" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


samedi 30 mai 2020

La morale juive au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ (5) : la Lettre d'Aristée

Dans la ville de Jérusalem, une forteresse s’élève près du Temple, sur une falaise rocheuse. Hérode, roi de Judée, l’a dédiée à Antoine en honneur de celui qui l’a protégé au début de son règne. Elle devait être sa résidence royale mais il a rapidement déserté ce lieu peu commode, trop proche du Temple, de ses activités bruyantes et de ses mouvements incessants. Il a préféré séjourner dans un autre palais qu’il a aussi bâti de l’autre côté de Jérusalem. La forteresse est alors devenue une caserne militaire que les troupes romaines ont naturellement occupée lorsqu’elles sont arrivées.

Flanquée de quatre tours, la forteresse domine l’esplanade du Temple. Le procurateur romain y siège quand il réside à Jérusalem. Ainsi, abrités derrière d’épais murs, Rome surveille la Ville sainte et sur le lieu le plus sacré des Juifs. Un détail nous frappe. Ses murs renferment les habits sacerdotaux du grand prêtre. Pourtant, aucun Juif ne peut y entrer de crainte de se souiller au contact des païens.

La forteresse n’est pas le seul lieu qui marque l’empreinte des païens dans la ville de Jérusalem. Grand bâtisseur et féru d’hellénisme, Hérode aurait aussi construit un somptueux théâtre, voire un hippodrome aux portes de la cité. Le Temple qu’il a rénové n’est pas non plus à l’abri de l’art païen. L’immense esplanade a été rebâtie à la romaine. Les portiques de Salomon, qui forment une grande allée à quatre rangs de colonne, nous renvoient à la  Grèce. Pourtant, l’accès du Temple reste interdit aux païens.

Contrairement à toutes les cités occupées par Rome, aucune divinité païenne ne réside dans le lieu sacré de la ville. Aucun signe de paganisme n’est accepté dans Jérusalem. Les étendards des valeureuses troupes romaines n’y sont pas admis. Elles déclencheraient aussitôt une émeute. La Loi est rigoureusement appliquée dans la ville sainte. Pourtant, l’influence païenne y est certaine.

Étrange cité que celle de Jérusalem au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ. Deux mondes se côtoient, les Juifs évitant tout contact avec les non-Juifs. La morale juive peut ainsi se développer en toute sûreté, sans se mêler aux mœurs helléniques. Mais le peuple juif n’est pas cantonné à Jérusalem ou encore à la Judée. Une partie des Juifs vit au milieu des païens. Leur morale est-elle identique à celle des Juifs de Jérusalem ?

Les Juifs de la Diaspora

 Les Juifs deuil en exil à Babylone
Eduard Bendemann
Au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ, le peuple juif n’est pas limité aux frontières des provinces romaines de la Judée, de la Galilée et de la Samarie. Il s’est répandu dans toutes les grandes villes de l’empire romain et bien au-delà encore. Regroupés autour d’une synagogue, les Juifs de la Diaspora forment des communautés à part, reconnues par la loi romaine. Elles sont présentes partout, à Rome, à Alexandrie, d’Espagne en Asie, d’Afrique en Mésopotamie. Les Juifs « ont déjà envahi toutes les cités, nous dit Strabon écrivant sous Auguste, et l’on trouverait difficilement dans le monde un endroit où ce peuple n’ait été accueilli et ne soit devenu le maître. »[1] Le témoignage que rapporte Flavius Joseph est sans-doute excessif mais il révèle un fait : la présence visible et particulière des Juifs dans tout empire romain. Les Actes des Apôtres mentionnent des Juifs « de toutes les nations qui sont sous le ciel » : des « Parthes, Mèdes, Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, du Pont et de l’Asie, de la Phrygie et de la Pamphylie, de l’Égypte, et des contrées de la Lybie voisines de Cyrène » (Actes des Apôtres, II, 5-10)


Leur dispersion a surtout eu lieu lors de la déportation babylonienne puis, de moindre envergure, s’est poursuivie sous l’occupation des Séleucides. Captifs ou soldats, des Juifs ont été installés loin de la Palestine. Des raisons d’ordre commercial expliquent aussi leur présence dans certaines cités antiques, notamment en Égypte, en Grèce et à Rome. Elle a aussi été facilitée par les Romains dont le pouvoir a généralement protégé les communautés juives et accepté leur particularisme.

La dispersion des Juifs n’entraîne pas systématique un abandon des coutumes ou de la religion juives. Ils demeurent de manière générale fidèle à la Loi et à ses pratiques. Les communautés juives forment en effet des noyaux de la pensée juive au sein du paganisme. C’est sans-doute à partir de ces îlots que la religion juive pénètre dans la population païenne.

La Lettre d’Aristée

La Lettre d’Aristée est un document juif d’origine hellénique, rédigée probablement au cours de la seconde moitié du IIe siècle avant Jésus-Christ. Elle est adressée à Philocrate, le frère de l’auteur. Elle est surtout connue pour le récit de l’origine de la version grecque de la Sainte Bible, dite la Septante. Elle nous raconte en effet comme soixante-dix maîtres juifs de Judée sont envoyés à Alexandrie à la demande du roi Ptolémée II pour traduire la Sainte Écriture en grec afin qu’elle soit comprise par les Juifs de la ville. La Lettre d’Aristée est aussi intéressante car l’auteur défend et loue la religion juive.

La Lettre d’Aristée est en effet un document apologétique. D’une part, elle est un plaidoyer en faveur de la libération des Juifs déportés en Égypte. L’auteur de la lettre profite des dispositions favorables du roi pour demander la libération de tous les Juifs déportés par son père. La demande est acceptée. La lettre contient le décret ordonnant leur libération. D’autre part, elle défend la sagesse enseignée par la Loi. En raison de cette dernière intention, la Lettre d’Aristée nous intéresse…

Qui est l’auteur ? Il se présente comme un Juif Grec d’Égypte qui a été envoyé à Jérusalem par le roi Ptolémée pour demander l’envoi de traducteurs versés dans la connaissance de la Loi et capables de traduire les livres sacrés, écrits en caractères et en langue hébraïques. Sa lettre montre qu’il connait bien Jérusalem ainsi que le Temple, le service liturgique, les ornements du grand prêtre. Il loue le zèle des paysans et les ouvrages de canalisation. C’est un homme cultivé et érudit, consciencieux dans ce qu’il observe, faisant aussi appel à la Sainte Écriture. Nombreuses sont ses réminiscences. La Lettre d’Aristée « rend bien l’état d’esprit d’un juif de quelque Diaspora lointaine qui a soupiré des années et des années vers le Temple de Jérusalem et qui, un jour enfin, a sous les yeux Jérusalem et le Temple. »[2]

La Lettre d’Aristée présente le projet du bibliothécaire Démétrios de Phalère, la libération des esclaves juifs, les échanges épistolaires entre le roi Ptolémée et le grand prêtre Eléazar, le voyage des gens du roi en Judée, la description de Jérusalem et des environs, le retour et la réception des traduction à Alexandrie, l’entretien entre le roi et les traducteur, enfin un épilogue. Nous allons traiter dans cet article uniquement ce qui relève de la morale juive.

