" La pierre précieuse, voire de grand prix aux yeux de certains, qu'est l'émeraude, se voit insultée par un morceau de verre habilement truqué, s'il ne se rencontre personne qui soit capable de procéder à un examen et de démasquer la faute. Et lorsque de l'airain a été mêlé à l'argent, qui donc, s'il n'est connaisseur, pourra aisément le vérifier ? "(Saint Irénée, Contre les hérésies)


vendredi 24 mars 2017

L'œuvre du salut : enseignement par les paraboles

Luther nie avec énergie le caractère méritoire des œuvres, l’homme ne se sauvant que par la foi seule. L’homme ne serait qu’un serf auprès de Dieu. Mais la force de ses convictions et la vigueur de sa parole ne cachent pas les faiblesses de son raisonnement et de ses arguments. Luther défend aussi la Sainte Écriture comme étant la seule source de foi. Par conséquent, suivons son exemple. Quittons le domaine spéculatif et prenons comme seule référence les textes bibliques. Que nous dit-elle sur la valeur des œuvres ?


L’enseignement de la Sainte Écriture et de Notre Seigneur Jésus-Christ

La Sainte Écriture parle de deux facteurs : la grâce et la liberté. Elle affirme l’un et l’autre sans cependant définir comment elles se concilient.
Sans Dieu, rien n’est possible. L’homme a besoin de crier vers Dieu. « Convertissons-nous à vous, Seigneur, renouvelez nos jours comme au commencement. »(Lamentations de Jérémie, V, 21)
Mais inversement, Dieu exhorte l’homme à se tourner vers lui. « Revenez à moi, dit le Seigneur des armées, et je reviendrai à vous » (Zacharie, I, 3). « Celui qui a été éprouvé par l’or, et trouvé parfait, a celui-là sera une gloire éternelle ; à lui qui a pu transgresser et n’a pas transgressé ; faire le mal et ne l’a pas fait » (Ecclésiastique, XXXI, 9-10) mérite les bénédictions divines.

Comme dans l’Ancien Testament, Notre Seigneur Jésus-Christ parle souvent de salaire, de récompense ou de couronne. Au sermon de la montagne, Il promet que ceux qui seront insultés ou persécutés à cause de Lui devront être dans l’allégresse car leur « récompense est grande dans les cieux » (Matthieu, V, 12) Ils peuvent aussi être heureux « les pauvres en esprit […], ceux qui sont doux, […] ceux qui pleurent, […] ceux qui ont faim et soif de la justice, […] les pacifiques, […] ceux qui souffrent persécution pour la justice » (Matthieu, V, 3-11) car grandes seront leurs récompenses. Ils posséderont la terre. Ils seront consolés, rassasiés. Ils verront Dieu. Ils seront appelés enfants de Dieu ! Le royaume de Dieu sera à eux ! Or il n'y a pas de récompense sans œuvre méritoire.

À Saint Pierre qui se demande comment il peut obtenir le Royaume de Dieu, Notre Seigneur Jésus-Christ répond. Il faut se renoncer. « Et quiconque aura quitté sa maison, ou ses frères, ou ses sœurs, ou son père, ou sa mère, ou sa femme, ou ses enfants, ou ses champs à cause de mon nom, il recevra le centuple et possédera la vie éternelle. » (Matthieu, XIX, 29)

Lorsqu’Il viendra dans sa gloire, Notre Seigneur Jésus-Christ promet aussi à ceux qui seront à sa droite qu’ils prendront possession du royaume qui leur a été préparé dès l’origine du monde car ils Lui ont donné à manger lorsqu’Il avait faim, à boire lorsqu’Il avait soif, L’ont accueilli, Lui qui était étranger, L’ont vêtu alors qu’Il était nu, etc. Mais les justes surpris diront qu’ils n’ont rien fait de tout cela. « En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Matthieu, XXV, 40) Et à ceux qui ne l’ont pas fait, il promet le feu éternel, l’éternel supplice.

Certes, Moïse nous apprend que Dieu a endurci le cœur du Pharaon mais il affirme fortement la liberté de l’homme dans son choix entre le bien et le mal. « J’invoque à témoin aujourd’hui le ciel et la terre, que je vous ai proposé la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis donc la vie, et toi et ta postérité, que tu aimes le Seigneur ton Dieu, que tu obéisses à sa voix et que tu t’attaches à lui » (Deutéronome, XXX, 19-20).

