" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


lundi 2 février 2015

Réflexions sur les attentats : démesure et irresponsabilité

En janvier, la France était en alerte. Elle l’est peut-être encore aujourd’hui. Des centres de crise ont été mises en place. Des militaires continuent de patrouiller à Paris. Certains ont parlé de guerre. Tout cela frise la folie. Une véritable hystérie a en effet gagné les hautes sphères du pouvoir. Tout cela ressemble fort à de l’agitation médiatique et politique. Derrière les discours et les manifestations se révèlent un véritable vide, une profonde misère. Rameutés d’urgence, les centres de crise ont attendu une crise. Les juifs sont venus au secours des militaires, apportant une logistique dont ils ont été tristement dépourvus. On nous a parlé d’un 11 septembre à la française. Comment la mort d’une dizaine de personnes peut-elle être comparée à celle de six mille innocents tués ? Et comble de misère, une vaste chasse aux sorcières est sortie de ses cendres. La justice s’est abattue sur la moindre parole déplacée. Tout cela apparaît bien comme des signes évidents d’une société à l’agonie 

Rappel des faits

La France a fait l’objet d’une attaque meurtrière qui a soulevé une vague d’émotions bien légitime. Ces émotions ont été exceptionnelles tant par leur durée que par leur intensité. Un véritable acte de guerre s’est déroulé en plein jour contre le journal Charlie Hebdo. Au nom de l’islam, des djihadistes ont tué une dizaine de personnes. Puis pendant que les terroristes fuyaient vers le nord de Paris, une autre attaque, toujours au nom de l’islam, s’est produite au sud de la ville contre un commerce juif. La tactique semble évidente.

Et rapidement, des manifestations se sont créées, un slogan a surgi : « je suis Charlie ». D’une même voix, les journalistes et les autorités politiques ont défendu la liberté d’expression, censée être mise à mal par cette attaque. Une foule extraordinaire, sans précédent, ont envahi les avenues et les rues des villes de France pour proclamer haut et fort les valeurs de la République. De nombreux chefs d’états y ont participé, y compris ceux qui les bafouent. Et voilà l’union nationale réalisée derrière un président si détesté auparavant. Une autre vague d’émotions aussi grande que la première a ainsi envahi la France. L’exaltation a succédé à l’angoisse.

Mais les événements laissent rapidement la place à d’autres événements. Les émotions se succèdent encore. Voilà que la minute de silence décrétée en mémoire des victimes n’est pas respectée par tous les écoliers de France. On découvre que les valeurs républicaines ne sont pas partagées par tous les chérubins de la République. Pire. L’union nationale qui s’est illustrée de manière si grandiose dans la rue est entachée par des « apologies au terrorisme ». De nombreux délits commis pour « incitation au terrorisme » sont repérés. La liberté d’expression a des limites. La récente loi de notre ministre de l’intérieur s’est appliquée en toute rigueur…

Puis fort d’une légitimité retrouvée, l’État sort en hâte une série de mesures tant répressives que préventives pour répondre à l’acte lâche des terroristes. Dans le combat contre l’infamie, les écoles sont aussi mises à contribution. On propose d’enseigner le fait religieux dans les classes. Les valeurs républicaines doivent imprégner davantage les jeunes de la République.

Mais autre surprise, un enseignant puis d’autres sont aussi accusés de rompre l’union nationale. Ils refusent de professer le slogan, symbole majeur de l’union nationale ! Les proviseurs les convoquent et les sermonnent. Les menaces fusent sur les récalcitrants. Le mal a aussi gagné le monde de l’enseignement …

Puis nouveau rebondissement : Charlie Hebdo ne disparaît pas et publie un numéro qui atteint un chiffre record de publication. La première page caricature Mahomet avec une parole énigmatique : « tout est pardonné ». Alors qu’on l’arrache dans les bureaux de presse, il est vilipendé par les pays musulmans. Une grande partie du monde musulman proteste et certains pays interdisent sa diffusion. Des innocents tombent. Des églises brûlent. Nous voilà replongés à l’origine même du drame…

Enfin, au lendemain de la publication du Charlie Hebdo, une filière islamiste est démantelée en Belgique. Des terroristes projetaient des attentats. Le mal est européen…