Ressources documentaires

La lettre est écrite originellement en grec. Pour notre étude, nous utilisons une traduction française, plutôt ancienne de la Lettre d’Aristée et accessible sur Internet. Le manuscrit provient des fonds de Sainte Germain des Près et se trouve dans la Bibliothèque nationale. Elle n’est pas complète et présente quelques lacunes.

La traduction la plus récente, datée de 1962, est celle de Pelletier dans Sources chrétiennes. Nous pouvons aussi accéder à des extraits dans certains ouvrages anciens, en particulier les Antiquités Juives de Flavius Joseph, la Vie de Moïse de Philon d’Alexandrie, ou encore la Préparation évangélique d’Eusèbe de Césarée.

Le projet de la bibliothèque

En vue de constituer la célèbre bibliothèque d’Alexandrie, Démétrios de Phalère reçoit pour mission « d’amasser force livres de tous les endroits du monde tant qu’il lui était possible »[3]. Il annonce au roi que la Sainte Écriture mérite de faire partie de la bibliothèque car elle est estimée par les païens « tant pour la sagesse qui est dedans que pour la hautesse qui est divine. »(31) En outre, il nous rapporte que la Loi est toujours au centre de la morale juive. « Les Juifs n’ont tous qu’une loi »(15). Pour encore appuyer ses propos, il nous donne le témoignage d’un historien, Hecateus Abdérite. Elle « sert grandement à dresser les mœurs et forme de vivre ».

Mais, la Sainte Bible est écrite en hébreu, langue que les Juifs d’Alexandrie ne comprennent plus. Elle doit donc être traduite en grec. C’est ainsi que Démétrius écrit au grand pontife du Temple de Jérusalem pour lui demander des traducteurs. La lettre reproduit la réponse du grand-prêtre Eléazar. Elle nous donne aussi ses réponses aux questions qu’on lui pose concernant la difficulté d’observer les règles portant sur l’alimentation et la boisson. La lettre devient alors une sorte d’apologie de la Loi.

L’apologie de la Loi par le grand-prêtre Eléazar

Eléazar justifie l’importance de la Loi en quatre raisons. D’abord, elle permet d’éduquer les Juifs, de les édifier et d’élever moralement leur esprit. Les observances à l’égard de l’alimentation renvoient à la « pureté d’esprit »(147) et à des vertus. Elles nous enseignent à « gouverner par droit et justice »(148), à ne pas user de la force, à ne pas « porter dommage à autrui par fierté ou ravissement » comme le font les oiseaux considérés comme immondes. Par l’observance de la Loi, Dieu prend garde « à corriger et à conformer nos mœurs »(150). Tous les animaux qui ne doivent pas être mangé sont des signes qui nous portent à distinguer ce qui est bon et droit.

La Loi est en fait signe de distinction. Elle permet en effet de distinguer le peuple juif des autres peuples afin que « hanter avec eux ne soyons gâtés de vices, car la plupart des nations païennes par se mettre les unes avec les autres se gâtent de grandes impiétés. »(152) Par cette distinction, elle préserve les Juifs du paganisme et de ses vices. Il décrit en effet la Loi comme un « rempart qu’on ne peut forcer et d’une muraille de fer afin que nous étant purs et nets de corps et de pensée, nous ne suivions aucun gentil ou païen et que, rejetant les folles opinions, nous servions Dieu seul lequel est par-dessus toute créature. »(139) Soulignons que le premier objectif que la lettre énonce est la préservation de la vie morale du Juif.

La Loi oblige à penser et à considérer ce que nous faisons, nous éloignant ainsi de toute impétuosité et nous maintenant dans la douceur et la justice. « Notre loi commande qu’on ne fasse déplaisir à personne, ni par fait ni par dit. »(169) Elle cultive la crainte de Dieu et la piété, la méditation et la contemplation de ses œuvres et de ses bienfaits. Finalement, elle nous oblige à vivre selon la raison et la volonté divine.

La Loi a enfin pour but de préserver la mémoire du peuple juif afin que dans les observances, il puisse se remémorer ce pour quoi il doit les respecter, c’est-à-dire se rappeler des choses « grandes et merveilleuses » qu’a faites Dieu pour lui. Elle est un moyen pour se souvenir de l’œuvre de la Création et donc de la puissance divine. Elle est un signe qui nous révèle sa bonté comme sa justice mais aussi la crainte de Dieu que nous devons avoir.

Finalement, la Loi a été faite de manière sensée et sage. Elle porte sur ce qui est droit et juste et nous maintient « doux, justes et raisonnables envers tous les gens, ne mettant jamais en oubli le Seigneur Dieu »(169), ce qui nécessite de protéger le peuple juif du paganisme.

L’entretien entre le roi Ptolémée et les traducteurs juifs

Le grand-prêtre envoie à Alexandrie des maîtres pour traduire la Sainte Écriture. À leur arrivée, le roi leur offre des banquets en leur honneur. Les festins durent sept jours au cours desquels soixante-douze questions seront posées aux traducteurs.

Ptolémée II Philadelphe fonde 
la bibliothèque d’ Alexandrie
Vincenzo Camuccini (1771–1844)
Au cours du premier repas, le roi leur demande comment il peut conserver son royaume dans la prospérité et régner avec justice, vaincre ses ennemis. C’est ainsi que la lettre énumère les vertus à cultiver pour un prince : la sollicitude auprès de son peuple à l’imitation de Dieu à l’égard de l’homme, l’équité dans le jugement, récompensant les bons et punissant les méchants avec raison, la confiance à l’égard de Dieu. Puis, lors de ce banquet et les jours suivants, toujours pour répondre aux questions du roi, un des maîtres de la Loi énonce de nombreuses règles morales portant sur le plus grand bien à acquérir en notre vie, l’éducation des enfants, la renommée et sur la finalité de la force.

Le roi est agréablement surpris des réponses rapides des maîtres. « Je pense, dit-il, que ces gens-ci sont excellents en vertu et bien entendu d’avoir si promptement répondu à telles questions faites sur le champ, commençant tous leurs propos par Dieu. »(200) Leurs réponses commencent en effet par des règles portant sur Dieu puis sur la raison. Elles témoignent ainsi ce que le grand-prêtre d’Eléazar a expliqué : la Loi est fondée sur la religion juive puis sur la raison. À la demande du roi, un philosophe, Ménédème Erétricien[4], justifie la pertinence des réponses. « Vraiment, Sire, puisque l’homme est une œuvre divine, ce que montre évidemment la fabrique et facture de tout le monde, il s’ensuit bien qu’il doit par raison déduire et entamer son propos par Dieu, prenant de lui le commencement de sa vertu et bien parler. »(201) La philosophie démontre ainsi que la morale est la conséquence logique des connaissances que nous avons de Dieu. Son enseignement doit donc commencer par elles.