Notre Seigneur Jésus-Christ nous enseigne aussi que le salut dépend de la grâce. C’est Dieu qui a voulu rassembler les brebis égarées. « Sans moi vous ne pouvez rien faire » (Jean, XV, 5), nous dit-Il. Et nul ne vient à Lui s’il n’est pas envoyé par Dieu le Père. « Je suis venu moi-même au nom de mon Père » (Jean, V, 43). Mais aussitôt, il rajoute « et vous ne me recevez pas ». « Il est venu chez les siens, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné le pouvoir d’être faits enfants de Dieu » (Jean, I, 11-12).

Comment après de telles affirmations, si claires pourtant, pouvons-nous encore croire à la doctrine de Luther ? Certes, la Sainte Écriture ne donne aucune théorie sur les relations entre la grâce et le libre-arbitre. Elle enseigne d’une manière pratique et non spéculative. Cependant, Notre Seigneur Jésus-Christ nous éclaire sur leur collaboration au travers de magnifiques paraboles, celle du denier des travailleurs de la vigne[1] et la parabole des talents.

La parabole du denier des travailleurs de la vigne (Matthieu, XIX)

Saint Pierre demande à Notre Seigneur Jésus-Christ quand ses disciples entreront dans le royaume de Dieu. « Voici, dit-il, que nous avons tout quitté pour vous suivre ; qu’avons-nous donc à attendre ? » Il lui répond que la vie éternelle est pour celui qui aura tout quitté pour Le servir. Il faut se dépouiller pour Lui, nous dit-Il. De même, pour trouver son âme, il faut la perdre. Notre Seigneur Jésus-Christ rajoute : « Et plusieurs qui sont les premiers seront les derniers, et plusieurs qui sont les derniers seront les premiers. » (Matthieu, XIX, 39) Pour illustrer cette étrange conclusion, Notre Seigneur Jésus-Christ raconte le récit du denier des travailleurs de la vigne…

Un maître de maison sort dès le matin afin d’engager des ouvriers pour sa vigne. Ce ne sont pas les ouvriers qui viennent chercher du travail mais bien le maître de maison qui part à leur recherche pour les embaucher. À la porte de la ville ou sur les places, il rencontre des ouvriers et après avoir négocié leur salaire à un denier, il les envoie à sa vigne. À la troisième heure, c’est-à-dire vers neuf heures, sur la même place, il en trouve d’autres qui ne font rien. « Allez aussi à ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera juste » (Matthieu, XX, 4), et ils y vont. Il n’est plus question de contrat pour le salaire. La scène se reproduit à la sixième puis à la neuvième heure. Le maître de maison continue son chemin. Il prend soin de sa vigne, cherchant à recruter des ouvriers nouveaux. À la onzième heure, c’est-à-dire une heure avant la fin de la journée, il en trouve encore des hommes oisifs et les gourmande familièrement. « Pourquoi vous tenez-vous ici toute la journée sans rien faire ? » (Matthieu, XX, 5) Personne ne les a encore loués. Il les envoie alors à la vigne rejoindre les autres.

Remarquons qu’aux ouvriers de la troisième heure, le maître ne leur indique pas le prix de la journée de travail. Il précise qu’il donnera « ce qui sera juste » (Matthieu, XX, 4). Pour les derniers ouvriers, rien n’est précisé. Seuls les premiers connaissent le montant de leur salaire.

Le soir vient. Et comme le demande la loi du Deutéronome, d’après laquelle le salaire de l’ouvrier mercenaire doit être payé avant la nuit, le maître de maison donne l’ordre à son intendant de rassembler les ouvriers et de leur distribuer leur salaire dans l’ordre inverse de leur arrivée au travail. Ainsi chacun pourra constater ce que les autres reçoivent. Les ouvriers de la onzième heure se présentent et reçoivent chacun un denier. Les autres viennent, espérant bien recevoir davantage puisqu’ils ont travaillé plus longtemps. Ils tendent donc la main. Ils reçoivent pourtant un denier. Ils élèvent alors des plaintes contre le maître de maison. « Ces derniers n’ont travaillé qu’une heure, et tu leur donnes autant qu’à nous, qui avons porté le poids du jour et de la chaleur. » (Matthieu, XX, 12)

Sans s’irriter de leurs murmures, à l’un d’entre eux, le maître rappelle les clauses du contrat passé avec les premiers ouvriers. « Mon ami, dit-il à l’un des ouvriers mécontents, je ne te fais point d’injustice : n’es-tu pas convenu avec moi d’un denier ? Prends ce qui te revient, et va-t-en. Pour moi, je veux donner à ce dernier autant qu’à toi. » (Matthieu, XX, 13-14) Il revendique sa liberté de faire de son bien ce que bon lui semble. « Pour moi, je veux donner à ce dernier autant qu’à toi. Ne m’est-il pas permis de faire de mon bien ce que je veux ? » (Matthieu, XX, 14-15) N’a-t-il pas le droit d’être généreux et de ne pas écouter leur jalousie ? « Et ton œil sera-t-il mauvais parce que je suis bon ? » (Matthieu, XX, 15) La bonté du maître de maison leur donne-t-il des droits sur lui ?

