" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


vendredi 31 juillet 2020

La morale chrétienne et la crise environnementale

La morale contemporaine ne peut guère résoudre la crise environnementale dans laquelle l’homme se débat depuis plus d’un demi-siècle. Les beaux discours, les plans successifs, les nombreuses conférences ne semblent guère faire évoluer la situation de manière probante. Des solutions techniques sont certes déployées pour réduire la pollution avec l’aide précieuse des États mais elles ne font que reporter le problème, voire l’aggraver. De belles initiatives locales, ingénieuses et émouvantes, cherchent à faire évoluer les habitudes mais elles se montrent bien impuissantes devant la gravité des dangers. Plus vifs et impatients, sans-doute plus conscients de la catastrophe qui arrive, les plus jeunes, donc les plus intéressés, manifestent leur colère dans la rue. Devant la menace qui grandit, imperturbable, tout cela paraît bien illusoire. L’homme est bien faible et misérable devant la nature et les lois qui la dirigent. Il apprend à ses dépens qu’à force de s’en moquer, il met sa vie en danger.

Mais en même temps, dans l’indifférence de nos contemporains, des hommes continuent à jouer les apprentis-sorciers avec les lois de la nature, les traitant comme s’ils en étaient les maîtres, sûrs de leurs pouvoirs. Ils manipulent les gènes et les embryons, étendent leurs explorations dans les coins encore indemnes pour assouvir leur faim insatiable, poursuivent les gaspillages les plus insensés et élèvent des montagnes de déchets, numérisent encore plus son environnement, avalant ainsi davantage les ressources d’une terre déjà bien épuisée. Une telle contradiction révèle clairement la cause du drame.

La morale contemporaine, dite autonome ou laïque,  qui s’est développée et imposée depuis plus d’un siècle dans la société moderne ne peut résoudre cette situation comme elle a été incapable de l’éviter. Elle en est même la cause. Souvenons-nous en effet d’où elle vient. Depuis plus d’un siècle, elle s’est développée au détriment d’une autre, la morale chrétienne, au point de la substituer et de régir désormais la société moderne. La situation dans laquelle nous débattons soulève alors une question. La morale chrétienne aurait-elle pu éviter la situation dans laquelle nous vivons ?

Des bien-pensants lèveront sans-doute la voix pour rappeler avec force et conviction les bienfaits qu’a procurés la société moderne et ils énuméreront sans difficulté tout le progrès apporté par la morale autonome contre les maux du temps passé, accusant la religion d’en être à son tour la responsable. Mais, la situation a changé. Quand la morale autonome méprisait la morale chrétienne et l’accablait de toutes sortes de fautes et de crimes, elle agissait comme un jeune imprudent qui critique sans concession les fautes passées d’un vieil homme. Avant même de vivre en homme responsable, l’adolescent naïf croit déjà faire mieux que son grand aîné. Aujourd’hui, ce jeune vantard et méprisant a grandi et assumé des responsabilités. Il est temps de le juger sur des faits. Et ceux-ci sont incontestables. Car depuis plus d’un siècle, c’est bien la morale autonome qui commande les comportements et les esprits

La morale chrétienne : le Décalogue, les béatitudes et la Croix

Lorsque la morale chrétienne est évoquée, nos contemporains pensent peut-être d’abord aux tables de la Loi sur lesquels sont frappés les dix commandements que Dieu a donnés à Moïse, c’est-à-dire à un ensemble d’interdits et d’obligations qui encadrent les comportements des chrétiens comme un code pénal, nous écartant du péché et nous évitant ainsi l’enfer. Si ces règles demeurent toujours valables et nous obligent, la morale chrétienne ne se résume pas à ces commandements. Certes, elles  nous indiquent les chemins à ne pas prendre et les fautes à ne pas commettre, ce qui est très profitable dans les moments d’incertitude, de doute et de faiblesse, mais la morale chrétienne nous montre surtout la voie à suivre, les vertus à suivre, le modèle à imiter, c’est-à-dire Notre Seigneur Jésus-Christ.

Le « sermon de la montagne », qui comprend notamment les célèbres béatitudes, définit un enseignement moral positif qui dépasse amplement tout code et toute autre morale. Notre Seigneur Jésus-Christ nous éclaire sur les vertus à pratiquer et à cultiver. Et si ses paroles ne suffisent pas, sa vie illustre de manière admirable les exigences morales qui doivent être les nôtres.