Au cours d’autres festins, le roi interroge les maîtres qui n’ont pas encore parlé. Les sujets portent sur les conditions pour « garder et conserver ses richesses »(204), puis sur l’honneur et la vérité, sur la science, la douceur, la piété, la bonté, la prudence et sur bien d’autres vertus ainsi que celles qui doivent animer les rois. Les questions portent aussi bien d’autres sujets, notamment les différents états et conditions de l’homme. Elles reviennent souvent sur l’art de régner. Dans cette deuxième partie, les réponses portent plus sur la raison, et moins sur la connaissance de Dieu. Les traducteurs ont finalement réponse à tout. Le roi loue tous ses interlocuteurs et les applaudit pour leurs réponses. Les philosophes les approuvent également. Le questionnaire se termine alors par « un grand bruit d’applaudissements […] tout fut rempli de joie et de réjouissance. »(293) Le roi conclut : « par votre venue et présence, il m’est advenu de très grands biens, car vos réponses m’ont apporté beaucoup de profit et d’enseignement pour régner. »(294)

L’œuvre de traduction

Selon la Lettre d’Aristée et Philon d’Alexandrie, les traducteurs se retirent sur l’île de Pharos pour mener à bien leur travail. Éloignée de la grande ville d’Alexandrie, elle est « propice au calme, à la solitude et à la communion de l’âme seule avec la Loi. »[5] La lettre nous apprend que c’est « un lieu de silence et de repos »(307). L’auteur de la lettre souligne l’unanimité des traducteurs dans leurs travaux, ce qui révèle une unité d’esprit.
La traduction achevée, les textes traduits sont lus devant la multitude des Juifs qui rendent grâce du travail accompli et le louent, puis devant le roi et la cour. Elle reçoit de « joyeux applaudissements »(311). Le roi gratifie les traducteurs de l’œuvre exécutée à sa demande. Puis de nouveau émerveillé par l’œuvre accomplie et notamment par « le sens et l’entendement du législateur »(312), le roi s’étonne du silence des poètes et des historiens au sujet de la Loi. Il apprend de ses maîtres qu’ils n’ont point pu en prendre connaissance en raison de son caractère sacré, Dieu les empêchant de mener une telle tâche.

La valeur de la sagesse enseignée par les traducteurs

Démétrios de Phallère ?
Musée archélogique de Naples
Quelles sont les conclusions de ces entretiens ? Revenons sur l’émerveillement du roi. Il porte sur deux points : la promptitude des réponses de ses hôtes et leur sagesse. Comme le suggère l’auteur de la lettre, ils ont pu répondre de cette façon parce qu’ils ont médité la Loi et l’ont étudiée. Le troisième point est le consensus des traducteurs qui n’est possible que par un travail en commun. Cependant, nous constatons, à notre grand étonnement, que leurs réponses ne contiennent aucune allusion à la Sainte Écriture même si elles s’appuient en partie sur la connaissance de Dieu. Il n’a en fait aucune allusion aux règles édictées par la Loi. Dans la Lettre d’Aristée, ce n’est donc pas la Loi en elle-même qui est exaltée mais son enseignement et son étude au travers des traducteurs.

Au cours du séjour, les voyant souvent se laver les mains, l’auteur de la Lettre interroge les traducteurs sur cette pratique. Reprenant la méthode d’Eléazar, ils répondent par ce qu’elle signifie. Elle est « un témoignage et avertissement de ne faire point de mal mais en leurs œuvres se gouverner selon Dieu et saintement parce qu’elles se font toutes avec les mains, en rappelant très bien chacunes choses à justice et vertu. »(306)

Un enseignement allégorique de la Loi bien différent de celui des docteurs de la Loi de Judée

De cette lecture, nous déduisons clairement que la morale mise en avant par le grand-prêtre Eléazar et les maîtres s’appuie sur la connaissance de Dieu et sur la sagesse philosophique. Ils expliquent et justifient toujours les règles et les pratiques morales par une interprétation allégorique, s’éloignant rapidement de leur expression littérale ou du fait extérieur. L’impureté corporelle est par exemple présentée comme un moyen pédagogique pour accéder à la pureté de l’âme. Nous sommes en fait très éloignés de l’interprétation que réalisent les docteurs de la Loi de Judée, une interprétation plus centrée sur la lettre que sur l’esprit. Notons que la recherche de la pureté, de la droiture et de la justice est au cœur de leurs interprétations de la Loi. Les rites n’ont pas non plus d’autres significations.

Retenons aussi qu’en dépit des soins pour se préserver du paganisme et de ses vices, le grand-prêtre de Jérusalem n’hésite pas à envoyer des docteurs de la Loi dans un pays païen, sans craindre de les souiller. De même, aucun païen ne peut étudier la Loi. Son étude et sa méditation ne sont possibles que pour les Juifs. Par conséquent, la morale ne peut être partagée avec les non-Juifs. Un tel exclusivisme contraste avec son aspect rationnel. La Loi ne devient plus qu’un livre sacré dont l’intégrité doit être préservée.

Un traité juif doublement surprenant

La Lettre d’Aristée est assez surprenante tant elle nous semble si éloignée des procédés en usage chez les docteurs de la Loi. Les procédés employés ressemblent plutôt aux discours philosophiques de l’antiquité. Ce n’est pas en effet un hasard si le sujet est traité au cours d’un banquet. Cela nous renvoie aux célèbres repas socratiques ou platoniques. Néanmoins, cet entretien n’a pas pour objectif de répondre à un problème philosophique ou de dénoncer une attitude philosophique mais il s’avère plutôt comme un test. Les réponses s’enchaînant sans un véritable ordre ne sont que l’occasion de vérifier la sagesse de la Loi. L’important ne réside pas en effet dans les questions en elles-mêmes ou encore dans leur enchaînement mais plutôt dans les réponses et dans leur immédiateté. En outre, le roi mène et dirige seul le débat qui ne se concentre pas sur un seul individu. Il choisit parmi les maîtres ceux qui doivent répondre. Le point est de montrer en fait l’unanimité des réponses.

La morale décrite dans la Lettre d’Aristée peut aussi nous étonner. Nous pouvons y trouver des tendances pharisiennes mais aussi des maximes socratiques et stoïciennes. La recherche de toute mesure nous rappelle celle du stoïcisme. L’appel au rêve nous renvoie aussi à l’épicurien Pétrone. L’auteur ressemble plus à un philosophe qu’à un rabbin, montrant finalement l’accord entre la Loi et la sagesse des grands philosophes grecs.

Conclusions

Au travers d’un récit portant sur la traduction de la Sainte Écriture, l’auteur de la Lettre d’Aristée répond en fait à certaines critiques portées contre les Juifs, c’est-à-dire leurs pratiques rituelles de purification, leurs règles alimentaires et finalement leur soin d’éviter tout contact avec les étrangers. Ce genre de vie mêlé de particularisme et de séparatisme n’est guère apprécié par des païens. Des historiens et philosophes les accusent de misanthropie et de misoxénie, c’est-à-dire de haine à l’égard des étrangers[6].

L’auteur de la Lettre d’Aristée présente la morale juive comme parfaitement rationnelles aussi bien dans son contenu que dans sa forme. Certes, son origine divine est rappelée. La connaissance de Dieu en est le premier fondement. Les païennes le comprennent très bien. Ils savent et enseignent que la morale manifeste la piétée d’un peuple. Mais, ce n’est pas l’essentiel de la lettre. Son auteur montre que les règles morales ne sont pas nées d’une fantaisie ou d’une superstition, qu’elles sont l’œuvre d’un législateur sage et bon et qu’elles ne peuvent qu’être approuvées par les philosophes. La Loi se présente donc comme une œuvre de raison.