Notre Seigneur Jésus-Christ conclue la parabole en reprenant la réponse qu’il a faite à Saint Pierre : « les derniers seront les premiers, et les premiers, les derniers, car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.[2] » (Matthieu, XX, 16) Il lui fait donc entendre que Saint Pierre comme les chrétiens ne peuvent réclamer la vie éternelle à titre de justice. Dieu la donne par pure bonté et miséricorde.

Interprétons la parabole. Le chef de famille est la figure de Dieu. La vigne, c’est l’Église. Les lieux où il rencontre les ouvriers, c’est le monde.


La première initiative revient à Dieu



Notons encore que c’est le maître qui le premier appelle les hommes à venir travailler pour sa vigne en échange d’un salaire. Il les appelle pendant toute la journée, du matin jusqu’au soir, c’est-à-dire jusqu’à l’heure du salaire. L’initiative appartient à Dieu seul. Cela nous renvoie à une autre parabole, celui des convives qui s’excusent.

« Un homme fit un grand souper, et y appela beaucoup de monde. »(Luc, XIV, 16) Le repas étant prêt, il envoie son serviteur quérir ses invités mais tous trouvent de bonnes excuses pour rejeter l’invitation. « Alors le père de famille irrité dit à son serviteur : va vite dans les places et les rues de la ville, et amène ici les pauvres et les estropiés, les aveugles et les boiteux. »(Luc, XIV, 21) Dieu va chercher les invités aux noces. Le Verbe est venu et Il n’a pas été reçu par les siens.

Mais faut-il encore que les hommes répondent à son appel ! Oisifs et inactifs, ils peuvent le rester, négligeant l’appel divin. Le maître de maison n’oblige pas. Dieu n’impose rien. Il ne force pas les ouvriers à travailler dans la vigne. Il propose et promet un juste salaire. L’homme est donc libre de répondre à l’initiative de Dieu ou de la refuser. Et Notre Seigneur Jésus-Christ est bien sévère envers ceux qui demeurent inactifs. Sur le chemin de la vie, il n’y a pas de place pour l’oisiveté. Il n’est jamais trop tard pour Le servir, quelle que soit l’heure de la journée.

De la justice et de la bienveillance de Dieu

Dans la parabole, nous voyons clairement les relations qui existent entre Dieu et les hommes. Ce ne sont pas des rapports d’un maître tout puissant à l’égard de vils serfs mais bien d’un chef de famille consciencieux avec des ouvriers parfaitement libres. C’est Lui qui fait le premier pas comme c’est encore Lui qui donne le salaire en toute liberté. Si l’homme ne répond pas à son appel, il ne recevra aucun salaire. Et s’il répond et travaille à sa vigne, c’est encore Lui qui le juge selon l’alliance qu’Il a conclue avec lui. Qu’ils soient de la première ou de la dernière heure, les ouvriers de Dieu obtiendront le bonheur éternel. Tous seront égaux, les premiers comme s’ils étaient les derniers, et les derniers comme s’ils étaient les premiers. La vie éternelle sera la même pour tous. « Car ce qui est éternel ne durera ni plus longtemps pour l’un, ni moins longtemps pour l’autre ; ce qui n’a pas de fin n’en aura ni pour moi ni pour toi. »[3]

Selon certains commentateurs, notamment Saint Jérôme, les heures de la journée représentent les différentes phases de la vie où l’appel de Dieu attache les hommes à son service. Qu’ils répondent à son appel dès son enfance ou en fin de vie, ils recevront la même récompense, quoique avec des degrés dans leur gloire et leur félicité.

