Dans les articles précédents, nous avons décrit de nombreuses théories censées expliquer l’origine et l’évolution des religions selon différentes approches (évolutionnistes, diffusionnistes, sociales, psychologiques, psychanalytiques, essentialistes, etc.). Désuètes ou toujours en odeur de sainteté, ces thèses ont influencé et continuent d’influencer l’opinion et les systèmes idéologiques ou philosophiques. La plupart d’entre elles utilisent une méthode dite comparative. Tel est le sujet de notre article.
Le comparatisme
Si elles sont utilisées depuis des siècles, les méthodes comparatives se sont surtout
développées au XIXe siècle, notamment dans l’étude de la mythologie puis dans les
différentes disciplines qui constitueront « la science des religions ». Elles sont devenues tellement omniprésentes
qu’elles l’ont longuement dominée, devenant presque une « idéologie ». « La méthode comparative est la seule qui
puisse éclairer l’histoire des religions »[1].
Tel est le comparatisme. Il est plus une pensée ou une philosophie qu'une méthode à
base de comparaison.
Derrière ces différentes méthodes
se cachent en effet des idées fortes, souvent identiques. Elles présupposent en
effet une certaine conception de la religion et de l’homme. Elles ont souvent
la même finalité : la recherche des origines. « Dans le tumulte des nouvelles théories énoncées par le darwinisme et
l'évolutionnisme, des méthodes classificatoires des espèces en botanique et en
biologie, des découvertes sans précédent de la grammaire comparée, des études
anthropologiques et sociologiques, l'histoire comparée des religions, en
s'inspirant de leur méthode comparative respective, espérait découvrir enfin
l'origine commune des croyances et remonter ainsi à la pensée religieuse
primitive de nos lointains ancêtres. »[2]
Elles prétendent aussi être le seul moyen de développer notre connaissance sur les
religions et leur développement.
En dépit de sa forte notoriété
à la fin XIXe siècle, le comparatisme a rapidement perdu de la crédibilité à
cause de ses erreurs et de sa radicalité. Néanmoins, il a
semblé reprendre vie dans les années 70, grâce notamment à Mircea Eliade (1907-1986) et à Dumézil (1898-1986),
qui, chacun, a développé une méthode particulière…
Le comparatisme
linguistique et mythologique
L’initiateur du
comparatisme est Friedrich Max Müller, un des fondateurs de la mythologie comparée,
grand érudit en langues orientales et notamment en sanscrit.
Friedrich Max Müller (1823-1900) |
Müller cherche à déterminer l’origine d’un mythe en trouvant la langue originelle du récit
mythique. Il croit la retrouver en Inde, notamment dans le
sanscrit. Il établit des liens entre les noms des divinités grecques
et des épithètes sanscrits, confirmant alors l’hypothèse de l’unité d’origine
des langues indo-européennes et par conséquent l’idée de la croyance d’un dieu
suprême commun à tous les peuples aryens. Zeus, Jupiter, Varuna, Ahura-Mazda,
Thor ne seraient en fait qu’une seule divinité d’un « ciel-père ».
Mais cette théorie s’est
révélée fausse. « La ressemblance
frappante du grec homérique et du sanscrit védique fait illusion ; autant
les deux langues se rapprochent, autant les religions divergent. »[4]
Cependant, de nos jours encore, des discours savants reviennent sur ces
correspondances linguistiques. Ils n’hésitent pas en effet à trouver des
filiations entre les dieux européens et hindous. La philologie et les autres
études de la langue sont certes importantes dans la compréhension des religions
mais elles ne doivent pas faire oublier l’essentiel, c’est-à-dire l’étude des
faits religieux.
D’autres chercheurs[5] ont repris la thèse de Müller et ont développé l’idée selon laquelle l’existence des dieux proviendrait des
noms. « C’est autour d’un nom
que la création mythique construit un personnage divin. » La recherche
religieuse s’oriente donc vers la comparaison entre le nom et l’être qui
caractérise dans le mythe les noms des dieux. Avec de telles études, ils
découvrent un véritable langage mythique avec sa grammaire, sa logique, son
mode de pensée. Mais leur recherche ne s’arrête pas au mythe. Elle se poursuit
évidemment dans la religion dont le mythe ne serait finalement que l’expression
collective.
Un comparatisme
universaliste
Müller propose de définir
les différences et les similitudes des philosophies indiennes et européennes et
d’utiliser la méthode comparative pour en extraire de la connaissance. Cette
méthode se veut objective et impartiale. Son ambition est parfaitement claire :
« établir une science des religions
qui reposera sur la comparaison de toutes les religions de l'humanité, ou au
moins des plus importantes, ce n'est plus là qu'une question de temps ».
Mais ces champs d’étude ne sont-ils pas un peu trop vastes et finalement
illusoires en pratique ? « Ils
trahissent cet optimisme et cette mégalomanie qui caractérisent si bien les
érudits du XIXe siècle enthousiasmés par tant de découvertes. »[6]
Effectivement, confronté à la réalité, Müller est dans l’obligation de faire des choix. Il se contente donc d’étudier des objets caractéristiques. Mais un choix implique un jugement de valeur. Parmi toutes les religions, laquelle prendre ?
Effectivement, confronté à la réalité, Müller est dans l’obligation de faire des choix. Il se contente donc d’étudier des objets caractéristiques. Mais un choix implique un jugement de valeur. Parmi toutes les religions, laquelle prendre ?
Une pensée bien orientée
Müller est marqué par
deux cultures, celles de l’Inde et de l’Europe, cultures qui ne sont pas
indifférentes à ses choix. « Il y a
dans son comparatisme une rencontre évidente qui trahit tant son indocentrisme
que son européocentrisme »[7].