La lettre utilise aussi les méthodes d’enseignement en usage chez les philosophes ainsi que l’interprétation allégorique. En outre, la morale contient des préceptes philosophiques qui proviennent de la sagesse grecque. Enfin, ce qui est mis en exergue n’est pas la Loi en elle-même mais l’excellence de son enseignement. La Lettre d’Aristée réhabilite ainsi la Loi et son enseignement qui égalent, voire surpassent la sagesse des anciens. Elle témoigne non seulement de l’élévation de la morale juive mais justifie aussi concrètement la nécessité de la maintenir pur en écartant les Juifs du paganisme et de ses vices. Elle suppose donc distinction et séparation. C’est en quelques sortes la pratique de la « distanciation sociale » qui s’impose....



Notes et références
[1] Strabon, cité par Antiquité Juives, Flavius Joseph, XIV, VII, 2, Œuvres complètes de Flavius Joseph, traduites en français de J. Chamonard, sous la direction de Théodore Reinach, 1900-1905, numérisé et mis en page par F.-D. Fournier, pour le site de Philippe Remacle.
[2] OP H. Vincent, Jérusalem d’après la Lettre d’Aristée dans Revue biblique (1892-1940), nouvelle série, volume 5, 14 juillet 1908, jstor.org.
[3] Lettre d’Aristée, 9, traduit par Herrmann Léon, dans revue belge de philologie et d’histoire, tome 44, fascicule 1, 1966, www.persee.fr. Toutes les citations viennent de cette tradition. Parfois, elles ont été mises dans un français moderne. Le nombre entre parenthèses correspond au numéro de verset. La Lettre ne comprend pas ce qui se rapporte à la description de Jérusalem et des environs (paragraphes 51 à 120).
[4] Ménédème d’Érétrie est un philosophe grec, socratique, vivant vers 350 à 277 avant Jésus-Christ.
[5] Philon d’Alexandrie, Vie de Moïse, dans Philon d’Alexandrie : un penseur en diaspora, Mirelle Hadas-Lebel, librairie Fayard, 2003.
[6] Voir Émeraude, mai 2020, article « La morale au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ (4) : les erreurs et les fautes des docteurs de la Loi à la lumière de l'Évangile ».

samedi 23 mai 2020

La morale juive au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ (4) : les erreurs et les fautes des docteurs de la Loi à la lumière de l'Évangile

Les Évangiles sont des livres historiques. Nul ne peut en effet contester sérieusement leur caractère historique. Ils portent un témoignage d’un temps passé et nous éclaire sur une époque disparue en un lieu bien précis, la Palestine. Ces témoignages sont même exceptionnels. Les récits ne sont pas ceux d’un savant ou d’un historien. Ils ne racontent pas non plus les événements politiques ou la vie d’un roi glorieux. Assis avec la foule au pied de la montagne ou debout auprès de ses disciples, nous écoutons des paroles étonnantes, des entretiens passionnants, des discours d’une clarté et d’une profondeur inégalable. Nous cheminons en Galilée, dans les rues de Jérusalem ou dans le Temple, regardant le peuple qui s’agite.  Nous rencontrons des pécheurs, des mères, des publicains, une veuve, une femme de mauvaise vie, des pharisiens et des prêtres, des centurions et bien d’autres encore. Nous découvrons ainsi un monde vivant au travers d’un récit qui témoigne de la vie concrète de tout un peuple

Certes, il serait erroné et dommageable de réduire les Évangiles à des récits historiques. Ce sont avant tout des livres inspirés qui porte un enseignement divin soumis à l’autorité de l’Église. « Dans quelques dispositions d’esprit que je me sois trouvé, jamais mes doutes, mes objections n’ont tenu contre un chapitre de l’Évangile. Je ne discute pas, je ne raisonne pas. L’Esprit de Dieu est là ; je le sens, et si je me trompe, c’est le fond même de mon jugement qui m’abuse, c’est l’idée de Dieu telle que je la conçois. »[1]  

Or, parmi les acteurs incontournables de la vie qui se dessine devant nous, nous rencontrons des scribes ou des docteurs de la Loi. L’Ancien Testament nous a déjà donnés quelques éléments instructifs sur leur rôle et leur importance dans la vie morale des Juifs ainsi que sur l’évolution de leurs fonctions et de leur place dans la société juive[2]. Nous allons donc poursuivre notre étude à la lumière du Nouveau Testament

Les docteurs de la Loi, maîtres incontestés de l’enseignement de la Loi

La première rencontre avec les docteurs de la Loi se déroule dans le Temple après la fête de Pâque, ou plutôt dans une de ses salles annexes, sur la terrasse ou sur un des portiques, là où les docteurs de la Loi donnent généralement leurs leçons. Nous les trouvons autour de Notre Seigneur Jésus-Christ, qui, « assis au milieu des docteurs » (Luc, II, 46), les écoute et les interroge puis leur répond. Selon la coutume, les docteurs de la loi sont assis sur des sièges quand les autres sont agenouillés auprès d’eux comme Saint Paul auprès de Gamaliel. L’enseignement se fait donc par questions et réponses. L’attitude de Notre Seigneur Jésus-Christ témoigne de sa soumission et de sa déférence à l’égard des docteurs de la loi. 

À sa recherche depuis trois jours, sa mère, Sainte Marie, le trouve ainsi, et étonnée, elle l’interroge : « Mon enfant, pourquoi avez-vous agi ainsi avec nous ? » Écoutons sa réponse : « Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas qu’il faut que je sois aux choses de mon Père ? » (Luc, II, 48-49) C’est donc auprès des docteurs de la Loi que Notre Seigneur Jésus-Christ s’enquière des choses de son Père.

Au cours de sa vie publique, Notre Seigneur Jésus-Christ confirme l’autorité et la fonction des docteurs de la Loi. « C’est sur la chair de Moïse que sont assis les scribes et les pharisiens. » L’expression « être assis sur la chaise de Moïse » signifie détenir l’autorité d’enseigner et de juger ce qui regarde la Loi. C’est pourquoi Notre Seigneur Jésus-Christ demande à ses contemporains de les entendre et de suivre leur enseignement. « Ainsi, tout ce qu’ils vous disent, observez-le et faites-le. » (Matthieu, XXIII, 3)

Le titre de « rabbi », un titre plein de sens

Le lendemain de la rencontre entre Notre Seigneur Jésus-Christ et Saint Jean Baptiste, au cours de laquelle ce dernier lui apporte son témoignage, des disciples de Saint Jean Baptiste suivent Notre Seigneur Jésus-Christ. Ce dernier leur demande alors ce qu’ils recherchent. Ils répondent en l’appelant « Rabbi » (Jean, I, 38), ce qui signifie « maître ». Ils L’appellent ainsi après le témoignage porté par Saint Jean Baptiste. Nathanaël l’interpelle aussi par ce terme quand il découvre sa science divine. Et après l’avoir appelé par ce titre, il reconnaît qu’il est « le Fils de Dieu » et « le roi d’Israël » (Jean, II, 49). Témoin de la Transfiguration, Saint Pierre l’appelle « maître » (Marc, IX, 4), de même un aveugle après avoir été guéri miraculeusement (Marc, X, 51). Quand elle Le reconnaît au sépulcre, Sainte Marie-Madeleine se jette aussitôt à ses pieds en l’appelant par un terme encore plus solennel et mêlé de tendresse, celui de « Rabbouni ».

