" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


lundi 1 décembre 2014

Libérons notre vie intérieure et intellectuelle




Les missionnaires catholiques en Corée du Sud rencontrent actuellement de graves difficultés d’évangélisation auprès des jeunes Coréens. Comment en effet les toucher quand ils sont pris dans l’engrenage infernal de la rentabilité ? Ils ne cessent en effet de courir pour qu’aucune seconde ne soit inoccupée, qu’aucun temps ne soit perdu. Dans une ville agitée, aux multiples enseignes lumineuses, les rues bruyantes se gorgent d’innombrables Smartphones qui imperturbables se suivent et se croisent dans une marche haletante. Foule nombreuse où se mêlent paroles et pages internet… Lutte effrénée contre le temps… 
Comment alors intéresser ces jeunes aux choses essentielles de la vie ? Comment élever leur âme aux biens célestes ? Comment leur faire apprécier le silence de la prière ? Ils s’épuisent à suivre le temps. Ils n’ont plus de temps pour eux-mêmes. Que devient leur vie intérieure et intellectuelle ? Il est particulièrement ardu de nourrir son esprit quand il n’est jamais au repos. Il finit par périr quand il est sous l’emprise totale de la vie extérieure.
Quand nous songeons à ces Coréens, nous ne pouvons ignorer notre propre situation. Car nous-aussi nous ne cessons de courir au travail et à la maison, dans le métro et dans la rue, pendant la semaine et les week-ends. Pressés pour mille raisons, nous supportons aussi la tyrannie du temps. Mais comme cela ne suffit pas, nous courons aussi dans le monde virtuel de l’Internet. A une vitesse prodigieuse, nous traversons les mers et les vallées, nous courons à la recherche du dernier buzz ou de la dernière information, nous cherchons la moindre occasion pour fructifier le temps qui passe. Et pendant qu’un nombre innombrable de pages Internet défilent devant nos yeux ébahis, le temps passe en effet…
Malheureusement, empêtrés dans un rythme effréné, nous finissons par ne plus pouvoir fixer notre esprit. Les textes longs nous sont très pénibles. La réflexion nous est difficile. Toute lenteur, toute attente nous sont insupportables. Seuls en fait l’imaginaire, l'extraordinaire, l'émotion nous enchantent. Car eux-seules ont le pouvoir d’emporter de nouveau notre esprit. Nous sommes en quête de mouvement et non de réflexions.
Posons-nous un instant et contemplons ce gâchis. Combien de temps perdus dans des chimères ? Ne nous abusons pas. Le travail n’en est pas la cause. Combien de fois nous sommes-nous surpris de travailler pour travailler ou pour nous donner de l’importance ? Combien de choses supposées importantes nous a vainement accaparés ! Le progrès est pourtant censé nous soulager ! Il ne faut pas se leurrer. Le travail appelle le travail. L’informatique amplifie notre capacité de travail et nos erreurs… Et il est beaucoup plus simple de courir au travail pour éviter de travailler véritablement, c’est-à-dire en profondeur. Nous avons souvent été témoins d’hommes plus soucieux de se perdre dans des réunions que de travailler sérieusement. D’autres nous ont étonnés par leurs activités débordantes. Entre deux réunions, ils ont encore le temps de se lancer dans des projets et de produire. Fantastique ! Pourtant quand le temps de l’émerveillement est passé, la réalité est toute autre. Que reste-t-il en effet de leur travail quand ils nous quittent ? Des souvenirs… Rien de solide...
Nous courrons car nous voulons bien courir ou plutôt fuir... Devons-nous vraiment partir en vacances chaque été ? Devons-nous toujours bouger le dimanche ? Pourquoi si peu de repos ? La peur de l’ennui ? Du silence ?... Et quand sonne le moment du repos, nous n’avons qu’une hâte : se distraire. Qu’est-ce se distraire si ce n’est s' oublier ?...
Et pendant que le monde égrène les secondes selon un rythme imperturbable, que devient notre vie intérieure et intellectuelle ?... Dieu compte aussi les secondes… 

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