Ses discours montrent nettement sa préférence. « Si l'on considère la philosophie comme une préparation à une bonne
mort, ou euthanasie, je ne connais pas de
meilleure préparation à cet effet que la philosophie védanta. »[8]
Sa méthode n’est donc pas
aussi impartiale et objective qu’il la prétend être. Qui pourrait encore le
croire ? « C'est ce trésor de
l'antique pensée religieuse que les sages des Oupanishads héritèrent de leurs
ancêtres, et nous allons voir maintenant quel usage ils en firent, et comment
ils découvrirent enfin la véritable relation qui existe entre ce que nous
appelons le Divin ou l'Infini, tel qu'on le voit objectivement dans la nature,
et le Divin ou Infini perçu subjectivement dans l'âme humaine. Nous serons
alors plus à même de comprendre comment ils érigèrent sur cette antique base ce
qui fut à la fois la philosophie la plus sublime et la religion la plus
satisfaisante, le Védanta. »[9]
En outre, dans sa théorie,
Müller refuse l'idée de toute diffusion d’une pensée d’une civilisation vers une autre, de toute doctrine philosophique d’un milieu à un autre selon le principe qu’ils
sont incommunicables à cause de la chaîne des traductions successives
nécessaires. En prenant en compte ce principe, s’il y a similitude
linguistique, elle ne peut pas s’expliquer selon d’hypothétiques contacts et
échanges historiques. L’explication ne se trouverait donc pas au niveau historique
mais étymologique. « Il affirme alors que cette communauté linguistique ne peut
être que le reflet d'une communauté de pensée et donc d'une pensée
philosophique aryenne commune avant même la séparation. »[10]
Müller refuse ainsi toute étude historique des milieux philosophiques. Il
recherche à définir ce qu’est la pensée du Divin chez l’homme, quels que soient
l’époque ou le milieu dans lequel il vit.
L’étymologie, science de
la vérité ?
Müller définit finalement l’étymologie
comme la science de la vérité. En fait, partant « du principe qu'il ne peut y avoir de séparation entre langage et pensée, il
voit dans l'étymologie comparée l'assurance de saisir parfaitement ce que nos
ancêtres, à travers leur expression langagière, avaient eux-mêmes perçu du
Divin ou de l'Infini. »[11]
C’est notamment par l’équivalence et la comparaison entre les termes « brahman » et « verbum » qu’il va tenter de montrer
l’unité de pensée entre les stoïciens, les néo-platoniciens, les chrétiens et
les védantistes.
Précisons que son époque
est marquée par le succès de la grammaire comparée des langues dites
indo-européennes et par la découverte de la philosophie védantique qui se fait
connaître en Occident, notamment par l’intermédiaire de conférences d’une
figure mystique de l’Inde alors que le bouddhisme commence à perdre son attrait
auprès de l’élite intellectuelle.
Or comme le soulignent ses
contradicteurs, Müller passe indistinctement de la grammaire comparée à la mythologie
comparée sans s’apercevoir leurs différences. « Travaillant sur des faits semi-physiques et sur des séries, la première
est une véritable science. Au contraire, la mythologie comparée, qui ne peut
faire ni l'un ni l'autre, « ne peut s'élever à des lois ; elle ne considère
que des couples isolés; ce n'est pas une science ; elle ne prend ce titre que
par l'effet de l'abus qui a étendu ce nom aux études historiques »[12].
Nous retrouvons cette limitation pratique dans le choix des objets comparés.
Müller sélectionne nécessairement les faits religieux selon des présupposés qui
n’ont rien de scientifiques. Car pour comparer, faut-il avant tout une
référence religieuse qui servira de modèle à tous les faits religieux. Müller a
choisi une religion indienne particulière. D’autres chercheurs préfèront la
religion égyptienne sans apporter de justifications convaincantes. La plupart
du temps, de tels choix s’expliquent par des raisons sentimentales ou
culturelles.
Le comparatisme
évolutionniste
Le comparatisme universaliste
de Müller n’est pas le seul à avoir dominé la science religieuse. Nous pouvons
aussi citer le comparatisme évolutionniste.
Rejetant tout lien étymologique
dans le développement des mythes et des religions, le comparatisme évolutif
part d’un autre constat et applique d’autres principes. Il considère que les phénomènes
religieux se répètent dans des sociétés, y compris dans celles qui n’ont jamais
eu de contact entre elles. Il présume donc que leur développement en divers
points du globe est identique. « L’évolution
du sentiment religieux et des pratiques religieuses, tant dans l’Ancien que
dans le Nouveau Monde et jusqu’en Polynésie, a connu presque partout les mêmes
étapes, sans qu’il puisse, en thèse générale, être établi d’influences directes
d’un peuple sur l’autre. »[13]
Il présuppose aussi que cette évolution est identique partout et progressive, du
culte le plus grossier à la religion la plus moderne, le niveau de complexité
déterminant le niveau de progrès religieux. En outre, il associe un niveau de
civilisation donné à un état des croyances, le progrès de la religion
accompagnant le progrès de la civilisation.
Nous pouvons alors
comprendre tout l’intérêt de tels principes. Par l’étude des sociétés dites
primitives, plus proches de nous, nous parviendrions à remonter le temps et à
accéder à l’état primitif religieux, c’est-à-dire à l’origine de la religion.
Nous comblerions ainsi le profond silence des sources historiques. Le
comparatisme est « la méthode où
l’on supplée à l’insuffisance des renseignements sur l’histoire continue d’une
croyance ou d’une institution dans une race ou dans une société, par des faits
empruntés à d’autres milieux et d’autres temps. »[14]
Il y aurait donc correspondance entre le temps et l’espace. « En comparant des formes apparentées de
religions différentes appartenant à un degré d’évolution récent, nous
reconstruisons la forme originelle d’où elles sont issues et nous dépassons le
cas échéant de la tradition historique. »[15] Le comparatisme
évolutionniste recherche ainsi les formes primitives qui se cachent dans les
phénomènes religieux, notamment dans les mythes qui vivent au travers des faits
religieux.
