Comme
Saint Pie X le déclare dans son encyclique, cet événement ne peut surprendre personne.
Elle « n’est ni une nouveauté, ni
une surprise » pour ceux qui sont témoins de ces « coups si nombreux et si redoutables tour à
tour portés par l’autorité publique à la religion ». Elle n’est qu’une
suite logique d’une série de mesures qui se sont abattues sur elle, mesures qui
« peu à peu séparaient de fait
l’Église de l’État ».
La
loi de 1905 résulte donc d’une série d’autres textes législatifs qui, tous,
conduisent à la mise en place d’un État
laïque. « Clé de voûte de la
laïcité », elle conforte et finalise la mise en place d’un nouveau
régime, un nouveau rapport entre l’Église et l’État. Après plus d’un siècle
d’existence, elle paraît renfermer les principes même de notre nation.
Cependant, aujourd’hui, elle ne peut guère être comprise, comme les réactions
qu’elle provoque encore, sans revenir
aux textes et aux mesures qui la précèdent et dont elle est une sorte de
conclusion. Comme nous l’avons pu le constater dans notre article précédent[2], elle contient
bien des difficultés et des contradictions. Mais au-delà du texte, elle porte
des valeurs que l’homme contemporain risque de ne pas saisir s’il ne revient
pas à ce passé. Le chrétien risque aussi de croire que le régime qu’elle a
institué est un régime normal, sans danger ni difficulté, et donc un régime
acceptable. Comment pourrait-il alors comprendre aujourd’hui les angoisses et les sollicitudes de Saint
Pie X ? Comprendra-t-il tous le sens de la résistance et du combat de
l’Église pour réduire les effets néfastes d’une telle loi ?
L’œuvre
de la révolution
Pillage d'une église en 1793
Huile sur toile, Victor Henri Juglar (v. 1885)
Musée de la Révolution française
|
Par
la constitution civile du clergé de 1790, l’assemblée nationale a voulu
constituer une Église nationale, soumise à l’État et aux lois de la république en
voulant l’ériger comme une véritable administration, avec des évêques et des
prêtres à sa solde. De manière unilatérale, sans aucune concertation avec les
autorités ecclésiastiques, reniant l’autorité du pape, les députés lui ont imposé
une nouvelle organisation, une nouvelle direction à l’Église, croyant pouvoir
faire et défaire la religion à leur gré, croyant qu’une loi suffise pour
qu’elle se transforme selon leur convenance. Il suffit d’un vote pour que tout
se plie à leur volonté. Mais elle a été un échec. Pire. Elle est devenue une
calamité. Comment l’Église aurait-elle pu accepter un tel abus de pouvoir, un
tel dictat, sans se défendre et rappeler ce qu’elle est ? Fort de leurs
prétentions et de leurs nouveaux pouvoirs, aveuglés par leurs passions et leur
idéologie, les politiques ont voulu imposer leur volonté par la force, la
violence et le sang, initiant ainsi les persécutions des temps modernes. Que de
crimes et de sang versés ! Le concordat de 1801 a ainsi mis fin à cette
tragédie odieuse et terrifiante…
La
confusion des pouvoirs temporel et religieux
Tout
a débuté par la suppression de la dîme et la mise à disposition des biens
ecclésiastiques à la nation, c’est-à-dire par la suppression des revenus de
l’Église en France en échange d’une compensation financière. L’appropriation de
ses richesses et de ses biens ont ainsi rendu illusoire l’autonomie de l’Église et l’a rendue dépendante de l’État.
Il est vrai que de nombreuses querelles religieuses ont émaillé l’ancien
régime. Il est vrai aussi que les autorités temporelles sont souvent intervenues
dans les affaires ecclésiastiques et dans l’organisation de l’État, conduisant
parfois à des conflits avec l’Église, frisant parfois la rupture. Fort d’un
gallicanisme de plus en plus radical, le politique a cherché à s’imposer dans
le religieux, à l’encadrer, à le réduire. Néanmoins, au temps de la révolution, l’État n’a jamais été aussi dominateur et
oppresseur. Il en vient à se
substituer à l’Église, ne craignant plus la séparation avec Rome et le
schisme contrairement aux autorités de l’Ancien Régime. Rompant avec cette
politique odieuse, le concordat de 1801
met en place un nouvel équilibre des pouvoirs. Il est aussi suffisamment
souple pour qu’il se maintienne en dépit des changements de régimes. Il met enfin
un terme à la révolution religieuse au sein même de l’Église.