Pendant ces jours si denses en émotions, les médias se saturent de commentaires, de débats, de propositions. Au gré des images et des informations, ils s’agitent. Chaque minute apporte son lot de sensations. Alors que les caméras sont centrées sur une foule scandant le fameux slogan, des massacres au Nord du Mali passent presque inaperçus. 2000 morts sont enfouis dans le silence. Les forces de Boko Haram détruisent des villages africains comme au temps des cavaliers arabes ou mongols ! Les États africains en appellent à l’aide ! Et les regards restent braqués sur les douze morts…

Nous avons assisté à un véritable matraquage où les paroles intelligentes ont eu bien de la peine à surgir. On a demandé de ne pas assimiler l’islam à l’islamisme, de combattre toute forme de radicalisation, de former davantage les musulmans, de donner une autorité à l’islam de France, d’éduquer les enfants sur les faits religieux, etc. Sempiternelles paroles qui ne font qu’éclater l’ignorance profonde de notre élite bien pensante, bien incapable de comprendre les événements qui les ont secoués. 

Mais l’émotion ne doit pas cacher la réalité, encore moins nous empêcher de réfléchir. Car ces événements sont riches d’informations. Faisons en effet quelques remarques…

La liberté d’expression était-elle vraiment la cible des terroristes ?

Rappelons en effet les faits. Les terroristes ont attaqué Charlie Hebdo pour se venger des caricatures que le journal a publiées il y a quelques années. Formés et préparés à la guerre dans un des camps de djihadistes, ils ont répondu à une fatwa, c’est-à-dire à une sentence juridique prononcé par un imam … L'attaque sur Charlie Hebdo n’est donc pas une surprise. On a peut-être oublié l’adage célèbre : « la vengeance est un plat qui se mange froid »…

Le fait important, parfois oublié, est l’audace et la sérénité des attaquants. Ils ont mené une véritable opération militaire en plein jour. Ce n’est pas vraiment une attaque terroriste. Leur amateurisme l’a suffisamment montré. Ce sont des combattants et non des terroristes. Leur but n’était pas de semer la terreur ou de frapper l’opinion mais la vengeance.

En outre, leur succès a renforcé le prestige des salafistes. Or l’histoire de l’islam montre que seule la force victorieuse est gage de légitimité pour les musulmans. Certes, les autorités politiques ont réagi efficacement. La France a été rapidement mise en état de crise. Mais il est trop tard. Le calme peut revenir. La guerre est terminée. Les salafistes ont remporté une victoire qu’on ne peut plus leur enlever.

La liberté d’expression est-elle un véritable enjeu dans ces événements ?

Non à l’origine, oui désormais. Les événements rappellent tristement que ceux qui abusent de la liberté d’expression doivent aussi en assumer les responsabilités. Car attiser le mal est une faute.

Pouvons-nous en effet laisser un journal proférer tant d’insultes à l’égard des religions ? Nous devons en effet le rappeler. Charlie Hebdo est un journal satirique, exécrable et abominable au moins pour les croyants. « On ne peut insulter la foi des autres », dira le Pape François. Le journal n’a jamais éprouvé le moindre respect pour les religions et leurs représentants qu’il traîne allègrement dans la boue. Un chrétien peut-il rester insensible devant un dessin qui représente le Pape en train de sodomiser des enfants ? Ce sont des images insupportables. Et l’État de droit qui protège pourtant la susceptibilité de certaines communautés ne s’oppose pas à ces injures. L’injure et l’injustice sont sources de colère aveugle !

Finalement, Charlie Hebdo a reçu ce qu’il a semé. Il ne s’agit nullement de justifier l’attaque meurtrière dont il a été victime, attaque que nous condamnons fermement. Mais nous devons reconnaître l’évidence. Charlie Hebdo a attisé la colère et la haine. Il est en partie responsable de ce que nous vivons aujourd'hui. Et pire encore, il continue ses injures sous la protection de l’État !

Une semaine après l’attaque, Charlie Hebdo a renouvelé la provocation. Pendant que la colère s’abat sur des innocents et que les églises brûlent, le président de la République nous parle de liberté d’expression ! L’irresponsabilité cause de nouveau la mort et la destruction !... Qu’il ose dire en face des nigériens qu’il faut être « Charlie » ?

Et pire encore, des journalistes français osent critiquer les journaux américains qui ont la délicatesse de reproduire la caricature mais floutée. Rappelons que la France est l’un des rares pays à accepter de telles injures. Les autres nations aussi civilisées et libres que la nôtre se refusent de blesser la foi de leurs citoyens. La liberté d’expression n’existerait-elle donc qu’en France ? En attendant, des dessins continuent de nourrir et d’armer les forces djihadistes

Les "terroristes" sont-ils des fanatiques, victimes d’une radicalisation de l’islam ?