Ainsi, le titre de « Rabbi » ou de « Rabbouni » désignent le « maître », le « seigneur ». Pour Notre Seigneur, il désigne ce qu’Il est contrairement aux docteurs de la Loi qui portent ce titre de manière honorifique. C’est vraiment au sens propre que les disciples désignent Notre Seigneur Jésus-Christ par ce terme après avoir manifesté ses pouvoirs, sa science et son autorité par des signes. Cela est encore plus clair quand Nicodème, lui-même docteur de la Loi, reçoit Notre Seigneur Jésus-Christ. « Maître, dit-il nous savons que vous êtes un docteur venu de Dieu, car personne ne saurait faire les miracles que vous faites si Dieu n’est pas avec lui. »(Jean, III, 2)


La coutume de désigner les docteurs de la Loi par le titre de « maître » fait par ailleurs l’objet d’une remarque de Notre Seigneur Jésus-Christ. « Ils se complaisent à être appelés par les hommes Rabbi. »(Matthieu, XXIII, 8) Le titre ne manifeste plus ce qu’il doit signifier. Il témoigne plutôt de l’esprit qui habite celui qui le porte. Il devient le signe de l’orgueil. Notre Seigneur Jésus-Christ prononce des paroles très dure contre la vanité et l’orgueil des scribes et des pharisiens en énonçant tous les autres signes qui les manifestent : « la première place dans les festins », à la synagogue, le port de signes vestimentaires de manière ostentatoire, les « salutations dans les places publiques » (Matthieu, XXIII, 6-7). « Ils font toutes leurs actions pour être vus des hommes » (Matthieu, XXIII, 5). Or, il n’y a qu’un seul maître, conclut-Il à ses disciples, le Christ.

Une remise en cause de l’enseignement des docteurs de la Loi

Entre Notre Seigneur Jésus-Christ et les docteurs de la Loi, une hostilité ne cesse de grandir. Nous pouvons trouver la cause de ce conflit dans le sermon de la montagne. Contrairement à ce que disent ses adversaires, Notre Seigneur Jésus-Christ est venu accomplir la Loi et non l’abolir ou la trahir. Il la connaît et l’applique. La cause de l’hostilité est donc ailleurs. « Je vous dis que si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez point dans le royaume des Dieu. »(Matthieu, V, 20) Que veut-Il dire ? « Celui donc qui aura violé un de ces moindres commandements », c’est-à-dire la Loi, « et appris aux hommes à les violer, sera le moindre dans le royaume des cieux. »(Matthieu, V, 19) Remet-Il en cause l’enseignement des docteurs de la Loi ?

Dans la suite du discours, Notre Seigneur Jésus-Christ précise sa pensée. Il revient d’abord sur leur enseignement puis en montre ses limites et ses erreurs. À chaque apostrophe, Il commence par les mêmes termes : « vous avez appris qu’il a été dit aux anciens » (Matthieu, V, 21, 27), « il a été dit aussi » (Matthieu, V, 31), « vous avez encore appris qu’il a été dit aux anciens » (Matthieu, V, 33), ou encore « vous avez appris qu’il a été dit » (Matthieu, V, 38, 43). La première partie de chaque apostrophe est donc un rappel de l’enseignement de la Loi venu de la tradition orale. « Il a été dit ». Certes, les docteurs de la Loi ne sont pas mentionnés mais ce sont bien leur enseignement qui y est visé.

Après avoir rappelé ce que les Juifs apprennent, Notre Seigneur Jésus-Christ donne son enseignement en commençant par « Et moi, je vous dis » (Matthieu, V, 22, 28, 32, etc.) Il a été dit de ne pas tuer. Et Lui, Il enseigne de ne pas se mettre en colère et de se concilier. Il a été dit de ne pas commettre d’adultère mais Il enseigne de ne pas regarder une femme avec convoitise. Notre Seigneur Jésus-Christ révèle ainsi l’esprit qui doit animer le fidèle, allant au-delà de la lettre. Il en dégage une morale bien plus élevée, qui ne se fonde pas uniquement sur l’acte extérieur ou visible mais part de l’âme.

En s’attachant au fait extérieur, nous risquons d’appliquer la Loi non pour obéir à Dieu mais pour plaire aux hommes. Les bonnes œuvres ne doivent pas être réalisées par le désir de paraître, de provoquer des applaudissements ou encore par le souci de l’effet produit sur autrui. Notre Seigneur Jésus-Christ prend exemple du jeûne. « Lorsque vous jeûnez, ne prenez pas un air sombre, comme font les hypocrites, qui exténuent leur visage, pour faire paraître aux hommes qu’ils jeûnent. » (Matthieu, VI, 16) Mais Dieu n’est pas dupe. « En vérité, je vous le dis, ils ont reçu leur récompense. » L’application de la Loi commence donc à l’intérieur de l’homme et ne se réduit pas au fait extérieur et matériel.

Ainsi, Notre Seigneur Jésus-Christ remet en cause l’enseignement réducteur des docteurs de la Loi qui s’attachent davantage à la lettre qu’à l’esprit qui doit animer le fidèle.

Un enseignement qui manque de discernement

L’enseignement que Notre Seigneur Jésus-Christ n’est pas sans rapport avec les querelles qui divisent les docteurs de la Loi. « Il a été dit aussi : quiconque envoie sa femme, qu’il lui donne un acte de divorce » (Matthieu, V, 31) Pourtant, l’acte de répudiation est exigé dans le Deutéronome. Que dit alors Notre Seigneur Jésus-Christ ? « Et moi je vous dis : quiconque renvoie sa femme, hors le cas d’infidélité, la rend adultère ; et quiconque épouse la femme renvoyée, commet un adultère. »(Matthieu, V, 32) Plus tard, son enseignement sera encore plus clair. Un pharisien lui demande « est-il permis à un homme de répudier sa femme pour quelque motif que ce soit ? » Sa réponse est claire et précise : « Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni. » Le pharisien connaissait déjà la réponse mais il l’a abordé pour le tenter, nous apprend Saint Matthieu. Il Lui demande alors pourquoi Moïse l’a alors permis. « C’est à cause de la dureté de vos cœurs que Moïse vous a permis de répudier vos femmes : au commencement, il n’en fut pas ainsi. » (Matthieu, XIX, 8)

Notre Seigneur Jésus-Christ montre que la Loi élève l’homme tout en prenant en compte sa maturité. Le dispositif mis en place par Moïse avait pour objectif d’empêcher que les hommes répudient facilement leur femme. La Loi s’avère donc comme une protection contre le tempérament des Juifs à un moment donné et finalement comme un moyen d’éducation. L’enseignement des préceptes doit donc prendre en compte l’intention du législateur.