Le
concordat est une convention destinée à rétablir des rapports entre l’Église et
l’État indispensable pour le retour de la tranquillité religieuse et donc de
l’ordre. Mais il ne traite pas des
points qui présentent de réelles difficultés, notamment l’enseignement et la
vie des congrégations religieuses. Or, ce sont précisément là que se situe
le véritable combat au XIXe et début XXe siècle.
Cependant,
sans aucune concertation et pour complaire les députés encore gallicans,
Napoléon joint au concordat des articles
dits organiques qui permettent à l’État de surveiller et de contrôler l’Église.
Les fameux quatre articles de Bossuet[4] sont ainsi
remis en honneur. Les régimes qui succèdent au premier empire en usent lorsqu’ils
veulent réduire le pouvoir pontifical.
Néanmoins,
peu à peu, l’Église renaît en France et
reprend de la vigueur, notamment par les congrégations religieuses nouvellement
fondées et par les missions.
Le
lourd héritage de la révolution
Mais
la révolution poursuit son ouvrage. Le XIXe siècle est fortement marqué de son
empreinte et des bouleversements qu’elle a occasionnés. Elle a rompu bien des équilibres dans la société. Le temps est ainsi
marqué par une forte instabilité
politique. En un siècle, la France a connu bien des régimes et des
formes de gouvernement : la monarchie parlementaire sous la Restauration
(1814-1821), la monarchie libérale sous la Monarchie de Juillet (1821-1848), la
Seconde République (1848-1852), le Second Empire (1852-1870) et enfin la
Troisième République. Deux révolutions, un coup d'état....Tout cela en un siècle ! Plusieurs forces se
disputent le pouvoir : les royalistes, attachés à un régime qu’ils
souhaitent faire revivre ; les conservateurs, préoccupé de maintenir
l’ordre ; les libéraux, soucieux de faire évoluer la société et les
esprits, avec calme et patience ; les révolutionnaires, encore portés par
des discours enflammés et bâtisseurs de rêves. Et dans chaque camps, des
opportunistes, des affairistes, des ambitieux, cherchant à rester debout dans
les tempêtes, à consolider leurs pouvoirs, à s’élever sur les ruines. La révolution poursuit son ouvrage…
Si
le concordat semble avoir éteint la tourmente religieuse, calmant les esprits
et renouant les relations, les cendres restent encore toutes brûlantes, prêtes
à tout moment à enflammer les passions tant la religion est au cœur des débats. La question religieuse est en
effet au centre des principales préoccupations et des programmes politiques.
Dès la restauration de la monarchie, des mouvements s’affirment selon
leurs positions religieuses. Nous pouvons citer les ultramontains, favorables à la primauté pontificale, les néo-gallicans, qui défendent encore
le gallicanisme royal, les libéraux,
sans oublier les antireligieux. Leur
importance politique et les alliances qu’ils peuvent nouer conditionnent la
politique de l’État à l’égard de l’Église. Les
domaines politiques et religieuses n’ont jamais été aussi mêlés et confondus…
Une
alliance fragile et dangereuse au temps de la Restauration
Inauguration du monument à la mémoire de Louis XVIII par Charles X Place de la Concorde BEAUME Joseph (1796 - 1885) © Photo RMN-Grand Palais - F. Raux |
À
la fin de la Restauration, les derniers gallicans et les libéraux s’allient
pour remettre en cause le rôle de l’Église dans l’État et la société. Face à
leurs protestations savamment menées, notamment au travers de campagnes de
presse, le gouvernement finit lui-même par
affaiblir l’influence de l’Église. Il fait notamment voter des ordonnances
qui restreignent l’enseignement fourni par les congrégations religieuses. En
juin 1828, tout membre d’une congrégation non autorisée est interdit d’enseignement.
On fait ainsi revivre une ancienne loi révolutionnaire. Dans une seconde
ordonnance, le nombre d’élèves dans les écoles secondaires tenus par les
évêques est réduit dans le but avoué de renforcer le monopole universitaire
voulu par Napoléon. Il est aussi décidé que les directeurs doivent désormais être
agréés par le roi sur proposition des évêques. L’État reprend ainsi la main sur la direction de l’enseignement. Mais
cela ne suffit guère à apaiser les esprits. Au contraire, ces mesures
encouragent d’autres menées, d’autres campagnes plus audacieuses.
La
maladresse du pouvoir finit par conduire à sa chute. Une vive réaction
antilibérale génère en effet une révolution qui non seulement fait sombrer le
trône mais fait aussi revivre la tourmente anticléricale sur la France. La
fin douloureuse de la Restauration touche en effet violemment l’Église. Ses
anciennes plaies s’ouvrent, de nouvelles blessures accroissent ses souffrances.
Elle revit les jours sombres de la révolution.
Le
combat autour de la liberté d’enseignement sous la Monarchie de Juillet
Sous
la Monarchie de Juillet, le catholicisme redevient la religion de la majorité
des Français. La notion de religion d’État est définitivement abandonnée. La principale question religieuse porte sur
la liberté de l’enseignement. Là résident tous les enjeux de la société. Là
se concentrent aussi toutes les forces. Les catholiques mènent tous leurs
efforts dans ce combat pour être plus libre. Ils tentent en effet de modifier
les lois qui assurent à l’État le monopole de l’enseignement. Ils mettent donc la
pression sur le gouvernement. Par la loi du 28 juin 1833, dit loi de Guizot, le monopole de
l’enseignement primaire est supprimé. La libre concurrence est proclamée. Une
nouvelle campagne se concentre désormais sur l’enseignement secondaire. Cela
soulève de la part des universitaires et
de leurs partisans une violente réaction
contre le christianisme. Ils font ainsi renaître l’opposition entre le christianisme et le progrès. Un
projet gouvernemental, qui propose la liberté de l’enseignement secondaire sous
le contrôle universitaire, provoque une vive protestation de la part des
évêques et des catholiques partisans de la liberté d’enseignement. Il unit
ainsi les volontés et apaisent les divisions au sein de l’Église. Mais en dépit
de leur union, elle ne réussit pas à obtenir la liberté de l’enseignement.
Néanmoins, elle a gagné une bataille, elle a gagné des cœurs. Lors de la révolution
de 1848, elle n’est pas inquiétée.
Une
politique d’abord favorable sous le Second Empire
Comte Alfred de Falloux du Coudray
1811-1886
Ministre de l'Instruction publique
(1848-1849)
|
Une
loi marque le début de la seconde république, celle du 15 mars 1854, plus
connue sous le nom de loi Falloux.
Elle autorise les écoles privées d’enseignement primaire. Elle prescrit
l’enseignement de la religion et attribue aux ministres des différents cultes sa
surveillance ainsi que la direction morale de l’école. La loi met aussi fin au
monopole de l’enseignement secondaire en accordant à tout citoyen la faculté de
fonder des établissements libres d’enseignement secondaire. Les congrégations peuvent donc enseigner en
toute liberté. Néanmoins, son budget ainsi que la collation des grades
restent dans les mains de l’université. En outre, les fonctionnaires chargés de
l’inspection des établissements publics et privés doivent être recrutés parmi
les membres de l’université. Enfin, au niveau de la direction, deux conseils sont
créés : le conseil académique dans lequel une place est réservée à l’évêque et
le conseil supérieur de l’Instruction publique qui doit désormais comprendre
des « notabilités sociales »,
dont des évêques mais aussi des conseillers d’état, des commerçants, des
industriels, chargés d’exprimer les vœux des familles en matière
d’enseignement.
Au
début du second empire, le gouvernement continue de s’appuyer sur les
catholiques et mène toujours une
politique favorable à l’Église. Les évêques jouissent d’une grande liberté
et peuvent réunir des conciles. Des églises peuvent être construites ou rénovées
grâces au soutien de l’État. C’est un
temps de prospérité pour l’Église.
Mais
à partir de 1859, la politique impériale
menée en Italie, favorable à l’unité italienne au détriment des États
pontificaux, déclenche l’opposition
du parti catholique. La ville éternelle est enlevée au pape. Napoléon III se
tourne alors contre l’Église tout en s’appuyant sur les adversaires du pape,
c’est-à-dire les libéraux. Les articles organiques[5] sont
remis en vigueur. En outre, la politique
autoritaire de l’empire divise les catholiques. Alors que certains
s’opposent au régime au nom des libertés politiques, d’autres maintiennent leur
appui.