Selon un autre principe évolutionniste, seuls survivraient les prescriptions et les rites utiles à la conservation de l’espèce humaine. En clair, il pratique une sorte de darwinisme religieux. La méthode employée proviendrait d’une école anthropologique anglaise qui veut appliquer la théorie de l’évolutionnisme darwinien au domaine de l’histoire des sociétés, rapprochant les rites des tribus sauvages à ceux des anciens.
Si elle espère fournir
d’hypothétiques explications sur leur développement au cours du temps, le
comparatisme évolutionniste est bien impuissant à justifier l’existence des
religions et surtout à les comprendre. « Ramener avec elles, à l’unité toutes les religions et leur histoire
respective, les imaginer comme se déployant et se diversifiant selon les modes
et les lois prescrits par Herbert Spencer au progrès général de l’humanité, ne
paraît plus possible. »[16]
Mais en vérité, toute conception évolutionniste tend en fait à assimiler une
suite idéale d’une forme de religion à une autre. Ou dit autrement, elle use
d’interprétations parfois abusives pour confirmer un jugement préétabli. Nous
ne sommes bien éloignés de la science dont elle se pare, d’objectivité et
d’honnêteté.
Critiques générales de la
méthode comparative
De nombreux théoriciens se
sont attaqués aux méthodes des évolutionnistes religieux en dénonçant les
principes erronés, sources d’erreurs, de maladresses, de malentendus. Nous
pouvons étendre leurs critiques à toute forme de comparatisme. « À l'école anthropologique, la nouvelle école
de Durkheim, Hubert et Mauss, ne reproche pas de comparer, mais de mal
comparer, en travaillant hâtivement sur un matériau de toutes provenances.
Cette hâte assimile facilement le dissemblable en présupposant l'unité de
l'esprit humain. » [17] La comparaison de faits ne peut
s’appliquer de manière aveugle. Elle nécessite des choix judicieux. Il ne
suffit pas d’accumuler des observations pour prétendre découvrir une loi. « Pour comparer, il convient de
travailler sur des aires culturelles voisines, strictement définies, et de
dégager un type. Bien exécuté, ce travail dispense de l'accumulation des
observations. Selon la célèbre formule de Durkheim : un fait unique peut mettre
une loi en lumière, alors qu'une multitude d'observations imprécises et vagues
ne peut produire que confusion[18]. »[19]
En outre, il ne s’agit pas
simplement de noter les ressemblances des religions comparées, il est aussi important d’identifier leurs
différences sur des caractères fondamentaux. Or pour
les identifier, faut-il les connaître de manière approfondie selon tous leurs
aspects. Il ne s’agit pas non plus de bâtir une théorie selon des
renseignements empruntés ici et là au hasard des recherches ou selon une
collection de faits bâtis pour les besoins de la démonstration afin de
construire ce qui n’existe finalement que dans l’esprit du théoricien. La
méthode comparative nécessite des exigences et un fort esprit critique que les
différents théoriciens ne semblent guère appliquer dans leurs études.
Enfin, comme nous l’avons
déjà évoqué, la méthode comparative nécessite de choisir une religion de
référence à partir de laquelle toutes les autres sont comparées. Or un tel
choix conduit à la distinguer des autres afin de la considérer comme étant le
type le plus complet ou dit autrement une religion modèle, idéale,
c’est-à-dire prééminente[20].
Le comparatisme s’appuie donc nécessaire sur un postulat. « Toutain […] se montre au contraire
extrêmement sévère pour la méthode comparatiste, qui procède a priori et manie
des postulats au lieu de recueillir les faits. »[21]
La comparaison induit
aussi l’opposition. « Comparer
deux objets signifie les opposer pour énumérer leurs ressemblances et leurs
différences et, par un glissement qui n'est guère évitable, pétrifier les
oppositions. On ne peut comparer en effet que ce qui n'est pas confondu. »[22]
Et cette opposition est purement abstraite ou spéculative au sens où elle ne s’appuie pas sur
une réalité historique ou vivante. Müller a en effet
explicitement refusé toute étude historique dans sa théorie. Il refuse de
prendre en compte toutes dimensions chronologiques entre les religions. « Le comparatisme met en parallèle des
constellations synchroniques sans prendre suffisamment en ligne de compte la
succession chronologique de leurs interférences. » [23]
Y compris pour le comparatisme évolutif, ce qui est le comble pour une telle
théorie, le temps étant finalement exclu de l’étude. « Les comparaisons portent sur les moments d'une culture qui, en raison
de ressemblances sémantiques, sont ressentis comme des phénomènes parallèles.
Mais ces moments sont eux-mêmes ancrés dans un développement qui s'étend sur
des décennies voire des siècles. » [24]
La comparaison se fonde sur des mots vidés du poids de leur histoire. Et c’est
en jouant avec les mots qu’on tente de justifier une théorie alors que parfois,
« seule la dimension du temps peut
expliquer des différences structurelles. » [25]
Finalement, « les comparaisons donnent un résultat anhistorique, alors que les points
de contacts entre les cultures sont impliqués dans un processus permanent. »[26]
Le comparatisme dumézilien
Rejetant le comparatisme
universaliste de Müller et de ses disciples, Dumézil se montre beaucoup moins
ambitieux. Son étude se limite à des analogies qu'entre peuples partageant des
similitudes linguistiques et sociales. En l'occurrence, ses hypothèses se limitent
le plus souvent aux Indo-Européens. Il est encore considéré aujourd’hui comme
un refondateur du comparatisme. « Par
son ampleur, sa puissance, sa richesse novatrice, par les problèmes de méthode
dont elle traite explicitement ou qu'elle suscite, par le constant travail de
mise au point qu'elle opère sur elle-même, la pensée de Dumézil est, pour
l'historien des religions et pour l'anthropologue, dans le champ des études
indo-européennes, la théorie par excellence. Le chercheur qui s'engage dans les
voies du comparatisme la rencontre nécessairement. »[27]
Selon sa théorie, les
cultures des peuples issues d’une même origine, celle de la source
indo-européenne, sont imprégnées d’une même construction idéale, celle dite des
trois fonctions, autour desquelles se divise la société et se développent les
activités sociales. « Dumézil étudie
les sociétés indo-européennes historiques et reconnaît dans les textes qu'elles
ont produits, sous des formes étonnamment diverses, les traces d'un même
schéma, celui des « trois fonctions » ; et il définit les règles qui permettent
d'identifier ces traces et de les interpréter. » [28]
Cependant sa théorie n’est
pas unanimement acceptée. Jean-Paul Démoule, archéologue et préhistorien,
revient sur la valeur de nos connaissances : « on ne peut rien dire des manières de vivre et des manières de penser
des locuteurs de la langue indo-européenne commune. Cette langue commune est
hypothétique, et, pour rendre compte des correspondances entre les langues «
indo-européennes » historiquement attestées, d'autres hypothèses peuvent être
proposées. »[29]
Les données notamment linguistiques sont insuffisantes pour savoir ce qui s’est
réellement passé. Les mots que nous utilisons pour traduire des textes anciens
reflètent parfois plus notre manière de pensée que celle que nous tentons de
percer. La lettre est insuffisante pour connaître l’esprit… Nous retrouvons le
péché d’orgueil des comparatistes.
