Le
New Age, toujours d’actualité
Qu’est-ce
que le New Age ?
Le
Vatican parle de « religiosité
», de « courant de pensée »
ou encore de « structure syncrétique »[6], mettant
davantage l’accent sur sa cohérence. Il semble alors qu’aucun terme
n’est capable de désigner ce qu’il est. Il « n’est pas une religion mais il est quand même religieux ; n’est
pas une philosophie mais il est quand même une vision de l’homme et du monde
ainsi qu’une clé d’interprétation. Il n’est pas une science mais s’appuie sur
des lois « scientifiques ». Il est une nébuleuse qui contient de
l’ésotérisme et de l’occultisme, de la pensée mythique et magique au sujet des
secrets de la vie. »[7]
Écoutons
désormais ceux qui se disent adeptes du New-Age. Comment le
désignent-ils ? Selon une étude[8], des
« participants » le
considèrent comme un produit, un ensemble de pratiques ou encore un outil sans
adhésion aux idées qu’ils véhiculent. Les sympathisants parlent aussi de
« nouvelle conscience », de
« nouvelle spiritualité ».
Dans un ouvrage considéré comme le manifeste du New Age, Marilyn Ferguson
utilise l’expression de « nouvelle
structure de pensée »[9].
Comme
dans tout mouvement actuel, nous devons distinguer les adeptes d’une
pratique et les véritables adhérents. Les premiers consomment des
services et des produits qu’il offre sans se soucier des idées qui les fondent
et leur véritable finalité. Ils sont intéressés par leurs effets sur leur
bien-être, corporels ou psychiques. Les seconds, minoritaires, sont
plus conscients de leur signification et de leur fondement. Ils adhèrent aux
croyances qu’ils véhiculent. Mais nous n’ignorons pas non plus que nous
vivons comme nous pensons et que nous pensons comme nous vivons. Quel que soit
le niveau d’adhésion des consommateurs des produits de New Age, ils finiront
par vivre selon l’esprit du New Age…
Les
caractéristiques du New Age
Au
sens propre, le New Age « consiste à croire qu’une ère nouvelle (l’ère
du Verseau), va arriver et remplacer l’ère actuelle du Poisson, amenant paix et
bonheur pour l’humanité. Cet avènement surviendra quand suffisamment de
transformations individuelles auront été opérées, et se manifestera par une
transformation de masse, de la « conscience universelle ». »[10] L’ère
du Poisson fait évidemment penser au christianisme.
Au
sens plus large, le New Age « est constitué de l’ensemble de pratiques,
croyances et nouvelles spiritualités, toutes interconnectées selon de nouveaux
modes d’organisation, et visant une transformation personnelle ou planétaire,
qui sont apparus dans les années 1960. »[11] Il se
caractérise alors par des valeurs (« écologique, féministe, optimisme planétaire », travail de l’énergie »)
et par son organisation, non-hiérarchique, non-institutionnelle. L’idée de
transformation personnelle est toujours présente. La finalité semble
néanmoins différente. Il a en effet pour objectif de créer une nouvelle
culture, une culture planétaire opposée à la culture contemporaine. Il
propose une « contreculture ».
Mais, l’idée n’est pas très éloignée de celle d’une transformation de la
conscience individuelle pour une nouvelle conscience planétaire.
Dans
les deux cas, le New Age veut modifier la vision que nous pouvons avoir du
monde. Cette vision est globale puisqu’elle prend en compte tous les
aspects de la société et du monde. Elle est en effet spirituelle, politique,
économique, environnementale, éducative, médicale, etc. Elle prend aussi en
compte l’homme dans sa totalité, corps et âme. La transformation
individuelle, humaine, sociale ou planétaire, est donc radicale par sa
dimension et sa profondeur.
C’est
un changement appliqué à notre façon de penser et de vivre, changement marqué par
le rejet total des valeurs de la société actuelle. L’ère du Verseau ou la
nouvelle culture désignent une nouvelle vision du monde qui remplace celle qui
domine actuellement les hommes, la société et le monde. « Il s’agit véritablement d’une révolution. »[12] Dans
son ouvrage, Marilyn Ferguson appelle à « un
nouveau paradigme »[13].
Le
changement de paradigme
Le
terme de « paradigme »
provient de deux mots grecs « para »
et « deigma »[14],
« deignumi » signifiant
« montrer ». Au XVIe
siècle, il désigne le « modèle »
des formes que peut prendre un mot, comme un modèle d’une déclinaison, d’une
conjugaison[15].
Au XIXe siècle, son sens s’élargit pour désigner le type ou l’archétype d’une
chose ou d’une valeur.
De
nos jours, le terme de « paradigme »
s’est considérablement élargi, dépassant le domaine de la vie scientifique. Il est
entendu comme un modèle de représentation normatif de la société, du monde,
de la vie, c’est-à-dire un ensemble de croyances, valeurs, techniques, etc.
qui influencent la façon dont un individu perçoit la réalité et réagit à cette
perception. Selon la théorie de Kuhn appliquée à la vie, un changement de
paradigme modifie l’individu. Enfin, les paradigmes ne peuvent coexister.
Et
comme le prétendent les théories évolutionnistes, qu’elle touche la conscience
ou la culture, la transformation est aussi perçue comme inéluctable ou
dit autrement « naturel ».
Il ne s’agit pas en effet de l’élaborer mais plutôt d’anticiper ou d’y participer.
Quelques
éléments du New Age
Le
New Age puise aussi dans l’ésotérisme d’origine occidental et oriental.