La
laïcisation de l’enseignement sous la IIIe République
Jules Ferry (1832-1893) Ministre de l'instruction publique (1879-1893) |
À partir de 1880, plusieurs lois
s’abattent en effet sur l’Église. La principale
cible demeure l’enseignement. L’État
exclue les autorités ecclésiastiques au conseil supérieur de l’instruction
publique au profit des seuls fonctionnaires (loi du 27 février 1880). Il
supprime aussi le droit d’inspection, de surveillance et de direction aux
ministres de culte (loi du 28 mars 1882). La liberté de l’enseignement est
ensuite remise en cause. La loi du 18 mars 1880 retire toutes les garanties
accordées aux établissements privés d’enseignement supérieur fixées par la loi
de 1875. La collation des grades est de nouveau le monopole des facultés de
l’État. Les examens ne peuvent être subis que devant elles. Les établissements
libres d’enseignement supérieur ne peuvent plus prendre le titre d’universités.
Le gouvernement réduit le soutien de l’État à l’attention de l’enseignement
privé. Les établissements privés ne peuvent être reconnus d’utilité publique
qu’en vertu d’une loi, ce qui leur interdit toute subvention de l’État sans
l’accord des députés.
L’État encadre davantage le personnel
d’enseignement. La loi du 16 juin
1881 remet en vigueur l’obligation pour tous d’acquérir le brevet de capacité,
supprimant ainsi les différentes exceptions créés par la loi Falloux ou encore
les dispenses. L’État crée des écoles normales en charge de la formation des
enseignants de l’école primaire, « véritables
séminaire laïc ».
L’État s’attaque aussi au contenu de
l’enseignement. La loi du 28 mars
1882 sur l’instruction publique obligatoire, dite aussi loi Jules Ferry, supprime
l’« instruction de la morale
religieuse » au profit d’une « instruction morale et civique »[7]. La loi
réserve un jour par semaine pour l’enseignement éventuel du catéchisme.
L’organisation de l’enseignement
primaire fait l’objet de la loi du
30 octobre 1886, dit loi Goblet. Elle définit deux types d’établissements
d’enseignement primaire. Ils peuvent « être
publics, c’est-à-dire fondés par l’État, les départements ou les
communes ; ou privés entretenus par des particuliers ou des associations »
(article 2). « Dans les écoles
publiques de tout ordre, l’enseignement est exclusivement confié à un personnel
laïque » (article 17). Les instituteurs et institutrices publics ne
peuvent non plus exercer des emplois rémunéré ou gratuits dans les services des
cultes. Au niveau de l’enseignement privé, les méthodes, les programmes et les
livres d’instruction sont libres. « Aucune
école privée ne peut recevoir, sans l’autorisation du conseil départemental,
d’enfants des deux sexes, s’il existe, au même lieu, une école publique ou
privée spéciale aux filles » (article 36). L’ouverture d’une école
privée peut faire l’objet d’opposition par l’inspecteur d’académie, dans
l’intérêt des bonnes mœurs ou de l’hygiène. Les écoles publiques et privées
peuvent être contrôlées par l’inspection académique. « L’inspection des écoles privées porte sur la
moralité, l’hygiène, la salubrité et sur l’exécution des obligations imposées à
ces écoles par la loi du 28 mars 1882 » (article 9).
Ainsi,
peu à peu, de manière méthodique et
cohérente, le gouvernement retire à l’Église le droit et la capacité
d’enseigner ainsi que de fonder des établissements d’enseignement. Des lois
lui retirent tout rôle dans la direction de l’enseignement, imposent des
contraintes à l’exercice des enseignants, limitant ainsi leur nombre et la capacité
même d’enseigner, accroissent la surveillance de l’État, etc. Le principal
secteur touché est l’école secondaire. Enfin, l’enseignement du religieux est
banni. En clair, non seulement, la liberté de l’enseignement est fortement
réduite mais aussi l’enseignement se « laïcise »
dans son contenu, dans son personnel et dans son organisation…
Le
combat contre les congrégations
L’arrivée des radicaux au pouvoir en
1898 ravive la politique antireligieuse dont les attaques se concentrent
d’abord sur les congrégations religieuses. La
loi de 1901 relative aux
associations autorise à toute association même religieuse la faculté de se former
librement, sans autorisation ni déclaration sauf pour les congrégations religieuses qui doivent solliciter une
autorisation législative. La demande doit être faite dans les trois mois qui
suivent la promulgation de la loi, faute de quoi les congrégations non
autorisées seront déclarées illicites et leurs membres coupables de délit. Pour
créer un nouvel établissement, un simple décret suffit. Il existe 753
congrégations non autorisées…
Or
après les élections de 1902, le chef de gouvernement est Émile Combes, un anticlérical convaincu. La loi de 1901 est appliquée brutalement et sommairement. Les
demandes d’autorisation des congrégations vouées à l’enseignement et à la
prédication sont rejetées en bloc et sans examen. En 1904, même celles qui ont
déjà été autorisées avant la loi de 1901 sont supprimées ! Seules les
congrégations charitables antérieures à la loi sont autorisées. Cela concerne
3 040 prédicateurs et 15 964 religieux enseignants. Mais l’existence
des congrégations et établissements autorisés est désormais fragile. Elle dépend
désormais d’un simple décret. Notons que la suppression de tant
d’établissements est une belle aubaine pour les liquidateurs et les avocats.
