Depuis les premières
heures, le christianisme s’est développé dans un monde où se côtoyaient de
nombreux cultes religieux différents.
Après sa victoire contre le paganisme, il a dominé une grande partie du
monde, progressant dans toutes les directions. Au fil des siècles, il a planté
la croix sur toutes les terres du globe, semant la bonne parole à tous les
hommes sans distinction. À partir de Jérusalem, le peuple de Dieu s’est répandu
sur toute la terre. Les prophètes l’ont prophétisé. Notre Seigneur Jésus-Christ
l’a annoncé. Mais le christianisme ne s’est pas implanté dans une terre vierge.
Au cours de son expansion, il a rencontré et découvert de nombreuses religions.
Ces rencontres n’ont pas été sans heurt et sans difficulté. Il a été l’objet
de nombreuses persécutions. Certains chrétiens ont à leur tour pu se transformer en persécuteurs,
pensant imposer leur foi par les armes. Le christianisme vit dans un
monde marqué par le pluralisme religieux.
Cette réalité religieuse,
passée comme présente, a soulevé et soulève encore de graves questions dont
certaines réponses ont pu affaiblir la foi de nombreux chrétiens et éloigner de
l’autel des âmes autrefois croyantes. La coexistence de religions aussi variées
pose nécessairement problème. Comment le christianisme peut-il prétendre être
la véritable religion quand d’autres, parfois plus anciennes, défendent aussi
le même privilège ? Des adversaires du christianisme ont insisté sur
l’existence du multi confessionnalisme pour relativiser notre foi et donc pour
la remettre en doute tout en élargissant leurs attaques sur l’idée même de
religion.
Dans un passé encore
récent, l’attitude des autorités de l’Église à l’égard du pluralisme religieux
étaient plutôt claire. Elles défendaient fermement la position du christianisme
avec des arguments souvent efficaces. Mais depuis plus de cinquante ans, elles sont
plus difficiles à entendre, leurs attitudes complexes et incohérentes, voire
intenables, explosives. Certaines d’entre elles, y compris les plus hautes, ont
prêché et continuent de prêché le dialogue entre les religions, n’hésitant pas à abandonner les
anciennes prétentions. Dans la société multiconfessionnelle, le Chrétien devait
s’ouvrir à l’autre, affermir les points de rapprochement et oublier les
différences. L’heure était et reste au dialogue et à l’ouverture, aux abandons…
Pendant que les portes des
églises se sont ouvertes au dialogue et à la « tolérance », notre société a poursuivi allègrement son chemin
vers des voies périlleuses : une société de consommation, où tout est bon
à monnayer, y compris la chair et la vie ; une société de libres pensées, où l’idéologie
dominante impose finalement ses directives ; un État tout-puissant et
omniprésent, qui impose un laïcisme outrancier. Nous sommes aussi témoins aux pires
sentiments et à un hédonisme exacerbé. École, famille, enfants, que de coups
reçus depuis cinquante ans ! Parallèlement, délivrées de toute obstacle,
sans entrave ni résistance, libres de se répandre, des religions se sont
implantées dans les terres anciennement chrétiennes, des temples bouddhistes et
des mosquées se sont ouverts. Le christianisme est devenu une parmi tant
d’autres…
Depuis plus de cinquante
ans, nous avons aussi connu une autre transformation plus profonde encore. Nous
nous sommes véritablement ouverts à la diversité culturelle et à la rencontre
des civilisations. Nous ne connaissons plus de véritables frontières. Notre
regard n’a en effet plus de limite, les distances n’entravent plus nos
mouvements. Tout est presque à notre portée. Un véritable cosmopolitisme a
gagné les esprits et les cœurs. La planète est devenue un village où les
religions, les sectes, les mouvements religieux se côtoient allégrement,
certains étant plus prosélytes que d’autres, moins ouvertes également.
N’oublions pas enfin l’Internet, extraordinaire invention, qui rend le virtuel
plus vivant et attrayant que le réel, qui nous rend accessible une masse
d’informations de tout genre, vraies ou fausses, utiles ou vaines, véritables
chaires pour toutes organisations religieuses. En un mot, le pluralisme
religieux n’a jamais été aussi plus visible et concret qu’aujourd’hui. La
question qu’il soulève est donc encore plus virulente.