Pendant plusieurs jours, que d’âneries avons-nous entendues de la part de notre élite ! Elle voit encore l’islam comme il semble exister en France. Parfois, elle distingue le sunnisme et le chiisme. Mais le sunnisme et le chiisme sont aussi composés de nombreuses mouvances selon l’école juridique et « théologique » à laquelle elles appartiennent. Les combattants qui ont combattu Charlie Hebdo et pris en otage des  juifs appartiennent à l’une de ces mouvances, le salafisme, qui gagne actuellement du terrain dans le monde, y compris dans les pays non musulmans.

Et cette mouvance est-elle contraire à l’islam ? Qui pourrait nous le dire puisqu’il n’y a pas d’autorités capables de définir ce qu’est l’orthodoxie dans l’islam ?! Il est donc étrange et invraisemblable qu’on les exclue de l’islam. Arrêtons donc de croire que le musulman français, ou plutôt ce que nous imaginons comme tel, est le véritable musulman. Il nous plaît car il nous laisse tranquille. Il ne nous dérange pas sauf lorsqu’il montre sa présence, défend son identité musulmane ou lorsque ses mosquées sortent de terre. Certes nous ne devons pas assimiler la majorité des musulmans avec les salafistes mais personne ne peut dire que les salafistes ne sont pas des musulmans authentiques.

Y-a-il alors une radicalisation de l’islam ou un réveil d’un des courants forts de l’islam ?

Nous devons en effet nous poser cette question au lieu de nous abandonner à un angélisme irresponsable. Si nous songeons à l’histoire de l’islam depuis ses origines, nous ne pouvons pas vraiment parler de radicalisation mais d’un véritable réveil d’un islam violent et conquérant.

Qu’est-ce que la radicalisation ? Elle évoque rupture et intransigeance. Y a-t-il vraiment rupture dans ce mouvement qui prend ses racines dans l’histoire de l’islam ?

Posons-nous de bonnes questions. Pourquoi le salafisme fait-il tant d’adeptes en France ? Des musulmans et des français, parfois d’origine chrétienne, se convertissent à cette mouvance musulmane. Pourquoi adhèrent-ils à cette religion si contraire à leur culture ? Ne sont-ils que des "déstructurés" de la société comme le présente l‘opinion ? Nous savons aujourd’hui qu’elle touche aussi bien les jeunes désœuvrés des banlieues que des diplômés hautement qualifiés et des docteurs que nous avons formés dans nos écoles et universités. Croyons-nous aussi vraiment que les sites Web islamistes sont seuls responsables de leur conversion ? La force de ces musulmans ne provient pas uniquement de leur prosélytisme et de leurs talents. Un site Web n’est pas en effet suffisant pour changer un homme si profondément. Un message n’est pas efficace s’il ne répond pas à une attente. La question que nous devons nous poser est donc simple.

Les convertis se transforment profondément, intégralement. Leur vie prend en effet un nouveau sens qui oriente complètement leurs pensées et leurs actions. Nous pouvons alors parler d'une certaine radicalisation de ces individus - et non de l’islam. Comparer cette conversion à un lavage de cerveau, ce n'est rien comprendre à l’essence même de l’homme. Osons voir la réalité des choses sans aucun préjugé. Les convertis sont passés d’une vie perçue minable à une vie plus exaltante. A leurs yeux, leur existence a gagné en valeur. Elle leur apparaît plus épanouissante, plus digne d’être vécue. Selon Martin Luther King, si notre vie ne méritait pas de mourir pour elle, mieux vaut ne pas vivre. Ils ont pris conscience de leur misère et le salafisme leur est apparu comme une délivrance, une élévation. Ils ont donc trouvé un nouveau sens à leur vie grâce aux salafistes, ce que notre société n’a pas su faire ! Voilà le véritable drame qui devrait nous faire frémir de honte et de crainte. Effectivement, notre société a plus tendance à déstructurer qu’à former. Elle ne nourrit plus notre âme.

Et qui aujourd'hui pourrait s’opposer à leur prosélytisme ? Quelle est en effet la force spirituelle et morale capable aujourd'hui de s’opposer au salafisme ? Notre société est devenue faible et fragile tant au niveau intellectuelle que spirituelle et morale. Les réactions qui ont suivi les événements en sont une preuve évidente. L’hystérie a gagné l’opinion. Comment pouvons-nous nous en étonner ? Comment une société qui prône le libéralisme dans tous les domaines peut-elle attirer les jeunes, plutôt attirés par l’authenticité, l’exigence, l’héroïsme ? Ils n’aspirent pas à la corruption. Nos évêques ont aussi une part de responsabilité dans cet échec. Sont-ils encore le sel de la terre ? La terre s’est terriblement affadie. La place qu’ils n’ont pas voulue occuper a été prise par d’autres. La vie a en effet horreur du vide…

Comment l’État veut-il combattre le salafisme ?