Ce discours admirable est surprenant par sa clarté et sa simplicité. Pourtant, il ne suffit pas encore à décrire ce qu’est la morale chrétienne. Un signe encore bien plus simple et pourtant plus profond complète merveilleusement ce que nous avons pu dire. Il est par ailleurs étonnant qu’une si grande simplicité suffise pour exprimer un si haut enseignement. Ce signe est la Croix. Tendue vers le Ciel et attachée sur la terre, elle porte en fait deux vérités indissociables.

En premier lieu, la Croix porte la souffrance de Notre Seigneur Jésus-Christ et sa mort. Elle désigne le renoncement de Notre Seigneur Jésus-Christ, un renoncement qui a commencé depuis son incarnation jusqu’à son dernier souffle, un renoncement silencieux durant trente ans, qui a abouti aux supplices de la flagellation, au couronnement d’épines, à de terribles humiliations, à la lente et interminable chemin du Calvaire et enfin aux dernières douleurs sur l’arbre maudit. Il a renoncé à tout, y compris à se défendre, se laissant conduire comme un agneau. Innocent, Il l’était. Il n’a fait que du bien autour de lui, guérissant les malades, rendant la vue aux aveugles et ressuscitant les morts. Quand nous songeons à ses œuvres et ses paroles, son renoncement prend encore une dimension insupportable. La Croix fait alors peur, non parce que Notre Seigneur Jésus-Christ y est mort, mais parce qu’elle témoigne d’un renoncement extrême. Que dit-Il pour se justifier ? Que la volonté de son Père soit faite…

La Croix porte aussi une autre vérité. Sur l’arbre maudit, tout a été consommé. Trois jours après, le tombeau dans lequel a été déposé le corps de Notre Seigneur Jésus-Christ est désormais vide. Il est ressuscité ! Pendant quarante jours, Il se manifeste en effet à tous ses disciples, mangeant et buvant avec eux. L’arbre maudit devient alors l’arbre de bénédiction. Par sa passion et sa mort sur la Croix, Notre Seigneur Jésus-Christ a consommé l’œuvre de la Rédemption. Il est mort pour notre salut, et de la mort est née notre vie. Toutes les souffrances que Notre Seigneur Jésus-Christ a librement acceptées prennent alors tout leur sens. Le sang qui a tant coulé et devenu source de vie pour nous.

Ainsi, la Croix est « le divin témoignage d’amour »[1]. Elle incarne admirablement l’amour que Notre Seigneur Jésus-Christ porte à son Père et aux hommes.

Une morale portée par l’amour

Quand un docteur de la Loi Lui demande ce qu’il faut faire pour obtenir la vie éternelle, Notre Seigneur Jésus-Christ lui répond en citant la Sainte Écriture : il faut aimer Dieu et son prochain comme soi-même. Il donne la même réponse quand un second docteur de la Loi lui demande de résumer la Loi et les Prophètes[2]. Les béatitudes évangéliques sont aussi remplies de ces deux exigences[3]. Et comme nous venons de l’évoquer, la Croix témoigne concrètement de ce double amour. L’amour de Dieu et l’amour de notre prochain sont finalement les fondements de la morale chrétienne, fondamentalement indissociables.

Si  ces deux principes ne peuvent se dissocier sans se ruiner ou perdre tout leur sens, il y a toutefois un ordre. L’amour de Dieu demeure premier. Comme Dieu nous a aimés le premier, nous devons aussi L’aimer avant toute chose. Il est et demeure le premier commandement de Dieu. En outre, c’est parce que nous aimons Dieu de toutes nos forces, de toute notre âme que nous aimons notre prochain. Le regard est donc élevé vers Dieu pour ensuite se tourner vers l’homme. C’est alors que nous pourrons retourner vers le ciel.

Les béatitudes, l’esprit qui nous sauvera


 

Revenons sur les béatitudes évangéliques. Le « sermon sur la montagne » définit de manière très synthétique la morale chrétienne comme nous l’avons déjà évoqué[4]. La première béatitude porte sur la pauvreté d’esprit, c’est-à-dire le détachement des biens de ce monde sans orgueil ni vanité. Les pauvres d’esprit ne voient pas leur richesse dans les choses terrestres. Ils ne veulent ni capitaliser leur fortune, ni accumuler tout ce que le monde peut leur offrir. Ils refusent de voir dans cette quête le but de leur vie. Leur regard est ailleurs. Il est tourné vers Dieu, là réside leur véritable trésor. Le royaume des cieux peut alors leur appartenir. Ils n’attendent pas leur consolation dans ce que peuvent donner l’homme ou la nature. Ils se contentent finalement de tout car ils savent où se trouve leur véritable bonheur. « Bienheureux les pauvres d’esprit… »

