" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


vendredi 2 mars 2018

Ockham : contre l'autorité du Pape

Guillaume Ockham (V. 1285-1347) est un de ses personnages que nous rencontrons souvent dans nos articles depuis que nous étudions le protestantisme. Nous sentons sa présence auprès de Wiclef puis de Jean Huss et de Luther. Sa pensée nominaliste est partout, se répandant dans les universités, touchant les philosophes, les théologiens, les prêtres. Dans un article récent, nous le voyons accompagner le chef de l’Ordre franciscain Michèle de Cesena qui, menacé d’arrestation pour hérésie, fuit le Pape Jean XXII en raison de sa doctrine sur la pauvreté. Il est auprès de Louis IV de Bavière, lui-aussi en lutte contre le Souverain Pontife.

Dans notre dernier article, nous avons découvert qu’Ockham avait élaboré un nouveau droit, inspiré de sa philosophie, pour défendre son maître franciscain, n’hésitant pas à renverser les valeurs de son temps, logique conséquence du nominalisme qu’il défend et propage. Alors que ses contemporains défendent un droit objectif, objet de la justice, il développe l’idée d’un droit subjectif, considéré comme un pouvoir, soit inhérent à l’homme car provenant de Dieu, soit évolutif car simple convention humaine. C’est ainsi lui qui inspire Wiclef et Luther quand ils protestent contre le Pape lorsqu'il les condamne et quand ils refusent de lui obéir sous prétexte qu’ils ne peuvent s’opposer à leur droit naturel. Mais son action et sa pensée vont aller encore plus loin. Ockham s’est aussi intéressé à la politique.

En effet, en lutte contre le Pape comme son maître et son hôte, Ockham se met en devoir de réfléchir sur le moyen d’affaiblir la position de leur adversaire en commun. Ainsi en 1349, il écrit le Breviloquium de potestae papae[1], traduit en français sous le titre de Court traité du pouvoir tyrannique. Le sous-titre est plus éloquent : « sur les choses divines et humaines – et tout spécialement sur l’Empire et sur ceux qui sont assujettis à l’Empire – usurpé par ceux que certains appellent « Souverains pontifes ». Avant de découvrir cet ouvrage, nous allons rappeler le contexte dans lequel il se situe, c’est-à-dire la lutte qu’engage Louis de Bavière contre le Pape Jean XXII.

Louis IV de Bavière s’oppose au pouvoir de Jean XXII

L’empereur germanique Henri VII meurt en 1313. Son successeur sur le trône du Saint Empire germanique doit être élu par les princes dits électeurs. Rappelons que l’Empire est un morcellement d’États, principautés ecclésiastiques ou laïcs et villes libres. Pour préserver une certaine indépendance et accroître leurs pouvoirs comme leurs domaines, les princes veulent faire perdurer ce morcellement afin d’affaiblir l’autorité de l’empereur. Un pouvoir central fort remettrait en cause leur propre autorité. Ainsi ont-ils pris le soin d’élire comme empereur un homme dont la puissance ne peut pas rivaliser avec la leur. Généralement, l’élu appartient à l’un des trois familles suivantes : celles de Luxembourg, d’Autriche ou de Bavière. Le prétendant de la première famille est trop jeune pour prétendre au trône impérial. Les princes ont donc le choix entre Frédéric le Bel, duc d’Autriche, et Louis de Bavière. Celui-ci remporte les élections mais Frédéric le Bel refuse de reconnaître sa défaite. De manière traditionnelle, le Pape pourrait trancher ce différend. Mais en ce temps-là, le siège pontifical est vacant depuis la mort de Clément V (avril 1314). Le conclave est réuni pour choisir un nouveau Pape. Les armes ne permettent pas non plus d’évincer l’un des deux.

À peine élu, sûr de ses droits, le Pape Jean XXII exhorte les deux élus à régler pacifiquement leurs différends et les invitent à le reconnaître comme arbitre. En même temps, il déclare le trône de l’Empire vacant et confirme Robert de Naples dans ses fonctions de vicaire de l’Empire pour l’Italie, le 16 juillet 1317. Mais les deux prétendants refusent l’arbitrage du Pape et préfèrent la fortune des armes. À la bataille de Mühldorf, le 28 septembre 1322, Louis de Bavière bat son rival. Le sort en est donc jeté. Il en informe aussitôt le Pape qui insiste encore en termes affectueux sur son droit d’arbitrage. Mais sans s’occuper de la reconnaissance du Pape, Louis envoie son propre vicaire en Italie et impose son autorité sans égard aux troupes pontificales. À ce moment-là, il accueille à sa cour les Spirituels[2] en révolte contre le Pape.

Jean XXII ne peut guère ne pas réagir contre Louis de Bavière. Son autorité pontificale et son prestige sont bafoués. Il exerce les prérogatives impériales et royales sans son accord et en plus, il accueille à sa cour des gens opposés à la doctrine de l’Église. Le 8 octobre 1323, le Pape le somme alors, sous la menace de l’excommunication, de se désister de l’administration de l’empire et de se présenter, dans les trois mois, à la cour pontificale. Alors que le Pape consent à lui accorder deux mois de sursis à sa demande, Louis de Bavière déclare à la Diète de Nuremberg, le 18 décembre 1323, qu’il ne reconnaît pas au Pape le droit d’intervenir dans l’élection de l’empereur et que celui-ci, une fois élu par la majorité des voix et couronné dans le lieu traditionnel, à Aix-la-Chapelle, devient, par le fait, roi des Romains. C’est une remise en question des droits du Pape. Il accuse en outre Jean XXII de favoriser les hérétiques et demande la convocation d’un concile général pour le juger. Finalement, Jean V de Bavière ouvre les hostilités contre le Pape.

Comme réponse, Jean XXII excommunie solennellement l’empereur et ses partisans. Louis de Bavière riposte en lançant un violent manifeste contre lui, le traitant d’hérétique parce qu’il tente d’anéantir la parfaite pauvreté que défendent les Franciscains. Les Spirituels inspirent donc la politique de l'empereur. Il en appelle à un concile général et dénonce les hérésies du prêtre Jean. En mai 1328 il fait élire un antipape. Guillaume Occam se met alors au service de son protecteur…

« Défends-moi par ton épée et je ne te défendrai pas la parole », aurait dit Ockham à Louis IV de Bavière

Guillaume Ockham intervient dans le conflit qui oppose le Pape et l’empereur pour défendre la position de son protecteur. Dans son Court traité du pouvoir tyrannique, il tente en effet de prouver l’illégitimité du pouvoir du Pape. Jean XXII s’appuie sur une interprétation de la Sainte Écriture pour revendiquer un pouvoir supérieur à celui de l’Empereur et pour soumettre le pouvoir temporel. Par une autre lecture des textes sacrés, Ockham montre que son interprétation est erronée et qu’au contraire, qu’il ne peut s’arroger un tel pouvoir. Mais il n’ignore pas la faiblesse de sa position car Jean XXII peut aussi s’appuyer sur son autorité pour enseigner et imposer la juste interprétation de la Sainte Écriture. Ockham ne peut pas recourir à une telle autorité. Ainsi, doit-il avant tout s’opposer à une telle prétention. Il défend alors l’autorité même de la Sainte Écriture contre l’autorité de ses interprètes les plus autorisés. Et pour garantir cette autorité, Ockham établit des critères.

Le premier critère porte sur la cohérence interne de la Sainte Écriture. Un verset évangélique peut être éclairé par d’autres s’y rapportant. « Des paroles générales ne doivent pas toujours être comprises d’une manière générale. » Ainsi si Jean XXII s’appuie sur un seul verset pour justifier son autorité sur les autorités temporelles, Ockham peut citer plusieurs versets concordants pour révoquer cette justification. Il faut aussi être éclairé des textes des Pères de l’Église. « Après les raisons fondées sur les écritures faisant autorité […], il nous faut maintenant faire état de quelques-uns des nombreux textes des saints Pères d’où il ressort avec évidence que le Pape ne possède pas cette plénitude de pouvoir. » Il s’appuie essentiellement sur Saint Augustin et Saint Bernard. Néanmoins, le sens mystique que les Pères ont pu développer ne lui semble pas suffisamment clair pour les prendre en considération. Mais tout cela ne permet pas encore de contrer l’argument d’autorité que peut opposer le Pape à ses interprétations. Alors Ockham en vient à démontrer l’exigence intrinsèque à l’Évangile d’une liberté individuelle d’interprétation de la Sainte Écriture.

