« Plus nous abstrayons la réalité, plus elle
devient explicable. Plus nous nous éloignons de la réalité, plus nous la
saisissons. Telle est le paradoxe que nous révèlent les théories de la
relativité et la physique quantique »[1]. Des scientifiques élaborent au début du XXe siècle de
nouvelles théories pour comprendre des phénomènes inexplicables et ainsi répondre à l'insuffisance de la physique
classique. Ils comprennent vite que les notions qu’ils ont l’habitude de
manipuler n’ont pas de réalité dans le monde de l’infiniment petit. Leurs
découvertes semblent même remettre en cause la réalité elle-même. La notion du
temps a aussi changé depuis les théories de la
relativité. La conception du Monde a ainsi profondément évolué depuis un
siècle. L’Univers de Laplace avec son déterminisme exact apparaît désormais
bien dépassé, naïf et bien éloigné de la science. Qui oserait encore s’en servir pour
combattre la foi ? Si les progrès scientifiques rendent le scientisme du
XIXe siècle moins dangereux pour le christianisme, ils peuvent néanmoins présenter de réelles
inquiétudes pour la foi.
Les
théories scientifiques du XXe siècle décrivent un monde étrange qui
interpelle et remet en cause notre perception de la réalité et nos
connaissances. Contrairement à ce que prévoyaient les scientistes, la
philosophie revient en force dans les sciences. En percevant au loin le Big
Bang, de nombreux astrophysiciens se posent de véritables questions
philosophiques sur la Création et sur Dieu. Les physiciens les plus célèbres se
sont aussi interrogés sur la nature même de la réalité et de la connaissance. De
sérieux débats se poursuivent encore sur des questions fondamentales. Car les
scientifiques touchent désormais aux principes mêmes de la matière et de la
vie. Que doit-on croire ? Que peut-on faire ? Les philosophes à leur
tour utilisent des résultats scientifiques pour argumenter et valider leurs
pensées, édifier de nouvelles théories de la connaissance. De ces recherches
scientifiques et philosophiques sont nées de nouvelles conceptions sur le Monde et
sur l’homme, bien étranges pour un chrétien non averti. La foi est-elle alors de
nouveau menacée ?
La
physique quantique : un nouveau regard scientifique de l’infiniment petit
L’expérience
des fentes de Young [2] est l’une des expériences les plus marquantes du XXe
siècle. Non seulement elle a révélé la dualité corpuscule-onde de la lumière
mais également l’interaction entre l’observation et l’observateur au niveau des
électrons. Elle renverse des concepts de la physique et de la vie quotidienne.
Les corpuscules et les ondes ne sont-ils que des leurres ? Elle renverse
aussi un postulat de base de la physique. L’observateur et les appareils
d’observation feraient-ils partie intégrante de l’expérience au point de
rendre caduque l’étude isolée d’un objet ? Nous pourrions alors remettre
rapidement en cause toute connaissance de la réalité, voire la réalité
elle-même. Ne serait-elle qu’une construction intellectuelle ? La réalité n’aurait-elle
de sens qu’en fonction de l’observation, voire de notre conscience ? En
d’autres termes, en observant le Monde, nous ferions la réalité. Il n’y aurait
pas non plus de réalité hors du regard de l’homme. Nous pourrions enfin croire
qu’il n’y aurait pas finalement de réalité. Certaines de ces conclusions se
retrouvent hélas dans des essais scientifiques et philosophiques. Elles
affectent aussi des hommes et des femmes comme nous avons pu nous en
apercevoir récemment.
L’expérience
des fentes de Young est une des expériences les plus caractéristiques de la
physique quantique. Né au début du XXe siècle, cette nouvelle science a
bouleversé notre appréhension scientifique du Monde. Considéré aujourd’hui
comme une des branches fondamentales de la science, elle a donné lieu à de nombreuses interprétations tant physiques que philosophiques.
Théories
de la relativité : une nouvelle conception de l’Univers
Si
la vitesse de la lumière est fixe dans un milieu homogène quel que soit le
référentiel utilisé, Einstein a montré que le temps physique n’est pas une
notion absolue mais dépend du mouvement de l’observateur [3]. Plus le mouvement est rapide, plus le temps se détend ;
plus il est lent, plus le temps se contracte. Si vous voyagez à une très grande
vitesse, votre temps ralentira. Le temps est comme un des dimensions physiques de
l’espace, il est relatif à un référentiel. Contrairement à ce que pensait la
physique classique, le temps est une dimension qui se rajoute à celles de
l’espace. L’Univers apparaît ainsi à quatre dimensions : la hauteur, la
largeur, la profondeur et le temps. Ainsi les théories de la relativité ont
élaboré la notion d'espace-temps.
Une
nouvelle perception de la réalité…
Si
le temps et l’espace sont relatifs à l’observateur selon les théories de la
relativité, si la réalité dépend de l’observation selon des conclusions hâtives
de la physique quantique, le relativisme apparaît alors comme une des règles « naturelles » qui régissent le
Monde. Tout semble en effet être relatif à l’homme, à son mouvement ou à son
regard. Nous retrouvons ce relativisme dans d’autres sphères de la pensée,
atteignant même la morale et la religion. Finalement, la connaissance et donc
la Vérité elle-même seraient-elles relatives à l’homme ? Que deviendrait
alors la foi dans un tel Monde ? Elle ne pourrait subsister. Comment défendre nos convictions dans un Univers où tout serait
relatif ? Aucune vérité n’est tenable dans de telles conditions. C’est le
règne du scepticisme et non de la certitude. Que deviendrait même la notion de
Dieu, notion absolue par excellence ? … Les théories de relativité et la physique
quantique fonderaient-elles un relativisme dans lequel tout se
dissout, où rien ne subsiste de durable ?
De
véritables révolutions
La
physique quantique et les théories de relativité s’élaborent dans les années 20
du XXème siècle. Elles ont engagé une intense activité scientifique
internationale. De nombreux savants ont en quelques années fondé les branches
fondamentales des sciences modernes, balayant les certitudes scientifiques du
XIXe siècle. D'abord fruits de spéculations intellectuelles, les théories ont
été ensuite confirmées par des expériences. Elles ont donné naissance à de
nombreuses technologies, devenues rapidement indispensables pour notre vie
quotidienne (laser, énergie nucléaire, GPS, supraconducteurs, informatique, imagerie
médicale, etc.).
Nous
oublions souvent que la science a connu un bouleversement extraordinaire en
quelques années au début du XXème siècle. Souvent, nous nous débattons contre
les pensées funestes des idéologies qui datent presque toutes du XIXe siècle.
Nous luttons aussi contre le positivisme et le scientisme qui ont vu leurs
heures de gloire dans ce siècle si riche en événements. L’évolutionnisme date
aussi de ce siècle. Mais les interprétations issues de la physique quantique et
des théories de la relativité ne doivent-elles pas une plus grande
attention de notre part tant elles bouleversent notre manière de concevoir et de connaître le Monde ?
Sans
la physique classique, il n’est guère possible de réfuter le scientisme et le
déterminisme qui ont produit de nombreux ravages dans les âmes. Pour comprendre
l’évolutionnisme et le theillardisme, nous avons du aborder de nombreuses
théories et méthodes scientifiques. Ainsi avons-nous pu définir des arguments
contre ces idéologies. Pouvons-nous aussi comprendre le monde d'aujourd'hui en
ignorant la science moderne ? L’étude des nouvelles théories s’impose
donc.
Une
étude particulièrement ardue…
Cependant nous rencontrons rapidement de sérieux obstacles. Nous devons en effet aborder des
sciences difficiles, aux notions peu communes, où les mathématiques les plus
complexes jouent un rôle central. La physique quantique, par exemple, a pu se
développer grâce aux découvertes mathématiques les plus récentes. Le monde
quantique n’est perçu qu’au travers un formalisme mathématique ardu. En outre,
les sciences modernes ne sont guère abordées dans l’enseignement secondaire qui
reste profondément newtonien. Elles sont réservées aux études supérieures.
Paradoxalement,
ce sont aussi des sciences très vulgarisées. Nombreux sont en effet les
documents, les livres et les émissions qui traitent de ces sciences pour le
grand public. Généralement, ils se focalisent sur leurs révélations,
simplifient à l’extrême des résultats complexes et abordent les mêmes sujets sans apporter une lumière
suffisante. La documentation de vulgarisation ne permet pas souvent de comprendre
les fondements des sciences modernes et de distinguer l’essentiel du superflu. Nombreux
sont aussi les pseudo-scientifiques qui usent d’une connaissance mal digérée
pour dévoiler des théories parfois farfelues. Ainsi est-il nécessaire d’aborder
des documents plus sérieux mais aussi plus complexe. La difficulté est alors de
comprendre l’essentiel et de le rendre compréhensibles à des non-initiés sans
tomber dans le piège de la vulgarisation. En dépit de ces difficultés, nous
avons néanmoins eu l’audace de poursuivre notre étude…
Au cours de notre étude, nous avons alors rencontré une autre
difficulté, plutôt inattendue. Si les théories de la physique quantique sont aujourd'hui bien formalisées,
elles donnent lieu aussi à de nombreuses interprétations, parfois contradictoires
et à des débats multiples entre scientifiques qui ne sont pas encore achevés. « Il est étonnant de constater que si, à
l’heure actuelle, le formalisme, l’appareil mathématique et le cadre opératoire
de cette théorie sont universellement reconnus, il existe encore des débats
acharnés sur son interprétation et ses implications philosophiques. Pour la
première fois sans doute, l’esprit humain se sent parfois dominée par une
vérité qu’il a lui-même construite »[4].
Il existe de nombreuses écoles sur la signification que peut revêtir
la physique quantique. Elles influencent les théories de la connaissance et nos relations avec le réel. Elles nous interrogent sur les limites de la science et
de nos langages, sur nos capacités de décrire la réalité et de la comprendre. « À mon sens, la physique actuelle soulève la
question radicale […] : « le
réel est-il connaissable ? » »[5].
Les interprétations philosophiques réveillent ainsi de vieilles interrogations que le
matérialisme du XIXe avait enterrées. Nous entrons inévitablement dans la
philosophie et la métaphysique. Une des conséquences de la révolution
scientifique du XXe siècle ! Et là apparaît encore toute la pertinence de notre
étude. Certaines interprétations « philosico-physique »
ébranlent les conceptions et les manières de penser et détournent le regard loin de Dieu et de sa Création. Comment pouvons-nous alors chercher à défendre la foi et
à la répandre si l’homme s’est éloigné de la
réalité ?...
Références
[1] Émeraude, janvier 2014, article « La lumière ».
[2] Émeraude, janvier 2014, article « La lumière ».
[3] Émeraude, janvier 2014, article « La vitesse fixe de la lumière ».
[4] Jean-Louis Basdevant et Jean Dalibard, Mécanique quantique, cours de polytechnique, février 2002.
[5] Bernard d’Espagnat, Bernard d’Espagnat – De la physique à la métaphysique ? Entretien d’Hugues Simard, http://journaldesgrandesecoles.com/bernard-despagnat-de-la-physique-a-la-metaphysique
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