Or dans une telle
situation, qu’est devenu le christianisme, notamment en France ? La situation
est accablante. Lorsque certaines voix de l’Église prêchent un angélisme
scandaleux et niais, ouvrant les portes aux autres religions et la livrant aux
innovations les plus scandaleuses, les églises se vident. Elles ouvrent même
ses portes à ceux qui veulent l’abandonner ! Que de paroles
creuses et mièvres ! Que de ruptures, d’indignations et de colères !
Comment les fidèles peuvent-ils résister aux transformations que nous vivons depuis
plus de cinquante ans ? Le christianisme est devenu inintelligible et
inaudible dans un monde où les religions abondent et se font entendre, parfois avec violence…
Lorsque une religion est
dominante dans une société, il est aisé pour elle de se maintenir au moins par
conditionnement social et par éducation. Sa domination et sa prégnance peuvent
facilement écarter les autres religions, notamment en les reléguant aux
mensonges de l’histoire et à la perversion de la vérité. La situation est
encore plus simple quand l’État la protège et la défende. Faute de place et de
visibilité, le pluralisme religieux n’est donc pas un problème. Il a plutôt
tendance à réconforter la religion dominante et a consolidé l’identité
religieuse des croyants. Né dans une religion et ne connaissant qu’elle, le
croyant n’a aucune raison pour la quitter et la remettre en question. La
situation change lorsque la religion perd son influence et quand elle-même
légitime les autres religions, notamment par des attitudes ambigües, voire
scandaleuses. En se mettant à l’égal des autres religions tout en refusant la
confrontation, elle livre sans défense les âmes en quête de Dieu ou doutant de
leur foi au problème douloureux que soulève le pluralisme religieux …
Le pluralisme religieux a
été et demeure encore une belle arme aux mains de certains adversaires du
christianisme. En le comparant aux autres religions, en les confrontant, ils
ont cherché à le relativiser et à le remettre en cause avant de dénigrer
finalement la religion en elle-même. En soulignant le pluralisme des formes et
des sentiments religieux, ils n’ont donc cessé de remettre en question la
véracité de notre religion. L’œcuménisme déroutant que nous subissons depuis
des années ne peut qu’accentuer cette idée de relativisme religieux. Seules les
religions à la voix forte et vigoureuse peuvent y échapper. Selon
les adversaires du christianisme, le pluralisme religieux n’est que la marque de l’erreur, du
mensonge, de l’imagination …
Pendant des siècles, le
christianisme a connu une situation de prédilection. La situation a
probablement changé au XIXe siècle. Alors qu’il perdait lentement son
influence, combattu par les États et les idéologies, la société s’est
véritablement ouverte au pluralisme religieux. Ce n’est pas un hasard si au
même moment s’est véritablement développée une nouvelle branche historique
particulière, « l’histoire des
religions » ou dit encore « la
science des religions », la religion devenant véritablement un objet
de science.
Toute religion est alors
devenue objet de science et donc de diverses théories, chacune cherchant à lui appliquer les principes de la science afin notamment d’expliquer son
origine et son développement. On lui a
trouvé des raisons historiques, sociales, psychologiques, psychiques, ... Ainsi
a-t-on cherché à justifier le pluralisme religieux de manière naturelle. Considéré
comme une religion parmi tant d’autres, le christianisme a également été
justifié sans faire appel à aucune intervention divine.
Aujourd’hui, ces diverses
théories, dont certaines ont perdu toute créance chez les spécialistes en dépit
de sa prégnance encore forte dans l’opinion, sont redoutables pour notre foi.
Elles nourrissent aussi l’œcuménisme déroutant que nous connaissons aujourd’hui
comme elles minent les « dialogues religieux ». Mais surtout, elles
favorisent et consolident l’idée que le christianisme n’est qu’une religion
parmi tant d’autres, certes avec ses particularités, ses forces et ses
faiblesses, mais une religion et non la religion.
Dans certains articles,
nous avons déjà évoqué certaines de ces théories. Nous allons désormais approfondir
cette « science » et nous
attaquer au difficile problème du pluralisme religieux…
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