La liberté intérieure du Chrétien

Ockham s’appuie sur une idée fondamentale : la nouvelle Loi que nous donne l’Évangile rend les Chrétiens libres. Mais de quelle liberté s’agit-il ? Lorsque les apôtres sont confrontés aux conditions d’intégration des païens à la foi chrétienne, ils décident qu’on ne peut leur imposer le joug de la loi mosaïque. Nul homme ne peut être esclave d’un autre. Mais dans une autre épître, il est dit que tous doivent accepter l’état dans lequel il est. Donc l’esclave doit demeurer esclave. L’Évangile n’est pas là pour le faire changer d'état. Selon Ockham, la nouvelle loi doit transformer la vie de l’intérieur de la condition de chacun et non en imposant des règles extérieures. La liberté évangélique est une liberté intérieure. Une personne doit accueillir les règles avec une liberté intérieure, et non comme si elle devait s’y conformer sans discussion. Et cela est aussi vrai pour la société. Tel est le sens de la liberté évangélique authentique. « De même que le Christ n’était pas venu pour ôter les droits temporels d’autrui, la religion chrétienne ne dépouille personne de son droit. » Ainsi aucune autorité n’a de légitimité pour imposer absolument à d’autres des normes de droit à partir de la Sainte Écriture. Les textes sacrés ne fondent donc pas la plénitude de pouvoir du Pape.

Revenant sur la liberté évangélique promise aux esclaves, Ockham montre que la Sainte Écriture est soumise aux conditions concrètes, individuelles et sociales, de réception. La liberté évangélique n’est pas de l’ordre de la conduite sinon cela impliquerait une forme de révolte vis-à-vis des maîtres. Les Chrétiens doivent donc prendre en compte ces conditions singulières pour interpréter la Sainte Écriture. Alors seulement, ils pourront vivre une forme de liberté qui n’impose pas d’obligations nouvelles aux autres. Ils proposeront même une nouvelle forme de liberté à ceux qui les entourent. Ils seront à la société ce que la Sainte Écriture est pour eux : une source accueillie sans qu’elle ne s’impose à eux. Il y a donc une correspondance entre la manière d’interpréter la Sainte Écriture et la manière d’être présent dans une société civile donnée. La Sainte Écriture est au Chrétien ce que le Chrétien est à la société, c’est-à-dire la source d’une liberté nouvelle.

Le Chrétien libre de juger le Pape

Ockham reconnaît néanmoins une certaine autorité au Pape mais non une autorité absolue. Il soulève alors la question de son jugement s’il affirme une chose fausse ou hérétique ? Qui dispose de l’autorité pour juger un Pape ? Cependant, il « refuse d’admettre qu’il s’agit seulement de savoir qui détient l’autorité de trancher : la question est d’ordre intellectuel, car il s’agit de savoir ce qui est apostolique et ce qui ne l’est pas, ce qui est hérétique et ce qui ne l’est pas : le pape doit être obéi dans tout ce qu’il commande lorsque ses ordres ont un vertu apostolique et salutaire, mais la question de savoir si les ordres qu’il donne ont bien en eux cette qualité apostolique et salutaire ne saurait être tranchée par le pape lui-même sans que tous les chrétiens deviennent autant d’esclaves, ce que le Christ a explicitement refusé en disant que la loi qu’il apportait était une loi de liberté et non une loi de servitude. »[3] Alors, il conclue que si le Pape affirme ou donne une opinion contraire à ce qu’un Chrétien est tenu de croire explicitement, il appartient à tout Chrétien de juger que le Pape erre en cette occasion. Tout Chrétien peut donc juger le Pape. Luther s'en souviendra...

