références

Mohammed Sven Kalish, Wall Street Journal, le 15 novembre 2008, cité sur Point de Bascule, 19 novembre 2008.
Article Muhammad comme prophète dans la Bible dans Résurrection, L'islam au risque de l'histoiren°123-124 (janvier-avril 2008). François-Xavier, membre de Résurrection, participe à un groupe d'apostolat « Saint-Jean de Damas » qui a pour objet l'annonce de l'Évangile aux Musulmans. 
Doctrina Jacobi nuper baptizati, V, 16, 209 cité dans http://www.lemessieetsonprophete.com/
Les historiens de l'islam : John Wansbrought (1928-2002), Patricia Crone (1945-), Alfred Louis de Pémare (1930-2006). 
Alfred Louis de Prémare, Les fondations de l'islam, cité par Agnès Devictor, dans www.sissco.it le 23/05/2002.
Selon le site http://www.lemessieetsonprophete.com/. Cette attestation est reconnue fiable par Maxime Lenôtre, Mohammed fondateur de l’Islam, (voir http://afs.e-catho.com/ideologieserreurs/fausses-mystiques/445-les-origines-de-l-islam ). 
Article paru dans le Courrier de l’Unesco de janvier 1990 et légèrement remanié par l’auteur. 
11Alfred-Louis de Prémare, Les fondations de l'islam, Le Seuil, Paris 2002, cité sur le forum http://www.bladi.net/forum/231066-bahira-moine/index2.html
12 L'Enseignement de Jacob, nouvellement baptisé
13 Wikipedia, article "Sébeos". Le site afs précise qu'une partie du manuscrit n'est pas reconnue. http://afs.e-catho.com/ideologieserreurs/fausses-mystiques/445-les-origines-de-l-islam Selon Frédéric Macler, qui a traduit de l'araméen, seul le livre III est authentique. 
14 Nevo Yehuda D. and Judith Koren, Crossroads to Islam, The origins of the Arab Religion and the Arab State (2003) Promotheus Books, New York . Voir http://www.observatoiredesreligions.fr/spip.php?article31
15 Histoire d'Héraclius, chapitre XXX, traduit de l'araméen par Fréderic Macler, numérisé par Marc Szwajcer 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire