" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


mercredi 12 février 2014

Révolutions scientifiques au XXe siècle

« Plus nous abstrayons la réalité, plus elle devient explicable. Plus nous nous éloignons de la réalité, plus nous la saisissons. Telle est le paradoxe que nous révèlent les théories de la relativité et la physique quantique »[1]. Des scientifiques élaborent au début du XXe siècle de nouvelles théories pour comprendre des phénomènes inexplicables et ainsi répondre à l'insuffisance de la physique classique. Ils comprennent vite que les notions qu’ils ont l’habitude de manipuler n’ont pas de réalité dans le monde de l’infiniment petit. Leurs découvertes semblent même remettre en cause la réalité elle-même. La notion du temps a aussi changé depuis les théories de la relativité. La conception du Monde a ainsi profondément évolué depuis un siècle. L’Univers de Laplace avec son déterminisme exact apparaît désormais bien dépassé, naïf et bien éloigné de la science. Qui oserait encore s’en servir pour combattre la foi ? Si les progrès scientifiques rendent le scientisme du XIXe siècle moins dangereux pour le christianisme, ils peuvent néanmoins présenter de réelles inquiétudes pour la foi.

Les théories scientifiques du XXe siècle décrivent un monde étrange qui interpelle et remet en cause notre perception de la réalité et nos connaissances. Contrairement à ce que prévoyaient les scientistes, la philosophie revient en force dans les sciences. En percevant au loin le Big Bang, de nombreux astrophysiciens se posent de véritables questions philosophiques sur la Création et sur Dieu. Les physiciens les plus célèbres se sont aussi interrogés sur la nature même de la réalité et de la connaissance. De sérieux débats se poursuivent encore sur des questions fondamentales. Car les scientifiques touchent désormais aux principes mêmes de la matière et de la vie. Que doit-on croire ? Que peut-on faire ? Les philosophes à leur tour utilisent des résultats scientifiques pour argumenter et valider leurs pensées, édifier de nouvelles théories de la connaissance. De ces recherches scientifiques et philosophiques sont nées de nouvelles conceptions sur le Monde et sur l’homme, bien étranges pour un chrétien non averti. La foi est-elle alors de nouveau menacée ?

La physique quantique : un nouveau regard scientifique de l’infiniment petit

L’expérience des fentes de Young [2] est l’une des expériences les plus marquantes du XXe siècle. Non seulement elle a révélé la dualité corpuscule-onde de la lumière mais également l’interaction entre l’observation et l’observateur au niveau des électrons. Elle renverse des concepts de la physique et de la vie quotidienne. Les corpuscules et les ondes ne sont-ils que des leurres ? Elle renverse aussi un postulat de base de la physique. L’observateur et les appareils d’observation feraient-ils partie intégrante de l’expérience au point de rendre caduque l’étude isolée d’un objet ? Nous pourrions alors remettre rapidement en cause toute connaissance de la réalité, voire la réalité elle-même. Ne serait-elle qu’une construction intellectuelle ? La réalité n’aurait-elle de sens qu’en fonction de l’observation, voire de notre conscience ? En d’autres termes, en observant le Monde, nous ferions la réalité. Il n’y aurait pas non plus de réalité hors du regard de l’homme. Nous pourrions enfin croire qu’il n’y aurait pas finalement de réalité. Certaines de ces conclusions se retrouvent hélas dans des essais scientifiques et philosophiques. Elles affectent aussi des hommes et des femmes comme nous avons pu nous en apercevoir récemment.

L’expérience des fentes de Young est une des expériences les plus caractéristiques de la physique quantique. Né au début du XXe siècle, cette nouvelle science a bouleversé notre appréhension scientifique du Monde. Considéré aujourd’hui comme une des branches fondamentales de la science, elle a donné lieu à de nombreuses interprétations tant physiques que philosophiques.

Théories de la relativité : une nouvelle conception de l’Univers

Si la vitesse de la lumière est fixe dans un milieu homogène quel que soit le référentiel utilisé, Einstein a montré que le temps physique n’est pas une notion absolue mais dépend du mouvement de l’observateur [3]. Plus le mouvement est rapide, plus le temps se détend ; plus il est lent, plus le temps se contracte. Si vous voyagez à une très grande vitesse, votre temps ralentira. Le temps est comme un des dimensions physiques de l’espace, il est relatif à un référentiel. Contrairement à ce que pensait la physique classique, le temps est une dimension qui se rajoute à celles de l’espace. L’Univers apparaît ainsi à quatre dimensions : la hauteur, la largeur, la profondeur et le temps. Ainsi les théories de la relativité ont élaboré la notion d'espace-temps.

Une nouvelle perception de la réalité…

Si le temps et l’espace sont relatifs à l’observateur selon les théories de la relativité, si la réalité dépend de l’observation selon des conclusions hâtives de la physique quantique, le relativisme apparaît alors comme une des règles « naturelles » qui régissent le Monde. Tout semble en effet être relatif à l’homme, à son mouvement ou à son regard. Nous retrouvons ce relativisme dans d’autres sphères de la pensée, atteignant même la morale et la religion. Finalement, la connaissance et donc la Vérité elle-même seraient-elles relatives à l’homme ? Que deviendrait alors la foi dans un tel Monde ? Elle ne pourrait subsister. Comment défendre nos convictions dans un Univers où tout serait relatif ? Aucune vérité n’est tenable dans de telles conditions. C’est le règne du scepticisme et non de la certitude. Que deviendrait même la notion de Dieu, notion absolue par excellence ? … Les théories de relativité et la physique quantique fonderaient-elles un relativisme dans lequel tout se dissout, où rien ne subsiste de durable ?