Le bienheureux n’est donc pas un consommateur qui ne cherche qu’à satisfaire sa faim et sa soif au travers de choses bien vaines, qui n’apportent ni nourriture ni satisfaction. Il a soif et faim de la justice de Dieu. Il n’envie pas, ne convoite rien ici-bas. Il ne veut qu’une chose : la vie éternelle. Or celle-ci ne s’obtient pas par la satisfaction de nos appétits bien sensibles. Le bienheureux sait où réside la nourriture et l’eau vive qui apaiseront sa faim et sa soif. Comme il ne cesse de le proclamer dans sa prière, il n’espère qu’une chose : que la volonté de Dieu soit faite. Il se soumet à sa loi et à celle qu’Il a mise dans la nature. Car il sait qu’aimer, c’est d’abord se soumettre. « Bienheureux ceux qui ont soif et faim… »

Le bienheureux ne cherche pas non plus à jouir de la vie et à s’épuiser en plaisir. Il ne cherche pas non plus à duper ou à tromper, ne voyant que son intérêt au détriment des autres. Sa conscience est pure et droite. « Bienheureux ceux qui ont un cœur pur… »

Pourtant, le bienheureux ne se désintéresse ni du monde dans lequel il ne vit ni de son entourage. Par sa miséricorde, il tourne ses yeux vers celui qui éprouve la misère et n’hésite pas à s’y approcher pour porter les soins indispensables. Comme l’histoire le montre amplement, les chrétiens ont soulagé bien des peines et des malheurs, inventant, innovant pour réduire la misère tant physique qu’intellectuelle. C’est parce que leur regard sont tournés vers Dieu qu’ils se penchent vers les plus faibles à l’imitation de Notre Seigneur Jésus-Christ. « Bienheureux les miséricordieux… »

Le bienheureux n’est pas non pas plus insensible comme le philosophe stoïque ou le sage fermé du monde, impossible à émouvoir. Il sait pleurer ses fautes et demander pardon. Il sait ce qui est la tristesse et le dur poids des épreuves de la vie comme Notre Seigneur Jésus-Christ l’a montré devant Lazare mort. Il sait éprouver de la peine comme il sait consoler. « Bienheureux ceux qui pleurent… »

Le bienheureux cherche encore la paix autour de lui, calmant les discordes et faisant taire les divisions. La trêve de Dieu en est une illustration. Mais pour y arriver, doit-il aussi être en paix en lui-même. Il ne doit pas se laisser emporter par la colère sourde, aveugle et mauvaise conseillère, et si elle éclate, il cherchera à la maîtriser.  « Bienheureux les pacifiques… » « Bienheureux ceux qui sont doux … »

A-t-il peur de supporter le regard de l’autre ? Cherche-t-il à changer d’attitude de peur d’être méprisé, insulté, voire frappé ? Qu’importe s’il doit subir cette sorte de persécution pour demeurer fidèle à l’égard de Notre Seigneur Jésus-Christ ! Il refuse de suivre l’opinion qui, sans visage ni voix, pourrait l’égarer comme il refuse aussi de marcher derrière un aveugle qui l’éloignera de la lumière. « Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour la justice… »

Les dix commandements, des obligations salutaires

Si ses vertus ne sont pas suffisamment fortes ou s’affaiblissent pour diverses raisons, le chrétien peut encore s’appuyer sur les dix commandements dont toute violation peut devenir un obstacle à sa vie éternelle. Certains rient sans-doute de la crainte salutaire qu’il peut éprouver en pensant aux châtiments célestes, mais eux-mêmes, ne veulent-ils pas agir pour la planète pour éviter les conséquences néfastes du dérèglement climatique ? La crainte en elle-même n’est pas une vaine chose si elle conduit à un bien et manifeste un amour droit et pur. Lorsqu’elle n’est pas servile, elle devient salutaire…

Or que disent les commandements ? Comme nous l’avons rappelé, toute la loi de Dieu se résume en deux préceptes : l’amour de Dieu et l’amour du prochain, y compris de nous-mêmes. Un bon père doit parfois imposer des règles à son fils comme lui-même en a reçu de son père. Il ne s’agit pas pour lui d’imposer sa volonté pour satisfaire sa vanité ou pour faire sentir sa domination mais de préserver son enfant des maux aux conséquences néfastes. Telle est la sagesse qui se transmet de génération en génération au sein de la famille. Le gendarme punit un conducteur imprudent non pour savourer un quelconque orgueil mais pour le protéger et protéger les autres. La soumission à des lois n’est pas non plus signe de faiblesse quand ses lois proviennent d’une autorité légitime qui œuvre pour le bien. Si Dieu est l’auteur des dix commandements, devons-nous hésiter à les suivre ?