En outre, Dumézil est
fortement convaincu de l’origine commune de certains peuples européens,
orientaux et indiens. « Il est vrai qu'on
ne saurait parler de trace et d'héritage sans admettre par là même, au moins à
titre de cause nécessaire, la notion d'une origine. Comment pourrait-on faire
l'économie de discussions sur le statut de cette origine, c'est-à-dire sur le
type de réalité qu'il faut lui attribuer ?» [30]
Les faiblesses de la
méthode comparative universaliste
Dans un discours adressé
au Collège de France, Dumézil nous rappelle un fait que nous avons tendance à
oublier. Les sources, archives, écrits, monuments, des peuples anciens, tels que
les Indo-européens, sont très rares, voire inexistants. « Entre les belles et croissantes moissons
faites sur les champs de fouilles par les archéologues préhistoriens et la
notion de « peuple indo-européen » qui ressort, elle, comme une
conclusion nécessaire, d’études linguistiques vieilles de près de cent
cinquante ans et de plus précises et pressantes, ente cette collection concrète
de faits relevant des civilisations matérielles et cette entité nationale,
aucune liaison valable ne s’établit. »[31]
Les hypothèses s’appuient uniquement sur des « traces non identifiables ». En clair, sa théorie ne
s’appuie pas sur des faits. C’est une suggestion susceptible d’expliquer un
constat, celle des concordances entre les mythes. Elle est une « conclusion nécessaire ».
Conscients de cette limite,
les linguistes « savent que la
reconstruction vivante, dramatique, de ce qu’était la langue ou la civilisation
des ancêtres communs est impossible, puisqu’on ne remplace par rien les
documents, et qu’il n’y a pas de documents. » Leurs méthodes consistent
d’abord à identifier des faits homologues afin de suggérer une homologie pour
proposer ensuite une commune origine comme l’explication la plus vraisemblable.
Puis, à partir de classement et de relations, ils établissent un système. Des
observations doivent ensuite confirmer l’hypothèse des correspondances afin de
fonder l’affirmation. Telle est la méthode comparative en usage dans « la linguistique comparée ». En
dépit d’absence de sources, elle travaille sur des éléments matériels. Avec le temps, elle aurait gagné en maturité et en crédibilité selon Dumézil. Elle serait unanimement appréciée…
Or cette unanimité n’est
pas acquise pour les « faits de
civilisation non matérielle, pour les représentations collectives et les
institutions, pour le culte, les légendes, la structure sociale des peuples
indo-européens », en clair pour les mythes et les religions. D’où
vient ce manque de crédibilité ?
Dumézil dénonce l’erreur
des premiers comparatistes, erreurs qui seraient dues à leur précipitation. « On a cru pouvoir, plus vite même que pour le
langage, reconstituer les modes de pensées, de pensées religieuses notamment,
des Indo-Européens. » Le verdict est sans appel : l’échec est
cuisant, incontestable. « Trop d’a
priori, pas de sens historique, une ignorance à peu près complète des données
de l’ethnographie, l’absence de sociologie, des mirages littéraires comme la
mythologie solaire ou fulgurante généralisée, une confusion perpétuelle des
faits de langue et des faits de civilisation, qui sont liés, mais distincts,
plus d’enthousiasme, enfin, que de critique, expliquent cet échec. »
L’échec de la mythologie
comparée s’explique aussi par sa vision très parcellaire du mythe ou plutôt des
textes mythiques dont elle disposait. Les théoriciens les ont découpés de la
réalité, c’est-à-dire de l’organisation sociale et politique, du rituel, de la
loi et de la coutume, bref de la vie des hommes qui les racontent. En clair,
la mythologie comparée a dépouillé les mythes, les isolant de la vie pour
finalement les interpréter selon des systèmes a priori. « On sait aujourd’hui que, devant un corpus
mythologique, il faut être plus humble, les servir et non le faire servir,
l’interroger et non l’annexer à des dossiers avides de matière, en respecter
surtout toute la richesse, la variété, voire la contradiction. »[32]
Enfin, Dumézil remet en
cause les consonances linguistiques des premiers linguistes. De nos jours, avec
des exigences phonétiques plus exigeants, nous savons que certaines d’entre
elles sont sans valeur puisqu’elles ne se rapportent pas sur des choses
comparables.
Les critiques de Dumézil
sont fort intéressantes et ne peuvent que nous aider à s’opposer à toutes les
théories qui sont bâties à partir de la méthode
comparative universaliste. En effet, en dépit de cet échec, l’idée d’une
religion commune, de « la religion
primitive des Indo-européens » - « comprenons celle que des écoles de théoriciens ont fabriquée »
- demeure encore. Elle persiste même, les spécialistes refusant désormais
de se justifier par la méthode comparative, devenue infréquentable. C’est pour
s’opposer à cette nouvelle illusion que Dumézil définit une nouvelle méthode
comparative.