Il s’inspire de pratiques anciennes qu’il remet au goût du jour comme l’astrologie,
la numérologie, la voyance, le magnétisme, etc. Il utilise aussi tout un
univers symbolique de religions anciennes comme le druidisme ou le catharisme. C’est
ainsi qu’il apparaît comme une continuité d’un phénomène bien ancien
qu’est celui de l’ésotérisme occidental, marqué notamment par une fascination
de l’Orient.
Le
New Age en appelle au retour à la nature. Il défend des idées
écologiques, voire panthéistes, et utilise des moyens naturels pour se
maintenir en bonne santé ou pour se soigner comme la médecine douce, les
produits biologiques, le massage ou encore la musique. Il développe de nouvelles
thérapies et diététiques. Ces pratiques semblent faire croire à une
connaissance des pouvoirs de la nature et de l’homme ainsi qu’à leur
utilisation pour le bien et la transformation de soi.
Enfin,
le New Age sait parfaitement utiliser les moyens de communication actuels
pour se diffuser, usant de tous les artifices du marketing. L’Internet
semble même répondre à ses objectifs par les liens qui relient les individus et
l’impact que l’un d’entre eux peut avoir sur le monde. Les relations virtuelles
deviennent celles qui relient les consciences entre elles. La musique et le
cinéma sont aussi de bons moyens de prosélytisme. Le New Age porte un vif
intérêt à tout ce qui touche la communication entre les hommes.
Conclusions
L’éclectisme
est donc une caractéristique majeure du New Age. Tout l’intéresse et tout lui est utile puisqu’il se
présente comme un alternatif à la société actuelle, à l’état d’esprit
qui y règne, à la culture contemporaine. Rien ne lui échappe dans l’homme et
dans le monde. Il développe ainsi une pensée dite holiste. Le New Age
intègre en fait la totalité de l’humanité et cherche à faire prendre conscience
à l’homme qu’il appartient à cette totalité. Les différentes techniques qu’il
offre ont en effet pour objectif d’atteindre ce niveau supérieur de la
perception de la réalité et d’élargir la conscience humaine bien au-delà de ses
limites actuelles.
Pour
parvenir à cette évolution inéluctable, le New Age suit un mode d’action très
particulier. Convaincu que c’est par la multiplication des transformations
individuelle que l’humanité, c’est-à-dire l’homme, pourra se transformer dans
sa totalité, le New Age utilise tout un ensemble de moyens pour parvenir à ce
changement radical de l’individu.
Enfin,
le New Age est fondamentalement opposé à la société actuelle et à l’esprit
qui l’anime, à tout ce qui a été, au niveau politique, religieux,
social, etc.
Après
cet aperçu du New Age, nous pouvons comprendre tout le danger qu’il présente
non seulement pour le chrétien mais aussi pour l’homme et la société.
[1] Voir Émeraude,
décembre, article « Le Bouddhisme occidental selon différentes études :
encore le culte du bien-être mais selon une voie différente du commun ».
Voir les autres articles du mois de novembre pour comprendre ce qu’est le
bouddhisme occidental.
[2] Michel Lacroix, Une
mise en garde bienvenue dans Actualité des Religions, n°48, avril
2003.
[3] Conseil pontifical de
la culture, Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, Jésus-Christ
le porteur d’eau vive, Une réflexion chrétienne sur le « Nouvel Age »,
3 février 2003, vatican.va.
[4] Michel Lacroix, Une
mise en garde bienvenue, dans Actualité des Religions, n°43, 2003.
[5] Dictionary.cambridge.org,
article New Age, tiré du Dictionnaire Cambridge Advanced Learner’s
& Thesauris, 17 novembre 2020.
[6] Conseil pontifical de
la culture, Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, Jésus-Christ
le porteur d’eau vive, Une réflexion chrétienne sur le « Nouvel Age ».
[7] Cardinal G. Daneels, Le
Christ ou le verseau ?, Presses de l’archevêché, Mechelen, 1991
dans Regard
chrétien sur le Nouvel Age (1/5), Père Joseph-Marie, 5 octobre 2014, fsj.fr.
[8] Elsa Bishop, Le
New Age aux États-Unis. 1980 à 2000, thèse de doctorat d’études
anglophones, présentée le 18 juin 2007, Université Lumière Lyon 2, thes.univ-lyon2.fr.
[9] Marilyn Ferguson, Les
enfants du Verseau. Pour un nouveau paradigme, Calmann-Lévy, 1980.
Titre original : The Aquarian Conspiracy, trad. de
l’américain par Guy Beney dans Ferguson (Marilyn) les Enfants du Verseau.
Pour un nouveau paradigme, Danièle Hervieu-Léger, archives de sciences
sociales des religions, n°53/2, 1982, www.persee.fr.
[10] Elsa Bishop, Le
New Age aux États-Unis. 1980 à 2000.
[11] Elsa Bishop, Le
New Age aux États-Unis. 1980 à 2000.
[12] Conseil pontifical de
la culture, Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, Jésus-Christ
le porteur d’eau vive, Une réflexion chrétienne sur le « Nouvel Age ».
[13] Le titre de son
ouvrage est assez évocateur : Les enfants du Verseau. Pour un nouveau
paradigme.
[14] Larousse, Dictionnaire
étymologique et historique du français, 1994.
[15] La conjugaison
d’« aimer » est par exemple
le paradigme des verbes du premier groupe. Le tableau de déclinaison latine
« rosa, rosam, rosae, etc. »
est le paradigme des mots de la première déclinaison latine.
[16] Daniel Hervieu-Léger,
Ferguson
(Marilyn) les Enfants du Verseau. Pour un nouveau paradigme.
[17] Voir Émeraude,
juin 2013, « Le gnosticisme au IIème siècle, une hérésie de la
connaissance ».
[18] Voir Émeraude,
mai 2013, article « Teilhard et la Création continue ».
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