Sacrement
et sacrifice
Tout
sacrement signifie, représente, contienne, produise la grâce et la met dans
l’âme de celui qui le reçoit. Tel un canal spirituel, il l’y fait découler de
Notre Seigneur Jésus-Christ. Il crée en l’homme la vie divine, la conserve et
la développe par des moyens, signes sensibles et extérieurs, que Notre Seigneur
Jésus-Christ a établis comme instruments
de la grâce.
Le
concile de Trente déclare ce sacrifice comme « propitiatoire ». Il est offert à Dieu pour la rémission des péchés.
L’Eucharistie « est légitimement
offerte, non seulement pour les péchés, les peines, les satisfactions et les
autres besoins des fidèles vivants, mais aussi pour ceux qui sont morts dans le
Christ et ne sont pas encore pleinement purifiés. »[16] Le
sacrifice eucharistique n’est donc pas réduit à un sacrifice de louange et
d’actions de grâces.
Ainsi,
en tant que sacrement,
l’Eucharistie est un moyen de salut destiné aux hommes, et, en tant que sacrifice, elle est un acte de culte envers Dieu.
La
Présence réelle …
L’Église
enseigne clairement la présence réelle et
intègre de Notre Seigneur Jésus-Christ sous l’apparence du pain et du vin.
Dans l’Eucharistie, sont en effet contenus le corps, l’âme et la divinité de
Notre Seigneur Jésus-Christ. La définition emploie trois termes « vraiment », « réellement » et « substantiellement », termes qui se
complètent et se renforcent pour insister sur la réalité de cette présence. Ces
termes s’opposent aux trois autres mots que sont « signe », « figure »
et « virtuellement », qui
peuvent remettre en question cette réalité.
Un
mode de présence particulier
Mais,
prétextant que Notre Seigneur Jésus-Christ ne peut être à la fois sur l’autel
et dans les cieux, les calvinistes[19]
refusent toute présence réelle. Pour répondre à cet argument, le concile de
Trente précise que Notre Seigneur Jésus-Christ est bien présent sous
l’apparence du pain et du vin « par
un mode de présence que nous ne pouvons à peine exprimer par des mots, et que
nous pouvons cependant reconnaître et constamment croire comme possible à Dieu
par notre pensée éclairée par la foi. »[20] Notre
Seigneur Jésus-Christ demeure présent à la droite de Dieu le Père « selon un mode d’existence qui est
surnaturelle ». Et Il est « sacramentellement
présent en de nombreux autres lieux en sa substance ». L’Eucharistie
est un mystère…
Présent
sous chaque espèce et dans chaque parcelle
Présence
produite par transsubstantiation…
Le
concile de Trente enseigne la manière dont la Présence réelle se produit. Il
déclare que « par la consécration du
pain et du sang se fait un changement de toute la substance du pain en la
substance du corps du Christ Notre Seigneur et de toute la substance du vin en
la substance de son sang. Ce changement a été justement et proprement appelé,
par la Sainte Église catholique, transsubstantiation. »[21]
Quand
l’Eucharistie est produite, il n’y a donc plus de pain ni de vin. Contrairement
à ce que croyait Luther, les deux
substances, la substance naturelle et la substance surnaturelle, ne coexistent
pas. Le concile de Trente a ainsi condamné la doctrine de l’impanation et
de la consubstantiation qu’enseignait Luther. Il y a bien conversion des substances naturelles en substances surnaturelles.
C’est par cette conversion que Notre Seigneur Jésus-Christ est présent dans
l’Eucharistie. Néanmoins, les espèces demeurent, ce qui explique que nous ne
percevons que le pain et le vin. La foi seule juge. La
transsubstantiation, que nous ne pouvons pas expliquer, est attribuée à la toute-puissance de Dieu.
Le
terme de transsubstantiation est récusé par Luther, Calvin et les autres
protestants, notamment parce qu’il n’est pas mentionné dans la Sainte Écriture.
Permanence de
l’Eucharistie
La
Présence réelle ne se limite donc pas à la communion. Selon cette erreur, il ne
peut y avoir de culte eucharistique. En raison de cette permanence, il est
possible de conserver l’Eucharistie et de la porter aux malades selon une très
ancienne tradition. La croyance en la Présence réelle oblige aussi de la
conserver en un lieu sacré et de la manipuler avec un très grand soin.
Objet
d’un culte divin
Notre
Seigneur Jésus-Christ, dans l’Eucharistie, est alors honoré par des fêtes
particulières et porté en procession, par exemple pour la fête du Saint
Sacrement, appelé aussi Fête Dieu, ou encore exposé publiquement à l’adoration
des chrétiens.
Faut-il
enfin s’en approcher « avec grand
respect et sainteté »[26]. Saint
Paul nous a déjà demandé de nous éprouver nous-même avant de nous y approcher
(cf. I. Corinthiens, II, 28). Si une personne a conscience d’un péché
mortel, elle ne peut recevoir le sacrement de l’Eucharistie sans une confession
préalable.
L’excellence
et la particularité du sacrement de l’Eucharistie
Le
concile de Trente précise enfin les
effets du sacrement. Il est un « aliment
spirituel des âmes qui nourrit et fortifie ceux qui vivent de sa vie », un « antidote nous libérant des fautes quotidiennes et nous préservant des
fautes mortelles » et « le
gage de notre gloire à venir et de notre félicité éternelle », ainsi « qu’un symbole de cet unique corps dont
Il est lui-même la tête et auquel il a voulu que nous soyons attachés par les
liens les plus étroits de la foi, de l’espérance et de la charité, en sorte que
nous disions tous la même chose et qu’il n’y ait pas de divisions parmi nous.»[27].
En
outre, le concile de Trente rappelle que tous les « sacrements ont la vertu de sanctifier lorsque quelqu’un y a
recours ». Or, « ce que
l’on trouve d’excellent et de particulier est […] que, dans l’Eucharistie,
se trouve l’auteur même de la sainteté avant que nous la recevons. »[28]
Conclusion
Nourriture
céleste à recevoir et à consommer précieusement en tant que sacrement, l’Eucharistie est aussi sacrifice en
tant qu’elle est offerte à Dieu au cours de la Sainte Messe. Elle est « sacrifice au sens propre »[32] au
point que si elle est privée de sa valeur sacrificielle, elle perd tout sens. La
doctrine sur le sacrement de l’Eucharistie ne doit pas nous détourner de celle
de la Sainte Messe à laquelle elle est intimement et inévitablement associée. Doté de ce double caractère, sacrement et
sacrifice, l’Eucharistie est décisive pour notre salut et notre vie éternelle. Il
est donc essentiel de connaître la doctrine qu’enseigne l’Église sur
l’Eucharistie et de la défendre contre toute erreur.
La
connaissance de la doctrine sur l’Eucharistie implique aussi d’entourer ce mystère d’une grande vénération
et d’un profond respect qui exclut négligence et irrévérence. L’Église
l’entoure ainsi d’un culte divin et s’efforce de lui préparer un cadre digne
des rites divins, veillant à écarter tout ce qui ne lui convient pas. La Sainte
Messe au cours de laquelle se réalise l’admirable mystère est ainsi un livre
sacré ouvert aux fidèles qui leur ouvre les yeux de l’âme en touchant à tous
leurs sens dans un cadre adapté à ce trésor divin. Comme un écrin protégeant la
plus belle des pierres précieuses, elle fait davantage éclater l’œuvre divine pour la plus grande gloire de Dieu et pour notre
propre sainteté.
Notes et références
[1] Pie XII, lettre encyclique Mediator
Dei sur la liturgie et le culte eucharistique, II, I, 20 novembre 1947,
laportelatine.org.
