De nos jours, nous
assistons aussi à la division des
catholiques selon leur conception de la Sainte Messe. Les uns demeurent
fidèles à l’ancien rite romain quand d’autres suivent encore celui de Paul VI
ou participent à des messes toujours plus innovantes. La position des papes est
encore plus significative. Ce que Benoît XVI a accepté, le pape François
refuse. Ce qui était hier permis ne l’est plus aujourd’hui. Au XVIe siècle, les
différents mouvements protestants s’opposent aussi aux catholiques par la mise
en place de nouvelles cérémonies en rupture avec la messe. Toutes ces querelles
et divisions illustrent encore de manière éclatante l’importance de la sainte
messe dans la vie et la piété des fidèles. C’est sans-doute une triste leçon à
retenir de la crise qui atteint l’Eglise.
Elle nous oblige à tourner notre regard vers la sainte messe …
La sainte messe est désormais
le sujet de notre essai apologétique afin de mieux faire connaître ce qui est
le cœur de l’Eglise et de la défendre contre tous ceux qui l’ont remise en
cause afin de contribuer avec tant d’autres à une restauration que nous
souhaitons vivement. Pour cela, nous allons tenter de comprendre l’origine de
la crise qui touche la sainte messe et d’abord, dans cet article, de présenter
la constitution Sacrosanctum Concilium du deuxième concile de Vatican dont le
but était de rénover la liturgie…
La constitution Sacrosanctum
Concilium
La constitution
comprend sept chapitres qui peuvent être répartis en deux parties. La première
partie définit les principes généraux et
les normes à apporter « pour la
restauration et le progrès de la liturgie » (chap. I) alors que la
seconde n’est que l’application de ces
normes aux différentes parties de la liturgie. Les chapitres II à VII
révisent en effet le mystère de l’Eucharistie (II), les rites des différents
sacrements (III), l’office divine (IV), l’année liturgique (V), la musique
sacrée (VI), l’art sacré et le matériel du culte (VII). Un appendice en faveur
d’une réforme du calendrier liturgique termine la constitution.
La première partie commence
par définir en quoi la célébration
liturgique est une action de l’Eglise d’une extrême importance. Elle est « l’action sacrée par excellence dont nulle
autre action de l’Eglise ne peut atteindre l’efficacité au même titre et au
même degré » (7), même si elle n’en est pas son unique activité. Elle
est aussi « sommet et source de la
vie de l’Eglise. » (10) L’action de l’Eglise tend vers elle et en même
temps toute sa vertu en découle. La liturgie est aussi le principe de la piété.
Cependant, pour obtenir
cette pleine efficacité, non seulement la célébration doit être valide et
licite, mais les fidèles doivent aussi être dans « les dispositions d’une âme droite » (11). La constitution
insiste surtout sur la participation des
fidèles qui doit être « consciente, active et fructueuse. »
En outre, la
constitution veut améliorer la formation
liturgique du clergé et des fidèles (II).
Enfin, dans une
troisième partie, elle définit « la
restauration de la liturgie » (III) et qu’elle promeut le
développement de la vie liturgique dans le diocèse et la paroisse (IV) et de la
pastorale liturgique (V).
La
constitution souligne donc l’importance de la liturgie qu’elle veut restaurer
pour favoriser les bonnes dispositions des fidèles afin qu’ils en reçoivent
toutes les vertus. Son rôle et son caractère sacrés
imposent aussi une grande prudence.
Enfin, comme elle est de nature doctrinaire, elle définit des principes, des
normes, des limites. Elle n’est pas avant tout pratique. Nous allons désormais étudier
uniquement la partie portant sur la « restauration
de la liturgie ».
Objectifs de la « restauration de la liturgie »
Les objectifs de cette
rénovation et de ce progrès sont de rendre la
participation des fidèles « consciente,
active et fructueuse » (11), « pleine, consciente et active » (14), « plénière et active »
(41), « consciente, pieuse et
active » (48), « consciente,
active et facile » (79). Le terme de « participation active » revient à dix-huit reprises dans le
texte.
Notons aussi que neuf
fois, la constitution précise que les modifications doivent être jugées « utiles »,
« nécessaires » ou « pertinentes ».
Les limites de la réforme liturgique
Cette rénovation doit
se faire également « avec prudence
dans l’esprit d’une saine tradition » (4), même si elle doit adapter
les rites aux circonstances et aux nécessités d’aujourd’hui. Les modifications
doivent répondre à une double nécessité.
« On ne fera des innovations que si
l’utilité de l’Eglise les exige vraiment et certainement, et après s’être
assuré que les formes nouvelles sortent des formes déjà existantes par un
développement en quelque sorte organique. » (23) Cela
signifie donc l’absence de rupture.
Enfin, les modifications ne doivent pas conduire à singulariser un rituel par
rapport à d’autres.
Les points à modifier
La rénovation doit promouvoir la célébration communautaire
au détriment de la célébration individuelle et quasi-privée. En outre, elle
doit favoriser « les acclamations du
peuple, les réponses, le chant des psaumes, les antiennes, les cantiques et
aussi les actions ou gestes et les attitudes corporelles. » (30)
Elle doit préserver la dignité de la célébration.
Les participants à la célébration doivent exercer leur fonction « avec toute la piété sincère et le bon ordre
qui conviennent à leur ministère » (28) et selon leur rôle. Le rôle
des fidèles ne doit pas être oublié.
« L’usage
de la langue latine, sauf droit
particulier, sera conservé dans les rites latins. » (36) Cependant, la
constitution précise que l’emploi de la langue vernaculaire étant très utile
pour les fidèles, il est possible de lui accorder une grande place.
Enfin, la constitution
promeut l’adaptation de la liturgie au
caractère et aux traditions des différents peuples sous condition que ces
adaptations ne soient pas liés à des superstitions et à des erreurs et qu’elles
soient conformes « avec les
principes d’un véritable et authentique esprit liturgique. » (37) En
outre, le rite romain doit être
substantiellement sauvegardé.
Quelques remarques
Nous pouvons aussi noter
qu’après avoir clairement défini des principes, la constitution donne la
possibilité de les déroger si cela est nécessaire et utile. Ainsi, après avoir
rappelé la conservation de l’usage de la langue latine dans les rites latins,
elle demande d’accorder une plus large place à la langue vernaculaire si cela
est utile pour le peuple. La constitution tente donc de concilier la Tradition et le progrès en définissant le principe de développement organique,
ce qui semble impliquer une continuité dans les modifications liturgiques.
La
formation est un élément clé de la réforme liturgique.
La constitution souligne en effet l’importance de la formation liturgique des
prêtres et des fidèles, sur laquelle fonde en effet la restauration de la
liturgie. Toute modification s’appuie sur une connaissance de la liturgie et de
la tradition liturgique, qui doit guider le progrès liturgique dans la
continuité de la tradition. Il ne s’agit pas simplement de connaître les
raisons d’être des différents gestes et rites ainsi que de leurs évolutions
mais aussi d’acquérir le sens de la
liturgie ou encore l’esprit de la
liturgie. Cette formation s’étend à tout ce qui constitue la liturgie,
notamment l’art et la musique sacrés. Sans cette connaissance, il n’y a point
de restauration possible, de retour à la tradition authentique.
Alors que la
constitution concentre l’attention sur les fidèles, elle précise que la fin de
la liturgie et de tout ce qui la constitue est la gloire de Dieu et leur
sanctification. Cependant, elle le rappelle de manière discrète. La
glorification de Dieu est ainsi mentionnée quatre fois dans le texte.
Conclusions
La constitution Sacrosanctum
Concilium est votée avec 2147 voix pour (« placet ») et 4
contre (« non placet ») après deux sessions seulement. Elle est donc satisfaisante pour l’unanimité des pères
conciliaires. Elle se présente comme une restauration qui cherche à rendre
la liturgie plus accessible aux fidèles pour une meilleure participation et
compréhension des fidèles, et finalement pour leur sanctification, dans la
continuité de la tradition.
Cependant, si les
principes et les normes de la restauration de la liturgie sont suffisamment
clairs, l’ensemble présente quelques
risques. Elle se fonde notamment sur une connaissance de la liturgie, sur
la formation et sur l’obéissance aux autorités de l’Église. Si ces conditions
décisives n’étaient pas remplies, l’appel à l’adaptation et aux modifications
pour le progrès pourrait rapidement conduire à de malheureuses initiatives incontrôlables
contraires à la tradition liturgique et finalement à l’esprit de la
constitution. Or, au lendemain du deuxième concile de Vatican, un autre esprit s’est
imposé…
Note et référence
[1] Paul VI, Constitution sur la sainte liturgie Sacrosanctum Concilium, Préambule,4 décembre 1963, vatican.va. L'ensemble des citations provient de cette constitution.
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