Des autorités spirituelles et temporelles complémentaires, les deux provenant de Dieu

En s’appuyant sur la Sainte Écriture, Ockham rappelle que tout pouvoir temporel provient de Dieu. Les autorités séculières, même celles des non-chrétiens, ont donc une légitimité réelle, y compris devant Dieu. Ainsi c’est une erreur de croire que l’autorité de Louis IV de Bavière vient du Pape. Il y a une « véritable seigneurie des choses temporelles et une véritable juridiction temporelle, laquelle était concédée et non pas seulement permise. »[4] Il en appelle aussi à la Genèse. Lors de l’œuvre de la Création, Dieu a donné à l’homme le pouvoir de s’approprier des choses temporelles. La propriété n’est donc pas mauvaise. Elle permet en outre de réguler les droits de chacun dans la condition pécheresse de l’homme et de préserver les droits des plus faibles.

Ockham montre ainsi que la Sainte Écriture ne peut être au-dessus des lois humaines, qui sont aussi issues d’un don de Dieu. Comme nous l’avons déjà vu, elle n’impose pas d’abord des obligations nouvelles, mais demande et propose une relation de liberté. Comme le Christ est resté soumis aux lois humaines, la Sainte Écriture ne peut être placée au-dessus des lois juridiques. C’est plutôt par sa soumission, à travers les hommes soumis à ces lois, qu’elle fait autorité. Elle a donc l’autorité de la liberté qu’elle autorise, de la vie nouvelle qu’elle suscite, et augmente ceux qui la reçoivent librement. Ainsi la Sainte Écriture et les lois humaines sont complémentaires comme la seigneurie spirituelle et la seigneurie temporelle. Il n’est ni domination arbitraire ni assujettissement illimité à la volonté d’autrui. Il est au service du bien commun. Insistons sur ce point : le pouvoir est pour Ockham service et utilité.

Ainsi d’après Ockham, la Sainte Écriture ne peut avoir d’autre autorité que la liberté qu’elle offre, à travers la possibilité d’une interprétation respectant les lois civiles de ceux qui la reçoivent. C’est donc grâce à elle que peut être pensée la distinction entre le pouvoir spirituel, médiatisé par la liberté intérieure des Chrétiens, et le pouvoir temporel, qu’elle légitime pour avoir reçu de Dieu la garde du bien commun. La Sainte Écriture n’a donc signification que comme entreprise de libération. « Il n’était donc ni adéquat ni utile à la propagation de la foi et à la conversion des nations que Pierre, ou l’un quelconque des évangélisateurs de la vérité, possédât [une telle plénitude] de pouvoir sur les choses temporelles ; en effet, si Pierre ou l’un de ses successeurs avait revendiqué pour eux les droits et les biens de ceux à qui ils dispensaient la parole de Dieu, ils auraient paru prêcher non pour la cause des hommes mais par appétit du lucre. »[5]

Jean XXII
Ainsi Ockham distingue les deux pouvoirs, temporel et spirituel, chacun étant autonome dans sa sphère. Mais comme nous verrons dans de prochains arbitres, cela n'est pas une nouveauté et l'Eglise l'a toujours enseigné. Mais distinction ne signifie pas ni séparation ni primauté de l'un sur l'autre. Comme le Christ n’est pas venu pour instaurer un empire ou défaire les lois existantes, comme Il s’est détourné des affaires politiques et ne s’est pas opposé à son arrestation, son vicaire, qu’est le Pape, ne peut prétendre avoir plus de pouvoir qu’Il n’en possédait lui-même. Ainsi le Pape ne peut revendiquer le moindre pouvoir sur l’autorité politique, ce que l'Église n'a jamais enseigné. La plénitude du pouvoir et son droit à intervenir dans les royaumes temporels sont donc illégitimes. Le pouvoir temporel n’a pas non plus d’autorité sur le spirituel, n’ayant aucune compétence dans ce domaine. Chacun reste donc dans sa sphère. Mais les deux pouvoirs doivent œuvrer ensemble pour le bien d’autrui tout en ne les assujettissant plus qu’il n’est nécessaire. Seul Dieu pourrait retirer à l’homme sa liberté par sa toute-puissance. Ainsi les pouvoirs spirituel et temporel sont au service de l’homme et ce dernier n’est leur assujetti que parce qu’il en va de son intérêt. Un pouvoir n’est légitime qu’au service de l’individu.