[2] Léon XIII, lettre encyclique Mirae
caritatis, 28 mai 1902, Denzinger n°3360.
[3] Concile de Vatican II,
constitution dogmatique Lumen gentium sur l’Eglise, chapitre
II, n°11, 21 novembre 1964, Denzinger n°4127.
[4] Jean-Paul II, lettre encyclique Ecclesia
de Eucharistia sur l’Eucharistie dans son rapport à l’Eglise, chapitre
I, n°11, 17 avril 2003, vatican.va.
[5] Paul VI, lettre encyclique Mysterium
Fidei sur la doctrine et le culte de la sainte Eucharistie, 3 septembre
1965, vatican.va.
[6] Jean-Paul II, lettre encyclique Ecclesia
de Eucharistia, conclusion, n°61.
[7] Concile de Trente, 13ème
session, décret sur le sacrement de l’Eucharistie, 11 octobre 1551.
[8] Concile de Trente, 22ème
session, doctrine et canons sur le sacrifice de la messe, 17 septembre
1562.
[9] Concile de Trente, 21ème
session, doctrine et canons sur la communion sous les deux espèces et la
communion des enfants, 16 juillet 1562.
[10] Les autres sacrements
sont : le baptême, la confirmation, la pénitence, l’extrême-onction,
l’ordre et le mariage.
[11] Voir Emeraude, août 2023,
article « La Dernière Cène, ultime
repas ».
[12] Concile de Trente, Décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chap. 2, Denzinger n°1638.
[13] Jean Calvin, Institution
de la religion chrétienne, livre IV, p. 487
[14] Concile de Trente, doctrine
et canons sur le sacrifice de la messe, chapitre 1, Denzinger
n°1740.
[15] Concile de Trente, doctrine
et canons sur le sacrifice de la messe, chapitre 2, Denzinger
n°1743.
[16] Concile de Trente, doctrine
et canons sur le sacrifice de la messe, chapitre 2, Denzinger
n°1743.
[17] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chapitre 1, Denzinger n°1636.
[18] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, canon 1, Denzinger n°1651.
[19] Voir Calvin Institution chrétienne,
livre IV, et le pamphlet d’Antoine Marcourt (v. 1485-1561), disciple de Jean
Calvin, célèbre pour l’affaire des placards. Les placards contre la messe
(1534), museeprotestant.org. Le pamphlet est intitulé « articles véritables sur les horribles,
grands et insupportables abus de la messe papale, inventée directement contre
la sainte cène de notre Seigneur, seul Médiateur et seul Sauveur Jésus-Christ. »
[20] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chapitre 1, Denzinger n°1656.
[21] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chapitre 4, Denzinger n°1642.
[22] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, canon n°5, Denzinger n°1654.
[23] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chapitre 3, Denzinger n°1643
[24] Jean Calvin, Institution
de la religion chrétienne, livre IV, nouvelle édition revue et corrigée
sur l’édition française de 1560, p. 655, Franck Baumgartner, édition E. Beroud
& C., librairie de la suisse française, archive. org.
[25] Jean Calvin, Institution
de la religion chrétienne, livre IV, p. 487
[26] Concile de Trente, décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chapitre 7, Denzinger n°1646.
[27] Concile de Trente, Décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chap. 2, Denzinger n°1638.
[28] Concile de Trente, Décret
sur le sacrement de l’Eucharistie, chap. 2, Denzinger n°1638.
[29] Lauda Sion, chant de la fête
du Très Saint-Sacrement de l’Eucharistie, dite aussi Fête-Dieu.
[30] Léon XIII, lettre encyclique Mirae
caritatis sur la très sainte Eucharistie.
[31] Léon XIII, lettre encyclique Mirae
caritatis sur la très sainte Eucharistie.
[32] Jean Paul II, lettre encyclique Ecclesia
de Eucharistia, chapitre I, n°11.
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