De véritables révolutions

La physique quantique et les théories de relativité s’élaborent dans les années 20 du XXème siècle. Elles ont engagé une intense activité scientifique internationale. De nombreux savants ont en quelques années fondé les branches fondamentales des sciences modernes, balayant les certitudes scientifiques du XIXe siècle. D'abord fruits de spéculations intellectuelles, les théories ont été ensuite confirmées par des expériences. Elles ont donné naissance à de nombreuses technologies, devenues rapidement indispensables pour notre vie quotidienne (laser, énergie nucléaire, GPS, supraconducteurs, informatique, imagerie médicale, etc.).

Nous oublions souvent que la science a connu un bouleversement extraordinaire en quelques années au début du XXème siècle. Souvent, nous nous débattons contre les pensées funestes des idéologies qui datent presque toutes du XIXe siècle. Nous luttons aussi contre le positivisme et le scientisme qui ont vu leurs heures de gloire dans ce siècle si riche en événements. L’évolutionnisme date aussi de ce siècle. Mais les interprétations issues de la physique quantique et des théories de la relativité ne doivent-elles pas une plus grande attention de notre part tant elles bouleversent notre manière de concevoir et de connaître le Monde ?

Sans la physique classique, il n’est guère possible de réfuter le scientisme et le déterminisme qui ont produit de nombreux ravages dans les âmes. Pour comprendre l’évolutionnisme et le theillardisme, nous avons du aborder de nombreuses théories et méthodes scientifiques. Ainsi avons-nous pu définir des arguments contre ces idéologies. Pouvons-nous aussi comprendre le monde d'aujourd'hui en ignorant la science moderne ? L’étude des nouvelles théories s’impose donc.

Une étude particulièrement ardue…

Cependant nous rencontrons rapidement de sérieux obstacles. Nous devons en effet aborder des sciences difficiles, aux notions peu communes, où les mathématiques les plus complexes jouent un rôle central. La physique quantique, par exemple, a pu se développer grâce aux découvertes mathématiques les plus récentes. Le monde quantique n’est perçu qu’au travers un formalisme mathématique ardu. En outre, les sciences modernes ne sont guère abordées dans l’enseignement secondaire qui reste profondément newtonien. Elles sont réservées aux études supérieures.






Paradoxalement, ce sont aussi des sciences très vulgarisées. Nombreux sont en effet les documents, les livres et les émissions qui traitent de ces sciences pour le grand public. Généralement, ils se focalisent sur leurs révélations, simplifient à l’extrême des résultats complexes et abordent les mêmes sujets sans apporter une lumière suffisante. La documentation de vulgarisation ne permet pas souvent de comprendre les fondements des sciences modernes et de distinguer l’essentiel du superflu. Nombreux sont aussi les pseudo-scientifiques qui usent d’une connaissance mal digérée pour dévoiler des théories parfois farfelues. Ainsi est-il nécessaire d’aborder des documents plus sérieux mais aussi plus complexe. La difficulté est alors de comprendre l’essentiel et de le rendre compréhensibles à des non-initiés sans tomber dans le piège de la vulgarisation. En dépit de ces difficultés, nous avons néanmoins eu l’audace de poursuivre notre étude…


Au cours de notre étude, nous avons alors rencontré une autre difficulté, plutôt inattendue. Si les théories de la physique quantique sont aujourd'hui bien formalisées, elles donnent lieu aussi à de nombreuses interprétations, parfois contradictoires et à des débats multiples entre scientifiques qui ne sont pas encore achevés. « Il est étonnant de constater que si, à l’heure actuelle, le formalisme, l’appareil mathématique et le cadre opératoire de cette théorie sont universellement reconnus, il existe encore des débats acharnés sur son interprétation et ses implications philosophiques. Pour la première fois sans doute, l’esprit humain se sent parfois dominée par une vérité qu’il a lui-même construite »[4]. Il existe de nombreuses écoles sur la signification que peut revêtir la physique quantique. Elles influencent les théories de la connaissance et nos relations avec le réel. Elles nous interrogent sur les limites de la science et de nos langages, sur nos capacités de décrire la réalité et de la comprendre. « À mon sens, la physique actuelle soulève la question radicale […] : « le réel est-il connaissable ? » »[5]

Les interprétations philosophiques réveillent ainsi de vieilles interrogations que le matérialisme du XIXe avait enterrées. Nous entrons inévitablement dans la philosophie et la métaphysique. Une des conséquences de la révolution scientifique du XXe siècle ! Et là apparaît encore toute la pertinence de notre étude. Certaines interprétations « philosico-physique » ébranlent les conceptions et les manières de penser et détournent le regard  loin de Dieu et de sa Création. Comment pouvons-nous alors chercher à défendre la foi et à la répandre si l’homme s’est éloigné de la réalité ?...



Références
[1] Émeraude, janvier 2014, article « La lumière ».
[2] Émeraude, janvier 2014, article « La lumière ».
[3] Émeraude, janvier 2014, article « La vitesse fixe de la lumière ».
[4] Jean-Louis Basdevant et Jean Dalibard, Mécanique quantique, cours de polytechnique, février 2002.
[5] Bernard d’Espagnat, Bernard d’Espagnat – De la physique à la métaphysique ? Entretien d’Hugues Simard, http://journaldesgrandesecoles.com/bernard-despagnat-de-la-physique-a-la-metaphysique 

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