La récompense ne dépend donc pas du temps passé au service de Dieu. La durée du travail fourni et ses difficultés ne sont pas les seuls facteurs à influer sur la grandeur de la récompense accordée dans le Royaume de Dieu. Cela dépend en premier lieu de la libre décision et de la bienveillance de Dieu. Il mesure la grâce comme Il l’entend sans cependant léser la justice. Notre Seigneur Jésus-Christ s’oppose donc aux opinions des Justes eux-mêmes, qui pourraient accorder trop d’importance aux efforts humains et pas assez à la souveraine indépendance de Dieu. Cela nous ramène à l’attitude de Saint Pierre : « voici, dit-il, que nous avons tout quitté pour vous suivre ; qu’avons-nous donc à attendre ? »

Saint Jérôme attribue alors cette parabole aux justes qui ont été appelés de péché à la justice à des âges différents de la vie, fournissant des sommes variables de bonnes œuvres et d’actes méritoires. Que les Justes prennent donc garde de se conduire de façon à mériter l’élection définitive par leurs seuls efforts. Qu’ils n’oublient pas non plus qu’il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus, c’est-à-dire peu de persévérants.

L’interprétation historique

Des Pères de l’Église voient dans la parabole l’histoire de l’œuvre de la Rédemption. Ils ont vu dans les ouvriers des premières heures les Juifs qui s’indignent du traitement fait par Dieu aux Gentils qui arrivent en fin de journée. Ce sont aussi les Juifs qui, les premiers, ont reçu l’Évangile. Notre Seigneur Jésus-Christ demande en effet à ses Apôtres de s’adresser d’abord aux brebis égarées. « N’allez point, leur dit-il, vers les Gentils, et n’entrez point dans les villes des Samaritains ; allez plutôt aux brebis perdues de la maison d’Israël. » (Matthieu, X, 5-6) Mais rejetés par les Juifs et guidés par le Saint Esprit, les Apôtres se sont alors tournés vers les Gentils. Les Pères de l’Église ont ainsi vu dans les ouvriers de la onzième heure les Chrétiens. Eux-aussi sont appelés à la vigne. Alors pour éviter toute réclamation des Juifs, Notre Seigneur Jésus-Christ veut leur montrer qu’ils ne peuvent réclamer plus de bienfaits en prétextant leurs privilèges et leur ancienneté. Il annonce même qu’ils seront supplantés par les derniers, c’est-à-dire par les Gentils ou les Chrétiens.

La libéralité souveraine de Dieu

Le jour du jugement, c’est-à-dire le jour où chacun recevra son salaire, Dieu demeure donc libre de verser la mesure de sa bonté en faveur de ceux qui ont accepté de travailler dans sa vigne. Ses bontés ne nous donnent aucun droit sur Lui. Le don n’est pas un dû. Dieu reste Dieu. Ce n’est pas parce qu’Il donne que nous devons juger la mesure de son don. Tous, juifs ou chrétiens, les premiers comme les derniers dans l’ordre chronologique, et quelque soit le moment où le pécheur devient juste, chacun recevra sa récompense selon la libéralité souveraine de Dieu.

Certains pourront être choqués par cette apparente injustice mais comme le dit souvent Notre Seigneur Jésus-Christ et la Sainte Écriture, notre jugement n’est pas celui de Dieu. Et est-ce vraiment justice de réclamer plus ? Notre Seigneur Jésus-Christ dénonce la jalousie et l’envie qui se cachent derrière les réclamations de certains ouvriers de la première heure. La bonté divine, qui peut en effet la juger ? Elle est égale pour tous. Elle est au-dessus des convoitises et des pauvres jugements humains. Elle rit de la fourberie de ceux qui veulent abuser du don de Dieu. Elle démasque les bons esprits qui sous prétexte d’égalité veulent en fait recevoir plus. Au lieu de murmurer contre Lui, il serait plus juste de se réjouir de ses libéralités !

La parabole des talents

Dans la parabole des talents, Notre Seigneur Jésus-Christ donne une nouvelle leçon sur le jugement. Avant de partir en voyage, un homme confie à ses serviteurs ses biens selon une sage répartition. « À l’un il donna cinq talents, à un autre deux, à un autre un, selon la capacité de chacun » (Matthieu, XXV, 15). Celui qui a reçu cinq talents les utilise efficacement puisqu’il en gagne cinq autres. Celui qui a reçu deux talents double aussi sa mise. Mais le troisième se borne à enterrer le denier qu’il a reçu.

Le maître revient et exige des comptes. Au serviteur qui a reçu cinq deniers et en a gagné cinq autres, il le félicite. « C’est bien, Seigneur, serviteur bon et fidèle, parce que tu as été fidèle en peu de choses, je t’établirai sur beaucoup : entre dans la joie de ton maître. » (Matthieu, XXV, 23) Sa joie est identique lorsque le second serviteur lui montre ce qu’il a gagné. Il est aussi félicité. Les deux serviteurs voient ainsi leur joie dans celle de leur maître. Ils sont ainsi récompensés de leur bonne gestion.