Une des mesures envisagées concerne l’éducation nationale. Il voudrait en effet enseigner le fait religieux. Des experts et des autorités veulent décrire les religions selon le point de vue scientifique, c’est-à-dire montrer qu’elles ne sont que des mythes, des histoires, des interprétations… En un mot, cet enseignement diffuserait la vision agnostique voire athée des religions. Nous pouvons alors imaginer la réaction des croyants de toute confession. Le monde musulman protestera, les chrétiens aussi. Nous pouvons craindre de nouvelles manifestations, de nouveaux débordements. Cette mesure ne fera en outre que réveiller l’identité religieuse des musulmans, voire les pousser vers le salafisme, vers la colère contre l’Occident. En un mot, les musulmans prendront conscience de l’islam et le revendiqueront. La société se trouvera encore plus divisée et affaiblie…

Et comment l’école sera-t-elle capable d’enseigner le fait religieux quand elle éprouve bien de difficultés pour remplir ses missions fondamentales ? Les événements qui sont survenus dans les classes lors de la minute de silence montrent son terrible échec. Depuis longtemps, elle a perdu toute crédibilité et autorité. Et quelle sera sa légitimité pour enseigner le fait religieux ? Le comble d’un État laïque serait de demander aux autorités religieuses de venir enseigner elles-mêmes leur religion à l'école publique …

Les attaques dont la France a été victime sont-elles une véritable surprise ?

En septembre dernier, sur ce site, nous avons annoncé que nous ne serons pas à l’abri d’attaques islamistes. Comment en effet pouvons-nous croire que des musulmans aguerris et fiers se satisferont-ils de leurs victoires en Irak, en Syrie, en Afghanistan, au Mali quand nos pays se montrent si faibles ?

Le Président de la République a annoncé une remise en cause des baisses d’effectifs de nos armées pour répondre aux menaces. Or, ces menaces ne sont pas nouvelles. Le dernier Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale est pourtant clair. Nous vivons aujourd’hui ce que nos experts avaient prévu. Quand nous lisons ce document officiel qui définit les nombreuses et diverses menaces qui pèsent sur la France, nous ne pouvons pas comprendre pourquoi il a donné lieu à la baisse de notre principal outil de défense. Comment cela se fait-il aussi qu’en dépit des nombreux attentats déjoués en ce dernier semestre 2014, nous n’avons pas modifié une politique si incohérente ? En un mot, il faut attendre de tels événements meurtriers pour qu’on réagisse. C’est d’une tristesse affligeante, un manque de vue politique …

Une semaine avant les attaques, sur France info, un philosophe s’attristait devant le faible niveau culturel de nos dirigeants. Il rappelait que sans véritable culture, nos autorités ne peuvent pas résoudre les nombreuses crises qui touchent profondément la France. L’actualité en est un exemple parfait. Certes, ils savent bien manier la force des images et des discours mais les défis ne se résolvent pas par des coups médiatiques, par des gestes politiques ou par des slogans…

Les tristes événements qui ont frappé la France ne sont donc par surprenants. Nous méritons ce que nous subissons. Hélas, au lieu de nous réveiller et de réagir efficacement, nous risquons de persister dans nos erreurs et dans nos illusions. Il est temps de nous armer intellectuellement, moralement, spirituellement et militairement. Seule une nation forte dotée d’une âme forte sera capable de vaincre un courant islamique en expansion. L’histoire et l’actualité nous montrent qu’il ne remporte des victoires que sur des peuples affaiblis et divisés. Or il n’y a pas de force sans unité. Il est donc temps de cesser de diviser et d’épuiser la France, de fragiliser les familles, lieux véritables d’éducation de nos enfants, de prôner la déstructuration de notre nation , de négliger et de mépriser notre culture. Il est temps d’en finir avec les idéologies et les lobbies des minorités. A force de jouer avec des allumettes à côté de barils de poudre, « les bolcheviques de la liberté » risquent de provoquer des incendies incontrôlables. Des innocents vont encore mourir. Il est temps de se réveiller et de revenir à l’essentiel…



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