Ainsi, tout pouvoir politique est organisé en vue de l’utilité commune et se trouve limité par un impératif, à savoir la liberté évangélique qui est une loi de liberté.

Ockham, auteur d’autres ouvrages contre Jean XXII

Pour s’opposer aux prétentions du Pape, Ockham n’a pas seulement écrit son Court traité contre la tyrannie. Il écrit en effet de nombreux ouvrages contre Jean XXII. Dans De dogmatibius Johannis XXII papae (1333), il le déclare hérétique. Dans les Allegationes de potestas imperiali (1338), il défend le décret impérial qui décide que seule l’élection suffit à faire l’empereur, sans la consécration du Pape. Il élabore aussi ses Dialogues dont la première partie est groupée autour de l’autorité de la Sainte Écriture, de la théorie du concile général, de la théorie de la primauté apostolique et de la subordonnée nécessaire de l’Église à la communauté politique. En clair, il s’oppose à l’autorité du Pape et aussi aux pouvoirs des autorités ecclésiastiques. Contrairement à ce qu’il affirme dans son Court traité, selon des commentateurs, il semble même qu’il défend l’idée de la suprématie de l’autorité civile sur l’autorité religieuse.

Le droit qu’Ockham a élaboré pour justifier la distinction entre l’usage et la propriété répond aussi à cette lutte dans lequel il s’est engagé. Comme nous l’avons en effet vu dans notre dernier article, il distingue le droit provenant de Dieu (ou de la nature) et de l’homme. « L’autorité du Pape ne s’étend pas, selon la règle, aux droits et aux libertés d’autrui, pour les supprimer ou les troubler, surtout à ceux des empereurs, rois, princes et autres laïcs, parce que ces droits et ces libertés de ce genre sont au nombre des choses du siècle et que le Pape n’a pas d’autorité sur elles. […] C’est pourquoi le Pape ne peut priver d’une personne d’un droit que l’on tient non de lui mais de Dieu, de la nature ou d’un autre homme ; il ne peut priver les hommes de liberté qui lui ont été concédée par Dieu ou par la nature. »

Conclusion

Fuyant Avignon où siège le Pape, Guillaume d’Ockham défend les prétentions de son protecteur, Louis IV de Bavière. Il écrit des libelles et des pamphlets contre l’autorité du souverain pontife. Il élabore une doctrine qui distingue les pouvoirs spirituels et temporels, indépendants mais complémentaires, agissant pour le bien des hommes. Ainsi le Pape ne peut pas prétendre intervenir dans les affaires temporelles. Guillaume d’Ockham légitime ainsi les actions de Louis de Bavière et sécularise en fait la fonction impériale. Il écarte aussi l’Empire de la soumission de Rome. La portée de ses idées est encore haute. Il donne en fait à l’État une justification pour étendre son pouvoir sur ses sujets. Il défend même l’idée qu’il est aussi sacré que ne l’est le Siège pontifical. Wiclef puis Luther entendront sa doctrine pour opposer au Pape le pouvoir des seigneurs, ralliant ainsi ces derniers à leurs doctrines religieuses…



Notes et références
[1] J.-F. Spitz, introduction, Court traité du pouvoir tyrannique, traduit du latin et annoté par J.-F. Spitz, Fondements de la politique, PUF, 1999.
[2] Voir Émeraude, février 201, l’article "Une querelle autour de la pauvreté, lourde de conséquence".
[3] J.-F. Spitz, introduction, Court traité du pouvoir tyrannique, traduit du latin et annoté par J.-F. Spitz, Fondements de la politique, PUF, 1999.
[4] Livre III, chap. 2.
[5] Livre II, chap. 16.


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