Tout change avec le troisième serviteur. Il ne rend à son maître que le denier qu’il a reçu. Il donne comme prétexte sa crainte de le déplaire et son injustice. « Seigneur, je savais que vous êtes un homme dur, qui moissonnez où vous n’avez pas moissonné, et recueillez où vous n’avez pas vanné. J’ai eu peur et j’ai été cacher votre talent dans la terre. » (Matthieu, XXV, 24-25) Certes, il n’a pas volé son maître, mais il ne l’a pas aimé non plus. Le jugement du maître est clair. Ce n’est qu’un « serviteur méchant et paresseux » (Matthieu, XXV, 26). Il aurait dû porter le denier au banquier afin qu’il le fructifie. « Et ce serviteur inutile », il demande de le jeter « dans les ténèbres extérieurs : c’est là qu’il y aura des pleurs et des grincements de dents. » (Matthieu, XXV, 30) Le maître justifie sa condamnation. «  Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance ; mais à celui qui n’a pas, on ôtera même ce qu’il a. » (Matthieu, XXV, 29)

Bien user des dons de Dieu

Les deniers représentent les dons de la nature et de la grâce, tout ce que Dieu a donné à l’homme. Un jour, Dieu viendra juger de leur utilisation. Certes la répartition des dons est inégale à l’origine. Certains en ont plus que d’autres. Qu’importe ! À chacun de tirer le meilleur parti des « talents » qu’il a reçus. Celui qui n’a eu que deux deniers et les a doublés a reçu le même jugement que celui qui en a reçu cinq. Ceux qui les ont fructifiés recevront une récompense en abondance. Ceux qui les ont négligés seront punis. Laisser improductifs les dons de Dieu, c’est finalement les perdre et se perdre soi-même. L’âme inactive est condamnée. Le troisième serviteur représente donc celui qui détient les biens de Dieu et les laisse sans fruit. Il ne sert donc à rien de les avoir détenus. Il n’y gagne qu’un surcroît de responsabilité devant Dieu. Mieux vaudrait n’avoir rien reçu ! Il est donc dégradé et dépouillé puis il est expulsé et livré à la justice.

Dans la parabole des talents, Notre Seigneur Jésus-Christ nous demande de fructifier les dons que Dieu nous a donnés pour la plus grande gloire de Dieu. Notre bonheur réside en effet dans la joie de Dieu et non dans la nôtre. Nous usons des biens que nous avons reçus pour la seule joie de Dieu. Au jour du jugement, Il viendra évaluer notre travail. Nous pourrions alors obtenir plus de grâce.

Même bonheur éternel mais selon la grandeur des mérites

Dans la parabole du denier des travailleurs de la vigne, Notre Seigneur Jésus-Christ rappelle néanmoins que la récompense des Justes ne se fera pas uniquement selon leurs œuvres. Tous les justes obtiendront le même bonheur éternel. Cependant, comme dans le cas des talents, chacun le recevra selon la grandeur de son mérite. C’est une récompense dite surabondante. « Donnez, et il vous sera donné ; on versera dans votre sein une bonne mesure, pressée, secouée et débordante, car on se servira de vous de la même mesure avec laquelle vous aurez mesuré les autres. » (Luc, VI, 38)

Dans une autre paraboles que rapporte Saint Luc (Luc, XIX, 11-27), les serviteurs reçoivent des mines et au retour de leur maître sont récompensés en proportion de leurs efforts. L’enseignement est aussi clair…

Conclusion

Notre Seigneur Jésus-Christ nous enseigne clairement qu’à la fin des temps, au moment du jugement, où chacun recevra son salaire, Dieu récompensera les bons et les mauvais. La récompense provient de Dieu. Sa bonté se manifestera sans que la justice soit lésée. Mais l’homme a une véritable part de mérite. Néanmoins cette part, il ne faut pas l’exagérer au point de croire que le salut ne proviendrait que des efforts fournis. Ce serait une grave erreur. Notre Seigneur Jésus-Christ rappelle que Dieu est seul souverain. En outre, tous les justes recevront substantiellement la même chose mais de manière inégale et surabondante. Ceux qui verront leur joie dans celle de Dieu, c’est-à-dire se dépouilleront pour Lui, entreront dans sa joie selon une certaine mesure. 





Notes et références
[1] Dit encore parabole des ouvriers de la dernière heure.
[2] Les paroles « car beaucoup sont appelés, mais peu sont élus » ne sont pas dans certains codices.
[3] Saint Augustin, Sermon 87.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire