Jean XXIII Discours d’ouverture du Concile. |
La constitution dogmatique relative à l’Église intitulée Lumen Gentium, promulguée le 21 novembre 1964, est un des textes essentiels du concile. Il est un des piliers sur lesquels s’appuient les mouvements œcuméniques. Elle définit la doctrine de l’Église. Par conséquent, elle traite de ses membres et de tous ceux qui n’y font pas partie. C’est donc un texte à connaître.
Le
concile, effort vers l’unité des Chrétiens
Dans
le discours d’ouverture du concile, Jean XXIII rappelle la nécessité urgente de
l’unité des Chrétiens. Depuis plus de deux mille ans, l’homme est toujours confronté
au même problème, c’est-à-dire à un choix capital. Comme Notre Seigneur
Jésus-Christ est au centre de l’histoire et de la vie, il doit choisir : soit
il est avec Lui et avec son Église, soit il vit sans Lui, agit contre Lui et
demeure délibérément hors de l’Église. Dans le premier cas, l’homme jouit de la
lumière, de la bonté, de l’ordre et de la paix alors que dans le second, il
connaît la confusion et la souffrance. L’union avec le Christ et son Église est
donc un élément fondamental pour les âmes et leur salut. La volonté de Dieu est
que l’homme puisse parvenir à cette union afin d’obtenir les biens célestes. Mais
de nombreux chrétiens sont séparés de l’Église. C’est alors le devoir de
l’Église catholique de « faire tous
ses efforts pour que s’accomplisse cette unité que Jésus-Christ, à l’approche
de son sacrifice, a demandée à son père dans une ardente prière » [3].
C’est
pourquoi le Pape Jean XXIII demande au concile d’œuvrer pour favoriser l’unité
des Chrétiens. Il considère que le temps est propice à une telle œuvre. Est en effet
forte « l’aspiration des chrétiens
séparés du Siège apostolique à être réunis avec nous ». Il constate
« les efforts accrus et courageux de
beaucoup pour réaliser cette unité visible de tous les chrétiens qui répondent
dignement au désir du divin Sauveur ». Il demande alors au concile de
clarifier la doctrine et de se montrer exemplaire pour répondre à cette aspiration et la rendre encore plus grande.
Paul VI, successeur de Jean XXIII, poursuit l’œuvre du concile. Ouvrant
la deuxième session, il renouvelle les intentions de son prédécesseur. Il rappelle
en particulier les trois principes fondamentaux sur la base desquels l'Unité des Chrétiens peut
se réaliser. La foi est « principe
d’unité, non de divergence ou de séparation ». Notre foi ne doit pas
être un motif de polémique. Le deuxième principe est le respect « des richesses authentiques de vérité
et de vie spirituelle que
possèdent ces frères séparés ». Enfin, la confiance en Dieu doit
animer les âmes. Trois principes en effet à rappeler pour comprendre le
mouvement œcuménique…
La
doctrine de l’Église selon Lumen Gentium
Conformément
aux vœux du Pape Jean XXIII, la constitution Lumen Gentium a pour but
de « faire connaître avec plus de
précision à ses fidèles et au monde entier la nature et la mission universelle »
de l’Église en « suivant de près la
doctrine des précédents conciles »(1).
L’union
se réalise par le baptême et par le sacrement de communion. Par le premier
sacrement, l’homme est rendu conforme au Christ. Par le second, il participe au
Corps de Notre Seigneur Jésus-Christ comme membre. Par ces deux sacrements, les
fidèles forment un seul corps dont le Chef est le Christ, un unique Corps
habité par un seul Esprit qui l’unifie, le vivifie et le meut comme le principe
vital dans le corps humain. L’Église est comblée des dons de Dieu « en vue de notre salut »(7).
La
constitution rappelle également la nature de l’Église, à la fois visible et
spirituelle. Elle distingue en effet l’organisme visible, c’est-à-dire la
« société constituée d’organes
hiérarchique », et le « Corps
mystique du Christ » ou encore « l’Église terrestre » et « l’Église déjà pourvue des biens célestes »(8). Elle rappelle
que « l’organisme visible »
est le moyen par lequel le Christ « répand
sur tous la vérité et la grâce »(8). Reprenant l’analogie du mystère du
Verbe incarné, il « sert à l’Esprit
du Christ qui le vivifie en vue de la croissance du Corps. »(7)
De
nature visible et spirituelle, l’Église est une et unique. La constitution
rappelle les notes qui permettent de la reconnaître, c’est-à-dire son unité, sa
sainteté, sa catholicité et son apostolicité, sans cependant réellement les
définir. Elle rappelle aussi que Notre Seigneur Jésus-Christ l’a remise à Saint
Pierre et a demandé aux Apôtres de répandre et de guider pour qu’elle demeure
« colonne et soutien de la vérité »
(I
Tim., III, 15).
Nous
remarquons que la constitution ne reprend pas la doctrine de l’Église
militante, souffrante et triomphante, permettant de distinguer ses différentes
"états" selon la sanctification des fidèles. Certes, plus loin dans le texte,
elle revient sur cette distinction sans cependant utiliser les termes. « Certains de ses disciples cheminent sur
terre tandis que d’autres, après cette vie, subissent la purification et que
d’autres enfin, jouissant de la gloire, contemplent clairement Dieu »(49).
Il rappelle aussi la doctrine de la communion des Saints sans la nommer non
plus.
Quelle
est cette Église ?
Cependant,
la constitution précise que « cette
Église, constituée et organisée en ce monde comme une communauté, subsiste dans
l’Église catholique »(8). Ce terme « subsiste » nous interpelle. Signifierait-il que l’Église et
l’Église catholique ne sont pas équivalentes ? Il semble nous faire croire
que la première est incluse dans l’autre sans se confondre.Nous y reviendrons plus amplement dans un futur article...
La
constitution précise que l’Église catholique est « gouvernée par le successeur de Pierre et les
évêques en communion avec lui ». Elle est dite aussi Sainte Église
catholique apostolique.
Cette
précision soulève alors implicitement la question du pluralisme des églises et
de leur efficacité dans l'œuvre du salut. En effet, la constitution rajoute aussitôt que « hors de cet ensemble »,
c’est-à-dire de l’Église catholique, « on
trouve plusieurs éléments de sanctification et de vérité qui, en tant que dons
propres à l’Église du Christ, invitent à l’unité catholique. »(8) Les
autres églises et communautés possèdent donc des biens de l’Église…
Ce
paragraphe est essentiel. Pourtant, en dépit de son importance, il est effroyablement
court. Il définit l’objectif réel de la constitution, c'est-à-dire les rôles, les missions et la place des différentes églises chrétiennes.
Il soulignerait surtout une distinction capitale. L’Église catholique ne serait pas
l’Église puisque l’Église « subsiste »
dans l’Église catholique.
Après
avoir affirmé cette doctrine, sans aucune justification, la constitution
revient sur l’Église et plus précisément sur son rôle et son mode d’action.
Elle doit poursuivre l’œuvre de la
Rédemption dans la voie de la pauvreté et de la persécution pour communiquer
aux hommes les fruits du salut, prêchant, « même par son exemple, l’humilité et l’abnégation »(7),
soulageant la détresse et la misère, servant le Christ dans les pauvres. Ces
missions nécessitent des « ressources
humaines » et légitiment donc l’aspect visible et corporel de l’Église.
Si
elle doit suivre la voie qu’a tracée Notre Seigneur Jésus-Christ, l’Église se
distingue de Lui puisqu’elle « renferme
en son sein les pécheurs ». La constitution précise notamment que tout
en étant sainte, elle « doit
toujours être purifiée »(7) et donc qu’elle « recherche sans cesse la pénitence et le
renouvellement. »(7) Ce paragraphe peut légitimement nous surprendre.
Comment l’Église peut-elle être sainte et être purifiée ? Précisons que la
constitution traite de l’Église que Notre Seigneur Jésus-Christ a fondée,
c’est-à-dire celle qui subsiste dans l’Église catholique.
Le
peuple de Dieu
La
constitution parle de « peuple
messianique », qui a pour chef le Christ et pour « terme dans le Royaume de Dieu, inauguré sur terre par Dieu
Lui-même »(9). S’il ne comprend pas tous les hommes, « il n’en subsiste pas moins au sein de toute
l’humanité comme un germe très fort d’unité, d’espérance et de salut. »(9)
À
quoi sert ce peuple messianique ? « Établi
par le Christ en communion de vie, de charité et de vérité, il lui sert d’instrument pour la rédemption
de tous et il est envoyé au monde entier comme lumière du monde et sel de la
terre. »(9). Il œuvre pour la Rédemption au service de Notre Seigneur
Jésus-Christ. Il représente d’abord le peuple israélite puis le peuple
chrétien. Il semble que de ce peuple messianique est sorti l’Église. « Dieu a convoqué la communauté de ceux qui
regardent avec foi Jésus, auteur du salut, principe d’unité et de paix, et il
en a fait l’Église. »(9)
Cependant,
les expressions « regardent avec foi
Jésus » ou « ont foi dans
le Christ », que signifient-elles ? Plus loin dans le texte, la
constitution distingue les fidèles catholiques et « les autres qui ont foi dans le Christ ». Elles
désignent, semble-t-il, les « chrétiens
séparés ». Le Peuple de Dieu comprendrait donc aujourd’hui tous les
chrétiens.
Le
Peuple de Dieu a pour vocation d’être universel tout en étant un. « Tous les hommes sont appelés à former le
nouveau peuple de Dieu. En conséquence, ce peuple doit, sans cesser d’être un
et unique, s’étendre au monde entier et en tous les siècles afin que
s’accomplisse le dessein de Dieu »(13). Comme pour l’unité de l’Église, la
constitution précise qu’« en se
nourrissant du corps du Christ dans la sainte communion », les fidèles
« manifestent concrètement l’unité
du Peuple de Dieu, qui, dans ce sublime sacrement, est convenablement signifiée
et merveilleusement réalisée. » (11) Le caractère d’universalité est
un signe distinctif du Peuple de Dieu. Les fidèles apportent aux autres et à
l’Église leurs dons.
La
constitution insiste sur la diversité des membres du Peuple de Dieu. Ils
viennent de toutes les nations. Ils sont aussi au sein de l’Église une
diversité dans les charges et dans l’état de vie. Il y a aussi des Églises
particulières légitimes différentes, « sans
préjudice du primat de la Chaire de Pierre » (13). Cette diversité ne nuit
pas à l’unité mais la sert.
L’Église,
nécessaire au salut
Le
Concile de Vatican II précise qu’« en
s’appuyant sur la Sainte Écriture et la Tradition »(14), l’Église est
nécessaire au salut. La nécessité de l’Église se justifie par la nécessité de
la foi et celle du baptême comme l’a expressément enseigné Notre Seigneur
Jésus-Christ. Et l’homme s’introduit dans l’Église par le baptême. « Aussi ne pourraient-ils pas être sauvés,
ceux qui, sans ignorer que Dieu, par Jésus-Christ, a établi l’Église catholique
comme nécessaire, refuseraient cependant d’y entrer et de demeurer en elle. »(14)
Remarquons que le texte ne parle plus d’Église mais d’Église catholique.
La constitution précise les conditions pour que les fidèles soient « pleinement incorporés à la communauté ecclésiale »(14). Ils doivent accepter « toute l’économie du Christ et tous les moyens de salut établis en elles et sont, par les liens de la profession de foi, des sacrements, de la direction et de la communion ecclésiastiques, unis dans ce même ensemble visible de l’Église, avec le Christ qui la régit par le souverain pontife et les évêques. »(14) Cependant, si l’homme est incorporé à l’Église mais ne persévère pas dans la charité, il n’est pas sauvé. Il n’appartient qu’au « corps » de l’Église et pas de « cœur ». Ainsi l’incorporation à l’Église n’est pas gage de salut.
Et
le salut pour les autres ?
Selon la constitution, ceux qui ne sont pas incorporés à l’Église tout en
étant baptisés et portent le nom de chrétiens sont cependant unis à l’Église.
Le texte parle désormais de ceux qui ne professent pas intégralement la foi ou
ne conservent pas l’unité de la communion avec le Pape. Il cite les différents
points communs entre les catholiques et les autres : vénération de la
Sainte Écriture comme norme de foi et de vie, zèle religieux, croyance en Dieu
le Père et dans le Fils, baptême qui les unit au Christ, martyre, etc. « L’Esprit agit également en eux par ses dons
et ses grâces, avec sa puissance sanctificatrice » (15).
Toujours selon Lumen Gentium, les
non-chrétiens, les croyants comme les Juifs et les Musulmans sont aussi
ordonnés au Peuple de Dieu. Le texte n’oublie pas non plus ceux qui cherchent
le Dieu inconnu et ceux qui, « sans
faute de leur part, ignorent l’Évangile du Christ et son Église »(16)
tout en étant en quête de Dieu. « La
divine Providence ne refuse pas les secours nécessaires au salut à ceux qui ne
sont pas encore parvenus, sans qu’il y ait de leur faute, à la connaissance
claire de Dieu et s’efforcent, avec l’aide de la grâce divine, de mener une vie
droite. »(16) Cependant, bien souvent, certains se perdent par le
Malin quand d’autres vivent sans Dieu en ce monde. D’où la nécessité pour
l’Église de développer les missions.