L’œuvre divine, l’objet de notre amour

Revenons sur l’amour de Dieu que nous impose le premier commandement de Dieu. Ce n’est pas un vain mot. Si nous L’aimons réellement, de toutes nos forces, de toute âme, de toute notre volonté, alors nous aimons aussi ce qu’Il a créé, c’est-à-dire l’œuvre de la création. Notons donc que l’amour de Dieu n’est pas dissocié de notre foi en l’œuvre divine de la création.

Notre amour porte naturellement sur toutes les créatures qui peuplent le ciel, la terre et les eaux, sur le spectacle de la vie qui déploie tant de beauté et de richesses, sur tout l’Univers, de l’infiniment petit à l’infiniment grand, proche et lointain. Comment pouvons-nous ne pas aimer toutes ces œuvres dont chacune élève en nous émerveillement et admiration ? L’œuvre divine témoigne aussi la présence de Dieu. Dans chaque brin de vie, nous accédons à un mystère qui génère en nous louange et actions de grâces. Par la contemplation de ses créatures, notre regard s’élève ainsi vers Notre Créateur.

Nous n’aimons pas réellement Dieu si nous n’aimons pas ce qu’Il a fait et ce qui manifeste si clairement sa présence. Par conséquent, nous ne pouvons que respecter et soigner l’œuvre de la création.

L’homme, aimé pour Dieu



 

Si la Création est l’objet de tout notre amour, nous ne pouvons pas non plus ignorer l’homme, créé à son image et à sa ressemblance[5], le chef d’œuvre de son ouvrage. Ne nous trompons pas. Notre place dans l’œuvre divine n’est pas là pour satisfaire notre vanité. Bien au contraire. Objets de tant de privilèges en dépit de nos faiblesses et de notre misère, nous ne pouvons que louer notre Bienfaiteur et se montrer digne de la confiance qu’Il nous accorde sans aucune raison.

Et comme la Sainte Écriture nous l’apprend, Dieu nous a confié ce monde non à titre de maître mais d’intendant. Par conséquent, nous avons des responsabilités à l’égard de Dieu sur notre façon d’agir sur son œuvre. Nous aurons en effet des comptes à Lui rendre lorsque viendra l’heure du jugement.

L’amour de Dieu ne s’arrête pas là. Il nous est pourtant suffisamment accessible pour remplir notre âme d’un amour sans limite. Mais le passé de l’homme montre qu’il en est bien incapable. Il oublie rapidement d’où il vient pour vivre comme s’il était dieu lui-même. Depuis le péché originel, notre histoire n’est en effet qu’une litanie de désolation et de malheurs. Même le peuple qu’Il a choisi s’est montré bien peu fidèle. Pourtant, son amour a dépassé toute notre misère. Notre Seigneur Jésus-Christ est mort sur la Croix pour tout restaurer. Et depuis ce jour, le Ciel nous est désormais accessible. Mais la bonne nouvelle ne se réduit pas à ce pardon. Comment cela ne suffit pas ? Que peut-Il encore faire ? Il a envoyé son Fils pour ce sacrifice sublime afin de nous faire enfants de Dieu ! L’âme se confond devant tant d’amours !


 

Quand nous prenons conscience de cette réalité, nous ne pouvons pas ne pas aimer Celui qui nous témoigne tant d’amour ! Or quel est le plus grand désir de celui qui aime si ce n’est de s’unir avec l’objet aimé ? Il aime ce qu’Il fait, ce qu’Il veut et ce qu’Il lui plaît. Il rejette tout ce qui pourrait L’offenser ou Le déplaire. Il aime aussi tout ce qu’Il manifeste ou rappelle sa présence. Toute la morale chrétienne est ainsi habitée par ce désir d’union. Nous pouvons alors comprendre que l’amour ne se satisfait pas d’être enfermé dans nos pensées ou encore dans nos paroles, il explose en des actes bien concrets afin de parvenir à cette union. Ainsi, l’amour de Dieu porte naturellement vers l’amour de notre prochain.