Une méthode plus souple et
humble ?
Dumézil demande d’observer
les différentes sociétés et d’en extraire des données dites primaires. Ces
dernières doivent alors être interprétées sous un même regard analytique pour
obtenir des données secondaires, appelées « faits comparables », c’est-à-dire des « concordances sur un fond de différences ».
Ces concordances doivent alors recevoir
« l’explication la plus plausible ». Sa méthode consiste donc à « confronter, mesurer et limiter les
concordances, les expliquer ». Dumézil prône une méthode souple,
refusant toute recherche de solutions finies et définitive.
En dépit de l’échec des
méthodes comparatives linguistiques, Dumézil bâtit aussi sa méthode sur la
langue qui reste pour lui « un
conservatoire et un véhicule d’idées »[33].
Et c’est à partir de ces études linguistiques qu’il va élaborer sa théorie de
tripartition, justifiant l’idée des peuples indo-européens.
L’héritage du peuple
indo-européen
Comment les concordances
peuvent-elles s’expliquer ? Dumézil propose quatre explications :
« soit par la hasard, soit par une
nécessité naturelle, soit par l’emprunt direct ou indirect, soit par une
parenté génétique » (filiation, héritage commun). Il va alors montrer
que la solution d’héritage commun est en fait la plus plausible.
Pour cela, il constate que les systèmes théologiques romains, iraniens, scandinaves ont structuré leur société de la même façon selon une tripartition, c’est-à-dire selon trois niveaux : sacerdotal, guerrier et producteur. C’est son idée maîtresse. Or ces peuples romains, iraniens et scandinaves parlent une langue indo-européenne. Par ailleurs, « une telle tripartition, théorique ou pratique, n’est attestée que chez des peuples indo-européens, ou chez quelques autres, mais après des contacts précis avec des Indos-Européens identifiés. » Cette concordance uniquement constatée chez les peuples de langue indo-européenne montrerait donc qu’elle ne peut provenir ni du hasard ni d’une nécessité naturelle.
Certes, l’idée du hasard nous semble bien peu convainquant mais pourquoi rejette-t-il l’idée d’une nécessité naturelle ? Car selon Dumézil, elle ne peut expliquer l’originalité de la tripartition et sa répartition tant géographique qu’historique. « Je crois donc qu’on peut dire que la rareté de la structure, et le fait qu’elle n’apparaît que dans les idéologies de peuples parlant des langues indo-européennes, empêche d’attribuer l’accord constaté aussi bien à une pente ordinaire de l’esprit humain ou de la vie collective qu’à un caprice du hasard».
Pour cela, il constate que les systèmes théologiques romains, iraniens, scandinaves ont structuré leur société de la même façon selon une tripartition, c’est-à-dire selon trois niveaux : sacerdotal, guerrier et producteur. C’est son idée maîtresse. Or ces peuples romains, iraniens et scandinaves parlent une langue indo-européenne. Par ailleurs, « une telle tripartition, théorique ou pratique, n’est attestée que chez des peuples indo-européens, ou chez quelques autres, mais après des contacts précis avec des Indos-Européens identifiés. » Cette concordance uniquement constatée chez les peuples de langue indo-européenne montrerait donc qu’elle ne peut provenir ni du hasard ni d’une nécessité naturelle.
Certes, l’idée du hasard nous semble bien peu convainquant mais pourquoi rejette-t-il l’idée d’une nécessité naturelle ? Car selon Dumézil, elle ne peut expliquer l’originalité de la tripartition et sa répartition tant géographique qu’historique. « Je crois donc qu’on peut dire que la rareté de la structure, et le fait qu’elle n’apparaît que dans les idéologies de peuples parlant des langues indo-européennes, empêche d’attribuer l’accord constaté aussi bien à une pente ordinaire de l’esprit humain ou de la vie collective qu’à un caprice du hasard».
Le chevalier, le clerc, le paysan |
Ainsi Dumézil étudie les
mythes et religions des peuples d’origine indo-européenne pour confirmer la
structure tripartite. Son interprétation des faits religieux s’inscrit dans
cette représentation. « L’exploration
s’est développée sur toutes les parties du monde indo-européen et sur tous les
types d’œuvre que produit habituellement la pensée humaine et qu’il faut bien
distinguer, malgré leurs communications à tous les instants et leur unité
foncière :la théologie, la mythologie, les rituels, les institutions, et
aussi cette chose sûrement aussi veille que la plus veille société parlante, la
littérature. »[35]
C’est pourquoi sa théorie et ses conclusions ne peuvent être comprise sans
prendre en compte cette lecture particulière de Dumézil.
La structure tripartite,
une hypothèse critiquable
Certains critiques ne
voient dans la théorie de la tripartition qu’une évidence, qu’une nécessité
naturelle. Aucune société ne pourrait vivre sans concilier les trois fonctions.
Comment pouvons-nous alors en tirer une preuve d’un héritage
indo-européen ? Effectivement, comme le reconnaît Dumézil lui-même, cette structure
n’est pas propre aux peuples indo-européens mais il n'accepte pourtant pas son
universalité car tous n'en ont pas pleinement conscience. « Nombre de peuples, certes, sur tous les continents, assurent les trois
fonctions correspondant à cette division type, puisqu’il n’est pas possible
qu’ils subsistent autrement ; mais ils le font sans y prendre garde et
sans affecter à chacune un organe – de direction ou d’exécution – particulier. »[36]
Il rappelle alors certains récits où les fonctions existent mais se mélangent
comme ceux de la Sainte Écriture. Seuls les peuples indo-européens auraient
explicitement et clairement construit un système tripartite. Mais cette prise
de conscience suffit-elle pour établir une commune origine ? N’est-ce pas
seulement le seul moyen de garantir une société forte et prospère ? Et
enfin, notre ignorance est si grande que nous ne pouvons guère affirmer que
seuls les peuples indo-européens ont construit un système tripartite…
D’autres critiques, au
contraire, ne sont pas aussi convaincus de la méthode comparative et encore
moins de l’existence d’une souche indo-européenne, qui ne demeure en fait
qu’une hypothèse. En fait, ils rejettent l’hypothèse de l’héritage
indo-européen. Pour se défendre, Dumézil regrette que des savants s’enferment
obstinément dans leurs études et ne s’ouvrent pas aux nouvelles méthodes. Il
s’attaque à une aristocratie de la République des Lettres qui défend une
certaine domination intellectuelle. Il accuse aussi un système éducatif enfermé
dans un humanisme classique. Sa défense nous semble bien peu efficace et
n’apporte guère de réponses.