Mais surtout, Notre Seigneur Jésus-Christ distingue ce qui est de Dieu et de Moïse, c’est-à-dire les commandements divins et la tradition humaine. L’enseignement nécessite donc du discernement. La confusion entre la Loi et les préceptes d’origine humaine est souvent évoquée par Notre Seigneur Jésus-Christ quand Il évoque leur enseignement. Il reproche aux docteurs de la Loi de mettre toutes les règles au même niveau au point de violer les commandements divins. Quand « les scribes et les pharisiens » accusent Notre Seigneur Jésus-Christ de transgresser la tradition des ancêtres, Il leur retourne la question : « Et vous, pourquoi transgressez-vous le commandement de Dieu par votre tradition ? » (Matthieu, XV, 3) Ce manque de discernement conduit alors à oublier Dieu, rendant ainsi vains tous les efforts que les fidèles mènent pour obéir à la Loi. « C’est en vain qu’ils m’honorent, en donnant des préceptes qui ne sont que des commandements d’hommes », comme le rappelle Notre Seigneur Jésus-Christ en reprenant la prophétie d’Isaïe.

En outre, Notre Seigneur Jésus-Christ intervient sur un sujet qui oppose les docteurs de la Loi, les disciples de Shammai et ceux de Hillel[3]. Ces derniers étendent en effet les cas de répudiation. Ils trahissent alors l’esprit qui animait Moïse et augmente le risque d’adultère. En étudiant uniquement la tradition à la lettre, ils vont de nouveau à l’encontre de la volonté divine.

Le mauvais exemple des docteurs de la Loi

Dans un seul chapitre, Saint Matthieu nous rapporte tout un ensemble de traits et d’invectives que Notre Seigneur Jésus-Christ adresse aux scribes et aux pharisiens puis à la foule qui L’entend. Ce texte est terrible. À huit reprises, Notre Seigneur Jésus-Christ apostrophe « les scribes et les pharisiens » par ces mots « Malheurs à vous ». Ces huit anathèmes sont à reprocher aux huit béatitudes. Après avoir énoncé comment la Loi doit être vécue et perfectionnée, donnant ainsi l’esprit qui doit animer son application, Notre Seigneur Jésus-Christ décrit ce qu’il faut éviter et pour cela, Il prend l’exemple des scribes et des pharisiens.

Notre Seigneur Jésus-Christ avertit ses disciples et la foule qui l’entendent contre les erreurs de leur enseignement et les dangers que représentent les scribes et plus généralement les pharisiens. Dans cette diatribe, des termes reviennent souvent : sept fois « hypocrite », cinq fois « aveugle ». Le troisième trait qui se dessine est leur rapacité. Notre Seigneur Jésus-Christ fait allusion à la pratique des oraisons. « Ils dévorent les maisons des veuves. » (Matthieu, XXIII ; 14). En échange d’honoraires, les docteurs de la Loi disent de longues oraisons sur demande des veuves, certains n’hésitant pas à leur extorquer de somptueuses sommes.

Enfin, dans le Sermon de la Montagne, Notre Seigneur Jésus-Christ fait allusion aux querelles qui divisent les docteurs de la Loi et à leur comportement. Leurs échanges sont souvent houleux, les uns insultant les autres, se traitant de « Racca ». Par leurs attitudes, les docteurs de la Loi trahissent ce qu’ils enseignent. Ils n’appliquent pas ce qu’ils imposent aux autres. Cette accusation revient souvent dans la bouche de Notre Seigneur Jésus-Christ. « Gardez-vous avant tout du levain des pharisiens qui est l’hypocrisie. » (Luc, XII, 1)

Les responsabilités des docteurs de la Loi

Notre Seigneur Jésus-Christ ne les invective pas pour le plaisir ou par rancune. Il décrit les conséquences graves que génère leur attitude. Il cite deux principaux dangers sur la justification des fidèles. Le premier est l’exaspération qu’ils peuvent générer en eux. Faute de discernement, ajoutant aux commandements divins des préceptes humains en grand nombre, qu’ils imposent aux fidèles avec la même autorité que celle de la Loi divine, ils les découragent et les empêchent d’entrer dans le royaume de Dieu. « Ils lient des fardeaux pesants et difficiles à porter, et les mettent sur les épaules des hommes » (Matthieu, XXIII, 4) Ils exaspèrent ceux qui voudraient rejoindre Dieu au point de leur fermer la porte du royaume des cieux. Le second danger est de pervertir les prosélytes. Avec zèle, les scribes cherchent à convertir les gentils mais finalement, par leur enseignement et leur conduite, ils les transforment en « fils de la géhenne » (Matthieu, XXIII, 15).

« Malheur à vous, scribes et pharisiens, parce vous fermez aux hommes le royaume des cieux ! Vous n’y entrerez pas vous-mêmes, et vous n’y laissez pas entrer ceux qui y viennent. » (Matthieu, XXIII, 13) Notre Seigneur Jésus-Christ leur rappelle qu’ils détiennent les clés pour accéder au royaume de Dieu par leur enseignement de la vérité et de la morale, et par leur conduite. L’étude de la Sainte Écriture sert ainsi à ouvrir la porte pour eux-mêmes. L’enseignement des scribes a donc aussi un impact sur leur propre justification. Certes, les docteurs de la Loi sont assis sur la chaire de Moïse, mais cette charge leur incombe des devoirs et de lourdes responsabilités. S’ils en abusent ou les négligent, malheurs à eux ! Ils recevront « un jugement plus rigoureux » (Matthieu, XXIII, 14) de la part de Dieu.

Un enseignement qui manque l’essentiel

Enfin, dans ce texte, Notre Seigneur Jésus-Christ révèle la cause de leurs erreurs et de leurs vices. Leur manque de discernement et leur obstination à respecter des choses futiles leur font perdre l’essentiel. « Guides aveugles, qui filtrez le moucheron, et avalez le chameau ! » (Matthieu, XXIII, 23) ce sont des « guides aveugles », qui dirigent d’autres aveugles. Ils recherchent à appliquer scrupuleusement les règles définies par la Loi en s’attachant uniquement à la lettre de la Sainte Écriture, et finalement, au détriment de l’esprit. Ils sont donc portés vers tout ce qui est extérieur, sensible, visible. De cette attention, naît alors l’envie de paraître, la vanité. C’est pourquoi ils paraissent beaux de l’extérieur mais sont finalement morts de l’intérieur. C’est pourquoi Il les appelle des « sépulcres blanchis ». « Vous paraissez justes aux hommes, mais au-dedans vous êtes pleins d’hypocrisie et d’iniquité. » (Matthieu, XXIII, 28) Avant de chercher à plaire, il est beaucoup plus important de s’occuper de son âme. Tout effort extérieur est vain sans cette recherche intérieure. « Pharisien aveugle, nettoie d’abord le dedans de la coupe et du plat, afin que le dehors aussi soit pur. » (Matthieu, XXIII, 26)

« Guides aveugles, qui filtrez le moucheron, et avalez le chameau ! » (Matthieu, XXIII, 23). Leur volonté de respecter à la lettre la Loi n’est pas sans arrière-pensée. Les scribes y pratiquent des sélections. Un réel et sévère effort est porté sur des observances particulières qu’ils ont déterminées et moyennant quoi, ils se persuadent qu’ils sont quittes envers Dieu. Ainsi, se croyant parfait, ils peuvent juger les autres.