Les béatitudes apparaissent alors d’une logique implacable. Nous ne pouvons prétendre nous unir à Dieu si notre regard n’est pas tourné vers Lui, s’il reste attaché aux biens de ce monde, s’il ne porte pas sur la misère humaine et sur sa propre misère. Les dix commandements deviennent aussi éclatants de lumière. La Croix acquiert encore une force incroyable. La morale chrétienne apparait dans toute sa beauté.

Nous comprenons aussi aisément que la morale chrétienne ne peut se passer de la foi. Si nous ne croyons pas en Dieu et en ses œuvres, en Notre Seigneur Jésus-Christ et à ses mystères, comment peut-elle tenir et donner des fruits agréables ? Nous ne pouvons pas aimer ce que nous ne connaissons pas. Nous ne pouvons pas aimer l’objet de nos désirs s’il n’existe pas une adhésion complète de nos pensées à l’être aimé.

Conclusion

La nature et tout ce qu’elle comporte ainsi que l’homme dans tous ses états font l’objet de toute l’attention du chrétien en raison d’une morale centrée sur l’amour de Dieu et sur l’amour de son prochain. Et s’il ne comprend pas leurs exigences et ses devoirs en dépit de l’enseignement de l’Église, la morale chrétienne l’oblige à les respecter. Éclairée par sa foi, le chrétien ne peut admettre la moindre atteinte à l’œuvre de Dieu, dans la nature comme dans son prochain. Il est convaincu qu’une telle faute le conduirait à s’éloigner de son véritable bonheur. Comment pourrait-il alors abuser des biens que Dieu lui donne et détruire son œuvre sans se renier lui-même ?

La morale chrétienne est ainsi contraire à l’orgueil, aux vanités, à l’égoïsme, à l’indifférence et aux lâchetés, et à tous ces vices qui ont causé la ruine de notre planète et aggravé la misère humaine. Elle rend aussi plus légitimes le renoncement et le sacrifice quand ils portent sur l’objet tant aimé. Tout est en effet possible quand nous savons que Dieu nous aime et ne cesse pas de nous aimer. Car finalement, l’essence même de la morale chrétienne ne repose pas sur l’homme mais sur Dieu

Certes, l’histoire montre que des chrétiens n’ont pas toujours été à la hauteur de leur morale, comme cette même histoire recèle aussi de nombreuses merveilles, mais la cause de ses infidélités ne vient pas de la morale chrétienne. Elle réside essentiellement dans l’homme, dans ses faiblesses et ses lâchetés. Plus il se détache de Dieu, plus il est influencé par ce qui Lui est contraire, plus la vertu perd en lui de force et d’éclat. De nos jours, il lui est encore plus difficile de demeurer fidèle à la morale chrétienne.

Le désastre que nous connaissons actuellement est le résultat d’une morale qui met l’homme au centre de toutes les préoccupations, ce qui conduit finalement à exacerber ses vices, à le laisser exploiter la nature de manière éhontée et sans limite, et dominer les plus faibles pour satisfaire ses intérêts ou ses plaisirs. Si son regard change et s’élève vers une autre réalité, son cœur changera, son comportement sera davantage plus mesuré et raisonné. Il ne pourra plus agir sans songer à ses responsabilités.

La crise actuelle exige des renonciations et des sacrifices qui ne sont possibles que si les morales individuelle et sociale les acceptent, les proposent et les justifient, si elles sont suffisamment cohérentes et solides pour en imposer les contraintes. Or, une telle morale, si efficace et forte, ne peut provenir de l’homme. Elle doit le dépasser …

 


Notes et références

[1] Pape Pie XII, Summi Pontificalis, 20 octobre 1939, vatican.va.

[2] Voir Émeraude, juin 2020,  article « La morale  et l'Évangile (1) : Le Bon Samaritain ».

[3] Voir Émeraude, juillet 2020,  article « La  Morale  et l’Évangile (5) : le sermon sur la montagne (2)  - les huit béatitudes ».

[4] Voir Émeraude, juillet 2020,  « La  Morale  et l’Évangile (4) : le sermon sur la montagne (1) , « La  Morale  et l’Évangile (5) : le sermon sur la montagne (2)  - les huit béatitudes » et « La  Morale  et l’Évangile (6) : le sermon sur la montagne (3) :  la  charte du chrétien. »

[5] Voir Émeraude, octobre 2012, article « Qu'est-ce que l'homme ? ».


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