Une méthode si différente
que les anciennes ?
La méthode de Dumézil
est-elle fondamentalement différente des anciennes méthodes si décriées ?
Müller voit dans la langue la source de la vérité, appliquant les méthodes de la grammaire
comparée aux mythes. Rappelons que l’hypothèse d’une origine commune
indo-européenne s’appuie sur des études linguistiques. L’étude comparative des
religions ne viendrait que confirmer cette hypothèse. Mais c’est oublier que la
connaissance des mythes et des religions anciennes ne peuvent provenir que de la
« littérature ». Dumézil s’appuie fortement sur la linguistique
comparée pour comparer des mythes et des religions. La seule différence est la
réduction du périmètre d’étude. Contrairement à ses devanciers, il n’étend pas
ses études sur l’ensemble des faits religieux mais sur un sous-ensemble dit
indo-européen. Est-il vraiment pertinent de comparer les mythes et les
religions comme il est possible de comparer des langues pour parvenir aux mêmes
objectifs ?
Quels objectifs ?
Soulignons d’abord que contrairement à ses prédécesseurs, il est conscient que «
prétendre reconstituer un mythe, un
rituel, un organe politique ou un rouage social indo-européen dans la forme
concrète, pittoresque, où il a pu exister trois mille ans avant notre ère »
n’est pas une chose à faire. La méthode comparative doit chercher des
correspondances précises et systématique sur un périmètre réduit et
caractériser les évolutions divergentes qui ont abouti à des choses analogues
et diverses. Elle cherche donc à expliquer l’évolution des mythes et des
religions. Mais s’il ne cherche pas à reconstruire « des formes de religion ou de mythologie indo-européennes communes», nous ne voyons pas comment il
est capable d’expliquer leur évolution sans se référer à un modèle originel,
idéal ou pratique.
Une approche
structuraliste et non historique
La méthode comparative ne
reconstitue donc pas de l’histoire. Effectivement, « remarquons […] que l'archéologue, dans sa critique, insiste surtout sur
le fait qu'il est impossible d'imaginer, à l'aide des données linguistiques,
qui sont les seules dont nous disposons, ce qui s'est « réellement » passé. »[37]
Elle est plutôt de l’ordre de la psychologie. « Le travail avançant, je prenais une conscience plus nette des
possibilités, mais aussi des limites de la méthode comparative, en particulier
de ce qui doit en être la règle d'or, à savoir qu'elle permet de reconnaître et
d'éclairer des structures de pensée, mais non pas de reconstituer des
événements, de fabriquer de l'histoire, ni même de la préhistoire. »[38] Cette limite explique notamment l’opposition des historiens et des
archéologues. Nous sommes désormais dans une approche structurelle de la
religion. Cependant, comment est-il possible de parler d’héritage sans revenir
aux sources, ou de manière de penser que les Indo-Européens auraient transmis à
des peuples sans parler d’eux-mêmes, de leur réalité ?
Pour définir sa structure
tripartite, il parle d’idéologie. « Mais
tous ces éléments (c'est-à-dire mythologie, théologie, littérature sacrée,
organisation sacerdotale) sont eux-mêmes subordonnés à quelque chose de plus
profond, qui les oriente, les groupe, en fait l'unité, et que je propose
d'appeler, malgré d'autres usages du mot, l'idéologie, c'est-à-dire une
conception et une appréciation des grandes forces qui animent le monde et la
société, et de leurs rapports. »[39]
Dumézil ne cherche pas à identifier la structure psychologique de l’homme. « J'appelle "idéologie"
l'inventaire des idées directrices qui commandent la réflexion et la conduite
d'une société et qui, bien entendu, n'impliquent pas je ne sais quelle
organisation particulière des cerveaux. »[40]
Une approche
fonctionnaliste de la religion
Enfin, contrairement à ces
prédécesseurs, Dumézil n’étudie pas les dieux en eux-mêmes mais leurs
relations. « C'est moins chaque
figure divine, chaque concept religieux qu'il faut étudier que les rapports
qu'ils soutiennent entre eux et les équilibres que révèlent ces rapports. Bref,
la plus sûre définition d'un dieu est différentielle, classifîcatoire. »[41]
Ou dit autrement, sa conception de la divinité est purement fonctionnelle. Le
comparatiste « ne s'intéresse qu'à
son articulation avec d'autres fonctions, à sa position dans l'ensemble du
système et aux combinaisons dans lesquelles elle est apte à figurer. »[42]
Dumézil ne se préoccupe pas du sens qui se cache derrière la divinité. Le danger de n’y voir qu’une abstraction est grand. « On peut sentir à travers ces analyses schématiques, l'importance que revêt, dans l'étude moderne des religions, la notion de système et, par suite, pratiquement, le repérage des rapports (opposition, complémentarité, hiérarchie...) : les dieux ne se définissent bien que les uns par rapport aux autres et ce qui les domine ou les explique tous, c'est le plan d'ensemble dont ils ne sont, même les plus grands, que des parties. »[43] Ainsi Dumézil parle-t-il souvent de système puis de structure.
Dumézil ne se préoccupe pas du sens qui se cache derrière la divinité. Le danger de n’y voir qu’une abstraction est grand. « On peut sentir à travers ces analyses schématiques, l'importance que revêt, dans l'étude moderne des religions, la notion de système et, par suite, pratiquement, le repérage des rapports (opposition, complémentarité, hiérarchie...) : les dieux ne se définissent bien que les uns par rapport aux autres et ce qui les domine ou les explique tous, c'est le plan d'ensemble dont ils ne sont, même les plus grands, que des parties. »[43] Ainsi Dumézil parle-t-il souvent de système puis de structure.