Comme nous l’avons déjà évoqué, Notre Seigneur Jésus-Christ s’attaque donc à une forme de piété et de zèle inconvenants, plus inspirés par le désir de plaire aux hommes que par un véritable sentiment de dévotion. De plus, de tels dévots en attendent des autres une récompense, surtout sous forme de marques d’honneur. C’est ainsi qu’ils se revendiquent le titre de « rabbi », les premières places, les salutations et toute sorte de marques de référence. Leur ostentation est ainsi guidée par leur vanité. Les faits extérieurs manifestent donc leurs désirs intérieurs qui contredisent ce que Dieu leur demande.

Jésus parmi les docteurs - Dürer
Une disposition d’âme contraire à la volonté de Dieu

Notre Seigneur Jésus-Christ adresse aux docteurs de la Loi des condamnations très sévères « parce qu’il s’agit d’une hypocrisie religieuse et d’une contrefaçon de l’adoration en esprit et en vérité. Dieu y devient un voile, un prête-nom ; on se sert de Lui pour abriter la cupidité, la cruauté, l’erreur. Dieu, au nom de qui sont accomplies les œuvres perverses, est, autant qu’il est possible, rendu responsable ou complice. »[4] Ses condamnations portent non seulement sur leur enseignement proprement dit mais aussi sur leur morale. Les paroles de l’enseignement et les dispositions de l’âme de celui qui enseigne ne peuvent être séparées.

Avec une telle disposition d’âme, les docteurs de la Loi ne comprennent pas l’enseignement de Notre Seigneur Jésus-Christ. Non seulement ils ne comprennent pas ce qu’Il veut leur enseigner mais ils ne cherchent pas à comprendre. En effet, ils ne veulent point L’écouter ; ils cherchent surtout à mettre à défaut ses paroles. « Les pharisiens et les scribes se mirent à le presser vivement et à l’accabler de questions, lui tendant des pièges, et cherchant à surprendre quelque parole de sa bouche. » (Luc, XI, 54) Certains l’interrogent pour Le tenter ou L’éprouver.

Un enseignement fermé à la lumière

Les invectives de Notre Seigneur Jésus-Christ s’adressent aux docteurs de la Loi de manière générale. Tous les docteurs de la Loi ne ressemblent pas au portait qu’Il dessine. « Il y avait dans la synagogue des hommes de bonne foi, de loyauté réelle, que l’éducation juive n’avait pas tellement imprégné qu’ils ne demeurassent inaccessibles à la vérité. Nicodème est de ce nombre. »[5]

Nicodème aborde Notre Seigneur Jésus-Christ en l’appelant « maître ». Ce n’est pas un vain mot. Ce docteur de la Loi est un homme âgé, un personnage important. Il est en effet « membre du conseil des Juifs » (Jean, III, 1), c’est-à-dire du Sanhédrin. Or, il se met à son enseignement en lui donnant le titre de « maître ». Il se montre donc humble. Contrairement à ceux qui veulent Le tenter, il semble être réellement sincère, respectueux et aimable. « Nous savons que vous êtes un docteur venu de Dieu. » (Matthieu, III, 2) en raison de ses miracles. Il semble représenter tous ceux qui croient en son enseignement mais il est prudent. Sa démarche est secrète. Il vient de nuit. Plus tard, Nicodème prendra sa défense au Sanhédrin.

Nicodème trouve Notre Seigneur Jésus-Christ pour comprendre son enseignement. Il semble être préoccupé des conditions de la justice, c’est-à-dire de ce qu’il faut être et faire pour plaire à Dieu. L’entretien est fait de questions et de réponses. Les questions de Nicodème permettent d’approfondir et d’éclaircir ses paroles. Les réponses de Notre Seigneur Jésus-Christ sont solennelles. « En vérité, en vérité, je vous le dis. » Au cours de l’entretien, lorsque la doctrine s’élève, Notre Seigneur Jésus-Christ est étonné. « Tu es docteur d’Israël, et tu ignores ces choses ? » (Jean, III, 10) Il évoque aussi l’hostilité de la synagogue. « Vous ne recevez point notre témoignage. » Comment les docteurs de la Loi peuvent-ils comprendre les choses célestes quand ils ne peuvent comprendre les choses qui sont sur la terre ? Ils n’ont pas encore compris les enseignements de la Sainte Écriture au travers des patriarches et des prophètes.

Le refus de voir et d’entendre

Nous retrouvons ce reproche dans les paroles d’un aveugle guéri par Notre Seigneur Jésus-Christ. Interrogé à plusieurs reprises par les docteurs de la Loi sur sa guérison et sur celui qui l’a guéri, il finit par reprocher leur étonnante ignorance « Il est surprenant que vous ne sachiez pas d’où il est. » (Jean, IX, 30). Il en vient même à leur donner une leçon : « Jamais on n’a ouï dire que quelqu’un ait ouvert les yeux d’un aveugle-né. Si cet homme n’est pas de Dieu, il ne pourrait rien faire. »(Jean, IX, 31-32). Nous retrouvons les paroles de Nicodème lorsqu’il donne le titre de « maître » à Notre Seigneur Jésus-Christ : « Personne ne saurait faire les miracles que vous faites, si Dieu n’est pas avec lui. » (Jean, III, 2)

L’attitude des docteurs de la Loi est alors évidente. Au lieu de s’ouvrir aux événements et de les regarder à la lumière des Saintes Écritures, qui manifestent clairement les erreurs de leur enseignement, ils persistent dans leurs convictions et s’enferment dans leur conception. Ils agissent comme des aveugles qui persistent à croire qu’ils voient clairs. Comment peuvent-ils se tromper ? « Nous, nous sommes disciples de Moïse. » (Jean, IX, 28) Alors au lieu de comprendre et de remettre en cause leurs connaissances, les docteurs de la Loi n’ont qu’une réponse : l’insulte. Ils persistent dans leur aveuglement. Ils se dérobent à la lumière. Or, leur mission est de conduire les Juifs vers Dieu, vers le Messie. Pour cela, ils détiennent la clé de la lumière. La faute des docteurs de la Loi « est de retenir captive dans l’injustice la vérité que l’on voit, de trahir sa conscience, de se dérober à ce que la vérité exige de nous, de dérober la vérité à ceux que l’on a la charge d’éclairer. »[6]

Comportement des docteurs de la Loi envers Notre Seigneur Jésus-Christ 

Des docteurs de la Loi posent des questions à Notre Seigneur Jésus-Christ, non pour s’instruire mais pour Le mettre à défaut, ce qu’ils ne réussissent pas. Ils en viennent à s’unir avec leurs adversaires, les sadducéens, pour « Le surprendre dans ses paroles afin de le livrer aux magistrats et au pouvoir du gouverneur. » (Luc, XX, 20) Une des questions les plus célèbres est celle sur le paiement du tribut. Elle est très subtile. Faut-il payer le tribut à César ? Leurs paroles sont d’abord emplies de douceur et de flatterie. Une réponse le condamne nécessairement. Mais la ruse est déjouée. Ils se taisent et se retirent. Ils finissent alors par ne plus L’interroger, ne pouvant Le surprendre

Les docteurs de la Loi se scandalisent aussi des libertés que prennent Notre Seigneur Jésus-Christ et ses disciples à l’égard des préceptes mosaïques. Trois pratiques font l’objet de critiques : les ablutions rituelles, des repas avec des publicains et des pécheurs, une guérison le jour du sabbat. La remise des péchés les scandalise. En fait, ils observent avec malignité tout ce que Notre Seigneur Jésus-Christ et ses disciples font et relèvent tout ce qui peut faire objet d’infractions.