L’Église
a reçu des Apôtres « le mandat
solennel d’annoncer la vérité qui sauve »(17), eux-mêmes ayant été
envoyés par Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est par la prédication que l’Église
peut se répandre.
L’unité
de gouvernement
Pierre-Paul Rubens
Le Christ remettant les clefs à saint Pierre
|
« Le collège ou corps épiscopal n’a cependant
d’autorité que si on le conçoit comme uni à son chef le pontife romain,
successeur de Pierre, lequel conserve intégralement sa primauté sur tous, tant
pasteurs que fidèles »(22). Le corps épiscopal manifeste en fait l’universalité
du peuple de Dieu quand la primauté pontificale reflète l’unité de l’Église. Le
Pape est bien « le fondement de
l’unité tant des évêques que de la masse des fidèles » quand l’évêque
est « le principe visible et le
fondement de l’unité de son Église particulière. »(23) Lorsque le
texte parle de communion, il désigne une communion hiérarchique comme le
souligne la note ajoutée à la constitution,
La
constitution Lumen Gentium en vient ensuite à traiter de la nature de
l’Église particulière et de ses relations avec l’Église. Elle est formée à
l’image de l’Église et l’Église catholique est constituée de ces Églises
particulières tout en étant une et unique.
Manque
de lumière
Que
pouvons-nous retenir de la constitution Lumen Gentium ? Notons d’abord qu’elle
rappelle rapidement certains éléments traditionnels de l’enseignement de l’Église, sans
souvent les citer avec les termes classiques. Cette pratique traduit-elle une
volonté de ne pas utiliser des termes qui pourraient « choquer » les « frères séparés » comme le désire le
Pape Paul VI ? Nous sommes surtout surpris par la pauvreté du texte. Si elle
a pour objectif de faire connaître clairement l’Église, la constitution n’est
guère satisfaisante. Pourquoi ne précise-t-elle pas davantage ce que sont les
notes de l’Église afin de la reconnaître ? Pourquoi les fondements de
l’unité de l’Église ne sont-ils pas rappelés avec clarté selon
l’enseignement traditionnel ? Serait-ce cela le mouvement œcuménique ?
La
constitution affirme aussi des doctrines surprenantes par leur nouveauté.
L’idée selon laquelle l’Église subsiste dans l’Église catholique, les notions
de « Peuple de Dieu » et de
collège apparaissent pour la première fois dans un texte qui doit faire
autorité dans l’Église. Ce sont des idées et des termes nouveaux. Pourtant, ils
ne sont guère expliqués. La nouveauté provient aussi du style d’écriture employé.
Contrairement aux textes des précédents conciles, la constitution manque
clairement de clarté et de précision, laissant place à de nombreuses questions
et interrogations. Ce texte se distingue fortement des textes des conciles
précédents qui manifestaient une rigueur et une précision, notamment dans les
définitions et les termes employés. Est-ce cela l’éclaircissement de la
doctrine que demandait Jean XXIII pour répondre à l’aspiration des « chrétiens séparés » ? Nous
sommes plutôt dans un texte qui évite que la foi les heurte…
L’incertitude
et la multiplicité des termes ou concepts employés nous étonnent et nous
inquiètent. Le texte utilise les termes d’Église et d’Église catholique.
Parfois, la constitution laisse clairement entendre que l’Église et l’Église
catholique sont différentes mais laisse aussi supposer que les deux se confondent
finalement. Que de difficultés pour savoir ce qu’est en fait l’Église ! Et
qu’est-ce que le peuple de Dieu par rapport à l’Église ? Ces interrogations
viennent de l’absence de définitions claires et précise...
Nous
retrouvons aussi cette imprécision dans le terme d’« unité », qui est employé dans des sens différents. L’unité des
Chrétiens dans l’Église au sens traditionnel n’est pas en effet la même chose
que l’unité des « chrétiens séparés »
entendue plutôt au sens de lien. Comment en effet peuvent-ils être unis à
l’Église sans y être incorporés ? Certes comme la constitution le
rappelle, le chrétien peut être incorporé à l’Église sans cependant y être unis
et donc être sauvés mais l’unité exige nécessairement l’appartenance, condition
nécessaire mais insuffisante. En lisant attentivement le texte, nous pouvons en
effet comprendre que les « chrétiens
séparés » ont des éléments communs avec les catholiques, éléments qui
finalement les lient à l’Église catholique. Pouvons-nous vraiment parler
d’unité ? Rappelons aussi que, dans la constitution, les croyants non
chrétiens sont ordonnés à l’Église. Ainsi avons-nous trois types de relations
entre le croyant sauvé et l’Église : les chrétiens, les « frères séparés » et les autres sont
respectivement unis ou liés ou ordonnés
à l’Église …
De
quelle Église ?