Nous retrouvons l’erreur
des comparatistes universalistes, certes moins prononcée mais toujours bien
réelle, erreur finalement inhérente à toute méthode comparatiste. Aujourd’hui,
comme la génétique, elle établit des arbres généalogiques selon des
classifications typologiques à partir de l’étude des structures, oubliant que
les mots portent du sens avant tout…
Retour à un axiome
contesté
Revenons à la conception
religieuse de Dumézil. Comment conçoit-il en effet la religion ? « Primitivement les dieux de la triade
(Jupiter, Mars, Quirinus) n'étaient sans doute pas l'expression des trois
fonctions sociales et cosmiques considérées abstraitement..., mais les patrons
des projections des trois groupes sociaux auxquels incombaient ces fonctions.
»[44]
Ou encore « et comme, chez les
demi-civilisés, la conception du monde et celle de la société, la hiérarchie
des dieux et celle des hommes sont le plus souvent parallèles. »[45]
Le mythe et la religion seraient donc le reflet de la société ou des hommes qui
l’ont conçue. Il y aurait alors une dépendance de la religion à l’égard de la
structure de la société. Ainsi l’étude comparée des religions permettrait
de la connaitre. Les similitudes
fondamentales religieuses prouveraient ainsi celles des sociétés qui ne pourraient venir que d’une origine commune. Mais pourquoi la religion refléterait-elle les hommes qui l’ont
conçue ? Pouvons-nous voir dans cet axiome l’influence des théories de
Durkheim ?
Mais son axiome soulève des
difficultés sur l’origine et l’importance de la religion. Si la religion n’est qu’un
reflet, pourquoi constituerait-elle un objet d’étude d’importance ?
Autant comparer les sociétés. Si elle est indépendante de la représentation
sociale, comment s’est-elle constituée et quelle en est la source ? La
religion est-elle finalement déterminée ou déterminante ? « On se demande évidemment comment une chose
peut en susciter une autre tout en en étant l'une des expressions, idéelles ou
concrètes ? De même aimerait-on connaître les processus qui permettent à un
schème mental de fonder une organisation sociale effective. »[46]
Dumézil finira par abandonner l’idée d’une approche sociale de la religion.
Conclusion
Les méthodes comparatives
universalistes ou restreintes présentent des défauts inévitables et ne peuvent
prétendre être exemptes d'erreurs et de partialité. Elles impliquent nécessairement
des choix qui biaisent le regard qu'on porte sur les religions étudiées, sur la
notion même de la religion, et donc orientent les réflexions et les conclusions
sur ces sujets. Il est donc important d'identifier les motifs qui déterminent
les choix pour évaluer la valeur des théories. Elles servent en outre à confirmer des idées et des hypothèses, ne pouvant les démontrer en absence de faits matériels probants. De telles méthodes sont souvent les seules possibles. Mais elles n'ont pas de valeur démonstrative. Elles ne convainquent pas mais ne peuvent que persuader. Enfin, elles ont tendance à vider les religions de toute vie, c'est-à-dire de toute histoire, voire de toute humanité, ne devenant qu'un objet abstrait, sans âme, le contraire même de ce qu'est la religion.
Si donc les méthodes comparatives sont parfois intéressantes à utiliser, faut-il être prudent, humble et conscient de leurs limites. L'erreur et la faute de certains chercheurs sont de croire en leur infaillibilité et de vouloir les imposer comme mode de connaissance certaine ou unique.
Notes et références
[1] A. Brelich, Prolégomènes,
Tome I dans L’Histoire des
religions, Michel Meslin.
[2] Guillaume Ducoeur, Comparatisme
orienté et étymologie comparée chez Max Müller : l'équation
Bráhman = Verbum, Revue
de l’histoire des religions [En
ligne], 2 | 2009, mis en ligne le 01 avril 2012, consulté le 19 mars
2016. http://rhr.revues.org/7227.
[3] Max Müller, La
Science du langage dans
Préface, Cultes, Mythes et
Religions.
[4] James Darmesteter, Revue
archéologique, 1884 dans Préface, Cultes,
Mythes et Religions.
[5] H. Usener, Les
Noms des Dieux (1896), E.
Cassirer, Spracht und
Mythos (1924), W.Wundt, Mythe et Religion (1911).
[6] Guillaume Ducoeur, Comparatisme
orienté et étymologie comparée chez Max Müller : l'équation
Bráhman = Verbum.
[7] Guillaume Ducoeur, Comparatisme
orienté et étymologie comparée chez Max Müller : l'équation
Bráhman = Verbum.
[8] M. Müller, Three Lectures on the Vedanta
Philosophy, London, 1894, dans Comparatisme orienté et
étymologie comparée chez Max Müller : l'équation Bráhman = Verbum,
Guillaume Ducoeur.
[9] M. Müller, Introduction à la philosophie du
védanta, Paris,
E. Leroux, 1899, dans Comparatisme
orienté et étymologie comparée chez Max Müller : l'équation
Bráhman = Verbum, Guillaume Ducoeur.
[10] Guillaume Ducoeur, Comparatisme
orienté et étymologie comparée chez Max Müller : l'équation
Bráhman = Verbum.
[11]Guillaume
Ducoeur, Comparatisme
orienté et étymologie comparée chez Max Müller : l'équation
Bráhman = Verbum
[12] J. Darmesteter, Revue
archéologique, juil.-déc. 1884, dans L'histoire
des religions en France au début du XXe siècle, Laplanche François dans Mélanges de l'École française de
Rome, Italie et Méditerranée, tome 111, n°2. 1999, , publié le 23/09/2015 sur http://www.persee.fr/doc/mefr_1123-9891_1999_num_111_2_4660.