Une de leurs critiques est intéressante. « Pourquoi vos disciples ne gardent-ils pas la tradition des anciens, et prennent-ils le repas avec des mains impurs ? »(Matthieu, VII, 5) Le lavement des mains avant le repas pour éviter l’impureté ne relève pas de la Loi mais des nombreuses règles de purification que les docteurs lui ont ajoutées. Il relève de la « tradition des anciens ». La réponse de Notre Seigneur Jésus-Christ est encore éclatante. Au lieu de se justifier, Il soulève la question fondamentale en rappelant les versets du prophète Isaïe : « Vous laissez de côté la loi de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes. […] Vous savez fort bien, ajouta-t-il, anéantir ainsi les commandements de Dieu, pour observer votre tradition ! » (Matthieu, VII, 8-9) C’est alors une remise en question de leur préoccupation. « C’était une grande et forte leçon, montrant une fois de plus aux docteurs, aux foules, aux apôtres que la religion est chose d’âme, et que ce n’est pas avec des attitudes, des mots, des pratiques d’où l’esprit est absent que l’on peut se rendre agréable à Dieu. »[7] Ensuite, Il justifie l’attitude de ses disciples.

De manière générale, les docteurs de la Loi ne savent pas quoi croire au point qu’ils en viennent à demander un signe, ce qui leur vaut une nouvelle réplique sanglante portant sur leur méchanceté..

Des docteurs de la Loi ont aussi confiance en Lui comme Nicodème. Certains l’écoutent avec foi et l’interroge avec sincérité. L’un d’entre eux veut le suivre et devenir un de ses disciples. « Maître, je vous suivrai partout où vous irez. » (Matthieu, VIII, 19) Un chef de synagogue se prosterne devant Lui et Lui demande de guérir sa fille. S’ils demeurent plutôt une minorité, ils révèlent une certaine division au sein des docteurs de la Loi. L’épisode de la guérison de l’aveugle-né montre clairement le désaccord qui existe entre eux à l’égard de Notre Seigneur Jésus-Christ. Les uns Le déclarent pécheur puisqu’Il ne pratique pas les règles de la Loi, les autres excluent cette solution en raison des miracles qu’Il réalise et ses paroles.

Concernant la foule qui écoute les paroles de Notre Seigneur Jésus-Christ, elle est frappée de la différence entre son enseignement et celui des docteurs de la Loi. « Jésus ayant achevé son discours, le peuple était dans l’admiration de sa doctrine. Car il les enseignait comme ayant autorité, et non comme leur scribe. » (Matthieu, VII, 28-29) Et les docteurs de la Loi en sont bien conscients. Est-ce pour cette raison qu’ils veulent Le mettre à défaut ?

Conclusions

Par leurs efforts, les docteurs de la Loi ont réussi à maintenir le peuple juif dans l’observation de la Loi au milieu des païens, y compris lors de l’exil, loin de Jérusalem et de la Palestine. Mais, ils sont devenus excessifs dans l’application des préceptes divins et ont finalement détourné l’âme des véritables préoccupations. Leur souci d’appliquer à la lettre les commandements divins a fini par leur faire oublier l’esprit qui anime les textes sacrés. Faute de discernement, ils n’ont point distingué ce qui relevait de Dieu et des hommes au point de donner l’autorité divine aux traditions humaines. 


Finalement, complaisant dans l’aspect extérieur de la Loi, ils ont préféré obéir aux préceptes des hommes qu’aux commandements de Dieu. Une telle attitude favorise alors la vanité et l’hypocrisie. Il ne s’agit plus de plaire à Dieu mais de plaire aux hommes. Mais, par leur exagération et leur aveuglement, ils ont rendu plus difficile aux fidèles l’accès à la justice divine. Le fardeau est devenu plus lourd, accablant, voire insupportable. Or, ce fardeau, les docteurs de la Loi l’ont-ils porté ? 

Le reproche le plus grave est leur incrédulité et leur mauvaise foi devant Notre Seigneur Jésus-Christ. Ils avaient les clés de la connaissance pour discerner en Lui le Messie, dont l’arrivée était longuement préparée par les Saintes Écritures, qu’ils connaissaient parfaitement. Ils se sont complus dans la subtilité de leurs pensées, c’est-à-dire dans leur suffisance, fermant alors leur esprit à la simplicité divine. Au lieu de recevoir la lumière, les docteurs de la Loi ont voulu rester dans les ténèbres. Ils n’ont pas cessé d’épier Notre Seigneur Jésus-Christ au lieu d’entendre ses paroles et de remettre en question leur science. Ils se sont scandalisés en écoutant ses réponses au lieu d’entendre ses leçons. Ils ont été en colère quand Il leur montrait leur erreur et leurs contradictions. Devant le Messie, leur cœur était fermé. Les miracles et tous les signes qui manifestaient le rôle et la nature de Notre Seigneur Jésus-Christ ne leur servaient à rien…

Certes, certains docteurs de la Loi ont compris ce qu’il se passait. Comme de nombreux Juifs, ils ne se sont pas satisfaits des prescriptions rituelles et des observances extérieures. Mais leur nombre est bien faible. La responsabilité des docteurs de la Loi est donc lourde, terriblement lourde, comme la Croix que Notre Seigneur Jésus-Christ a portée. Mais ils n’en assument pas seuls les conséquences. Le peuple tout entier, la ville de Jérusalem, la gloire de ce peuple, le Temple, … seront ravagés et ne se relèveront jamais…



Notes et références
[1] Préface, Le Nouveau Testament de Notre Seigneur Jésus-Christ, traduit sur la Vulgate par M. l’abbé H. Crampon, reproduction de l’édition de 1885.
[2] Voir Émeraude, mai 2020, article « La morale juive au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ (3) : les docteurs de la Loi ».
[3] Voir Émeraude, mai 2020, article « La morale juive au temps de Notre Seigneur Jésus-Christ (3) : les docteurs de la Loi ».
[4] Dom Paul Delatte, L’Évangile de Notre Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, 3ème édition, 6ème partie, chap. II, Maison Alfred Mame et fils, 1926.
[5] Dom Paul Delatte, L’Évangile de Notre Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, 2ème partie, chap. II.
[6] Dom Paul Delatte, L’Évangile de Notre Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, 5ème partie, chap. I.
[7] Dom Paul Delatte, L’Évangile de Notre Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, 4ème partie, chap. I.