Leurs biens font en effet l’objet d’un véritable pillage de leur part au point que
l’État n’en a guère profité, déclenchant un
véritable scandale.
L’État
entreprend une « laïcisation »
de nombreux secteurs : exclusion des prêtres des bureaux de bienfaisance, des
religieux dans les hôpitaux, suppression des aumôneries militaires, interdiction
des processions dans les villes, enlèvement de tout signe religieux des
prétoires et des écoles, etc. En outre, il oblige désormais les séminaristes et
les clercs au service militaire. Enfin, le divorce est réintroduit par la loi
Naquet du 31 mars 1880. L’État
déchristianise la société…
Conclusions
Saint Pie X (1835-1914) Pape en 1903 |
Les
partis partageant le pouvoir n’agissent pas de manière irréfléchie. Leur stratégie est claire. Après la
laïcisation de l’enseignement et l’exclusion des congrégations religieuses, il
s’attaque désormais à la vie publique de l’Église. Le concordat de 1801, traité
de compromis, n’a plus lieu d’être. Ce n’est même pas la peine de l’abroger. La
loi de 1905 relative à la séparation des Églises et de l’État est
l’aboutissement d’une série de mesures dirigées contre l’Église. Elle conclut vingt-cinq ans de combat contre l’Église et
la vie des chrétiens. Progressivement, l’Église et les catholiques se sont
vus affligés des lois et décrets qui leur ont retiré bien des libertés. « Les lois sur la séparation des Églises
et de l’État, sur les biens ecclésiastiques, sur les congrégations religieuses,
dans celles de leurs disposition qui mettent hors du droit commun les biens ou
les personnes ecclésiastiques, sont manifestement contraires aux principes de
la liberté individuelle, de la liberté de conscience et des cultes, de la
liberté d’enseignement et de l’égalité devant la loi. »[9]
Depuis
un quart de siècle, l’État impose sa loi à l’Église et lui dicte sa volonté.
C’est donc un temps d’angoisse pour les fidèles. Au-delà des lois
discriminatoires, nous ne devons pas oublier le drame des catholiques qui, méprisés, sont victimes d’une idéologie,
maîtresse de tous les pouvoirs. Saint Pie X ne l’ignore pas. Il en souffre.
Il ne méconnaît pas non plus tout l’enjeu
du combat. Mais il sait aussi que toute
persécution est salutaire. Une nouvelle aventure commence pour l’Église en
France…
Notes et références
[1] Saint Pie X, Lettre
encyclique Vehementer nos, w2.vatican.va.
[2] Émeraude, septembre 2019,
article « Laïcité : la loi de séparation des Églises et de l'État ».
[3] Émeraude, juillet 2019, article
« La constitution civile du clergé : division et persécution de
l'Église ».
[4] Voir Émeraude,
mai 2019, article « XVIIe-XVIIIe siècle : l'Église face à la volonté
hégémonique de la puissance temporelle ».
[5] Voire Émeraude,
août 2019, article « Le Concordat de
1801 ».
[6] Gambetta, dans 1789,
Recueil
des textes et documents du XVIIIe siècle à nos jours, J. Lechat, J.
Bersani, D. Borne, A. Monchablon, centre national de documentation pédagogique,
1989 dans La laïcité ou l’histoire mouvementée d’un concept français,
Daniel Moatti, Pyramides, 8, 2004.
[7] Loi du 28 mars
1882 sur l’enseignement primaire obligatoire, article 1.
[8] Ces
décrets sont une reprise plus sévère de l’article 7 d’un projet de loi rejeté
par le Sénat. Cet article interdisait l’enseignement aux congrégations non
autorisées.
[9] André Hauriou, Droit
constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien, 1975, dans Quand
les catholiques étaient hors la loi, Jean Sévillia, Perrin, 2005.
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