[13] Reinach, dans Préface de Hervé Duchêne, Cultes, Mythes et Religions,
Reinach.
[14] Goblet d’Alviella, 1908, dans L’Histoire
des religions, Michel Meslin.
[15] Hardy, article Archiv
für Religionswissenschaft (1989)
dans L’Histoire des
religions, Michel Meslin.
[16] Henri-Charles Puech, Préface, Histoire des religions,
tome I.
[17] L'histoire des religions en France au début
du XXe siècle, Laplanche François dans Mélanges
de l'École française de Rome, Italie et Méditerranée, tome 111, n°2.
1999, , publié le 23/09/2015 sur http://www.persee.fr/doc/mefr_1123-9891_1999_num_111_2_4660.
[18] E. Durkheim, Les
formes élémentaires de la vie religieuse, Paris, 1994.
[19] L'histoire des religions en France au début
du XXe siècle, Laplanche François dans Mélanges
de l'École française de Rome, Italie et Méditerranée, tome 111, n°2.
1999, , publié le 23/09/2015 sur http://www.persee.fr/doc/mefr_1123-9891_1999_num_111_2_4660.
[20] Voir Histoire
des religions et méthode comparative, G.
Foucart (1866-1944), 1912, édition Alphonse Picard et fils, via Gallica.
[21] L'histoire des religions en France au début
du XXe siècle, Laplanche François dans Mélanges
de l'École française de Rome, Italie et Méditerranée, tome 111, n°2.
1999, publié le 23/09/2015 sur http://www.persee.fr/doc/mefr_1123-9891_1999_num_111_2_4660.
[22] Espagne Michel, Sur
les limites du comparatisme en histoire culturelle dans Genèses, 17, 1994. Les
objets et les choses, http://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1994_num_17_1_1266.
[23] Espagne Michel, Sur
les limites du comparatisme en histoire culturelle dans Genèses, 17, 1994. Les
objets et les choses, http://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1994_num_17_1_1266.
[24] Espagne Michel, Sur
les limites du comparatisme en histoire culturelle dans Genèses, 17, 1994. Les
objets et les choses, http://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1994_num_17_1_1266.
[25] Espagne Michel, Sur
les limites du comparatisme en histoire culturelle dans Genèses, 17, 1994. Les
objets et les choses, http://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1994_num_17_1_1266.
[26] Espagne Michel, Sur
les limites du comparatisme en histoire culturelle dans Genèses, 17, 1994. Les
objets et les choses, http://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1994_num_17_1_1266.
[27] Malamoud Charles, Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenne,
Présentation dans Revue de
l'histoire des religions, tome 208, n°2, 1991, http://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1991_num_208_2_5195,
publié le 19/10/2015.
[28] Malamoud Charles, Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenne, Présentation
dans Revue de l'histoire
des religions, tome 208, n°2, 1991, http://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1991_num_208_2_5195,
publié le 19/10/2015.
[29] Malamoud Charles, Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenne,
Présentation dans Revue de
l'histoire des religions, tome 208, n°2, 1991, http://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1991_num_208_2_5195,
publié le 19/10/2015.
[30] Malamoud Charles, Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenne,
Présentation dans Revue de
l'histoire des religions, tome 208, n°2, 1991, http://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1991_num_208_2_5195,
publié le 19/10/2015.
[31] Dumézil, Leçon inaugurale prononcée au Collège de France le 1er décembre 1949 dans Hervé
Coutau-Bégarie, Introduction, Mythes et dieux des
Indo-Européens, Flammarion, 1992.
[32] Dumézil, L’idéologie
tripartite des Indo-Européens.
[33] Dumézil, L’idéologie
tripartite des Indo-Européens.
[34] Dumézil, L’idéologie
tripartite des Indo-Européens, éditions Latomus, 1958 dans Hervé
Coutau-Bégarie, Introduction, Mythes et dieux des
Indo-Européens, Ière partie, Flammarion, 1992.
[35] Dumézil, L’idéologie
tripartite des Indo-Européens.
[36] Dumézil, L’Oubli
de l’homme et l’Honneur des Dieux, Gallimard, 1985 dans Hervé Coutau-Bégarie, Introduction, Mythes et dieux des
Indo-Européens, IVème partie, chap. VIII, Flammarion, 1992.
[37] Malamoud Charles, Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenne,
Présentation dans Revue de
l'histoire des religions, tome 208, n°2, 1991. Histoire des religions et
comparatisme : la question indo-européenne, www.persee.fr.
[38] Dumézil, La
religion romaine archaïque, Paris, 1974 dans Contribution
à une épistémologie dumézilienne : l'idéologie, Dubuisson Daniel, dans Revue de l'histoire des
religions, tome 208, n°2, 1991 dans Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenn, www.persee.fr e.
[39] Dumézil, Rituels indo-européens à Rome,
1949, dans Contribution à
une épistémologie dumézilienne : l'idéologie, Dubuisson Daniel.
[40] Dumézil, L’Oubli de l’homme
et l’Honneur des dieux, 1985, dans Contribution à une épistémologie
dumézilienne : l'idéologie, Dubuisson Daniel.
[41] Dumézil dans Hypothèse
indo-européenne et modes de comparaison, Charachidzé Georges dans Revue de l'histoire des
religions, tome 208, n°2, 1991, Histoire
des religions et comparatisme : la question indo-européenne.
[42] Charachidzé Georges, Hypothèse
indo-européenne et modes de comparaison.
[43] Dumézil Héritage indo-européen à Rome,
Paris, 1949, dans Contribution
à une épistémologie dumézilienne : l'idéologie, Dubuisson Daniel.
[44] Dumézil, Héritage indo-européen à Rome dans Contribution
à une épistémologie dumézilienne : l'idéologie, Dubuisson Daniel.
[45] Dumézil dans Contribution à une épistémologie
dumézilienne : l'idéologie, Dubuisson Daniel.
[46] Dubuisson Daniel, Contribution
à une épistémologie dumézilienne : l'idéologie.
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