Des
expressions semblent enfin évoquer des doctrines surprenantes par les
contradictions qu’elles renferment. Quelle est cette Église sainte qui doit
être néanmoins purifiée ? Comment après avoir affirmé qu’hors de l’Église,
le salut est impossible, comme l’a rappelé Jean XXIII dans le discours d'ouverture, pour ensuite affirmer avec la même certitude qu’hors de l’Église, il
existe des éléments de sanctification. Certes, la constitution semble préciser
que l’Église catholique les possède en plénitude mais cela n’enlève pas la
contradiction. Que de doutes et d’inquiétude !
Nous
constatons aussi que les citations utilisées dans le texte traitent de l’Église
dans un sens qui n’est peut-être pas celui de leur auteur. Utiliser Saint
Cyprien pour parler d’une Église différente de l’Église catholique mériterait de
plus amples justifications.
Une
désillusion ?
Enfin,
chose encore surprenante, la constitution souligne l’unité de gouvernement
comme fondement de l’unité de l’Église mais semble oublier l’autre pilier
qu’est l’unité de la foi.
Hors
de l’Église catholique, il peut certes exister des vérités mais cela ne
constitue pas la foi qui se définit par une profession, c’est-à-dire par
l’adhésion à un ensemble de vérités clairement prononcées. Si certains
partagent quelques vérités de croyance, cela ne signifie aucunement qu’ils sont
unis dans cette croyance. Ils ont certes des points communs mais aussi des
divergences.
Or
dans la déclaration d’ouverture, Paul VI ne souhaite pas que la foi soit
principe de divergences et de séparation. Mais justement, la foi divise
nécessairement car elle nécessite définition et profession et par conséquent
distinction et séparation. C’est pourquoi les mouvements œcuméniques ne
progressent guère car le véritable problème n’est pas ce qui rapproche les « chrétiens séparés » mais justement
ce qui les sépare. Lorsqu’il n’y a plus de séparation, il y a alors unité. Le
fait de ne pas vouloir définir clairement ces points afin de les résoudre
laisse envisager un échec inéluctable…
Conclusion
La
constitution Lumen Gentium nous ouvre de nombreuses portes pour définir les
rapports qui existent entre l’Église catholique, les frères séparés et les
autres croyants. Elle affirme de nouvelles doctrines et utilise des concepts
nouveaux dans l’enseignement de l’Église. Les Pères conciliaires s’attaquent
certainement à un problème difficile afin de chercher un chemin pour l’unité
des Chrétiens. Mais le manque de précisions et d’approfondissement nous laisse
cependant dans l’inquiétude, voire dans le désarroi. En voulant éviter d’heurter
les « frères séparés », le
texte finit par nous choquer. La recherche de l’unité passe-t-elle
nécessairement par de telles innovations et par des silences ? Nous sommes
loin de la doctrine définie par le Pape Léon XIII. Dans l’aréopage, Saint Paul a employé des méthodes rhétoriques pour se faire entendre des païens ; son
discours est clair, sans aucun malentendu. La rupture que présente le second Concile de Vatican n’est donc pas seulement
dans la nouveauté des doctrines ou des concepts mais aussi dans le manque de
clarté et de rigueur du texte. Rupture dans le langage. Or la division naît de
l’imprécision. Et ce texte ne peut que diviser les esprits et les cœurs. Rien
ne peut s’élever et se construire dans le malentendu…
Notes et références
[1] Discours d’ouverture de S. S. Paul VI lors de l’ouverture de la 2ème session, 29 septembre 1963.
[2]
Jean XXIII, Constitution Apostolique Humanae Salutis, bulle d’indiction
du concile de Vatican II, 25 décembre 1961.
[3]
Discours de S. S. Jean XXIII, 11 octobre 1962.
[4]
Saint Cyprien De Orat. Dom., 23 dans Lumen Gentium, n°4.
[5] Voir
Notifications
à la 123e congrégation générale tenue le 16 novembre 1964.
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